Effet de l’endommagement mécanique sur les propriétés thermiques de composites à matrice céramique

Le progrès technique a constamment fait partie des préoccupations humaines. Au fil du temps, il a permis à l’Homme de répondre à des besoins matériels grandissants et d’élargir ses champs de connaissance. Dans des domaines très divers (médecine, sciences de la Terre et de l’Univers, communication, transport, énergie, etc.) les Hommes se sont employés à découvrir et inventer en faisant sauter les verrous techniques qu’ils rencontrent sur leur chemin. Dans ce processus d’innovation, la Science des Matériaux est une discipline incontournable. Des matériaux aux propriétés tout à fait étonnantes ont été découverts et des travaux fondamentaux ont permis de tirer profit de ces spécificités afin de développer des matériaux aux propriétés maitrisées. C’est ainsi que l’ingénieur devra faire un choix parmi un très large éventail de matériaux afin de satisfaire l’ensemble des critères technico-économiques auxquels il est soumis.

Le développement des réacteurs nucléaires du futur (IVème Génération) est un projet qui s’inscrit dans un contexte interétatique mobilisant 12 pays. Le Forum International Génération IV (GIF) définit les axes de Recherche et Développement et coordonne les travaux des 13 membres qui le constituent dont le Commissariat à l’Energie Atomique (CEA) représentant la contribution française. Des comités d’experts ont retenu six orientations technologiques destinées à remplir les objectifs fixés conjointement qui sont : respect de l’environnement, compétitivité économique, sécurité, fiabilité et réduction des risques de prolifération. Les travaux dirigés par les membres du GIF portent actuellement sur l’assurance de la faisabilité des différentes solutions proposées. En effet, avec la définition d’objectifs de performances ambitieux, de nouveaux critères de sélection de matériaux sont ainsi formulés. C’est le cas en particulier des éléments constituant le coeur du réacteur nucléaire et notamment du gainage du combustible constituant la première barrière de confinement de la matière fissile.

Introduction aux Composites à Matrice Céramique (CMC) SiC/SiC

Les Composites à Matrice Céramique (CMCs) permettent de remédier à la fragilité intrinsèque et au manque de fiabilité des céramiques, afin d’en faire des matériaux à même de remplir des rôles structuraux dans des conditions de température sévères ou très sévères. Ils trouvent principalement des applications dans les secteurs stratégiques de l’aéronautique, du spatial, de la défense ou encore de l’énergie nucléaire. Le Laboratoire des Composites ThermoStructuraux (LCTS) a fait des CMCs sa principale activité de recherche.

Morphologie et élaboration des CMCs

Les Composites à Matrice Céramique sont constitués de trois phases fonctionnelles (renfort, interphase et matrice) que nous détaillons dans la suite puis d’une quatrième phase formée par la porosité à différentes échelles (microporosité, mésoporosité). L’existence de cette dernière est étroitement liée au procédé d’élaboration.

Le Renfort
Le renfort est l’élément qui supporte la charge appliquée lorsque les deux autres phases s’endommagent. C’est aussi la phase qui subit l’endommagement en dernier et celle qui dicte la rupture ultime du composite (Lissart and Lamon, 1997) (Lamon, 2002). Le renfort est le plus souvent réalisé à base de fibres longues dont le diamètre est inférieur à 15µm pour les fibres récentes (Hi-Nicalon, Hi-Nicalon S, Tyranno SA3, Sylramic, etc). Elles peuvent être obtenues par la transformation d’un précurseur (Polycarbosilane par exemple). Des éléments précis concernant les aspects structuraux, les propriétés et les procédés d’élaboration des fibres, pourront être trouvés dans (Clauβ, 2008). Parmi les principaux enjeux liés au développement de ces fibres, nous pouvons citer la tenue à l’oxydation, la contrainte à rupture ou encore le coût de production.

Plusieurs centaines de fibres sont assemblés formant ce qui est appelé un fil. Ces derniers sont tissés selon des architectures de complexité variable (2D, 2.5D, 3D, etc.) donnant ainsi forme au squelette du composite. Les préformes textiles sont traitées en détails dans (Gries et al., 2008).

L’interphase
Dans le composite, cette phase est en proportion négligeable mais n’en reste pas moins un élément clé assurant un rôle crucial dans le comportement des CMCs (Lamon, 2008). Lorsque l’interphase est dimensionnée et élaborée avec justesse, elle est le lieu de déviations de fissures, évitant ainsi la propagation des fissures dans la fibre conduisant à la rupture prématurée du composite. Les fissures matricielles peuvent alors se multiplier générant à chaque fois des décohésions interfaciales, lesquelles participent au transfert de charge de la matrice au renfort. C’est ainsi que le matériau s’endommage au lieu de rompre brutalement.

