Éducation cognitive : définition et méthodes
L’éducation cognitive désigne un ensemble de démarches et méthodes spécifiques qui ont pour objectif d’optimaliser le fonctionnement général de la pensée, d’augmenter le potentiel d’apprentissage et de favoriser l’adaptation à des situations nouvelles. Ainsi, pour Loarer (1998), on parle d’éducation cognitive lorsqu’un enseignant cherche explicitement, par la mise en place d’une démarche d’apprentissage spécifique, à rendre plus efficace, le fonctionnement intellectuel de l’apprenant. L’éducation cognitive est un courant pédagogique qui postule que l’intelligence est éducable. On parle ainsi du principe d’éducabilité cognitive. Dans cette approche, l’intelligence est perçue comme le produit d’une construction sociale. Autrement dit, on considère que l’intelligence n’est pas innée, mais qu’elle se développe au travers des expériences et des interactions sociales d’un individu. Pour l’apprenant, dans cette perspective, il ne s’agit pas uniquement d’apprendre, mais plutôt d’apprendre à apprendre.
Pour l’enseignant, comme le souligne Büchel (1995), il ne s’agit pas simplement d’enseigner des contenus et connaissances propres à une discipline, mais surtout d’aider l’apprenant à développer et à s’approprier des processus d’apprentissage et de pensée. Ainsi, l’éducation cognitive « se propose d’abord de façonner et développer l’intelligence, pour qu’ensuite soient facilités les apprentissages des différentes disciplines » (Loarer, 1998, p. 122). Il existe aujourd’hui une pléthore de méthodes d’éducation cognitive. Leur principal objectif est le développement de l’intelligence à travers l’acquisition « d’un ensemble de capacités et de stratégies mentales permettant l’apprentissage et l’adaptation à des situations nouvelles » (ibid., p. 134). Les méthodes d’éducation cognitive ne sont pas axées sur les contenus, mais elles ont pour but de faciliter les apprentissages scolaires a posteriori. Selon Loarer (1998), elles proposent « de développer le fonctionnement ou les structures de la pensée sans passer par l’acquisition de connaissances ou de procédures propres à une discipline donnée » (p. 137).
Chercheurs et praticiens s’accordent aujourd’hui sur le fait que les élèves en échec scolaire sont en difficulté lorsqu’il s’agit de généraliser une stratégie ou d’appliquer une compétence maitrisée dans une nouvelle situation d’apprentissage. Pour ces élèves, la notion de transfert d’apprentissage, d’une tâche à une autre est un processus complexe qui devrait se situer au coeur des préoccupations de l’enseignant et de l’approche pédagogique qu’il adopte. Il convient donc de s’interroger sur la pertinence des méthodes d’éducation cognitive qui, de manière assez stricte, se détachent des contenus et tâches scolaires. Loarer (1998) cherche à évaluer empiriquement l’efficacité de deux méthodes : les Ateliers de Raisonnement Logique (ARL) et le Programme d’Enrichissement Instrumental (PEI). Les résultats obtenus mettent en évidence les effets très limités sur les acquisitions scolaires. Ainsi, si l’auteur observe des effets bénéfiques sur des tâches similaires à celles entrainées par la méthode, il constate également que les principes enseignés ne sont nullement réutilisés dans des tâches dont le contexte est différent. L’auteur affirme que la volonté de ces méthodes de fournir aux apprenants des outils de pensée généraux, dénués d’apprentissages disciplinaires, constitue le principal point faible des méthodes d’éducation cognitive. Selon lui, cette vision pédagogique, basée sur la psychologie piagétienne, selon laquelle « il existe des structures générales de pensée indépendantes des contenus sur lesquels elles peuvent s’appliquer » et pour laquelle « le développement intellectuel précède l’acquisition des connaissances » (ibid., p. 153) est aujourd’hui désuète.
Éducation cognitive et métacognition chez les élèves en difficulté d’apprentissage
D’après Bosson, Hessels et Hessels-Schlatter (2009), les élèves en difficulté d’apprentissage et les élèves en réussite scolaire se différencient par leur comportement dans l’utilisation de stratégies d’apprentissage. Ces auteurs soulignent que les élèves en difficulté scolaire emploient communément moins de stratégies ou qu’ils les utilisent de manière inadaptée et inefficace, sans même s’en rendre compte. En effet, pour utiliser une stratégie de manière efficace, l’élève doit se familiariser avec un certain nombre de connaissances et de stratégies métacognitives. Ainsi, L’élève doit non seulement connaitre des stratégies, mais il doit aussi connaitre les situations dans lesquelles elles peuvent être utiles et la manière dont elles doivent être appliquées dans diverses tâches. […] L’élève doit également développer des moyens pour contrôler l’application des stratégies et évaluer les effets dans une tâche donnée (ibid., p. 15). Doly (2006) affirme que les connaissances et stratégies métacognitives sont des processus « automatisés chez les élèves experts et les élèves en réussite scolaire mais absents chez les novices et les élèves en échec » (p. 87).
Il est vrai que les élèves en difficulté scolaire ne font pas consciemment appel à une stratégie spécifique. Ils fonctionnent davantage à l’instinct et ne semblent pas outillés pour interroger l’efficacité des moyens qu’ils adoptent. Lorsque la stratégie choisie fonctionne, ils ne savent souvent pas pourquoi et lorsque face à un problème plus complexe, cette dernière ne donne pas satisfaction, l’échec est tantôt imputé à la difficulté de la tâche, tantôt à un manque de compétences de l’élève lui-même. Pour l’enseignant, il convient alors d’intervenir de manière à démontrer la diversité des stratégies possibles pour résoudre une même tâche, à mettre en évidence l’efficacité relative d’une stratégie sur une autre et la nécessité d’adopter une stratégie adaptée pour gagner en autonomie et efficience. Büchel (2007) suggère un modèle pour l’enseignement de stratégies en trois phases. En premier lieu, il s’agit de rendre l’élève conscient de sa manière de penser et des procédures qu’il met en place dans la résolution d’une tâche. L’enseignant, dans son rôle de médiateur, amène l’élève à verbaliser et expliciter son raisonnement. Dans un second temps, une fois ces stratégies rendues conscientes, l’enseignant a pour mission de guider l’élève et de l’aider à mesurer l’efficacité de certaines stratégies. L’élève peut ainsi valider les stratégies totalement efficaces, modifier celles qui sont partiellement efficaces en les remplaçant par d’autres, plus performantes.
Enfin, les stratégies confirmées doivent être entrainées jusqu’à être parfaitement intégrées. Seules des stratégies cognitives automatisées rendent l’apprentissage des matières plus efficace et plus rapide. Si l’élève doit consciemment appliquer une stratégie cognitive non automatisée, il se trouve dans une situation de double tâche : d’une part, il a besoin d’attention pour l’application des opérations, d’autre part il en a besoin pour chercher et appliquer la bonne stratégie. Certains élèves surchargent la mémoire de travail par cette répartition de l’attention (ibid., p. 21).
EFFET ENSEIGNANT
À partir des années 1970, de nombreuses études, comme celles de Rosenshine (1971) et celles de Bloom (1979), démontrent l’influence de l’enseignant et de ses pratiques pédagogiques sur les performances scolaires des élèves. L’explication de la réussite scolaire ne se situe plus uniquement dans les caractéristiques propres d’un élève, de son environnement familial ou de son milieu socio-économique. Désormais, on considère que l’enseignant est un facteur déterminant dans la variation de la réussite scolaire des élèves : c’est ce qu’on appelle l’effet enseignant. Des synthèses de recherches plus récentes (Wang, Haertel & Walberg, 1993 ; Gauthier, 1997 ; Hattie, 2003) confirment que l’impact de l’enseignant sur les acquisitions scolaires dépasse celui de la famille ou de l’école. Elles démontrent également que l’enseignant, à travers sa gestion de classe et son enseignement, influence directement l’apprentissage des élèves.
Lorsque l’effet enseignant sur les résultats scolaires s’avère positif, c’est-à-dire lorsque des enseignants, considérés comme efficaces, permettent un gain d’apprentissage significatif chez leurs élèves, on parle de valeur ajoutée de l’enseignant (Sanders & Rivers, 1996). Dans leur étude réalisée aux États-Unis, ces auteurs tentent de mesurer cette valeur ajoutée. Ils expliquent que les évaluations traditionnelles ne permettent pas d’établir un lien de causalité direct entre la qualité de l’enseignement et les performances des élèves. En effet, les résultats obtenus subissent l’influence de nombreux autres facteurs que les évaluations traditionnelles ne permettent pas d’isoler (origine ethnique de l’élève, niveau socio-économique, expériences scolaires antérieures, acquis, habiletés, etc.). En revanche, Lorsque les élèves sont évalués annuellement à l’aide d’épreuves standardisées, alignées et congruentes en fonction des programmes prévus, il devient possible de mesurer la valeur ajoutée de l’enseignant.
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Table des matières
1. INTRODUCTION
2. CADRE THÉORIQUE
2.1 ÉDUCATION COGNITIVE ET MÉTACOGNITION
2.1.1 Éducation cognitive : définition et méthodes
2.1.2 Métacognition
2.1.3 Éducation cognitive et métacognition chez les élèves en difficulté d’apprentissage
2.2 EFFET ENSEIGNANT
2.3 ENSEIGNEMENT EXPLICITE
2.3.1 Efficacité
2.3.2 Définition
2.3.3 Principales stratégies
2.3.3.1 Préparation de l’enseignement
2.3.3.2 Interaction avec les élèves
2.3.3.3 Consolidation des apprentissages
2.4 DIFFICULTÉS LIÉES À L’ORTHOGRAPHE GRAMMATICALE
2.4.1 Orthographe grammaticale
2.4.2 Accords et difficultés liées à l’accord du participe passé
3. PROBLÉMATIQUE
3.1 COMPOSANTES DE LA PROBLÉMATIQUE
3.2 OBJECTIF DE RECHERCHE
4. MÉTHODOLOGIE
4.1 FONDEMENTS MÉTHODOLOGIQUES
4.2 POPULATION
4.3 INSTRUMENTS DE MESURE
4.3.1 Prétest et post-test
4.3.2 Séquence pédagogique
4.4 MÉTHODE DE RECUEIL ET D’ANALYSE DES DONNÉES
5. PRÉSENTATION ET ANALYSE DES RÉSULTATS
5.1 STRATÉGIES
5.2 TÂCHES SIMPLES
5.3 TÂCHES COMPLEXES
5.4 DISCUSSION
6. CONCLUSION
7. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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