Au cours de ces vingt dernières années, il y a eu un intérêt grandissant pour les systèmes de taille nanométrique. En effet, ces objets présentent des propriétés remarquables dans cette gamme de taille comparées à leurs propriétés à l’état massif. De nombreuses techniques de synthèse ont été développées afin d’obtenir des nano-objets de tailles et de formes contrôlées et avec des compositions variées. La diversité et la versatilité des objets obtenus leur permettent d’être utilisés dans des domaines d’applications variés comme le médical ou l’électronique. Les rayonnements ionisants sont utilisés dans plusieurs domaines d’applications également. Le plus connu étant la radiothérapie utilisée pour détruire les cellules cancéreuses. L’irradiation est également utilisée pour stériliser des surfaces ou des objets, étudier leur comportement après vieillissement…
Effets de l’irradiation sur des systèmes moléculaires
L’irradiation : généralités
L’irradiation est une forme d’énergie émise par une source qui traverse un matériel via une particule ou des ondes. Il y a deux types de rayons ionisants : les rayons de type électromagnétique (X, UV et gamma) et les particules chargées de haute énergie (électrons, protons et neutrons). Dans le cas des rayonnements gamma, les radionucléides les plus utilisés pour obtenir des photons sont le cobalt-60 (60Co) et le césium-137 (137Cs). Les deux sont des émetteurs gamma et sont utilisés comme sources de radiation avec des énergies de quanta gamma de 1,17 et 1,33 MeV pour le 60Co et 0,66 MeV pour le 137Cs. Ces radionucléides ont des temps de demi-vie de 5,26 ans ( 60Co) et 30 ans (137Cs). Le 60Co est la source de radiation gamma industrielle la plus utilisée à cause de son énergie plus importante comparée à celle du 137Cs.
Les particules chargées de haute énergie peuvent être générées industriellement et accélérées par des champs électromagnétiques (sauf pour les neutrons). L’énergie de ces particules peut ainsi atteindre plusieurs MeV. Dans le cadre de notre étude ce sont les rayons de type gamma qui seront utilisés. En effet, ce rayonnement est commun aux différents domaines d’études (radiostérilisation et radiosensibilisation mais également en « drug delivery ») et il est plus simple de travailler avec un seul type de rayonnement.
Lorsqu’un matériau est bombardé par des particules, il se produit un dépôt d’énergie localement. Ce dépôt est quantifié lors de l’irradiation en termes de dose ou de débit de dose. La dose absorbée est la quantité d’énergie absorbée par unité de masse du produit irradié. Le système international d’unités (SI) pour les mesures d’irradiation utilise le Gray (Gy) mais le rad (la dose absorbée de radiation) est aussi utilisé. Un Gray correspond à une dose absorbée d’1 J/kg ou 100 rad. Le débit de dose est la dose absorbée par unité de temps (par exemple, Gy/s, kGy/h).
Les changements chimiques induits par l’absorption d’énergie sont quantifiés par le rendement radiolytique G. Il est défini comme le nombre de moles de molécules produites ou consommées divisé par la quantité d’énergie absorbée. Il s’exprime en mol.J⁻¹ dans les unités du SI. Auparavant, il était défini comme le nombre de molécules produites ou consommées pour une énergie absorbée de 100 eV. La conversion se fait par cette équation :
1 ???é???? (100 ??)⁻¹ = 1,036 × 10⁻⁷ ???.?⁻¹
Lorsqu’une particule traverse un matériau, le transfert d’énergie linéaire (TEL) quantifie l’énergie dissipée par unité de longueur traversée. Cette grandeur dépend du nombre atomique et de la charge des atomes du matériau mais également de la nature des particules incidentes.
Radiolyse de l’eau
La radiolyse de l’eau est le domaine où l’interaction rayonnement systèmes moléculaires condensés est la mieux décrite. Un rappel sur cette radiolyse est donc utile ici. Les effets des rayonnements sur l’eau sont divisés en plusieurs étapes et sont bien connus aujourd’hui . La décomposition ou la radiolyse de l’eau se fait en deux étapes : une étape cinétique nonhomogène et une étape cinétique homogène.
L’étape cinétique non-homogène se divise en trois sous-étapes. La première sous étape, dite physique, consiste en un transfert d’énergie des particules incidentes, ou ionisantes vers les molécules d’eau, produisant ainsi une ionisation ou une excitation électronique de ces molécules suivie de l’éjection d’un électron. Cet électron appelé électron sec ou présolvaté « e⁻pre » peut être une source secondaire d’irradiation. Toutes les espèces produites sont groupées dans des grappes ou spurs.
Radiolyse des polymères
Les nano-objets utilisés sous irradiation sont principalement des systèmes polymères ou à base de polymères. La radiolyse des polymères a été découverte dans les années 1940 avec la polymérisation induite par irradiation et l’irradiation du polyéthylène . De nos jours, cette radiolyse est utilisée à plusieurs fins : la polymérisation, le greffage sous irradiation ou après irradiation, la réticulation, la dégradation, la cyclisation et la préparation de matériaux composites. Les différentes espèces créées par les rayons ionisants dans le polymère, cations, électrons, et molécules excitées peuvent évoluer rapidement vers des recombinaisons, des excitations, des transferts de charge ou la création de radicaux. Elles peuvent également être piégées selon la structure du polymère et les groupements de la chaîne, leur polarité, leur affinité électronique ou leur capacité à stabiliser des états excités.
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Table des matières
Introduction générale
I Chapitre I : Contexte de l’étude
I.1 Effets de l’irradiation sur des systèmes moléculaires
I.1.1 L’irradiation : généralités
I.1.2 Radiolyse de l’eau
I.1.3 Radiolyse des polymères
I.2 Nano-objets sous irradiation
I.2.1 Nano-objets et lithographie
I.2.2 Nano-objets et radiostérilisation
I.2.3 Nano-objets et « drug delivery »
I.2.4 Nano-objets hybrides et radiosensibilisation
I.3 Positionnement du sujet et objectifs de la thèse
I.4 Références
II. Chapitre II : Synthèse de nano-objets polymères : micelles/nanoparticules de copolymères amphiphiles
II.1 Les copolymères à blocs amphiphiles
II.1.1 Définition/ Avantages
II.1.2 Méthodes de synthèses
II.2 Copolymères à blocs PEG-b-polyméthacrylate
II.2.1 Synthèse par polymérisation radicalaire contrôlée
II.2.2 Auto-assemblage par nanoprécipitation
II.3 Copolymères à blocs PEG-b-polysulfone
II.3.1 Synthèse par chimie « click »
II.3.2 Auto-assemblage par nanoprécipitation
II.4 Tests de cytotoxicité in vitro
II.5 Conclusion
II.6 Références
III Chapitre 3 : Irradiation de micelles/nanoparticules de copolymères amphiphiles
III.1 Irradiation des micelles PEG-b-poly(méthacrylate de tert-butyle)
III.1.1 Irradiation en milieu oxygéné
III.1.2 Irradiation en milieu désoxygéné
III.1.3 Perspectives : tests de chargement
III.1.4 Conclusion
III.2 Irradiation des nanoparticules PEG-b-polysulfone
III.2.1 Irradiation en milieu oxygéné
III.2.2 Irradiation en milieu désoxygéné
III.2.3 Conclusion
III.3 Tests de cytotoxicité in vitro
III.4 Comportement des micelles/nanoparticules sous irradiation
III.5 Références
IV. Chapitre 4 : Synthèse de nano-objets hybrides : Nanoparticules d’or greffées de polymère
Conclusion générale