Effet du décubitus ventral en ventilation spontanée sur l’oxygénation

Le monde fait face à une situation de pandémie liée au SARS‐CoV‐2, entraînant une augmentation de patients admis en réanimation pour insuffisance respiratoire aiguë (IRA). Pour les IRA les plus graves, le recours à l’intubation orotrachéale pour la ventilation mécanique peut rapidement saturer les ressources et augmenter la mortalité qui selon une récente cohorte française varie de 11% pour les patients traités de façon non invasive à 36% pour les patients intubés en France en mars 2020 [1]. Pour les patients intubés avec un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) sévère, les séances répétées et prolongées de décubitus ventral (DV) améliorent l’oxygénation et réduisent la mortalité [2]. Le DV améliore les rapports ventilation‐perfusion en redistribuant la ventilation dans les zones postérieures qui sont les mieux perfusées (zones dépendantes), en redistribuant les atélectasies causées par le décubitus dorsal (DD) des régions dorsales à ventrales, en augmentant l’homogénéité et en favorisant le drainage de ces régions [3]–[5]. Plusieurs auteurs ont rapporté que le DV en ventilation spontanée (VS) chez les patients non intubés pouvait être réalisé en sécurité et dans de bonnes conditions [6]. Des études préliminaires, suggèrent qu’une stratégie de mise en DV précoce permet d’améliorer l’oxygénation [7], [8] et d’éviter l’intubation [9], [10]. Cependant, la réponse sur l’oxygénation n’est pas forcément associée à une meilleure évolution clinique [11]. Dans ce contexte, les mécanismes par lesquels le DV pourrait éviter l’intubation sont mal connus. Chez les patients de réanimation atteints d’insuffisance respiratoire aiguë (IRA), le concept émergeant de « patient self‐inflicted lung injury (P‐SILI )[12] » ou lésions pulmonaires induites par le patient en VS fait l’objet d’un intérêt récent. Dans une population pédiatrique, l’utilisation du DV a montré une réduction de l’effort inspiratoire et du travail respiratoire (WOB pour work of breathing) chez les patients atteints de bronchiolites. Pour les adultes atteints de pneumonies à SARS‐CoV‐2, il est difficile de savoir si le DV réduit l’effort inspiratoire autorisant dans ce contexte le clinicien à retarder sans danger l’intubation. L’utilisation de l’oxygénothérapie à haut débit nasal (OHD) en VS est utilisée de façon large au cours de l’IRA, chez les patients les plus hypoxémiques [13]. Notre hypothèse est que le DV en VS chez les patients atteints de pneumonie à SARS CoV‐2 entraîne un effet physiologique bénéfique incluant une amélioration de l’oxygénation et une diminution du WOB.

Cathéter Œsophagien : Pour assurer la reproductibilité, avant chaque mesure, le ballon était dégonflé de façon passive pour vérifier la mise à zéro de la courbe, puis regonflé avec 1mL d’air, ce qui correspond au meilleur volume de travail pour le dispositif de la marque Cooper[17]. Chaque enregistrement durait 2 minutes. Nous avons analysé puis moyenné chaque cycle respiratoire et fait les mesures suivantes:
• La fréquence respiratoire par minute (FRm).
• La mesure de l’effort inspiratoire approchée par : (Annexe 6)
o La différence de pression œsophagienne moyennée (ΔPes), définie à chaque cycle respiratoire comme la différence entre la Pes en fin d’expiration et en fin d’inspiration.
o La pression transpulmonaire dynamique en fin d’expiration (PL,ee), définie comme la différence entre la pression des voies aériennes (Paw) et la Pes en fin d’expiration.
o La pression transpulmonaire dynamique en fin d’inspiration (Pl,ei), définie comme la différence entre Paw et Pes en fin d’inspiration.
o La pression motrice transpulmonaire dynamique (ΔPL) définie comme la différence entre PL,ei et PL,ee.
• La mesure du WOB métabolique :
o Le produit pression‐temps (PTP) simplifié (la pression liée au recul élastique de la paroi thoracique a été négligée du fait de l’impossibilité de réaliser des occlusions) par cycle, défini comme l’aire sous la courbe de Pes durant l’inspiration.
o Le produit pression‐temps simplifié par minute, défini comme la somme des aires sous la courbe de Pes durant l’inspiration sur la période d’enregistrement divisée par le nombre de minutes d’enregistrement.

Avec l’OHD, la Paw est dépendante du débit d’administration de l’oxygène selon l’estimation suivante : 1,52 cmH2O à 30L/min, 2,21 cmH2O à 40L/min et 3,10 cmH2O à 50L/min ou 60L/min[18].

Pour toutes les mesures, le début de l’inspiration était défini comme le début de la déflection œsophagienne et la fin de l’inspiration était définie à 25% du délais entre la déflection maximale et le retour à la valeur initiale de la Pes [19].

Capnométrie : Chaque enregistrement durait 5 cycles respiratoires. Nous avons analysé et mesuré tous les cycles pour extraire les données suivantes (Annexe 7) :
• La concentration de CO2 en fin d’expiration (EtCO2) (Annexe 8).
• L’espace mort physiologique (VD/VT phy) avec l’équation de Bohr modifié par Enghoff :
VD/VT = (PaCO2 ‐ PetCO2)/PaCO2, quireflète l’espace mort total égal à la somme de l’espace mort anatomique et alvéolaire. La PaCO2 était obtenue à partir de la gazométrie artérielle réalisée pendant que le patient respirait au travers de l’embout buccal.
• La différence alvéolo‐artérielle en CO2 = PaCO2 ‐ PetCO2, reflet de l’espace mort alvéolaire. Après le jour de l’expérience, les patients étaient suivis durant 2 mois : nous avons recueilli le statut vital, le recours à la ventilation mécanique et la durée de la ventilation mécanique.

Calcul de l’effectif : 

Nous avons calculé un nombre de sujets nécessaires de 16 patients pour détecter une différence (D) de PaO2:FiO2 de 30 unités entre le DV et le DD (objectif principal), avec un écart‐type pour un même patient de 40. Les hypothèses testées étaient : l’hypothèse nulle (H0 : D=30) et l’hypothèse alternative (H1 : D<>30) en utilisantle test T de Student pourles données appariées, un schéma d’étude en groupe croisé, un risque alpha de 5% et une puissance statistique de 80%. Pour s’affranchir de la sortie prématurée de patients en cours d’étude, nous avons inclus 18 patients (9 dans chaque séquence, bras A et bras B). Le calcul a été fait avec le logiciel SAS V9.4 (SAS Institute Inc., Cary, NC).

Analyses statistiques : 

Les variables continues sont exprimées par en moyennes (écart‐type) ou médianes (écart interquartile IQR) en fonction de leur distribution (respectivement gaussienne ou pas). Les variables catégorielles sont exprimées en effectifs et pourcentages. L’hypothèse de normalité des distributions a été évaluée par le test de Shapiro‐Wilk. La comparaison entre les groupes à la randomisation (bras A/bras B) a été réalisée avec le test non paramétrique de Wilcoxon. Le critère de jugement primaire était comparé entre DV et DD par un T‐test de Student pour les données appariées comme décrit dansle calcul du nombre de sujets nécessaires. Une approche par modèles mixtes pour plans à mesures répétées a été appliquée afin de mettre en évidence un éventuel effet de la séquence (DV‐DD ou DD‐DV), de la période (1ère ou 2ème) ou de la position (DV ou DD)sur chacun des paramètres de critères de jugement principal etsecondaires précités. Les différences ont été considérées comme significatives si p < 0,05. Toutes les analyses seront réalisées à l’aide du logiciel SAS V9.4 (SAS Institute Inc., Cary, NC). L’étude a été approuvée selon la législation française par le comité d’éthique (Comité de protection des personnes Nord‐Ouest, 20.05.26.63610). Tous les participants ont donné par écrit leur consentement éclairé. L’étude était enregistrée dans une base de données des essais cliniques (référence : NCT04543760).

Échanges gazeux 

Objectif principal : pour l’ensemble de la cohorte, au T1 de la première période, le PaO2 :FiO2 médian était de 93 mmHg [IQR : 73‐126]. Le PaO2:FiO2 était majoré à 208 mmHg [IQR : 114‐ 226] en fin de DV et était abaissé à 91 mmHg [IQR : 64‐120] en fin de DD (p=0,0004) (Figure 2). Entre T1 et T4, l’augmentation médiane était de 41 mmHg [IQR : 20‐124] en DV et la diminution médiane de ‐8 mmHg [IQR : ‐26‐ 4] en DD (p<0,0001). 65% des patients (n=11) ont été classés comme répondeurs dans le groupe DV. En DV, uniquement seulement 2 patients n’ont pas augmenté leur PaO2:FiO2. Nous pouvions déjà voir une augmentation significative du PaO2:FiO2 à partir de 30 minutes .

Mécanique respiratoire : 

La FR était significativement plus faible à T4 en DV qu’en DD, respectivement 21[IQR : 19‐22] cycles/minute et 28[IQR : 20‐33] cycles/minute, p= 0,0008. La médiane de diminution entre T1 et T4 était de ‐5 [IQR : ‐9‐(‐1)] cycles/minute en DV et 0 [IQR : ‐4‐2] cycles/minute en DD (p=0,0102). En revanche l’échelle de Borg, qui était déjà basse au début du protocole (premier T1) (2,9 [IQR : 1,5 ‐ 5]) n’était pas significativement différente entre le DV et le DD, respectivement 2  IQR : 0 ‐ 4] et 2 [IQR : 1,3 ‐ 4], p=0,5386. La FRm mesurée par le cathéter œsophagien était étonnamment plus élevée que la FR relevée à l’examen physique.

Au début du protocole (T1 de la première période), ΔPes et ΔPL étaient plus bas qu’attendus avec respectivement 10,89 cmH2O [IQR : 7,23‐15,48] et 10,89 cmH2O [IQR : 6,82‐15,48]. L’effort inspiratoire, mesuré par ΔPes et ΔPL, n’a pas été modifié par le DV. Au début du protocole (T1 de la première période), le PTP/cycle était de 3,62 cmH2O*sec [IQR : 2,03‐5,75] et le PTP/min était de 215 cmH2O*sec*min‐1[IQR : 135‐292]. Il n’y avait pas de différence significative de PTP à T4 entre le DV et le DD.

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Table des matières

I.RÉSUMÉS
Résumé
Abstract
II. INTRODUCTION
III. METHODES
Schéma de l’étude
Population
Interventions
Mesures
Cathéter Œsophagien
Capnométrie
Objectifs
Calcul de l’effectif
Analyse statistique
IV. RÉSULTATS
Échanges gazeux
Mécanique respiratoire
Tolérance
Effets indésirables
V. DISCUSSION
Oxygénation
Mécanique respiratoire
Espace mort
Extrapolation à l’intubation
Limites de l’étude
VI. CONCLUSION
VII. RÉFÉRENCES
VIII. ABRÉVIATIONS
IX. ANNEXES

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