Aperçu climatique
La région d’étude est sous l’influence d’un climat méditerranéen, à fort contraste saisonnier, caractérisé par une saison douce et pluvieuse entre les mois d’octobre et avril et une saison chaude et sèche entre juin et septembre. L’Automne et le printemps y sont d’assez courtes durées et sont marqués souvent par des changements brutaux du climat tels que des vagues de chaleurs dues aux siroccos, suivies par des orages violents. Température D’une manière générale la région d’El-Kala est située dans le méditerranéen chaud avec une température maximale pouvant atteindre 50°C. Les températures les plus basses sont naturellement enregistrées en altitude durant l’hiver au Djebel Ghorra, avec environ 5 à 6 mois de gelée blanche par an (inBenyacoub et Chabi, 2000).Au niveau de la mer, la température descend très rarement à 0°C ; les mois les plus froids sont janvier et février, alors que juillet et août sont les plus chauds (Benyacoub et al., 1998),
Pluviosité : C’est une des régions les plus pluvieuses de la frange littorale maghrébine, recevant en plaine entre 700 mm et 900 mm annuels. Deux phénomènes météorologiques conditionnent la pluviosité de la région : D’une part, les perturbations cycloniques d’origine atlantiques de l’Ouest et du Nord-Ouest, et d’autre part les dépressions qui prennent naissance en Méditerranée occidentale.
Vents : Durant l’hiver, les vents dominants soufflent du nord-ouest, modérés à forts, donnant à certains endroits très exposés, une physionomie caractéristique de port en drapeau à la végétation. Cette direction est également observée dans l’alignement général des crêtes dunaires, ce qui témoigne de la régularité des vents au cours des temps historiques. En été, on assiste à des vents d’est, faibles à modérés. On enregistre en cette saison un net déficit hydrique. Ce déficit, accentué certains jours par la présence de siroccos, favorise l’apparition d’incendies. Ces différents éléments associés éprouvent la végétation et font de l’été la saison de ralentissement ou d’arrêt des activités biologiques dans le sud méditerranéen.
Humidité : La région d’étude est connue pour être une des plus humides d’Afrique du Nord. Sa situation littorale, mais aussi l’existence de nombreuses zones humides, ainsi que de nouveaux barrages, entraînent une importante évaporation due à un ensoleillement intense. L’humidité relative de l’air varie ainsi entre 60% et plus de 80% au cours de l’année, particulièrement ressentie en hiver et au printemps, période au cours de laquelle les brouillards matinaux sont fréquents et les rosées matinales quasi quotidiennes.
Dimorphisme sexuel
Aucun caractère sexuel secondaire ne permet de différencier le male de la femelle. Il faut pour cela observer l’abdomen de l’animale déroulé. Le pénis qui mesure environ cinq centimètres chez l’adulte, se trouve appliqué contre le ventre, le fourreau s’ouvrant au milieu de la face inferieure de l’abdomen. Les testicules ovoïdes mesurent un centimètre de longueur et pèsent un tiers de gramme. Ils restent en position intra-abdominale. L’activité des testicules est saisonnière. Inexistante en hiver, la spermatogenèse existe de février à septembre. La sécrétion de testostérone des testicules joue un rôle sur la longueur de l’hibernation. Comme les femelles, un mâle castré se réveille plus tard; un mâle ayant subi des implants de testostérone écourte sa période de repos hivernal (Levier 1994). Chez la femelle, on trouve la vulve à environ un centimètre de l’anus. Elle possède des tétines noires (une paire thoracique et quatre paires abdominales) que l’on voit à peine dans la fourrure, identique à celle du mâle (Photos 6 et 7) (Levier, 1994). L’appareil urinaire présente une vessie d’une taille extrêmement importante par rapport à celle des autres insectivores (Page, 2001). Chez le Hérisson mâle le sexe est situé en plein milieu du ventre alors que chez la femelle le sexe est placé entre les pattes arrière tout près de son anus.
Zones préférentielles de fixation des tiques sur le corps de l’hôte
Les observations réalisées lors du déparasitage, nous ont permis de noter la zone d’implantation de chaque tique sur le corps de l’hôte. Il en ressort globalement que les zones de fixation sont les pattes inférieures (33%), suivi de l’anus (27%), de l’abdomen (13%), des oreilles (13%), et dans une moindre mesure du dos(7%) et des pattes supérieures (7%)(Fig. 33). Nous avons remarqué un tropisme préférentiel des zones de fixation en fonction du sexe de l’hôte. Chez le mâle, les ectoparasites se fixent préférentiellement sur les pattes inférieures, tandis que chez les femelles, les ectoparasites se fixent préférentiellement autour de l’anus(Fig. 34).
