Effet de l’hystérèse à saturation sur les propriétés du bois
Hygroscopicité et domaine hygroscopique
Le bois, comme la plupart des matériaux ligno-cellulosiques, est hautement hygroscopique. Un matériau hygroscopique tend vers un équilibre de teneur en humidité avec l’air qui l’entoure, en lui restituant ou en lui prenant de la vapeur d’eau. Cet équilibre se manifeste par une teneur en humidité particulière, laquelle est fonction principalement de la température, du degré hygrométrique de l’air ambiant (ψ), de l’histoire de sorption ainsi que de la pression (Bizoň 1995). Les échanges d’humidité entre le bois et l’air ambiant causent en général des altérations dans les propriétés physiques et mécaniques du bois. Cependant, ces phénomènes ont lieu seulement dans le domaine hygroscopique, lequel s’étend de l’état anhydre (H=0%) correspondant à un degré hygrométrique de l’air nul (ψ =0%) jusqu’à l’état de saturation des membranes, connu plus couramment comme le point de saturation des fibres (PSF ≅ 30% à 20ºC). Cet état s’obtient à l’équilibre avec la tension de vapeur d’eau saturée (ψ ≅100%).Le terme point de saturation des fibres a été défini par Tiemann (1906) comme l’humidité à laquelle les parois cellulaires du bois sont saturées d’eau hygroscopique tandis que les cavités cellulaires sont dépourvues d’eau liquide. Selon Stamm (1964), le point de saturation des fibres implique que les grands pores du bois, dont ses cavités cellulaires, ne renferment pas d’eau liquide, alors que les espaces fins, situés surtout à l’intérieur des membranes, sont remplis d’eau. D’après Stamm (1964) et Kollmann et Côté (1968), les molécules d’eau sont retenues dans le bois sous trois formes: celles liées au niveau monomoléculaire, celles sorbées à titre polymoléculaire et enfin celles retenues dans les capillaires fins des membranes par action des forces de capillarité.Le point de saturation des fibres varie selon l’espèce ligneuse. Parmi les sources de variation de cette propriété, on retrouve la teneur en extraits, la masse volumique et le contrefil du bois (Arévalo 2002, Hernández 2004a). Selon Bodig et Jayne (1982) et Stamm (1971), des bois ayant une teneur en extraits élevée présentent une faible valeur de PSF car ces substances occupent des espaces dans les parois cellulaires qui sont généralement disponibles pour l’eau. Ainsi, le PSF de la plupart des bois tropicaux est faible dû au fait que leur teneur en extraits est souvent élevée. Il y en ait de même pour l’humidité d’équilibre du bois dans tout le domaine hygroscopique (Siau 1984). Par ailleurs, la teneur en extraits provoque également une diminution du retrait du bois dans tout le domaine hygroscopique (Nearn 1955, Cooper 1974, Taylor 1974, Kryla 1980, Arévalo 2002, Hernández 2004c).Kolin et Stevanovic (1996) ont étudié les effets de la température, de la masse volumique et de la composition chimique du bois de cinq espèces sur le PSF. Ils ont montré que cette propriété diminue au fur et à mesure que la masse volumique basale augmente. Selon ces auteurs, la faible porosité des espèces denses pourrait limiter l’accès de l’eau aux groupes hydroxyles dans les microfibrilles de cellulose disponibles pour les liaisons hydrogènes. D’autre part, Barkas (1949) a établi que les contraintes internes produites lors de la sorption affectent l’équilibre d’humidité. La masse volumique pourrait ainsi représenter le niveau de contraintes internes dans le bois (Hernández 2004b).
Hystérèse de la sorption d’humidité
On sait qu’à l’équilibre la teneur d’humidité du bois augmente avec le degré hygrométrique de l’air et diminue avec la température et que ces mêmes variables affectent toutes les principales caractéristiques physiques du bois. La température et le degré hygrométrique de l’air jouent ainsi un rôle très important dans les variations de l’hygroscopicité et de l’hystérèse de la sorption d’humidité dans le bois. On peut supposer que pour une température fixe, une seule teneur en humidité correspond à un degré hygrométrique de l’air donné. En réalité il n’en est pas ainsi puisqu’il existe cependant des écarts considérables entre les teneurs en humidité d’équilibre obtenues suivant que le bois perd (désorption) ou gagne (adsorption) de l’humidité. Ce phénomène, connu depuis longtemps, est désigné comme hystérèse de la sorption d’humidité. La figure 1 présente cette hystérèse chez le bois d’érable à sucre à 21ºC. Ce graphique montre les écarts entre l’adsorption à partir de l’état anhydre et la désorption depuis l’état de saturation des fibres.
Plusieurs travaux ont porté sur les paramètres de l’hygroscopicité et de son hystérèse. Kollmann et Côté (1968) et Siau (1995) ont suggéré que les groupes hydroxyles de cellulose et de la lignine sont responsables pour l’effet d’hystérèse. D’autres hypothèses pour expliquer ce phénomène ont été proposées par plusieurs chercheurs et sont décrites par Skaar (1988). Les études de Djolani (1970) sur érable à sucre entre 5ºC et 50ºC ont montré que l’hygroscopicité de ce bois et son hystérèse diminuent sensiblement avec la température (figure 2). Une conclusion semblable a été obtenue par Ahmet et al. (2000) sur plusieurs espèces d’importance commerciale à trois différentes températures ainsi que Kolin et Stevanovic (1996) avec des espèces feuillues entre 20ºC et 80ºC et résineuses entre 20ºC et 90ºC. Ces derniers ont affirmé que ce phénomène pourrait être expliqué par des changements de la structure interne des microfibrilles de la cellulose. Selon Djolani (1970), les oscillations de la température et du degré hygrométrique de l’air affectent la largeur apparente de la boucle mais leur effet réel est faible. Il reste que certains facteurs physiques peuvent influencer l’humidité d’équilibre et son hystérèse.
Hystérèse à saturation d’humidité
Un autre phénomène relié à la sorption d’humidité est celui que l’on appelle l’hystérèse à saturation. Il est défini comme étant la différence entre l’équilibre atteint suite à une désorption en présence d’eau liquide et celui atteint en désorption à partir d’une saturation des membranes. La figure 1 montre cette caractéristique dans trois expériences, lesquelles ont été réalisées à l’aide de la technique des solutions salines saturées. La désorption de l’expérience 3 a eu lieu suite à une saturation des membranes dans l’air humide (PSF), tandis que la désorption des expériences 1 et 2 a été précédée d’une saturation dans l’eau liquide. Selon Goulet (1968), cette divergence a lieu au dessus de 60% (ψ) et aurait un caractère reproductible. En effet, des études antérieures ont montré que l’hystérèse à saturation n’est pas limitée à la première désorption mais plutôt à une désorption en présence d’eau libre (Fortin, 1979, Cloutier et Fortin 1991, Goulet et Hernández 1991, Hernández et Bizoň 1994, Defo et al. 1999).
Fortin (1979) a obtenu les isothermes de sorption du bois de la pruche de l’ouest à l’aide de la technique de la membrane poreuse sous pression à 21ºC (figure 3). Cette technique permet de contrôler avec précision la quantité de vapeur d’eau à des degrés hygrométriques de l’air élevés, soit au dessus de 96%. La boucle d’hystérèse s’élargit grandement à des degrés hygrométriques élevés. Fortin (1979) explique cette partie de l’hystérèse par la présence du phénomène dit de « la bouteille d’encre » provoqué par la variation de la dimension des capillaires dans le bois. Ainsi, la variation de la dimension entre les différents types de cavités connectées en série dans le bois, suggère que la désorption est contrôlée par les plus petits pores et l’adsorption par les plus gros pores. La courbe de désorption est alors fortement influencée par le diamètre des canaux qui relient les cavités cellulaires, tandis que la courbe d’adsorption est surtout régie par le diamètre de ces cavités.
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Table des matières
RÉSUMÉ
TABLE DES MATIÈRES
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 – REVUE DE LITTÉRATURE
1.1 Hygroscopicité et domaine hygroscopique
1.2 Hystérèse de la sorption d’humidité
1.3 Hystérèse à saturation d’humidité
1.4 Effet de l’hystérèse à saturation sur les propriétés du bois
CHAPITRE 2 – MATÉRIEL D’ESSAI
2.1 Espèces ligneuses
2.2 Préparation et sélection des éprouvettes
2.3 Jumelage et principales caractéristiques des éprouvettes
CHAPITRE 3 – MÉTHODE EXPÉRIMENTALE
3.1 Traitements préalables des éprouvettes
3.2 Essais de sorption
3.2.1 Caractéristiques générales
3.2.2 Méthode des solutions salines saturées
3.2.2.1 Bassins à température constante
3.2.2.2 Cellules de sorption
3.2.2.3 Durée de conditionnement
3.2.3 Méthode de la membrane poreuse sous pression
3.3 Essais mécaniques
3.3.1 Conditions hygrométriques à l’essai
3.3.2 Essais de compression
3.3.3 Mesures de déformation
3.4 Mesures des dimensions du bois
CHAPITRE 4 – EXÉCUTION DES ESSAIS
4.1 Sorption d’humidité
4.1.1 Méthode des solutions salines saturées
4.1.2 Méthode de la membrane sous pression
4.1.3 Détermination de la teneur en humidité d’équilibre
4.2 Compression tangentielle
4.3 Détermination du retrait
CHAPITRE 5 – PRÉSENTATION DES RÉSULTATS
CHAPITRE 6 – DISCUSSION DES RÉSULTATS
6.1 Précision des mesures et variabilité
6.2 Hygroscopicité du bois
6.3 Saturation des membranes
6.4 Relation entre l’humidité d’équilibre et le retrait du bois
6.5 Relation entre l’humidité d’équilibre et la compression tangentielle
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE A
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