L’interphase est le plus souvent déposée à la surface des fibres par voie gazeuse. Elle peut consister en une fine couche de pyrocarbone (PyC) de quelques dizaines de nanomètres. Des développements ont conduit à la mise au point d’interphases avancées (i) contenant du Nitrure de Bore (Rebillat et al., 2000) pour améliorer la résistance à l’oxydation (ii) des interphases multiséquencées (PyC/SiC)n  pour accoître leur capacité à transférer l’effort vers le renfort (Bertrand et al., 2000).

La matrice
La dernière phase fonctionnelle au sein des CMCs est la matrice. Elle participe, avec le renfort, à supporter le chargement jusqu’à être atteinte par l’endommagement. Ensuite, son rôle est essentiel quant à la protection du renfort contre l’environnement, notamment vis-à-vis de l’oxydation aux hautes températures (>500°C). Ainsi, le composite est finalement obtenu lorsque la préforme fibreuse revêtue d’une interphase est densifiée par la matrice. L’étape de densification consiste à remplir au mieux le volume laissé vide autour du renfort. L’élaboration de la matrice a suscité de nombreux travaux de recherche qui ont conduit à la mise au point de procédés industriels. Plusieurs voies ont été explorées : la voie liquide (Liquid Polymer Infiltration – LPI – et Liquid Silicon Infiltration – LSI), la voie solide (Nano-powder Infiltration Transient Eutectic – NITE), et la voie gazeuse (Isobare Chemical Vapor Infiltration – I-CVI). Des détails quant aux divers procédés et aux propriétés des matrices obtenues sont disponibles dans ((Bansall, 2005), (Heidenreich, 2008), (Motz et al., 2008), (Leuchs, 2008)).

Endommagement des CMCs

En réponse à un chargement thermomécanique, les Composites à Matrice Céramique développent un comportement non-linéaire à seuil du type élastique endommageable. Les mécanismes physiques responsables de la non-linéarité du comportement sont des fissures qui se forment dans les différentes phases précédemment citées selon un schéma que l’on appelle scenario d’endommagement. Ce dernier peut varier selon la texture, le mode de chargement, la nature de la fibre, celle de l’interphase et celle de la matrice. Les travaux menés depuis ceux de (Aveston et al., 1971) ont contribué à l’identification des modes d’endommagement affectant la matrice, l’interphase et le renfort fibreux, et de leur lien avec la microstructure (Guillaumat and Lamon, 1996a), (Lissart and Lamon, 1997), (Calard, 1998).

Avec l’apparition des différents systèmes de fissuration, une partie de l’énergie fournie au matériau est dissipée :
– sous la forme de création de surface (fissuration à proprement dite) ;
– sous forme de chaleur induit par des phénomènes de frottement.

Endommagement matriciel 

Les fissures matricielles sont les premières à se manifester au sein du composite. Elles constituent trois familles qui sont indiquées ci-dessous dans l’ordre de leur apparition avec l’augmentation de la charge (Guillaumat and Lamon, 1993) :
1. Les fissures interfil.
2. Les fissures des fils transversaux. Elles affectent les fils orientés perpendiculairement à la direction de chargement macroscopique. Elles se propagent initialement en mode I puis sont déviées en mode II , le plus souvent au voisinage de l’interface entre deux fils. Cela peut donner lieu à des décohésions interplis ou à des phénomènes de délaminage.
3. Les fissures intrafil. Elles se forment à l’intérieur des fils longitudinaux – au sein de la matrice qui recouvre les fibres.  les lèvres de la fissure sont normales à la direction des fibres.

Endommagement interfacial 

Les fissures qui d’abord se propagent dans la matrice sont déviées dans l’interphase générant des décohésions interfaciales. C’est le lieu où les transferts de charge vers la fibre s’opèrent. Les décohésions parcourent des longueurs variables conditionnées par la capacité de transfert de l’interphase. Ainsi, les fissurent interfaciales sont courtes lorsque le transfert mécanique à l’interface est intense, et elles sont longues dans le cas contraire (Guillaumat and Lamon, 1993) (Lamon, 2008).

