EFFET DE LA TEMPERATURE SUR LE TAUX DE CROISSANCE ET LA MORTALITE

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ECHANTILLONNAGE DES POPULATIONS ADULTES

Un รฉchantillonnage semi-quantitatif en plongรฉe a รฉtรฉ effectuรฉ entre le 20 et le 26 juillet 2006, ร  chacun des dix sites sรฉlectionnรฉs, dans le but dโ€™รฉvaluer la prรฉsence dโ€™adultes sur le fond. Pour cela, une exploration du fond a รฉtรฉ rรฉalisรฉe par les mรชmes plongeurs durant une durรฉe dรฉterminรฉe (13 minutes dans notre cas) ร  chaque site. Les chaรฎnes (groupes de crรฉpidules attachรฉes fortement les unes aux autres) observรฉes au cours de ces plongรฉes ont รฉtรฉ rรฉcoltรฉes et fixรฉes dans de lโ€™alcool 95% au retour au laboratoire. Les individus (juvรฉniles, mรขles, femelles, femelles avec ponte) rรฉcoltรฉs ont รฉtรฉ comptรฉs et mesurรฉs pour chaque site.

ANALYSES DE LA DISTRIBUTION SPATIALE DES TAILLES DES LARVES Pour

dรฉterminer si la taille moyenne des larves diffรจre entre sites, un test de comparaison multiple de Kruskal-Wallis a รฉtรฉ rรฉalisรฉ ร  chaque date entre les sites. Pour les tests significatifs, un test a posteriori de comparaison deux a deux a รฉtรฉ rรฉalisรฉ pour prรฉciser les รฉchantillons qui diffรฉrent les uns des autres. Ces tests ont รฉtรฉ rรฉalisรฉs sous R grรขce ร  la librairie Vegan 1.11-4. (http://vegan.r-forge.r-project.org/). De plus, le barycentre des moyennes des tailles a รฉtรฉ calculรฉ ร  chacune des dates dโ€™รฉchantillonnage dans lโ€™objectif de dรฉterminer la stabilitรฉ au cours du temps de la distribution spatiale des tailles moyennes de larves. La position longitudinale (coordonnรฉe x) du barycentre se calcule selon lโ€™รฉquation : ()ฮฃฮฃ==ยด=niiniiiaxaxBarycentre11)( oรน n est le nombre total de points รฉchantillonnรฉs ร  une date et a est la taille moyenne au site i de coordonnรฉe longitudinale xi. La coordonnรฉe y est calculรฉe dโ€™une faรงon similaire. Les distributions en classes de taille ont รฉtรฉ confrontรฉes aux paramรจtres environnementaux et aux coordonnรฉes gรฉographiques de chaque site ร  travers une analyse canonique de redondance (RDA pour ยซ Redundancy Analysis ยป, Legendre et Legendre 1998 ; voir encadrรฉ I.1). Cette analyse permet de confronter simultanรฉment deux tableaux de donnรฉes. Dans le cas le plus classique, cette analyse sโ€™applique entre une matrice de variables rรฉponses (les donnรฉes ร  expliquer, ici les diffรฉrentes classes de taille de larves ร  chaque site) et une matrice de descripteurs environnementaux. La RDA est une extension de la rรฉgression multiple au cas dโ€™une ยซ matrice rรฉponse ยป. Dans la RDA, le processus dโ€™ordination recherche les axes expliquent le mieux la variance par une combinaison linรฉaire des variables explicatives. Donc, cette mรฉthode recherche la combinaison des variables explicatives qui explique le mieux la variation de la matrice rรฉponse. La RDA produit autant dโ€™axes canoniques quโ€™il y a de variables explicatives mais chacun de ces axes est une combinaison linรฉaire de toutes les variables explicatives.

ETUDE DE L’EFFET DE LA MAREE SUR LA DISTRIBUTION DES LARVES AU SEIN DE LA BAIEย 

APPROCHE ANALYTIQUE Comme nous lโ€™avons rappelรฉ plus haut, les facteurs hydrodynamiques sont des facteurs essentiels pour le transport des larves des organismes bentho-pรฉlagiques, et donc pour expliquer la distribution des larves dans lโ€™espace ร  un temps t donnรฉ. Actuellement, aucun modรจle hydrodynamique nโ€™est disponible pour simuler le transport larvaire au sein de la baie de Morlaix. En nous inspirant du modรจle dรฉveloppรฉ par Black et al. (1990), nous avons donc dรฉveloppรฉ un modรจle analytique dans le but dโ€™รฉtudier lโ€™impact de la marรฉe sur le pool larvaire รฉmis dans la baie, et plus prรฉcisรฉment sur le taux de rรฉtention larvaire au sein de la baie. La mรฉthode utilisรฉe fait lโ€™hypothรจse que les caractรฉristiques hydrodynamiques de la baie sont exclusivement contraintes par les courants de marรฉe. Dans cette approche, nous avons donc nรฉgligรฉ lโ€™effet du vent et des gradients de densitรฉ de lโ€™eau de mer qui peuvent dans certains cas avoir une influence importante sur le transport larvaire (ex. chez le polychรจte tubicole Owenia fusiformis, Thiรฉbaut et al. 1992). Ces hypothรจses semblent toutefois recevables dans le cas de notre site dโ€™รฉtude et sur la pรฉriode considรฉrรฉe. En effet, lโ€™estuaire de la baie de Morlaix est situรฉ dans une zone de rรฉgime de marรฉe de type mรฉgatidal, le marnage pouvant รชtre de 9 m lors des plus grandes marรฉes de vive-eau. Ceci induit des courants de marรฉe importants, en particulier dans lโ€™axe du chenal et dans la partie la plus au nord de la zone oรน ils peuvent atteindre voire dรฉpasser 1 noeud. Par ailleurs, les donnรฉes de vents ont montrรฉ une vitesse moyenne faible (1.5 km/h) sur la pรฉriode dโ€™รฉtude de juillet et aoรปt 2006 (donnรฉes MรฉtรฉoFrance). De plus, les profils de densitรฉ de lโ€™eau de mer (ฯƒT) calculรฉs ร  partir des donnรฉes de tempรฉrature et de salinitรฉ extraites de la sonde CTD ont montrรฉ une faible stratification en juillet et en aoรปt dans les sites de fond de baies (ex. sites 0 et 9), et une absence de stratification dans la partie ouverte vers le large (ex. sites 2 et 5) (Figure I.14 et annexe I.1) . Ainsi, sur la pรฉriode et le site รฉtudiรฉs, lโ€™influence du vent et de la stratification de la masse dโ€™eau peut รชtre en premiรจre approximation nรฉgligรฉe par rapport ร  lโ€™influence de la marรฉe Le principe et les รฉquations ร  la base de ce modรจle analytique sont prรฉsentรฉs dans lโ€™encadrรฉ I.4. Au sein de la baie de Morlaix, nous avons dรฉfini deux rรฉgions de caractรฉristiques hydrodynamiques diffรฉrentes : (i) la baie stricto sensu (B), au sein de laquelle se situent les sites dโ€™รฉmission larvaire, et qui est uniquement sous lโ€™influence des courants de marรฉe entrants et sortants u(t) et (ii) la partie extรฉrieure de la baie (E) dans laquelle les larves รฉmises au sein de B peuvent รชtre exportรฉes et qui se trouve sous lโ€™influence des courants de marรฉe u(t) et du courant rรฉsiduel du large U. L’emprise de la rรฉgion E est dรฉterminรฉe par la distance maximale parcourue par une larve รฉmise en B au cours de l’excursion de marรฉe (amplitude maximale de marรฉe xT). Sa largeur L est donc variable selon la localisation du site dโ€™รฉmission larvaire au sein de B (voir figures de l’encadrรฉ 4). Le nombre de larves au sein des rรฉgions B et E ร  un temps t est notรฉ respectivement NB(t) et NE(t). Le volume de chaque rรฉgion ร  un temps t est notรฉ VB(t) et VE(t), respectivement. Les concentrations larvaires sont supposรฉes homogรจnes au sein de chaque rรฉgion. Seule lโ€™advection est prise en compte, c’est-ร -dire que le nombre de larves au sein de chaque rรฉgion varie seulement sous lโ€™effet des courants de marรฉe u(t) et U. Durant un pas de temps ฮ”t, le volume dโ€™eau รฉchangรฉ entre les deux rรฉgions par les courants de marรฉe u(t) est notรฉ V1(t) et le volume dโ€™eau extrait de la rรฉgion E sous l’effet de U est notรฉ V2(t). Les dรฉtails des calculs des volumes VB(t), VE(t), V1(t) et V2(t) sont prรฉsentรฉs dans lโ€™encadrรฉ 4.

DISTRIBUTION SPATIALE DES CONCENTRATIONS LARVAIRES

Les concentrations larvaires au sein de la baie de Morlaix sโ€™รฉchelonnent entre 1 et 8 larves par m3 pour lโ€™รฉchantillonnage 1 (20 juillet 2006; Fig. I.2.A) et entre 1 et 34 larves par m3 pour lโ€™รฉchantillonnage 2 (4 aoรปt 2006 ; Fig. I.2.B). Pour les deux dates dโ€™รฉchantillonnage, lโ€™analyse de rรฉgression multiple entre les concentrations larvaires et les coordonnรฉes gรฉographiques des sites montre une relation significative suivant un gradient ยซ cรดte-large ยป (i.e. latitude, axe Y; Tableau I.3) : les concentrations larvaires sont structurรฉes entre le fond et le large de la baie, avec respectivement de fortes et de faibles concentrations. Il nโ€™y a en revanche pas de structure selon la longitude (coordonnรฉe X).