Atelerix algirus : espèce phare en écologie urbaine
Les résultats obtenus à l’issue de toutes nos campagnes d’échantillonnage ont d’abord mis en exergue une tendance générale du hérisson d’Algérie à s’urbaniser. Cette tendance s’est confirmé tout au long de notre travail qu’il s’agisse des résultats relatifs aux captures, plus importantes dans la localité de Berrihane, mais également par les ectoparasites trouvés chez l’espèce et leurs dynamiques associées. Pour apporter une explication à ces constatations, nous nous sommes d’abord basés sur l’enquête socio-économique de Bouazouni réalisée en 2004 dans le Parc National d’El Kala, pour vérifier la particularité du site de Berrihane. Il en ressort que c’est celle qui est la plus riche en habitats diversifiés. Berrihane est une zone mixte aussi bien forestière qu’agricole (12007 ha / 72% et 4765 ha / 28% respectivement), constituée à la fois de zones urbaines (37%) et semi urbaines (51%) en plus de la présence 12% de zones rurales. De plus, cette localité connait depuis 2004 une expansion urbaine rapide, associée à la fragmentation intense des écosystèmes naturels, et ce en raison de la croissance démographique et des développements infrastructurels qui en découlent. Même si cette localité s’urbanise à un rythme effréné, il n’en demeure pas moins qu’elle reste l’habitat préférentiel d’Atelerix algirus, ce qui conforte les résultats de Boukheroufa (2017). Ainsi, L’urbanisation a induit la nécessité pour Atelerix algirus comme pour la plupart des espèces animales, à s’adapter à de nouvelles conditions de vie. Cette adaptation part du postulat que ce sont les espèces douées d’une plasticité écologique importante, qui sont les plus aptes à réussir la colonisation de nouveaux environnements. Une connaissance approfondie de l’écologie, du comportement et de la physiologie de ces espèces est donc essentielle pour comprendre leurs besoins environnementaux et leurs stratégies de cycle de vie (Kays et al.,2015; LaPoint et al., 2015). La tendance à l’urbanisation est confortée par la bibliographie à travers toute l’aire de répartiton de l’espèce, où il est décrit que le hérisson est aussi bien présent en ville qu’en campagne, se satisfait de l’expansion du milieu périurbain car celui-ci lui offre de nouvelles opportunités alimentaires grâce à la présence de ressources d’origine anthropique (plantes cultivées, ordures ménagères), tout en lui permettant d’éviter les prédateurs (Whitcomb et al.,1981 ; Adams, 1994). Ceci confère à Atelerix algirus le statut d’« Urban Adapter » (Blair, 2001). Dune façon globale, les changements environnementaux agissent et interagissent les uns avec les autres à diverses échelles spatiales et temporelles, ce qui peut avoir une incidence sur la faune et forcer les ajustements et l’adaptation (McDonnell et Hahs, 2015; Grimm et al., 2008; Barthel, 2019). C’est pour cela que l’étude des populations anthropisées, voire urbaines semble particulièrement intéressant car, de par ses spécificités, le milieu urbain impose des contraintes parfois très différentes du milieu d’origine (Marzluffetal., 2001). De nombreux auteurs ont mis en évidence un certains nombre de facteurs expliquant l’exploitation préférentielle des matrices urbaines par les hérissons (Moorhouse et al.,2017; van de Poel et al., 2015). Cette préférence pourrait être attribuable à des densités alimentaires plus élevées associées à l’occupation humaine, y compris des proies naturelles et des sources anthropiques, à des sites de nidification plus convenables et à une diminution du risque de prédation par les blaireaux (Pettett et al., 2017).Des études antérieures sur les hérissons urbains indiquent que les conditions climatiques et les ressources alimentaires anthropiques peuvent être des prédicateurs importants de la présence accrue de hérissons dans les zones urbaines par rapport aux zones rurales (Hubert et al., 2011). Harris et al.(2010)ont constaté que les hérissons résidant dans les zones urbaines se sont fortement adaptés aux conditions nouvelles de leur environnement urbain, en devenant plus actifs après minuit et en évitant de s’alimenter près des routes, ce qui est susceptible de réduire les dangers et les perturbations causées par le trafic routier et le risque de prédation par les chiens (Morris et Reeve, 2008; Reeve et Huijser, 1999; Stocker, 2005). Les hérissons quittent donc le milieu rural petit à petit vers les milieux anthropisés et de ce fait, profitent des sources de nourriture liées à l’homme et à son activité (plantes cultivées, ordures ménagères…) (Berthévas, 2014 ; Whitcomb et al.,1981 ; Adams, 1994), en faisant preuve d’une grande flexibilité comportementale, ce qui peut être une réponse adaptative de la population pour être plus résistante et résiliente face aux perturbations anthropiques. Tous ces éléments font qu’Atelerix est considéré comme une espèce micromammifère phare en écologie urbaine, une discipline qui a fait d’importants progrès dans la reconnaissance des modèles, de la dynamique et des impacts écologiques de l’urbanisation (Yang, 2020). L’écologie urbaine s’efforce actuellement d’analyser les relations entre les populations végétales et animales et leurs communautés ainsi que leurs relations avec les facteurs environnementaux, y compris les influences humaines (Magle et al.,2012; McDonald, 2016).A terme c’est à se demander si l’espèce n’est pas en train de changer de statut ?