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
1 Synthèse bibliographique
1.1 Introduction aux Composites à Matrice Céramique (CMC) SiC/SiC
1.1.1 Morphologie et élaboration des CMCs
1.1.2 Endommagement des CMCs
1.2 Comportement des matériaux et relation entre la thermique et la mécanique
1.2.1 La caractérisation thermique des matériaux
1.2.2 Analyse thermomécanique du comportement des matériaux
1.2.3 Comportement non linéaire induit par l’endommagement Mécanique : Analogie entre la Thermique et la Mécanique
1.3 Objectifs et plan de travail
2 Caractérisation de l’effet de l’endommagement mécanique sur les propriétés thermiques de minicomposites en traction simple
2.1 Présentation du matériau étudié : minicomposite SiC/PyC/SiC
2.1.1 Description morphologique et microstructurale
2.1.2 Intérêt du minicomposite
2.1.3 Temps caractéristiques associés aux transferts thermiques
2.2 Modèles pour l’estimation de la diffusivité thermique longitudinale de minicomposites
2.2.1 Le modèle d’Angström et les méthodes d’estimation associées
2.2.2 Le cas d’un matériau enrobé
2.2.3 Le cas d’un matériau fissuré
2.3 Le banc expérimental développé pour la caractérisation thermique et mécanique de minicomposites en traction
2.3.1 Description du montage expérimental
2.3.2 Procédure d’estimation de la diffusivité thermique longitudinale
2.3.3 Estimation de la diffusivité thermique longitudinale : application à des matériaux homogènes de référence
2.4 Le comportement mécanique du minicomposite en traction
2.4.1 Comportement élastique endommageable
2.4.2 Cinétiques d’endommagement
2.5 Le comportement thermique du minicomposite en traction
2.5.1 Caractérisation du comportement thermique dans la direction du renfort
2.5.2 Caractérisation du comportement thermique dans la direction transverse
2.6 Conclusions
3 Modèle de comportement thermique d’un composite unidirectionnel en traction monotone
3.1 De l’expérience … au modèle de comportement
3.1.1 Aspects phénoménologiques du comportement du minicomposite
3.1.2 Représentation micro de l’endommagement : approche micromécanique et microthermique
3.1.3 Une revue succincte des modèles d’endommagement d’un unidirectionnel
3.1.4 Démarche proposée
3.2 Modèles pour la prévision des cinétiques d’endommagement
3.2.1 Endommagement matriciel
3.2.2 Ruptures de fibres
3.3 Simulation de la courbe de comportement mécanique
3.4 Prévision de l’effet de l’endommagement sur les propriétés thermiques du minicomposite
3.4.1 Modèle de calcul de l’effet de l’endommagement sur la conductivité thermique longitudinale
3.4.2 Modèle de calcul de l’effet de l’endommagement sur la conductivité thermique transverse
3.5 Discussion
4 Caractérisation de l’effet de l’endommagement mécanique sur les propriétés thermiques d’un composite tissé 2D en traction simple
4.1 Outils pour la caractérisation thermique de matériaux hétérogènes et anisotropes par des méthodes non stationnaires
4.1.1 Problème général
4.1.1.1 Les équations de la thermique
4.1.1.2 Caractérisation des propriétés thermophysiques locales
4.1.2 Estimation de la diffusivité thermique transverse locale
4.1.2.1 Méthodes d’estimation de la diffusivité thermique transverse par la méthode flash
4.1.2.2 Transfert unidimensionnel : approche physique
4.1.2.3 Cas général : approche statistique
4.1.3 Estimation de la diffusivité thermique longitudinale
4.1.3.1 Eléments de bibliographie
4.1.3.2 Découplage des transferts thermiques dans le plan et hors-plan
4.1.4 Mise en oeuvre des méthodes d’estimation des diffusivités thermiques transverse et longitudinale appliquées à des matériaux homogènes connus
4.2 Présentation du matériau étudié : composite tissé stratifié HNS/PyC/SiC-CVI
4.2.1 Description de la Micro-Mésosctructure
4.2.2 Mise en relation de la mésostructure avec la distribution des diffusivités thermiques transverses locales
4.3 Comportement mécanique du composite en traction
4.3.1 Comportement mécanique élastique endommageable
4.3.2 Suivi de l’endommagement mécanique du composite au cours d’un essai de traction
4.4 Caractérisation du comportement thermique du composite en traction
4.4.1 Instrumentation de l’essai pour la caractérisation thermique
4.4.2 Comportement thermique global du composite tissé stratifié
4.4.3 Analyse locale du comportement du matériau composite
4.5 Conclusions
Conclusion

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *