Effets observationnels et tests de la relativité générale

Notions de relativité générale 

L’équation d’Einstein

Tout commence en novembre 1915 lorsque Albert Einstein publie une nouvelle théorie appelée la relativité générale. Celle-ci propose de décrire la gravitation d’une tout autre façon que celle proposée par Newton. Tandis que ce dernier imagine la gravitation comme une force subie par un corps, Albert Einstein, lui, voit la gravitation comme une perturbation de la géométrie de l’espace-temps. C’est le contenu en énergie-impulsion qui impose la géométrie de cet espace à quatre dimensions. Sa géométrie est décrite par ce qu’on appelle le tenseur métrique gµν qui est une solution de l’équation d’Einstein, cette dernière découlant du principe de moindre action  . Dans le cas de la relativité générale, l’action totale est la somme de l’action dite d’Einstein-Hilbert, liée à la géométrie de l’espace-temps, et d’une action Smat liée à la distribution de matière considérée dans l’espace temps.

Théorème d’absence de chevelure 

Le théorème d’absence de chevelure, aussi appelé théorème de calvitie des trous noirs, affirme qu’un trou noir stationnaire en rotation, solution du vide de l’équation d’Einstein ne présentant pas de singularités à l’extérieur de l’horizon des événements, est décrit par seulement trois paramètres : sa masse M, son moment cinétique a et sa charge électrique Q. Ces trous noirs sont décrits par la métrique de Kerr-Newman, il s’agit d’une solution généralisant celle de Kerr au cas chargé. Cependant, on s’attend à ce que les trous noirs astrophysiques soient neutres car ceux-ci sont entourés d’un plasma constitué de charges, mais surtout parce qu’ils baignent dans un milieu interstellaire chargé. Ils seraient donc dans ce cas définis par seulement deux paramètres M et a, et seraient décrits par la métrique de Kerr.

On comprend que le nom de ce théorème fait référence au faible nombre de paramètres permettant de décrire les trous noirs en relativité générale. En effet, ceux-ci sont décrits par seulement trois paramètres et ne possèdent donc que trois « cheveux ». Ce théorème a vu le jour grâce à la combinaison de plusieurs théorèmes établis par Hawking (1972a), Israel (1982) et Carter (1971). Afin de le vérifier, une formule analytique a été développée faisant intervenir le moment quadrupolaire du trou noir, que l’on note Q2, ainsi que les deux paramètres M et a (Gürsel 1983). Cette formule est donnée par :

Q2 = ‒ Ma² . (1.18)

Si cette égalité est vérifiée, cela constituera un test fort en faveur de la présence d’un trou noir. Cela signifiera également que la relativité générale n’aura pas été mise à défaut puisque cette formule découle de cette théorie de la gravitation.

La présence de matière, de champ électromagnétique ou encore de poussière aux alentours des trous noirs que l’on observe, enfreint les conditions de stationnarité et de vide de l’espace-temps. On peut donc penser que ces objets violent le théorème d’absence de chevelure. Néanmoins, on suppose que ces perturbations sont suffisamment faibles pour ne pas être observées. C’est pour cela que l’on considère que les trous noirs astrophysiques obéissent tout de même au théorème d’absence de chevelure.

Effets observationnels et tests de la relativité générale

La relativité générale a permis de prédire de nouveaux effets qui n’avaient encore jamais été observés. Ces prédictions s’appliquent aussi bien au comportement des photons qu’à celui des particules matérielles. Celles-ci ont permis et permettent encore aujourd’hui de faire des tests de la relativité générale, dont on cite plusieurs exemples dans la suite. Pour une liste détaillée des tests effectués on pourra par exemple voir les revues de Psaltis (2008), Will (2014) et Bambi (2015). Avant de s’intéresser à certains de ces effets relativistes, rappelons comment est régie l’évolution d’une particule test dans un champ gravitationnel relativiste.

Trajectoire des corps

D’après la relativité générale, la gravitation se manifeste par la courbure induite par la distribution d’énergie-impulsion, décrite mathématiquement par le tenseur métrique. Ainsi, les particules tests uniquement soumises à l’interaction gravitationnelle se déplacent sur ce qu’on appelle des géodésiques de l’espace-temps imposées par le tenseur métrique. Ces géodésiques correspondent à des courbes qui rendent extrémale la distance entre deux points. En mécanique classique, le principe d’équivalence stipule que les particules soumises à l’interaction gravitationnelle tombent avec la même accélération. En relativité générale, ce principe est également pris en compte et se traduit par le fait que le mouvement des particules est régi par la courbure de l’espace-temps et que celles ci suivent des géodésiques. Il existe trois types de géodésiques : les géodésiques de genre espace qui sont obtenues pour une distance ds² négative, les géodésiques de genre temps qui sont obtenues pour une distance ds² positive, et enfin les géodésiques de genre lumière qui sont obtenues pour une distance ds² nulle  . Le mouvement des photons, soumis uniquement à la gravitation, est régi par ces dernières tandis que les particules matérielles ont pour trajectoire les géodésiques de genre temps.

Tests en champ fort

Avec les moyens technologiques déployés aujourd’hui, des observations de divers objets générateurs de champ gravitationnel intense nous ont offert et nous offrent encore aujourd’hui la possibilité de tester la relativité générale en champ fort.

Les pulsars binaires 

Les pulsars binaires sont des systèmes composés de deux étoiles dont l’une au moins est une étoile à neutrons. La seconde, appelée compagnon, est une étoile pouvant être à n’importe quel stade de son évolution : cela peut être une étoile de la séquence principale, une naine blanche, une étoile à neutrons ou bien un trou noir.

Le premier pulsar binaire qui a permis de faire un test de la relativité générale se nomme PSR B1913+16 et a été découvert par Joseph Taylor et Russell Hulse en 1974 (Hulse & Taylor 1975). La nature du compagnon est encore mal contrainte, cependant, toutes les études menées tendent à prouver que ce serait un objet compact. Ce système est idéal pour effectuer des tests car les effets relativistes sont 10 fois plus importants que ceux présents dans le Système Solaire. De plus, la période orbitale est très courte ce qui permet un suivi plus long de l’évolution du système. Ce pulsar binaire est également stable, car âgé, ce qui lui permet d’être sensible aux effets de faibles amplitudes. Un grand nombre de paramètres, tels que les paramètres képlériens et post-képlériens  , a pu être contraint et a montré que la relativité générale était en accord avec les observations. Des effets tels que l’avancée du périastre et l’effet Shapiro ont été observés (Weisberg et al. 2010).

Il existe un grand nombre de pulsars binaires avec lesquels des tests semblables ont été faits. Certains d’entre eux ont pour compagnon une étoile à neutrons (par exemple, PSR J0737-3039 A, B qui constitue l’une des meilleures sources pour tester la relativité générale) ou encore une naine blanche (par exemple, PSR J1141-6545 ou PSR J1738+0333). Un système idéal pour tester la relativité serait néanmoins celui possédant un trou noir pour compagnon. Cependant, une étoile à neutrons en orbite autour d’un trou noir stellaire ou du candidat trou noir supermassif se trouvant au centre de notre Galaxie n’a pas encore été découvert. Pour davantage de détails sur les pulsars binaires, on pourra consulter les revues de Will (2014) et Kaspi & Kramer (2016).

Les objets compacts accrétants 

Les objets compacts accrétants permettent de tester la relativité de façon plus large au sens où ceux-ci sont à l’origine de divers phénomènes physiques.

Preuve de l’existence d’un horizon des événements 

Une première approche pour sonder l’espace-temps en champ fort est d’avoir une preuve directe ou non de la présence des trous noirs c’est-à-dire d’un horizon des événements. Pour cela, plusieurs façons de procéder ont été proposées. Une preuve directe mais qui est, comme nous le verrons au prochain chapitre, assez débattue, est de faire une image de l’environnement immédiat d’un trou noir et en particulier sa silhouette (voir Fig. 1.4 pour une illustration de cette dernière). Pour avoir accès à la silhouette d’un tel objet, il faut que sa taille angulaire sur le ciel soit suffisamment grande pour dépasser la résolution angulaire des instruments. Si on considère par exemple un trou noir stellaire de masse égale à 10 masses solaires et distant de 1 kiloparsec de nous, la taille angulaire apparente de sa silhouette serait d’environ 2×10⁻⁴ microseconde d’angle. Dans le cas d’un trou noir supermassif de 10⁸ masses solaires, distant de 1 mégaparsec, sa taille angulaire sur le ciel serait, elle, autour de 2 microsecondes d’angle. Les instruments d’aujourd’hui ne permettent pas d’observer de tels trous noirs. Néanmoins, avec l’arrivée sur le ciel d’un nouvel instrument nommé Event Horizon Telescope  (EHT), dont la résolution angulaire attendue est de 20 microsecondes d’angles, il sera possible d’imager le candidat trou noir situé au Centre Galactique . En effet, la taille angulaire apparente de sa silhouette est d’environ 50 microsecondes d’angle. Par ailleurs, il existe également la source M87 située à 16,8 mégaparsecs et dont la taille angulaire apparente est d’environ 20 microsecondes d’angle.

L’approche indirecte est quant à elle plus variée car il existe plusieurs phénomènes physiques permettant de prouver indirectement la présence d’un horizon des événements.

Une première méthode consiste à observer la luminosité des binaires X à faibles masses dans leur état quiescent. Ces systèmes sont composés d’un objet compact (étoile à neutrons ou trou noir) et d’une étoile. Du fait de l’échange de matière entre le compagnon et l’objet compact, ces sources sont les plus brillantes dans le domaine des rayons X. Dans le cas où l’objet compact est un trou noir, la mise en évidence de l’horizon des événements se manifeste grâce à cet échange de matière. En effet, si l’on considère un système stable composé d’une étoile à neutrons et d’une étoile, l’énergie potentielle accumulée associée au champ gravitationnel est libérée sous forme de rayonnement ce qui n’est pas le cas avec un trou noir. Dans ce dernier, l’énergie potentielle gravitationnelle est accrétée sous l’horizon des événements et devient invisible pour un observateur distant. On s’attend donc à ce que ces systèmes soient moins lumineux que ceux composés d’une étoile à neutrons. Plusieurs travaux ont été réalisés sur le sujet et ont démontré que les binaires X, que l’on pense être composées d’un trou noir, ont une luminosité bien inférieure à celle émise par les systèmes ayant une étoile à neutrons pour objet compact (Narayan et al. 1997; Garcia et al. 2001; McClintock et al. 2004). Néanmoins, comme la plupart des modèles astrophysiques les processus physiques rencontrés dans ces systèmes restent encore aujourd’hui débattus.

La présence de l’horizon des événements peut également être mise en évidence grâce aux spectres de trous noirs galactiques. En effet, lorsqu’ils sont dans leur état de luminosité maximale (états dits very high ou steep power law en Anglais), les spectres de tels objets sont caractérisés par la présence d’un spectre en loi de puissance dans le domaine des rayons X mous (faibles énergies) qui s’étend jusqu’au domaine des rayons gamma mous. Cette particularité serait expliquée par la diffusion Compton inverse  de photons du domaine des rayons X mous par des électrons relativistes tombant dans l’horizon des événements (Titarchuk & Zannias 1998).

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Table des matières

INTRODUCTION
I Contexte scientifique de la thèse
1 Notions de relativité générale
1.1 L’équation d’Einstein
1.2 Les trous noirs en relativité générale
1.2.1 Métrique de Schwarzschild
1.2.2 Métrique de Kerr
1.2.3 Théorème d’absence de chevelure
1.3 Effets observationnels et tests de la relativité générale
1.3.1 Trajectoire des corps
1.3.2 Tests en champ faible
1.3.3 Tests en champ fort
1.4 Théories alternatives aux trous noirs
1.4.1 Théories tenseur-scalaire
1.4.2 Théories de gravité quadratique
2 Sagittarius A*, un trou noir au centre de notre galaxie ?
2.1 Les 10 parsecs centraux
2.1.1 Principales structures du complexe Sagittarius A
2.1.2 Population stellaire de Sagittarius A : l’amas nucléaire
2.2 Zoom sur la source Sagittarius A*
2.2.1 Découverte d’un objet compact au Centre Galactique
2.2.2 Spectre d’émission et disque d’accrétion de SgrA*
2.3 Tests d’aujourd’hui et de demain
2.3.1 Un trou noir au centre de notre galaxie
2.3.2 Objets alternatifs aux trous noirs de Kerr
3 L’instrument GRAVITY
3.1 Les bases de l’interférométrie à deux télescopes
3.1.1 Fonctions de cohérence spatiale et de visibilité
3.1.2 Une question de résolution angulaire et de précision astrométrique
3.2 Présentation de l’instrument
3.2.1 Les dessous de GRAVITY
3.2.2 GRAVITY en quelques chiffres
3.2.3 Objectifs scientifiques de GRAVITY
II Première validation du code de tracé de rayons GYOTO
4 Présentation du code GYOTO en métrique de Kerr
4.1 Introduction du code GYOTO
4.2 Notions de tracé de rayons et de transfert radiatif
4.3 Intégration des géodésiques
4.3.1 Equations des géodésiques
4.3.2 Méthodes d’intégration
4.4 Quelques notions utiles
4.4.1 La scène
4.4.2 Définition de quelques fonctions et quantités du code GYOTO
5 Performance du calcul des géodésiques de genre lumière dans GYOTO 101
5.1 Test en déflexion faible
5.1.1 Définition de l’anneau d’Einstein
5.1.2 Comparaisons des intégrateurs GYOTO
5.1.3 Méthodes numériques
5.1.4 Résultats
5.2 Test en déflexion forte
5.2.1 Méthode
5.2.2 Résultats
III Observation d’effets relativistes sur l’orbite de l’étoile S2 avec GRAVITY
6 Simulations d’observations de l’étoile S2
6.1 Développement de plusieurs modèles d’orbites
6.1.1 Modèles képlériens
6.1.2 Modèles relativistes
6.1.3 Résumé
6.2 Amplitudes des différents effets affectant les observations de l’étoile S2
6.2.1 Effets affectant l’astrométrie
6.2.2 Effets affectant la spectroscopie
6.3 Comparaison des modèles A à F au modèle G
6.4 Conclusion du chapitre
7 Contraindre des effets relativistes avec l’étoile S2 et GRAVITY
7.1 Quelques rappels d’études menées au Centre Galactique
7.2 Vers des contraintes d’effets relativistes
7.2.1 Méthodes
7.2.2 Résultats
7.3 Contrainte du moment cinétique du candidat trou noir central avec S2
7.3.1 Impact du moment cinétique sur l’astrométrie et la spectroscopie
7.3.2 Méthode et résultats
7.4 Conclusions du chapitre
IV Vers une interprétation complète des données GRAVITY
CONCLUSION

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