RELATIONS ENTRE LES CONCENTRATIONS LARVAIRES, LA PRESENCE DES ADULTES ET LES PARAMETRES ENVIRONNEMENTAUX MESURES

Les valeurs des paramรจtres environnementaux sont prรฉsentรฉes dans le tableau I.4. Pour les รฉchantillonnages 1 et 2, la figure 5 et le tableau I.5A prรฉsentent les rรฉsultats de lโ€™Analyse en Composantes Principales (ACP) avec respectivement la projection des variables et des sites dans le plan formรฉ des deux premiers axes factoriels et la contribution (%) des variables et des sites aux axes. Le tableau I.5B des corrรฉlations entre variables montre que la concentration larvaire est positivement et significativement corrรฉlรฉe au nombre dโ€™adultes prรฉsent sur le fond pour lโ€™รฉchantillonnage 1; ces derniers รฉtant ร  leur tour positivement et significativement corrรฉlรฉs au nombre de femelles avec ponte. Le nombre dโ€™adultes et le nombre de femelles avec ponte sont nรฉgativement et significativement corrรฉlรฉs ร  la profondeur et ร  la teneur en chlorophylle a. Ces mรชmes corrรฉlations sont retrouvรฉes pour l’รฉchantillonnage 2 exceptรฉ entre la concentration larvaire et le nombre dโ€™adultes. Pour les deux dates, les rรฉsultats montrent deux groupes de sites qui sโ€™opposent le long de lโ€™axe F1 : le groupe A correspondant aux sites du fond de la baie (0, 9 et 8) et le groupe B rassemblant les sites plus au centre ou au large de la baie (1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7). Le groupe A est caractรฉrisรฉ par de fortes concentrations larvaires, plus particuliรจrement pour les sites 8 et 9 qui contribuent pour 63% (date1) et 73% (date2) ร  lโ€™axe F1, et par un grand nombre dโ€™adultes et de femelles avec ponte. A lโ€™inverse les individus du groupe B sont caractรฉrisรฉs par une profondeur plus importante traduisant les positions plus au large. Lโ€™axe F2 sรฉpare les sites en fonction de la tempรฉrature et de la salinitรฉ pour la date 2. Les tempรฉratures les plus รฉlevรฉes ont รฉtรฉ enregistrรฉes en fond de baie pour les sites 8 et 9 et plus particuliรจrement au site 0, contribuant ร  lui seul ร  plus de 50% ร  lโ€™axe F2.

DISTRIBUTION SPATIALE DES TAILLES DES LARVES

Toutes les larves mesurรฉes aux cours des trois รฉchantillonnages spatiaux ont une taille infรฉrieure ร  la taille classiquement reconnue comme รฉtant la taille ร  la compรฉtence ร  la mรฉtamorphose larvaire (900-1100 ฮผm ; Pechenik et Heyman 1987 ; voir aussi chapitre III). Trois larves seulement sโ€™approchent de cette taille limite, toutes prรฉlevรฉes au cours du troisiรจme รฉchantillonnage (21 aoรปt 2006): une au site 2 (800 ฮผm) et deux au site 3 (800 et 900 ฮผm). Les tailles moyennes des larves รฉchantillonnรฉes ร  chaque site et chaque date sont prรฉsentรฉes dans le tableau I.4. Quelle que soit la date considรฉrรฉe, le test de comparaison multiple de Kruskal-Wallis est hautement significatif (p<10-3), illustrant lโ€™hรฉtรฉrogรฉnรฉitรฉ des tailles moyennes au sein de la baie. Les rรฉsultats dรฉtaillรฉs des tests de Kruskal-Wallis et des tests a posteriori sont prรฉsentรฉs dans le tableau I.6. Les sites 2, 3, 4, 5 et 7 ne prรฉsentent pas de diffรฉrence de taille moyenne significative, ce quelle que soit lโ€™รฉchantillonnage. A lโ€™inverse, les sites 8 et 9 ont une taille moyenne significativement diffรฉrente des sites 1, 2 et 7 aux 3 dates. La position du barycentre des tailles moyennes (Fig. I.6) montre la stabilitรฉ de la distribution des tailles moyennes sur la durรฉe de lโ€™รฉtude confirmant ainsi dans le temps la sรฉgrรฉgation entre les sites du fond de la baie et ceux situรฉs plus ร  lโ€™extรฉrieur. Lโ€™analyse des histogrammes de frรฉquences de taille des larves รฉchantillonnรฉes ร  chaque site au cours du troisiรจme รฉchantillonnage nous permet dโ€™affiner nos observations (Fig. I.7). Un changement de structure de taille est observรฉ entre les points du fond de baie, caractรฉrisรฉs par une dominance de larves de faible taille (particuliรจrement aux sites 8 et 9), et les sites situรฉs plus au large qui se distinguent par une proportion plus importantes de larves de grandes tailles (exemple des sites 2 et 4). Le dรฉcalage vers les classes de tailles plus grandes entre le fond et le large est รฉgalement illustrรฉ par les mรฉdianes des distributions (Fig. I.7). Il est ร  noter que si les donnรฉes de lโ€™ensemble des sites sont rassemblรฉes, lโ€™hypothรจse nulle de normalitรฉ est rejetรฉe. Les modes et รฉcart-types issus de la dรฉcomposition modale sont donnรฉs sur la figure I.8. Par le rรฉtrocalcul (Encadrรฉ I.3), lโ€™รขge du premier mode, reprรฉsentant 54.30% des individus, a รฉtรฉ estimรฉ entre 2,5 jours et 3,9 jours, considรฉrant un dรฉveloppement ร  18,4ยฐC et 15,5ยฐC respectivement. Pour le deuxiรจme mode, reprรฉsentant 45.69% des individus, lโ€™รขge a รฉtรฉ estimรฉ entre 5,2 et 8,2 jours.

INFLUENCE DE LA MAREE SUR LE TRANSPORT LARVAIRE :

Les rรฉsultats issus du modรจle analytique construit pour analyser lโ€™influence de la marรฉe sur les taux de rรฉtention ร  lโ€™รฉchelle de la baie sont prรฉsentรฉs dans la figure I.10, et illustrent uniquement les calculs effectuรฉs pour des courants de marรฉe de vive-eau (les rรฉsultats ร  morte-eau, sensiblement les mรชmes, ne sont pas prรฉsentรฉs). Au cours du temps (au cours des cycles de marรฉe successifs), le nombre de larves dรฉcroit avec une intensitรฉ fonction du courant rรฉsiduel agissant au sein de la rรฉgion E (Fig. I.10A). Par exemple, au site 8, avec un courant rรฉsiduel U de 3 cm s-1, pour 100 larves รฉmises, 91 sont perdues aprรจs 15 jours (Fig. I.10A). Pour une valeur de courant rรฉsiduel U de 3 cm s-1 et quel que soit le site dโ€™รฉmission larvaire testรฉ, le taux de rรฉtention nโ€™excรจde pas 20% (Fig. I.10B). Dans le cas oรน les larves sont uniquement รฉmises du site 8 (x=5600 m), le taux de rรฉtention dรฉcroit de 36% ร  2% lorsque U varie respectivement de 1 ร  5 cm s-1 (Fig. I.10B). Il y a donc sous lโ€™effet de la marรฉe une exportation rapide et importante des larves, accentuรฉe pour les larves prรฉsentes dans la partie la plus au large de baie.

LA STRUCTURE SPATIALE DU NUAGE LARVAIRE REFLETE LA DISTRIBUTION DES ADULTES EN BAIE DE MORLAIX

Une des observations majeures de notre รฉtude est la faible concentration larvaire enregistrรฉe. A lโ€™รฉchelle de la baie, nous avons mesurรฉ des concentrations allant de une ร  huit larves par m3 pour les รฉchantillonnages 1 et 2 ร  lโ€™exception de site 9 oรน 34 larves par m3 ont รฉtรฉ observรฉes le 4 aoรปt 2006. Ces faibles valeurs tranchent avec celles rencontrรฉes dans la littรฉrature. En baie du Mont Saint-Michel, dans le secteur de Cancale, Lasbleiz (2003) ont rapportรฉ des concentrations de plus 2000 larves par m3 sur la pรฉriode estivale. Quiniou et Blanchard (1987), dans le secteur de Granville, enregistrent mรชme des concentrations au-delร  des 8000 larves par m3 au mois de juillet. Des concentrations de plus de 500 larves par m3 durant les mois dโ€™รฉtรฉ sont รฉgalement rapportรฉes en Rade de Brest (Coum 1979). Dโ€™importantes concentrations (2000 larves par m3) sont aussi enregistrรฉes ร  Sylt en mer de Wadden (Allemagne) par Thieltges et al. (2004). Bien que plusieurs raisons puissent รชtre avancรฉes pour expliquer ces fortes diffรฉrences avec les valeurs de concentration larvaire obtenues en baie de Morlaix (ex : hydrodynamisme, mรฉthode dโ€™รฉchantillonnage), les diffรฉrents sites citรฉs prรฉcรฉdemment se distinguent de notre lieu dโ€™รฉtude par la prรฉsence de fortes densitรฉs dโ€™adultes. En baie de Morlaix, une รฉtude rรฉalisรฉe dans le cadre de la thรจse de Lise Dupont (2004) avait estimรฉ la densitรฉ dโ€™adultes ร  20 individus par mยฒ avec des maximums locaux de 200 individus par mยฒ. A titre de comparaison, en baie du Mont Saint-Michel, la densitรฉ de crรฉpidules a รฉtรฉ estimรฉe ร  200 ind m-ยฒ avec des maximums locaux allant jusquโ€™ร  2000 ind m-ยฒ (Viard et al. 2006), soit des valeurs 10 fois plus รฉlevรฉes quโ€™en Baie de Morlaix (voir aussi tableau I.1). De mรชme, Coum (1979) avait estimรฉ ร  plus de 500 ind m-ยฒ la densitรฉ de crรฉpidules ร  proximitรฉ de ses sites dโ€™รฉchantillonnage larvaire. Ces diffรฉrentes observations vont dans le sens de lโ€™hypothรจse dโ€™une relation positive entre la densitรฉ dโ€™adultes prรฉsents et les concentrations larvaires. Notre รฉtude montre de plus que ces diffรฉrences rencontrรฉes entre diverses baies colonisรฉes par la crรฉpidule sont รฉgalement prรฉsentes entre diffรฉrents sites ร  lโ€™รฉchelle de la baie de Morlaix. En effet, la structure spatiale des concentrations larvaires mise en รฉvidence (analyse de rรฉgression multiple et ACP), caractรฉrisรฉe par des abondances plus fortes en fond de baie, reflรจte la distribution des adultes. Nous avons ainsi observรฉ une forte concentration dโ€™individus benthiques, en particulier des femelles avec ponte, et de larves dans le fond de la baie, ร  la sortie de la riviรจre de Morlaix (sites 9 et 8 reprรฉsentant 84% des adultes et 61% des concentrations larvaires pour les รฉchantillonnages 1 et 2 respectivement), et une quasi absence d’adultes, associรฉe ร  de plus faibles concentrations larvaires, aux autres sites รฉchantillonnรฉs.
La rรฉpartition spatiale des tailles moyennes des larves et de la structure de taille larvaire reflรจte รฉgalement la distribution de la population adulte, comme le montre le gradient cรดte-large mis en รฉvidence par les tests de comparaisons multiples (Tableau I.6) et lโ€™analyse canonique de redondance (Fig. I.9). Le nombre important de femelles avec ponte รฉchantillonnรฉes aux sites 8 et 9 souligne le rรดle de ces sites comme point majeur dโ€™รฉmission larvaire, ce qui est en accord avec la prรฉsence dans la colonne dโ€™eau dโ€™un grand nombre de petites larves (i.e. qui ont une taille proche de la taille ร  lโ€™รฉmission dรฉcrite dans la littรฉrature, 400ฮผm, e.g. Pechenik 1984). A partir des sites localisรฉs en fond de baie, un gradient de taille des larves est observรฉ jusquโ€™aux sites situรฉs plus au large et en grande majoritรฉ vierges de crรฉpidules adultes. Une analyse plus fine de la structure de tailles des larves de ces sites montrent la plus faible proportion des petites classes de taille aux sites du large, voire leur disparition dans certains cas (site 4) (Fig. I.7). A lโ€™inverse, les petites classes de tailles dominent dans les sites situรฉs en fond de baie. Ce gradient semble stable sur lโ€™รฉchelle de temps de notre รฉtude, comme lโ€™illustre lโ€™absence de variation de la position du barycentre des tailles sur les trois dates dโ€™รฉchantillonnage. Ce type de patron de distribution des tailles larvaires a รฉtรฉ observรฉ chez dโ€™autres espรจces en dโ€™autres sites. A titre dโ€™exemple, dans le golfe de Saint-Vincent en Australie, Bryars et Havenhand (2004) ont montrรฉ la dominance des stades I des larves du crabe Portunus pelagicus au-dessus de la population des femelles ovigรจres. De mรชme, dans le golfe du Maine (USA), Annis (2004) a mis en รฉvidence la corrรฉlation positive entre les densitรฉs de stades I รฉchantillonnรฉs et les densitรฉs dโ€™individus reproducteurs chez Homarus americanus, tandis que les post-larves sont rencontrรฉes loin de la zone dโ€™รฉmission. La distribution des adultes conspรฉcifiques sur le fond, et plus encore d’individus reproducteurs, semble donc รชtre un des facteurs expliquant la structuration du nuage larvaire ร  lโ€™รฉchelle dโ€™une baie, aussi bien en termes de concentrations que de structure de taille des larves.

PRELEVEMENTS ET TRI DES ECHANTILLONS DE 2005

Les prรฉlรจvements de lโ€™annรฉe 2005 ont รฉtรฉ effectuรฉs ร  lโ€™aide dโ€™un filet ร  plancton WP2 dโ€™une maille de 63 ฮผm dans le but dโ€™รฉtudier lโ€™รฉvolution de la communautรฉ larvaire de la baie de Morlaix incluant les larves de crรฉpidule. Le choix de cette maille a permis dโ€™รฉchantillonner les premiers stades larvaires de nombreux invertรฉbrรฉs, notamment des bivalves (90-100 ฮผm). Le volume dโ€™eau filtrรฉe ร  travers le filet ร  plancton a รฉtรฉ estimรฉ ร  lโ€™aide dโ€™un dรฉbitmรจtre (voir dรฉtails dans le chapitre I). Quatre traits ont รฉtรฉ effectuรฉs par prรฉlรจvement, seul le premier (fixรฉ ร  lโ€™รฉthanol 80%) a รฉtรฉ triรฉ. Au laboratoire, lโ€™รฉchantillon a รฉtรฉ amenรฉ ร  un volume compris entre 150 et 200 ml. Lโ€™รฉchantillon a รฉtรฉ ensuite homogรฉnรฉisรฉ et une fraction de 2,5 ml dรฉposรฉe dans une cuve de Dolfuss. Trois sous-รฉchantillons au minimum ont รฉtรฉ analysรฉs pour compter un nombre minimum de 100 larves de chaque groupe (Frontier 1972). Compte tenu des faibles abondances de larves de crรฉpidule en baie de Morlaix, celles-ci ont รฉtรฉ comptabilisรฉes dans la totalitรฉ de lโ€™รฉchantillon. Les larves de C. fornicata, de bivalves, de gastรฉropodes (crรฉpidules exclues) et de polychรจtes ont รฉtรฉ triรฉes ร  lโ€™aide dโ€™une loupe binoculaire. Les larves de C. fornicata ont รฉtรฉ identifiรฉes ร  partir des descriptions de Werner (1955), Thiriot-Quiรฉvreux et Scheltema (1982) et Lima et Lutz (1990). Les nombres de larves dans les sous-รฉchantillons analysรฉs ont รฉtรฉ additionnรฉs et ramenรฉs au volume total de lโ€™รฉchantillon. Les rรฉsultats ont รฉtรฉ exprimรฉs en nombre de larves par mรจtre cube (larves m-3). La longueur de la coquille des larves de C. fornicata a รฉgalement รฉtรฉ mesurรฉe ร  lโ€™aide dโ€™une loupe binoculaire munie d’un oculaire micromรฉtrique (x 500).

STRATEGIE Dโ€™ECHANTILLONNAGE POUR LES ANNEES 2006 ET 2007 ET TRI DES ECHANTILLONS

Pour les annรฉes 2006 et 2007, trois prรฉlรจvements supplรฉmentaires ร  lโ€™aide dโ€™un filet WP2 de maille 200 ฮผm ont รฉtรฉ rajoutรฉs au plan dโ€™รฉchantillonnage de 2005. Il est en effet possible que le filet 63 ฮผm sous-รฉchantillonne les larves de C. fornicata (gรฉnรฉralement plus grosses) au profit des larves de bivalves (voir encadrรฉ II.1). Un filet de plus grande maille paraissait donc mieux adaptรฉ aux larves de gastรฉropodes.
Les trois prรฉlรจvements au filet 200 ฮผm rรฉalisรฉs ร  chaque date correspondaient respectivement ร : (1) un รฉchantillon fixรฉ ร  lโ€™alcool (96%) et obtenu avec un trait de filet horizontal ร  une profondeur fixรฉe ร  10 mรจtres pour รฉchantillonner les masses dโ€™eau plus proches du fond; (2) un รฉchantillon fixรฉ au formol 10% et issu dโ€™un trait de filet vertical ; (3) un รฉchantillon fixรฉ ร  lโ€™alcool (96%) et obtenu ร  partir dโ€™un trait de filet vertical. Cโ€™est ce dernier prรฉlรจvement qui a รฉtรฉ triรฉ dans sa totalitรฉ ร  chaque date pour les annรฉes 2006 et 2007: toutes les larves de C. fornicata ont รฉtรฉ comptรฉes et mesurรฉes.

CARACTERISATION DE LA MASSE Dโ€™EAU ET DONNEES METEOROLOGIQUES

En parallรจle du suivi des abondances larvaires, nous avons couplรฉ ร  notre รฉchantillonnage un enregistrement de la tempรฉrature, de la salinitรฉ et de la chlorophylle a dans le but de dรฉcrire lโ€™รฉvolution de lโ€™environnement. Pour lโ€™annรฉe 2005, ces trois paramรจtres ont รฉtรฉ obtenus par le Service dโ€™observation du milieu littoral SOMLIT au point de prรฉlรจvement ยซ Estacade ยป (Fig. II.1). Pour les annรฉes 2006 et 2007, les mesures ont รฉtรฉ effectuรฉes au point dโ€™รฉchantillonnage larvaire. Les valeurs de tempรฉrature et de salinitรฉ ont รฉtรฉ acquises ร  lโ€™aide dโ€™une sonde CTD (SBE19+) et les valeurs de chlorophylle a ont รฉtรฉ obtenues par fluorimรฉtrie (voir dรฉtails du protocole au chapitre I ยงX). Etant donnรฉe la faible, voir lโ€™absence de stratification de la masse dโ€™eau (profils pour les annรฉes 2006 et 2007, annexe II.1A-B), les donnรฉes de tempรฉrature, de salinitรฉ et de concentrations en chlorophylle a ont รฉtรฉ moyennรฉes sur la colonne dโ€™eau. Les donnรฉes mรฉtรฉorologiques (vitesse et direction du vent ร  12H00 tous les jours) en 2005 et 2006 ont รฉtรฉ obtenues auprรจs du sรฉmaphore de Sibiril (MรฉtรฉoFrance), situรฉ ร  8 km environ de Roscoff). En 2007, les donnรฉes ont รฉtรฉ acquises ร  l’aide de la station mรฉtรฉorologique de la Station Biologique de Roscoff.

EVOLUTION TEMPORELLE DE LA STRUCTURE DE TAILLE DU NUAGE LARVAIRE

La mesure systรฉmatique des larves รฉchantillonnรฉes nous a permis dโ€™รฉtudier lโ€™รฉvolution de la structure de taille du nuage larvaire pour les trois annรฉes. En premier lieu, un test de Kruskal-Wallis a รฉtรฉ effectuรฉ par annรฉe entre les รฉchantillons de faรงon ร  dรฉterminer si les tailles moyennes รฉtaient homogรจnes sur lโ€™annรฉe. Dans le cas oรน le test se rรฉvรจle significatif, un test a posteriori de comparaison deux a deux a รฉtรฉ rรฉalisรฉ pour dรฉterminer les รฉchantillons qui se diffรฉrencient. Pour les รฉchantillons possรฉdant plus de 10 larves, des histogrammes de distribution des classes de taille larvaire ont รฉtรฉ rรฉalisรฉs, avec un pas de classe de 40 ฮผm (voir chapitre I ยงI.1.1.2).
Une analyse en coordonnรฉes principales (ACoP) a รฉtรฉ rรฉalisรฉe ร  partir des matrices de distribution des classes de taille par date dโ€™รฉchantillonnage. Le but de l’ACoP est de rechercher les axes principaux qui maximisent la variance dโ€™une matrice de distances mรฉtriques. Cette mรฉthode permet donc de situer les objets dans un espace de dimension rรฉduite, qui prรฉserve autant que possible les relations de distance entre objets. Cette mรฉthode utilise donc une matrice de distances calculรฉes ร  partir des distributions de classes de taille (Legendre et Legendre 1998). Dans la rรฉalisation de lโ€™ACoP, les distances sont par dรฉfaut euclidiennes. Nous avons au prรฉalable procรฉdรฉ ร  une transformation dโ€™Hellinger des donnรฉes avant le calcul des distances (cf. chapitre I).
Le calcul des matrices de distances et lโ€™ACoP ont รฉtรฉ rรฉalisรฉs sous le logiciel R ร  lโ€™aide de la bibliothรจque MASS.

RELATIONS ENTRE LES VARIABLES ENVIRONNEMENTALES ET LES CONCENTRATIONS LARVAIRES

La figure II.9 montre les rรฉsultats des corrรฉlations avec retard analysรฉes entre la concentration larvaire et (1) la tempรฉrature (valeurs des rรฉsidus), (2) la concentration en chlorophylle a et (3) la salinitรฉ. Lโ€™รฉvolution des concentrations larvaires sur les trois annรฉes prรฉsente un dรฉcalage de phase significatif dโ€™environ 60 jours (4 lags) avec la tempรฉrature signifiant que lโ€™apparition des larves et lโ€™augmentation de leur concentration prรฉcรจdent lโ€™augmentation de la tempรฉrature dโ€™environ deux mois. Ce dรฉcalage, toujours significatif, est rรฉduit ร  1 mois (2 lags) avec la concentration en chlorophylle a. Le cycle des valeurs de salinitรฉ prรฉsente un dรฉcalage de phase d’environ trois mois et demi avec celui des concentrations larvaires.
Lโ€™analyse de rรฉgression multiple entre les valeurs de concentration larvaire et les variables environnementales montre un ajustement significatif (Rยฒ=0,35 ; F=12,51; p<10-3) illustrant la forte corrรฉlation entre lโ€™รฉvolution temporelle des concentrations larvaires avec les variables environnementales (valeurs de rรฉsidus de la tempรฉrature, salinitรฉ et concentration en chlorophylle a). Cependant, seules la tempรฉrature (p=0,002) est significativement corrรฉlรฉes ร  la concentration larvaire (pour la chlorophylle a, p=0,0109 et pour la salinitรฉ, p=0,957).

EVOLUTION DE LA STRUCTURE DE TAILLES DU NUAGE LARVAIRE

Les distributions des classes de tailles pour chaque date dont les effectifs sont supรฉrieurs ร  10 larves sont prรฉsentรฉes en figures II.10A, II.10B et II.10C pour les trois annรฉes.
Les tailles moyennes des larves sont significativement diffรฉrentes entre les รฉchantillons du suivi temporel pour chacune des trois annรฉes (tests de Kruskal-Wallis significatif en 2005, 2006 et 2007 ; p<10-3). Les rรฉsultats des tests de comparaisons deux ร  deux sont prรฉsentรฉs en figures II.11A et II.11B, graphique nยฐ2. La distribution des tailles au cours de lโ€™annรฉe 2005 est diffรฉrente entre la pรฉriode de mai ร  dรฉbut juillet pendant laquelle seules des larves de petites tailles sont prรฉsentes et la pรฉriode de fin juillet ร  mi-octobre pendant laquelle co-existent des larves de petites et de grandes tailles (voir histogrammes des distributions des classes de tailles en figure II.10A), ce qui se traduit par une augmentation de la taille moyenne entre ces deux pรฉriodes. En 2006, les deux รฉchantillons du mois de juillet et lโ€™รฉchantillon de fin octobre prรฉsentent des tailles moyennes supรฉrieures au reste de lโ€™annรฉe. En 2007, la structure temporelle est plus complexe. On observe une augmentation des tailles moyennes sur les pรฉriodes dโ€™avril et mi-mai et entre mi-juin et mi-aoรปt atteignant des valeurs maximales le 11/05/07 et le 9/08/07.
Les analyses en coordonnรฉes principales (ACoP), basรฉes sur les distributions des classes de taille, sont prรฉsentรฉes en figures II.11A et II.11B (graphique nยฐ1). Lโ€™ordination des dates sur le plan factoriel pour lโ€™annรฉe 2005 distingue deux groupes de dates consรฉcutives (A et B) selon lโ€™axe 1 (63% de la variance expliquรฉe) : la pรฉriode entre le 31 mai et le 11 juillet (A), pendant laquelle la population larvaire est composรฉe uniquement de petites larves (en rouge) et la pรฉriode du 19 juillet au 6 septembre, oรน la structure de tailles est plus hรฉtรฉrogรจne, avec une dominance des petites larves et la prรฉsence de larves plus grandes (groupe B, dates en bleue). Ceci sโ€™observe clairement sur les histogrammes de distributions des classes pour 2005 (Fig. II.10A). En 2006, lโ€™ordination de lโ€™ACoP des dates fait รฉgalement ressortir deux groupes le long de lโ€™axe 1 (39% de la variance expliquรฉe) composรฉs pour le groupe B de quatre dates consรฉcutives de lโ€™รฉtรฉ (du 4/07/06 au 16/08/06) et des dates du 19/05/06 et du 29/09/06. Le groupe A (principalement des petites larves) comprend les dates restantes du dรฉbut de printemps, du mois de juin et de fin aoรปt/mi-septembre. En 2007, lโ€™ordination prรฉsente une dispersion des dates sur le plan factoriel de lecture moins clair quโ€™en 2005 et 2006. Les dates du 25/05/07 et du 11/05/07 sont situรฉ ร  lโ€™intersection des axes signifiant quโ€™elles ne peuvent pas รชtre rattachรฉes clairement ร  un groupe. Cependant, les dates consรฉcutives du 25/07/07 et du 09/08/07 (en bleu) se remarquent par la prรฉsence de grandes larves tandis que les dates restantes (mois dโ€™avril, mois de juin, mi-juillet et fin aoรปt) sont composรฉes uniquement de petites larves.
Ces deux analyses (Kruskal-Wallis et tests a posteriori et analyse en coordonnรฉes principales) montrent quโ€™il y a une concordance entre leurs rรฉsultats, tous deux, montrant que les dates de dรฉbut de pรฉriode de prรฉsence des larves sont moins riches en grandes classes de tailles que les dates de fin de printemps / รฉtรฉ. Seule lโ€™annรฉe 2007 ne semble pas prรฉsenter une sรฉgrรฉgation aussi claire.

PLACE DES LARVES DE CREPIDULA FORNICATA AU SEIN DE LA COMMUNAUTE LARVAIRE

Lโ€™รฉtude des variations saisonniรจres de la composition de la communautรฉ larvaire a permis de mettre en รฉvidence une longue pรฉriode de prรฉsence des larves des trois groupes taxonomiques รฉtudiรฉs (hors crรฉpidule), de mars ร  novembre. Nous avons observรฉ une forte synchronie de la prรฉsence larvaire de ces trois groupes qui est illustrรฉe par la position du barycentre de chacune des distributions, situรฉ entre les mois de juin et juillet. Les rรฉsultats de lโ€™ACP ont montrรฉ que les concentrations larvaires maximales รฉtaient corrรฉlรฉes avec les fortes tempรฉratures caractรฉristiques de la pรฉriode estivale. Ceci nโ€™est pas surprenant et corrobore de nombreuses observations mettant en รฉvidence la prรฉsence de fortes abondances larvaires durant les mois de fin de printemps et de dรฉbut dโ€™รฉtรฉ (e.g. de Vooys 1999; Chรญcharo et Chรญcharo 2001).
Lโ€™abondance relative des trois groupes est nรฉanmoins variable au cours du temps. Les larves de polychรจtes reprรฉsentent 20% en moyenne des larves รฉchantillonnรฉes (exceptรฉ au mois de mai avec plus 70% de lโ€™รฉchantillon). Prรฉsentes tout au long de la pรฉriode de prรฉlรจvement, les larves de bivalves atteignent des abondances importantes ร  la fin du mois de juillet (16000 larves par m3), dominant les รฉchantillons du 19 juillet et de dรฉbut aoรปt (55 et 70% respectivement). Les larves de gastรฉropodes, quant ร  elles, dominent les รฉchantillons ร  partir de fin aoรปt jusquโ€™au dernier prรฉlรจvement (21 dรฉcembre 2005). La distribution dans le temps des concentrations larvaires de C. fornicata concorde avec celle observรฉe pour les trois autres groupes. Le barycentre de la distribution est situรฉ au mois de juillet et les larves sont prรฉsentes durant une pรฉriode un peu plus courte, dโ€™avril ร  octobre.
Ces rรฉsultats montrent donc une synchronie entre les quatre groupes analysรฉs. Au vu des variations saisonniรจres des paramรจtres environnementaux mesurรฉes, il apparait que le barycentre de chacun de ces groupes se situe un mois aprรจs celui de la concentration en chlorophylle a situรฉ en mai pour lโ€™annรฉe 2005. Ces quatre groupes รฉtant prรฉsent hors des pรฉriodes de blooms phytoplanctoniques, une compรฉtition pour la nourriture pourrait sโ€™installer entre espรจces ร  larves planctotrophes (incluses dans chacun des groupes) et les larves de C. fornicata. Une rรฉcente รฉtude rรฉalisรฉe en laboratoire a dรฉmontrรฉ que contrairement aux larves dโ€™huitres (Crassostrea gigas) les larves de crรฉpidules pouvaient consommer toutes les cellules phytoplanctoniques quelles que soient leur tailles, et ceci, ร  des taux de filtrations plus รฉlevรฉes (Blanchard et al. 2008). Prenant ร  titre dโ€™exemple la coexistence entre les larves dโ€™huitres et les larves de crรฉpidules en baie du Mont Saint-Michel, ces auteurs ont suggรฉrรฉ que les larves de crรฉpidules pourraient abaisser notablement la concentration de phytoplancton entrainant alors une compรฉtition trophique avec les larves dโ€™huitres. En baie de Morlaix, la concordance de la prรฉsence des larves de crรฉpidules avec celles des trois autres groupes pourrait รฉgalement avoir un impact nรฉgatif sur la nutrition des larves des espรจces natives. Lโ€™impact rรฉel est cependant ร  relativiser compte tenu des faibles concentrations larvaires de C. fornicata en baie de Morlaix. En effet, au sein des รฉchantillons analysรฉs, les larves de crรฉpidule reprรฉsentent moins dโ€™1% des larves de gastรฉropodes, ce qui faible comparรฉ aux rรฉsultats obtenus par Lasbleiz (2003) en baie du Mont Saint-Michel oรน, ร  certaines pรฉriode de lโ€™annรฉe, les larves de crรฉpidules pouvaient reprรฉsenter plus de 60% des larves รฉchantillonnรฉes (dans cette รฉtude, les larves รฉchantillonnรฉes sont : les larves de bivalve, de gastรฉropode (hors crรฉpidules) de crรฉpidule).

DES LARVES PRESENTES DURANT UNE LONGUE PERIODE

Au cours des trois annรฉes de suivi rรฉalisรฉ durant cette thรจse, un des rรฉsultats majeurs est lโ€™observation dโ€™une longue pรฉriode de prรฉsence de larves de Crepidula fornicata, pรฉriode allant de six mois en 2005 et 2006 ร  huit mois en 2007. Des durรฉes de prรฉsence de larves du mรชme ordre ont รฉtรฉ observรฉes dans dโ€™autres sites colonisรฉs par cette espรจce, par exemple en baie du Mont Saint-Michel oรน Lasbleiz (2003) rapporte leur prรฉsence de fin mars ร  dรฉbut octobre 2002. Toujours en baie du Mont Saint-Michel dans le secteur de Granville, Quiniou et Blanchard (1987) ont observรฉ des larves de fin fรฉvrier ร  mi-novembre pour les annรฉes 1984 et 1985. Enfin, en rade de Brest, Coum (1979) les observe de dรฉbut avril ร  la mi-octobre en 1977. Au sein de notre site dโ€™รฉtude, la pรฉriode de prรฉsence des larves de C. fornicata est similaire ร  celle de la prรฉsence de femelles prรฉsentant des embryons incubรฉs dans la cavitรฉ pallรฉale. Les donnรฉes de la figure II.12, obtenues par Sabrina Le Cam au cours de sa thรจse, montrent en effet une pรฉriode de reproduction trรจs รฉtendue, allant de la mi-janvier ร  la mi-octobre avec un maximum (plus de 80% de femelles avec des pontes) atteint en mai 2005, juin 2006 et juin 2007. Cette durรฉe de la pรฉriode de reproduction est identique ร  celle enregistrรฉe dans dโ€™autres populations des cรดtes franรงaises (Tableau II.2). Cependant, en Angleterre (estuaire de la riviรจre Blackwater, Essex; Chipperfield 1951) et au nord de lโ€™Allemagne (Sylt en Mer de Wadden; Thieltges et al. 2004), la pรฉriode de reproduction semble rรฉduite ร  la fin du printemps et ร  l’รฉtรฉ. Dans ces sites, les hivers trรจs froids (ex. formation de glace sur lโ€™estran ร  Sylt) induisent un fort taux de mortalitรฉ chez les adultes de Crepidula fornicata (Thieltges et al. 2004) et pourraient รชtre responsables du raccourcissement de la pรฉriode de reproduction. Cette rรฉduction a pour consรฉquence une pรฉriode de prรฉsence des larves plus courte, lโ€™รฉmission des premiรจres larves dรฉbutant deux ร  trois mois plus tard que dans les sites franรงais caractรฉrisรฉs par un climat tempรฉrรฉ (notre รฉtude ; Coum 1979; Quiniou et Blanchard 1987; Lasbleiz 2003). Ces observations sont en accord avec celles d’une rรฉduction des pรฉriodes de reproduction (limitรฉes ร  l’รฉtรฉ) de nombreux invertรฉbrรฉs marins vivant sous un climat borรฉal ou arctique (e.g. Giese et Pearse 1974 ; Pearse et al. 1991). Il serait intรฉressant de pouvoir comparer cette variabilitรฉ des pรฉriodes de reproduction et de prรฉsence de larves dรฉcrite au sein de lโ€™aire introduite avec des observations rรฉalisรฉes au sein de lโ€™aire dโ€™origine. En effet, chez certaines espรจces invasives, des changements de phรฉnologie ont รฉtรฉ observรฉs entre populations de lโ€™aire native et populations de lโ€™aire introduite (Yan et al. 2001) rรฉsultant par exemple dโ€™une acclimatation ou dโ€™une adaptation au nouvel environnement colonisรฉ. Les donnรฉes dans lโ€™aire dโ€™origine sont cependant trรจs rares et ponctuelles : les quelques donnรฉes existantes (tableau II.2) indiquent que des femelles en pontes ont รฉtรฉ รฉchantillonnรฉes de fin avril ร  lโ€™รฉtรฉ, concordant en partie avec les observations rapportรฉes dans lโ€™aire introduite. Cependant, aucun suivi annuel de la reproduction et de la prรฉsence de larves nโ€™est disponible dans lโ€™aire dโ€™origine. Lโ€™allongement de la pรฉriode de reproduction chez Crepidula fornicata amรจne ses larves ร  se dรฉvelopper dans un environnement changeant rythmรฉ par les saisons. Lโ€™รฉvolution annuelle de la tempรฉrature, de la salinitรฉ et des concentrations en chlorophylle a a montrรฉ une forte saisonnalitรฉ (analyse dโ€™autocorrรฉlation, Fig. II.7). Lโ€™amplitude thermique peut ainsi dรฉpasser 10ยฐC entre les mois dโ€™hiver et la fin de lโ€™รฉtรฉ (ex : annรฉe 2006). Lโ€™analyse de rรฉgression multiple a en outre permis de montrer que la concentration larvaire et la tempรฉrature รฉtaient fortement corrรฉlรฉes (p=0,002). Cette corrรฉlation est frรฉquemment retrouvรฉe chez un grand nombre dโ€™invertรฉbrรฉs marins. En effet, la reproduction chez un grand nombre dโ€™entre eux est soumise ร  lโ€™influence des variations thermiques du milieu (Orton 1920 ; Giese et Pearse 1974) pouvant contraindre les espรจces ร  รฉmettre leur gamรจtes ou leurs larves ร  partir de tempรฉratures seuils. Dans le milieu, pour les trois annรฉes รฉtudiรฉes, les larves sont apparues quand la tempรฉrature รฉtait dโ€™environ 10ยฐC prรฉcรฉdant ainsi de plusieurs semaines lโ€™augmentation printaniรจre des tempรฉratures (corrรฉlation avec retard, Fig. II.8). Lโ€™apparition de larves ร  ces faibles tempรฉratures est une observation dรฉjร  rapportรฉe dans dโ€™autres sites europรฉens tels quโ€™en baie du Mont Saint-Michel (Lasbleiz 2003) ou dans lโ€™estuaire de la riviรจre Blackwater (Essex, RU ; Chipperfield 1951). Notons cependant quโ€™aucune donnรฉe expรฉrimentale ne permet de conclure ร  un dรฉterminisme de la premiรจre รฉmission larvaire en fonction dโ€™une tempรฉrature seuil chez Crepidula fornicata. Le dรฉterminisme de la reproduction et de lโ€™รฉmission larvaire, bien quโ€™il puisse รชtre fortement contraint par la tempรฉrature est en effet rรฉgi par lโ€™interaction de facteurs aussi bien endogรจnes quโ€™exogรจnes (e.g. Giese 1959, Morgan 1995b) rendant dรฉlicate lโ€™identification des causes dรฉclenchant la reproduction et la ponte chez C. fornicata sans expรฉrimentation dรฉdiรฉe ร  cette question.
De mรชme que la tempรฉrature, les valeurs de concentration en chlorophylle a varient fortement, atteignant leur maximum en fin de printemps et en รฉtรฉ, corroborant ainsi des observations antรฉrieures en baie de Morlaix (Paulmier 1969 ; Colobert-Le Floch 2001). La concentration en chlorophylle a et la concentration larvaire co-varient bien que les larves apparaissent en moyenne un mois plus tรดt que lโ€™augmentation printaniรจre des concentrations en chlorophylle a. Il nโ€™y a donc pas de synchronie marquรฉe entre lโ€™apparition du bloom phytoplanctonique, source principale de nourriture pour les larves planctotrophes, et lโ€™augmentation des concentrations larvaires. Dans notre site, les larves de crรฉpidules sont prรฉsentes durant le pic de production primaire mais รฉgalement durant les pรฉriodes de non-bloom.
A lโ€™inverse de la tempรฉrature et de la concentration en chlorophylle a, la salinitรฉ varie trรจs peu et ne prรฉsente pas de corrรฉlation avec les concentrations larvaires malgrรฉ la prรฉsence dโ€™un cycle saisonnier. Ceci sโ€™explique par lโ€™importante influence des eaux marines au sein de la baie de Morlaix (Colobert-Le Floch 2001) qui limite les fluctuations. Le cycle saisonnier observรฉ illustre nรฉanmoins lโ€™apport dโ€™eaux douces durant les pรฉriodes hivernales provoquant les faibles dessalures observรฉes en 2006 et 2007.

DYNAMIQUE TEMPORELLE DES CONCENTRATIONS ET DE LA STRUCTURE DE TAILLE DU POOL LARVAIRE

Le premier rรฉsultat ressortant du suivi larvaire rรฉalisรฉ en baie de Morlaix รฉtait la longue pรฉriode de prรฉsence des larves de Crepidula fornicata dans le milieu. Le second rรฉsultat majeur est que les valeurs de concentrations sont faibles, un rรฉsultat corroborant les observations ponctuelles faites au cours de lโ€™analyse spatiale (cf. chapitre I). Les concentrations larvaires, ne dรฉpassent en effet que trรจs rarement 20 larves par m3 (concentration maximale en 2005 : 26 larves par m3 ; en 2006, 22 larves par m3 et en 2007, 83 larves par m3). Ainsi, comme nous lโ€™avons discutรฉ au chapitre I, ces valeurs sont trรจs infรฉrieures ร  celles rapportรฉes couramment dans la littรฉrature dans dโ€™autres sites (ex. 2000 larves par m3 dans le secteur de Cancale ; Lasbleiz 2003). Nous avions proposรฉ dans le chapitre I que ces diffรฉrences remarquables pouvaient รชtre expliquรฉes par une faible densitรฉ en adultes en baie de Morlaix (20 ind.mยฒ ; voir discussion chapitre I).
Une autre diffรฉrence par rapport aux donnรฉes de la littรฉrature est lโ€™absence de pics majeurs de prรฉsence de larves dans la baie de Morlaix, ร  lโ€™exception du prรฉlรจvement du 11 mai 2007, oรน plus de 80 larves par m3 ont รฉtรฉ enregistrรฉes. Les concentrations larvaires fluctuent de maniรจre alรฉatoire au cours de la pรฉriode de prรฉsence exceptรฉ pour 2005 (p=0,015). Ces rรฉsultats sont diffรฉrents de ceux observรฉs dans le secteur de Cancale (Lasbleiz 2003) et en Rade de Brest (Coum 1979) oรน deux pics principaux se dรฉtachent : un en juin et un plus tardif en septembre. Deux pรฉriodes de fortes abondances sont รฉgalement notรฉes par Polk (1962) dans le Bassin dโ€™Ostende : une en mai-juin et une beaucoup plus faible en septembre.
Si les concentrations larvaires semblent relativement variables au cours du temps, en revanche, nos rรฉsultats ont mis en รฉvidence lโ€™existence de patrons saisonniers en termes de structure de tailles, au moins pour les annรฉes 2005 et 2006. Pour ces deux annรฉes, les quatre prรฉlรจvements estivaux sont en effet plus riches en grandes larves que ne le sont les prรฉlรจvements printaniers. En 2007, la structure temporelle est moins tranchรฉe; seuls les deux รฉchantillons de fin aoรปt / dรฉbut septembre semblent prรฉsenter une composition plus riche en grandes larves. Notons par ailleurs que les distributions des tailles surprennent par lโ€™absence de certaines classes de tailles (entre 740 et 900 ฮผm environ). Les diffรฉrentes hypothรจses รฉmises au chapitre I pour expliquer leur absence peuvent รชtre ร  nouveau รฉvoquรฉes dans ce cas : une forte mortalitรฉ, la possibilitรฉ dโ€™une migration ontogรฉnique, la rapiditรฉ des processus de sรฉdentarisation et la mรฉtamorphose ร  des tailles plus petites que celles dรฉcrites dans la littรฉrature.
La saisonnalitรฉ de la composition en classes de tailles du nuage larvaire peut rรฉsulter de diffรฉrents facteurs. Premiรจrement, lโ€™absence de grandes larves en dรฉbut de saison pourrait sโ€™expliquer par un dรฉveloppement larvaire ralenti par les faibles tempรฉratures rencontrรฉes (cf. chapitre III) et des concentrations en phytoplancton limitantes. La faible croissance des larves pourrait ainsi avoir pour consรฉquence de maintenir au sein des รฉchantillons une taille proche de la taille ร  lโ€™รฉmission (400 ฮผm, e.g. Pechenik et Lima 1984) durant les mois les plus froids. De plus, le stress induit par les basses tempรฉratures, le manque de nourriture ainsi quโ€™une exposition prolongรฉe ร  la prรฉdation pรฉlagique (Beaumont et Budd 1982; Young et Chia 1987; Rumrill 1990) pourraient accroรฎtre la mortalitรฉ larvaire et ainsi diminuer la probabilitรฉ dโ€™รฉchantillonner de grandes larves. A lโ€™inverse, la pรฉriode estivale permettrait un dรฉveloppement larvaire plus rapide (croissance accรฉlรฉrรฉe ร  haute tempรฉrature, Pechenik 1984 et chapitre III; apparition du bloom phytoplanctonique favorisant la croissance, Olson et Olson 1989) susceptible de rรฉduire lโ€™impact de la mortalitรฉ larvaire due aux basses tempรฉratures et ร  la prรฉdation du fait dโ€™un temps plus court passรฉ par les larves dans la colonne dโ€™eau. Ce dernier point peut cependant รชtre discutรฉ puisque certains auteurs suggรจrent que la pรฉriode estivale, succรฉdant au bloom phytoplanctonique serait รฉgalement la plus propice ร  la prรฉdation du fait de la mise en place de la chaine trophique pรฉlagique (e.g. Moloney et al. 1994).
Dโ€™aprรจs les rรฉsultats de lโ€™รฉtude de la distribution spatiale des larves dans la baie de Morlaix prรฉsentรฉe au chapitre I, les structures de tailles et les concentrations observรฉes au sein des รฉchantillons pourrait รฉgalement rรฉsulter de lโ€™influence de lโ€™hydrodynamisme trรจs actif de la baie de Morlaix. Au cours de lโ€™รฉtude spatiale nous avons mis en รฉvidence lโ€™importance du transport tidal sur la possibilitรฉ dโ€™exportation des larves en dehors de la baie. Bien que fortement contraint par le rรฉgime de marรฉe, lโ€™hydrodynamisme en baie de Morlaix, comme la majoritรฉ des baies de la Manche occidentale, est รฉgalement rรฉgi par la vitesse et la direction des vents (e.g. Ellien 2001; Barnay et al. 2003). Bien que nous ayons nรฉgligรฉ leur impact dans notre modรจle analytique (cf. chapitre I ยงI.1.3) du fait de leur faible puissance durant lโ€™รฉchantillonnage spatial de l’รฉtรฉ 2006, la direction des vents et leur intensitรฉ pourraient moduler le dรฉplacement des masses dโ€™eau ร  dโ€™autres pรฉriodes de lโ€™annรฉe. Plusieurs รฉtudes rรฉalisรฉes ร  lโ€™aide d’un modรจle biophysique englobant plusieurs sites de la Manche occidentale ont montrรฉ lโ€™importance de la direction des vents sur les taux de retentions de plusieurs baies le long des cรดtes franรงaises (e.g. Ellien 2001; Barnay et al. 2003; Lefebvre et al. 2003). Ainsi aBarnay et al. (2003), considรฉrant un point d’รฉmission de larves fixรฉ en sortie de la baie de Morlaix, ont montrรฉ que le nombre de recrues originaires de la baie chez le polychรจte tubicole Owenia fusiformis pouvait varier de 2,5 ind m-ยฒ avec des vents de sud-ouest (6 m s-1) ร  9,9 ind m-ยฒ avec des vents de nord-est (6 m s-1). Les figures prรฉsentรฉes en annexe II.3A, II.3B et II.3C montrent que les vents de nord ont tendance ร  รชtre dominant durant le printemps et les mois dโ€™รฉtรฉ sur les trois annรฉes de suivi. Cette dominance pourrait par consรฉquent limiter lโ€™รฉchappement des larves de la baie et ainsi permettre le maintient d’une structure de tailles du nuage larvaire plus hรฉtรฉrogรจne.

LA DYNAMIQUE DU RECRUTEMENT EN BAIE DE MORLAIX EST-ELLE LE REFLET DE LA DYNAMIQUE DU POOL LARVAIRE?

Chez les invertรฉbrรฉs marins, la synchronie entre lโ€™apparition de larves รขgรฉes dans le milieu et lโ€™apparition de nouveaux individus dans la population benthique reste encore peu documentรฉe, รฉtant pour lโ€™essentiel dรฉmontrรฉe par l’adรฉquation entre la prรฉsence dans la colonne d’eau de fortes abondances larvaires et dโ€™intenses รฉvรฉnements de recrutement. A titre dโ€™exemple, cela a รฉtรฉ dรฉcrit chez les moules Mytilus edulis et M. galloprovincialis et la palourde Ruditapes decussatus, pour lesquelles le pic dโ€™abondance larvaire est atteint entre 15 et 30 jours avant lโ€™arrivรฉe des recrues (de Vooys 1999; Chicharo et Chicharo 2000; Chรญcharo et Chรญcharo 2001) et pour certains invertรฉbrรฉs en Mer de Wadden (e.g. Strasser et Gรผnther 2001). Nรฉanmoins, dans une รฉtude sur les variations spatiales et temporelles de lโ€™abondance des larves du bivalve Spisula solidissima dans le New Jersey (USA), Ma (2005) a mis en รฉvidence lโ€™adรฉquation entre lโ€™arrivรฉe des larves compรฉtentes dans le milieu et lโ€™apparition dโ€™un recrutement significatif dans la population benthique. Dans le cas de C. fornicata en baie de Morlaix, cโ€™est รฉgalement de faรงon indirecte que nous pouvons essayer dโ€™analyser la synchronie entre la dynamique du nuage larvaire et la dynamique de recrutement. Dans le cadre du suivi de la dynamique de la population benthique rรฉalisรฉ par Sabrina Le Cam au cours de sa thรจse, des donnรฉes sont disponibles sur la dynamique du recrutement au sein de la population (Fig. II.12) situรฉe au point de notre รฉchantillonnage larvaire temporel (site 8 de lโ€™รฉtude spatiale, figure II.1). La saisonnalitรฉ de la composition en classes de tailles des larves de C. fornicata en baie de Morlaix est en adรฉquation avec les donnรฉes dโ€™apparition de nouveaux individus dans la population benthique (i.e. individus de taille infรฉrieure ร  3 mm et immatures sexuellement que nous appellerons ยซ recrues ยป dans la suite de ce texte). En 2005, les รฉchantillons prรฉsentant de grandes classes de tailles sont ceux du 19 juillet au 6 septembre.
Or les donnรฉes de suivi de la population benthique montrent quโ€™au cours de lโ€™annรฉe 2005, lโ€™arrivรฉe des recrues dรฉbute en juillet puis sโ€™intensifie de maniรจre significative en septembre. En 2006, les รฉchantillons composรฉs de grandes classes de tailles se distribuent du 4 juillet au 30 aout alors que lโ€™arrivรฉe des recrues dรฉbute en aoรปt. Enfin en 2007, le recrutement semble plus important que pour les annรฉes 2005 et 2006 et dรฉbute en juin, soit encore un mois aprรจs lโ€™observation dโ€™un pic dโ€™abondance larvaire (11 mai), le recrutement sโ€™intensifiant ensuite en juillet. Il semble donc bien que dans notre site dโ€™รฉtude la composition du nuage larvaire reflรจte avec une anticipation dโ€™environ un mois les รฉvรจnements majeurs de recrutement observรฉs dans la population benthique. Il semble donc quโ€™en ce site, il y ait un couplage efficace entre phase benthique et pรฉlagique malgrรฉ les exports possibles de larves tels que suggรฉrรฉs sur la base des faibles concentrations larvaires mesurรฉes ainsi que des patrons spatiaux de distribution larvaire observรฉs (cf. chapitre I).

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Table des matiรจres

INTRODUCTION Gร‰Nร‰RALE
1. PLACE DE LA PHASE LARVAIRE DANS LES ETUDES DE DYNAMIQUE DES POPULATIONS MARINES
2. RELATION ENTRE LA DUREE DU DEVELOPPEMENT LARVAIRE ET LE POTENTIEL DISPERSIF
3. LES FACTEURS RESPONSABLES DES VARIATIONS INTRA-SPECIFIQUES DE LA DUREE DE VIE PELAGIQUE LARVAIRE
3.1. ACTION DES FACTEURS CARACTERISANT Lโ€™HABITAT PELAGIQUE SUR LE DEVELOPPEMENT LARVAIRE
3.2. ACTION DES FACTEURS CARACTERISANT Lโ€™HABITAT BENTHIQUE SUR LA LARVE COMPETENTE
3.3. CONSEQUENCES DES VARIATIONS INTRASPECIFIQUES DE LA DUREE DE VIE PELAGIQUE SUR LA DYNAMIQUE DU POOL LARVAIRE ET DU RECRUTEMENT
4. ROLE DE LA PHASE LARVAIRE DANS LES INVASIONS BIOLOGIQUES
5. PRESENTATION DU MODELE Dโ€™ETUDE ET DES QUESTIONS ETUDIEES DANS CE TRAVAIL DE THESE
5.1. MODELE BIOLOGIQUE : CREPIDULA FORNICATA
5.1.1. CREPIDULA FORNICATA : UNE ESPECE A CYCLE BENTHO-PELAGIQUE INTRODUITE EN EUROPE
5.1.2. LA PHASE LARVAIRE DE CREPIDULA FORNICATA : DES CONNAISSANCES ESSENTIELLEMENT ACQUISES DANS SON AIRE DE DISTRIBUTION NATURELLE
5.2. SITE Dโ€™ETUDE : LA BAIE DE MORLAIX, EXEMPLE Dโ€™UNE BAIE MEGATIDALE RECEMMENT COLONISEE
5.2.1. DESCRIPTION DU SITE
5.2.2. CREPIDULA FORNICATA EN BAIE DE MORLAIX
5.3. ARTICULATION DU TRAVAIL DE THESE
CHAPITRE I : DISTRIBUTION ET CARACTERISTIQUES DES LARVES DE CREPIDULA FORNICATA AU SEIN Dโ€™UNE BAIE MEGATIDALE
I.1. MATERIELS ET METHODES
I.1.1. SITES Dโ€™ETUDE ET ECHANTILLONNAGE
I.1.1.1. ECHANTILLONNAGE LARVAIRE
I.1.1.2. ECHANTILLONNAGE DES POPULATIONS ADULTES
I.1.1.3. ENREGISTREMENT DES PARAMETRES ENVIRONNEMENTAUX
I.1.2. ANALYSE DES DONNEES
I.1.2.1. ANALYSE DE LA DISTRIBUTION SPATIALE DES CONCENTRATIONS LARVAIRES
I.1.2.2. ANALYSES DES STRUCTURES DE TAILLE DES POPULATIONS BENTHIQUES ET LARVAIRES
I.1.2.3. ANALYSES DE LA DISTRIBUTION SPATIALE DES TAILLES DES LARVES
I.1.3. ETUDE DE L’EFFET DE LA MAREE SUR LA DISTRIBUTION DES LARVES AU SEIN DE LA BAIE : APPROCHE ANALYTIQUE
I.2. RESULTATS :
I.2.1. DISTRIBUTION SPATIALE DES CONCENTRATIONS LARVAIRES
I.2.2. DISTRIBUTION ET STRUCTURE DE TAILLE DES ADULTES
I.2.3. RELATIONS ENTRE LES CONCENTRATIONS LARVAIRES, LA PRESENCE DES ADULTES ET LES PARAMETRES ENVIRONNEMENTAUX MESURES
I.2.4. DISTRIBUTION SPATIALE DES TAILLES DES LARVES
I.2.5. INFLUENCE DE LA MAREE SUR LE TRANSPORT LARVAIRE :
I.3. DISCUSSION
I.3.1. CARACTERISATION DES SITES ETUDIES :
I.3.2. LA STRUCTURE SPATIALE DU NUAGE LARVAIRE REFLETE LA DISTRIBUTION DES ADULTES EN BAIE DE MORLAIX
I.3.3. LES PROCESSUS HYDRODYNAMIQUES AU SEIN DE LA BAIE DE MORLAIX POURRAIENT-ILS LIMITER LA PROLIFERATION DE CREPIDULA FORNICATA ?
I.4. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
CHAPITRE II : DYNAMIQUE TEMPORELLE DU NUAGE LARVAIRE DE CREPIDULA FORNICATA EN BAIE DE MORLAIX
II.1. MATERIELS ET METHODES
II.1.1. ACQUISITION DES DONNEES
II.1.1.1. PRELEVEMENTS ET TRI DES ECHANTILLONS DE 2005
II.1.1.2. STRATEGIE Dโ€™ECHANTILLONNAGE POUR LES ANNEES 2006 ET 2007 ET TRI DES ECHANTILLONS
II.1.1.3. CARACTERISATION DE LA MASSE Dโ€™EAU ET DONNEES METEOROLOGIQUES
II.1.2. ANALYSE DES DONNEES
II.1.2.1. ANALYSE DE LA COMMUNAUTE LARVAIRE (ANNEE 2005)
II.1.2.2. VARIABILITE TEMPORELLE DES CONCENTRATIONS ET PARAMETRES ENVIRONEMENTAUX : TRAITEMENT DES SERIES TEMPORELLES
II.1.2.3. EVOLUTION TEMPORELLE DE LA STRUCTURE DE TAILLE DU NUAGE LARVAIRE59
II.1.2.4. CORRELATION ENTRE LES CONCENTRATIONS ET LES VARIABLES ENVIRONNEMENTALES
II.2. RESULTATS
II.2.1. LES LARVES DE CREPIDULA FORNICATA DANS LA COMMUNAUTE MEROPLANCTONIQUE EN 2005
II.2.2. DISTRIBUTION TEMPORELLE DES CONCENTRATIONS LARVAIRES DE C. FORNICATA ET DES VARIABLES ENVIRONNEMENTALES
II.2.3. RELATIONS ENTRE LES VARIABLES ENVIRONNEMENTALES ET LES CONCENTRATIONS LARVAIRES
II.2.4. EVOLUTION DE LA STRUCTURE DE TAILLES DU NUAGE LARVAIRE
II.3. DISCUSSION
II.3.1. PLACE DES LARVES DE CREPIDULA FORNICATA AU SEIN DE LA COMMUNAUTE LARVAIRE
II.3.2. DES LARVES PRESENTES DURANT UNE LONGUE PERIODE
II.3.3. DYNAMIQUE TEMPORELLE DES CONCENTRATIONS ET DE LA STRUCTURE DE TAILLE DU POOL LARVAIRE
II.3.4. LA DYNAMIQUE DU RECRUTEMENT EN BAIE DE MORLAIX EST-ELLE LE REFLET DE LA DYNAMIQUE DU POOL LARVAIRE?
II.4. CONCLUSIONS & PERSPECTIVES
CHAPITRE III : INFLUENCE DE LA TEMPERATURE SUR LE DEVELOPPEMENT LARVAIRE DE CREPIDULA FORNICATA
III.1. TEMPERATURES DU MILIEU ET DEVELOPPEMENT LARVAIRE DE CREPIDULA FORNICATA
III.1.1. MATERIELS ET METHODES
III.1.1.1. MISE EN PLACE DE Lโ€™EXPERIMENTATION (EXPERIENCE 1)
III.1.1.2. CROISSANCE ET MORTALITE
III.1.1.3. JOUR Dโ€™ACQUISITION DE LA COMPETENCE
III.1.1.4. METAMORPHOSE SPONTANEE
III.1.1.5. ANALYSES STATISTIQUES
III.1.2. RESULTATS
III.1.2.1. EFFET DE LA TEMPERATURE SUR LE TAUX DE CROISSANCE ET LA MORTALITE.
III.1.2.2. EFFET DE LA TEMPERATURE SUR Lโ€™ACQUISITION DE LA COMPETENCE
III.1.2.3. EFFET DE LA TEMPERATURE SUR LE CARACTERE ยซ COQUILLE EVASEE ยป
III.1.2.4. EFFET DE LA TEMPERATURE SUR LA METAMORPHOSE SPONTANEE
III.1.2.5. EFFET DE LA TEMPERATURE SUR LE DELAI A LA METAMORPHOSE
III.1.3. DISCUSSION
III.1.3.1. EXISTE-T’IL UNE TEMPERATURE LIMITE INFERIEURE POUR LE DEVELOPPEMENT LARVAIRE DE CREPIDULA FORNICATA ?
III.1.3.2. INFLUENCE DE LA TEMPERATURE SUR LES PERIODES PRE-COMPETENTE ET POST-COMPETENTE
III.2. EFFET DES CHANGEMENTS DE TEMPERATURES SUR LE DEVELOPPEMENT LARVAIRE DE CREPIDULA FORNICATA
III.2.1. MATERIELS ET METHODES
III.2.1.1. EXPERIENCE A : EFFET DE CHANGEMENTS PROGRESSIFS DE TEMPERATURE SUR LE DEVELOPPEMENT LARVAIRE
III.2.1.2. EXPERIENCE B : EFFET DE CHANGEMENTS INSTANTANES DE TEMPERATURE SUR LE DEVELOPPEMENT LARVAIRE
III.2.1.3. ANALYSE DES DONNEES
III.2.2. RESULTATS
III.2.2.1. EXPERIENCE A
III.2.2.2. EXPERIENCE B
III.2.3. DISCUSSION
III.3. ANALYSE DE LA COMPOSITION GENETIQUE DES LARVES METAMORPHOSEES : EFFETS DE LA DERIVE GENETIQUE ET DE Lโ€™IDENTITE PATERNELLE
III.3.1. OBTENTION ET ANALYSE DES DONNEES GENETIQUES
III.3.1.1. ECHANTILLONS ET ANALYSES MOLECULAIRES
III.3.1.2. MIGRATION SUR GEL DENATURANT Dโ€™ACRYLAMIDE
III.3.1.3. ANALYSES STATISTIQUES
III.3.2. RESULTATS
III.3.2.1. DIVERSITE GENETIQUE
III.3.2.2. ANALYSES Dโ€™ISOLEMENT PAR LA DISTANCE
III.3.2.3. ANALYSES DE PATERNITE
III.3.3. DISCUSSION
III.4. RESUME DES PRINCIPAUX RESULTATS ET CONCLUSIONS
CHAPITRE IV : VARIABILITE DE LA DUREE DE VIE PELAGIQUE CHEZCREPIDULA FORNICATA: INFLUENCE DE LA TEMPERATURE ET IMPLICATIONS SUR LE POTENTIEL DE DISPERSION
IV.1. METHODE Dโ€™ESTIMATION DES DUREES DE VIE LARVAIRE
IV.1.1. RELATION ENTRE LA PLD ET LA TEMPERATURE
IV.1.2. CALCUL DES PLD THEORIQUES EN BAIE DE MORLAIX
IV.1.3. COMPARAISON DES PLD DANS DIFFERENTS SITES EUROPEENS
IV.1.3.1. DONNEES SOURCES
IV.1.3.2. COMPARAISON DES PLD THEORIQUES OBTENUES
IV.2. RESULTATS
IV.2.1. VARIATION DES PLD EN BAIE DE MORLAIX
IV.2.2. VARIATIONS DES PLD EN EUROPE
IV.3. DISCUSSION
IV.3.1. VARIABILITE DES DUREES DE VIE LARVAIRE DE CREPIDULA FORNICATA EN BAIE DE MORLAIX
IV.3.2. ROLE DES VARIATIONS DE PLD SUR LE POTENTIEL DISPERSIF DE CREPIDULA FORNICATA EN EUROPE
IV.4. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
CONCLUSIONS & PERSPECTIVES
V.1. SYNTHESE DES RESULTATS
V.2. POSSEDER UNE PHASE LARVAIRE : CONDITION NECESSAIRE ET SUFFISANTE AU SUCCES DE Lโ€™INVASION ?
V.3. CRITIQUES ET PERSPECTIVES DE TRAVAIL
V.3.1. LIMITE DE LA RELATION PLD VS DISTANCE DE DISPERSION
V.3.2. AUTORECRUTEMENT VS ALLORECRUTEMENT
V.3.3. LIMITES DE Lโ€™APPROCHE EXPERIMENTALE MONO-FACTORIELLE
Rร‰Fร‰RENCES

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