Procédure
La recension des écrits s’est effectuée en trois temps. La première vague de cette recension a eu lieu du mois de janvier au mois d’avril 2014. Cette période de recherche a servi à analyser divers articles et livres autour du concept de résilience. Cette étape a permis de réaliser que très peu de recherches portaient sur les liens entre le loisir et les problématiques oncologiques et de la résilience. En fait, outre les travaux d’Iwasaki et de ses collègues (2005) sur le coping et sur la résilience d’individus atteints de troubles de santé mentale, aucune recherche ne semble s’approcher du concept de résilience dans la littérature propre aux recherches dans le domaine du loisir. Afin de pallier cette lacune, une étude de portée (scoping review) combinant les écrits scientifiques des domaines de la science du loisir, de la psychologie, de l’oncologie et des dynamiques familiales a été faite. Ainsi, diverses bases de données ont été consultées afin d’explorer les écrits abordant la place du loisir dans le développement de la résilience familiale en situation de cancer parental.
Plusieurs bases de données utilisées dans les champs de la psychologie, de la psychologie positive, des sciences du loisir, des dynamiques familiales, des sciences humaines et de l’oncologie ont été sélectionnées. Les bases de données analysées sont: Psychlnfo, Scopus, Ebsco Host: Academie search complete, Taylor and Francis, Web of Science et Eric. De là, une recherche par mots clés a été effectuée. Afin d’assurer une constance dans les résultats, les mêmes mots clés ont été utilisés dans chacune des bases de données. Initialement, les termes utilisés étaient « family resilience Il AND « Ieisure OR activit* OR recreation* activit* Il AND Il illness OR cancer « . N’ayant obtenu qu’un seul résultat, les mots clés ont été modifiés pour Family AND resilience AND (Ieisure OR Il recreation* activit* « ). Au total, 170 articles scientifiques ont été trouvés. 118 articles ont été retranchés, car ils ne respectaient pas les critères d’inclusion et d’exclusion qui avaient été sélectionnés. Les critères de sélections sont présentés dans le tableau 1.
Des 52 articles restants, un article et trois thèses ont été exclus, parce qu’ils n’étaient pas accessibles ou bien encore, non pertinents à la recherche en cours. Une mise à jour de cette collecte a été faite au mois de juillet 2015 en utilisant les mêmes bases de données ainsi que les mêmes codes de recherche. Un seul article issu de cette dernière étape est venu s’ajouter au lot d’articles déjà lus et analysés. Enfin, une troisième vague de recension des écrits a eu lieu lors du mois d’août 2015. Cette dernière avait pour but de peaufiner les connaissances sur les notions encore trop peu expliquées dans les deux premières périodes de recherche documentaire telles que les statistiques liées aux cancers au Canada ainsi que des articles expliquant ce qu’est vraiment la maladie du cancer. De plus, certaines revues précises ont été consultées par la suite, notamment la revue en ligne Psycho onc%gy ainsi que Therapeutic /eisure journo/. Dans ces revues, les mots clés utilisés restaient les mêmes que ceux utilisés lors de l’étude de portée. L’expression « parental cancer» a toutefois été ajoutée afin d’optimiser la collecte d’articles en lien direct avec la problématique de ce mémoire. Ce sont ainsi plus d’une cinquantaine d’articles qui ont été ajoutés à cette recension. Finalement, un total de plus de 150 articles a été utile à cette recension afin d’offrir un portrait le plus fidèle possible quant aux problématiques principales de cette recherche qui sont, comme il a été mentionné précédemment, la famille, le cancer, la résilience tant individuelle que familiale ainsi que le loisir. Les prochaines sections viennent décrire le résultat de la collecte pour chacun de ces concepts.
La famille
En premier lieu, il importe de bien saisir la complexité d’une famille. Toutefois, lorsque vient le temps de définir et d’expliquer ce qu’est une famille, nous nous rendons rapidement compte que la tâche est plus ardue qu’elle ne le paraît. En effet, nous faisons un usage si familier du terme famille qu’ il devient aberrant de se questionner sur sa définition. Après tout, nous sommes tous fils ou filles de quelqu’un et les premiers mots prononcés sont habituellement papa et maman. La définition que nous nous faisons de la famille va toutefois se voir modifiée selon les époques, les lieux et les cultures (Carter & McGoldrick, 1999; Lacharité & Gagnier, 2009; Legros-Bawin & Kellerhals, 1988). Dans notre société, nous avons tendance à voir la famille selon un paradigme biologique (Legros-Bawin & Kellerhals, 1988; Segalen, 2010). Ainsi, les liens de génétique et de sang seraient ce qui définirait la famille. Toutefois, les cinquante dernières années ont été marquées par de grands mouvements de société qui ont modulé la construction traditionnelle de la famille alors composée d’un père, d’une mère et de leur(s} enfant(s} (Lacharité & Gagnier, 2009). En effet, l’augmentation fulgurante des divorces, ainsi qu’une meilleure acceptation des couples jusqu’alors marginalisés viennent donner un tout nouveau visage aux familles. Ainsi, avec la venue en masse des familles recomposées, de la procréation assistée et de l’adoption, définir la famille par les simples liens biologiques devient obsolète. Il impose donc de trouver une nouvelle manière de la définir, en lui accolant un spectre plus large tout en évitant de tomber dans les définitions de groupes sociaux. Lacourse (2009) en vient ainsi avec une liste de cinq caractéristiques définissant la famille. Ces caractéristiques sont présentées dans le tableau 2.
Les dynamiques internes à la famille
Neuburger (2003) explique que la famille est composée de sous-groupes. Selon lui, il est alors question de la famille, de la fratrie et du couple. Tous ces sous-groupes d’appartenance sont nécessaires et fondamentaux sans pour autant être équivalents. C’est la relation de l’individu avec ces divers groupes d’appartenance qui va forger son identité. Les liens entre les membres et les sous-groupes seront également flexibles et se moduleront au travers les différents moments de la vie. Ces liens vont être modulés par divers éléments tels que l’histoire de la famille, les mythes de la famille ainsi que par les routines instaurées au sein du noyau familial (Segalen, 2010). C’est la somme des interrelations entre les membres de la famille qui compose la famille. Confucius disait d’ ailleurs que « le tout est plus grand que la somme des parties ». Ainsi, bien que la famille puisse se former sans toutes les parties de base (mère, père, enfants), elle ne peut toutefois pas exister sans les interactions créées par ses membres formant ainsi un système (Bradshaw, 2004). Il importe donc de veiller au bien-être de ces liens. Les liens reliant chaque membre aux autres sont si importants qu’on pourrait le comparer à une toile d’araignée.
En effet, tout comme sur cet impressionnant filage, un élément qui touchera un point précis de la toile se verra faire des secousses sur la totalité de la structure. Ainsi, un membre de la famille se verra attribuer deux rôles, celui d’un individu à part entière, mais également celui que le groupe familial lui attribuera (Bradshaw, 2004). Bien qu’il n’existe pas systématiquement de liens plus forts que d’autres au sein d’une famille, la littérature comporte certaines mentions quant à l’ampleur du lien entre une mère et sa fille, et ce, plus particulièrement lorsque cette dernière se trouve à l’adolescence (Snethen, 2010). Certains auteurs issus de la psychologie et de la sociologie expliqueraient la force de ce lien par le fait qu’alors que les jeunes adultes seront en âge de former leur propre famille, la jeune femme se verra renvoyer à son rôle de femme et aura plus que jamais besoin de sa mère comme soutien afin de devenir une mère à son tour (Segalen, 2010). D’autres vont plutôt mentionner la place primordiale de la femme dans l’unité familiale (Lacourse, 2009; Legros-Bawin & Kellerhals, 1988). Toutefois, bien que la force du lien existant entre la mère et sa fille soit jugé comme étant très significatif, il n’en fait pas moins que les autres liens, tels que celui unissant une mère à son fils, un père à ses enfants, un homme à sa conjointe ou bien des frères et soeurs sont tout aussi importants. En somme, comme il a été mentionné précédemment, chaque lien au sein de la famille est primordial pour son bon fonctionnement.
Effets des traitements sur la personne et sa famille
À cette étape, le patient ainsi que sa famille vont tendre à s’informer sur le cancer ainsi que sur les traitements. C’est aussi à cette étape qu’il sera possible d’observer une modification des rôles intrafamiliaux (Maynard, Patterson, McDonald, & Stevens, 2013; Nelson & While, 2002; Pailler et coll., 2015; Park & Kim, 2015). Ainsi, de nouveaux rôles seront distribués aux membres de la famille afin de pallier ceux que le cancéreux ne pourra plus poursuivre le temps qu’il sera dans le tourbillon des traitements médicaux. Par exemple, dans le cas de familles ayant de jeunes enfants et des adolescents, il n’est pas rare que les adolescents s’occupent plus qu’à l’habitude de leurs benjamins (Huizinga et coll., 2011). La routine du quotidien se verra donc également modifiée pour la durée des traitements (Feldman & Broussard, 2006). Aussi, les membres de la famille tendent à être apeurés à l’idée d’un éventuel décès prématuré de l’être aimé (Feldman & Broussard, 2006; Maynard et coll., 2013). Les proches de la personne atteinte sont donc en proie à une augmentation marquée du niveau de stress (Pailler et coll., 2015). D’ailleurs, l’âge des enfants est une variable importante à cette étape puisque des études ont montré une plus grande détresse psychologique et le développement de trouble anxieux chez les enfants (Nelson & While, 2002). Mireault et Compas (1997) ajoutent que plus les enfants approchent de l’adolescence, plus ils risquent d’être marqués négativement par le fait de vivre avec un parent atteint de cancer.
|
Table des matières
Remerciements
Introduction
Chapitre 1 : La problématique
Chapitre 2 : La recension des écrits
2.1 Procédure
2.2 La famille
2.2.1. La famille une institution dynamique
2.2.2 Les dynamiques internes à la famille
2.3 Le cancer
2.3.2 Types de cancer
2.3.3 Le cycle de vie du cancer
2.3.3.1 Période de doutes
2.3.3.2 Le diagnostic
2.3.3.3 Période de traitements
2.3.3.4 L’après-cancer
2.3.4 Les effets du cancer sur la famille
2.3.4.1 Effets de la période de doutes sur la personne et sa famille
2.3.4.2 Effets du diagnostic sur la personne et sa famille
2.3.4.3 Effets des traitements sur la personne et sa famille
2.3.4.3 La réalité de l’après-cancer pour la personne et sa famille
2.4 La résilience
2.4.1 La résilience familiale
2.4.2 Les facteurs de risques
2.4.3 Les facteurs de protection
2.5 Le loisir
2.5.1 Bienfaits reconnus du loisir
2.5.2 Effets du cancer sur les pratiques de loisir
Chapitre 3: But de la recherche, objectifs et pertinence
3.1 But de la recherche
3.2 Objectifs de la recherche
Chapitre 4 : Le cadre conceptuel
4.1 Présentation des concepts
4.2 Présentation du cadre conceptuel
Chapitre 5: La méthodologie
5.1 Stratégie de recherche
5.2 Population à l’étude
5.3 Collecte des données
5.3.1 L’entretien semi-dirigé
5.3.2 Les Génogrammes
5.3.3 Journal de bord
5.3.4 Retour auprès des familles
5.4 Stratégie d’analyse des données
5.5 Précautions éthiques
Chapitre 6 Résultats et analyse
6.1 Description de l’échantillon
6.2 La famille Allard
6.2.1 Composition et participation à l’étude
6.2.2 Dynamique familiale
6.2.3 Historique de l’épisode de cancer
6.2.4 Résilience de la famille
6.2.5 Expérience de loisir au sein de la famille
6.2.6 Le rôle du loisir au sein de la famille au cours de l’épisode de cancer
6.3 La famille Bélanger
6.3.1 Composition et participation à l’étude
6.3.2 Dynamique familiale
6.3.3 Historique de l’épisode de cancer
6.3.4 Résilience de la famille
6.3.5 Expérience de loisir au sein de la famille
6.3.6 Le rôle du loisir au sein de la famille au cours de l’épisode de cancer
6.4 La famille Carrier
6.4.1 Composition et participation à l’étude
6.4.2 Dynamique de la famille
6.4.3 Historique de l’épisode de cancer
6.4.4 Résilience de la famille
6.4.5 Expérience de loisir au sein de la famille
6.4.6 Le rôle du loisir au sein de la famille au cours de l’épisode de cancer
6.5 mise en commun des cas
6.5.1 Le conjoint, un pilier
6.5.2 Le cancer, une occasion de développement personnel
6.5.3 La place du loisir
6.6 Modélisation de l’étude
Chapitre 7: La discussion
7.1 La place du loisir dans le développement de la résilience des familles
7.2 Validité de la structure de la preuve
7.3 Portée et limites de l’étude
Conclusion
Références
Télécharger le rapport complet