Atelerix algirus urbanisé et surinfesté: quels risques sanitaires potentiels ?
Les animaux sauvages, sont considérés comme d’importants réservoirs d’agents pathogènes zoonotiques préoccupants (Simpson, 2002; Hassell et al., 2017).Qu’il s’agisse de l’espèce européenne ou du Hérisson d’Algérie, de nombreuses études ont démontré que cette espèce hôte peut transporter une grande diversité d’ectoparasites et agit comme réservoir et vecteur dans la transmission des pathogènes à partir des tiques et des puces aux humains (de Sousa et al., 2006 ; Marie et al., 2012; Khaldi et al., 2012 ; Boukheroufa, 2017 ; Senaoui et al., 2020 ; Orkun et al., 2019).Le cas d’Atelerix algirus en est la parfaite illustration puisque l’espèce prospère en milieu urbain, rural et naturel, partageant donc les mêmes environnements avec les animaux sauvages, domestiques et les humains (Skuballa et al., 2007). Concernant les Siphonaptères, les hérissons sont souvent infectés par la puce héritière, Archaeopsylla erinacei qui leur est spécifique (Beck et Clark 1997, Beck 2005). Hors, dans les milieux fragmentés, on observe de plus en plus la présence et la fréquence de parasites supplémentaires comme la puce du chat, Ctenocephalides felis, ou la puce du chien Ctenocephalides canis, ce qui est en parfait accord avec les résultats obtenus. De plus, la présence de ces deux espèces de puces qui sont d’ordinaire apparentées à des hôtes des milieux urbain et péri urbains confirme bel et bien la tendance de l’espèce à s’urbaniser mais également l’anthropisation évolutive de la localité de Berrihane, puisque les travaux entrepris par (Boukheroufa ,2017) entre 2010 et 2014 dans cette localité de rapportent la présence exclusive de la puce spécifique au hérisson. Il en est de même pour les travaux de Sakraoui et al., (2014) et Madoui et al., (2014) dans la localité de Séraidi. Les puces sont considérés comme des vecteurs de maladies potentielle qui peuvent contaminer leurs hôtes ( Ricard et al.,2020) mais aussi transmettre plusieurs maladies à l’homme (Kumar,2020). La présence d’espèces siphonaptères supplémentaires, corrélées à leurs charges parasitaires importantes devrait donc nous interpeller afin d’engager une réflexion globale sur les potentiels risques sanitaires induits par ces charges parasitaires plus importantes, et spécialement pour les puces (Mrzljak et al.,2020).Concernant l’infestation par les tiques, de nombreux travaux ont démontré l’importance des rongeurs et autres petits mammifères en tant qu’hôtes « relais », doués d’une plasticité extraordinaire qui leur permet de s’ériger en réservoirs compétents pour de nombreux pathogènes, pouvant introduire les parasites ou les pathogènes dans de nouveaux habitats (Rizzoli et al., 2014). De plus, les petits mammifères sont des hôtes d’entretien pour différentes espèces de tiques, ce qui signifie que les agents pathogènes peuvent être échangés entre les différentes tiques. Ce changement d’hôte peut être important parce que le comportement et les besoins en habitat des espèces de tiques diffèrent en fonction des paramètres biotiques et abiotiques (Pfäffle et al.,2013;Sonenshine et Roe, 2014).Dans les régions tempérées de l’Europe, deux espèces de tiques infectent également couramment les hérissons : Ixodes hexagonus (Leach, 1815) et Ixodes ricinus Linnaeus, 1758 (voir Földvári et al., 2011). En tant que tels, les hérissons peuvent agir comme hôtes paraténiques et réservoir pour une grande variété de pathogènes et de parasites d’importance épidémiologique significative.En effet, les tiques (Acari) et les puces (Siphonaptera) sont parmi les ectoparasites hématophages les plus importants des vertébrés terrestres et des vecteurs de zoonose. Au cours de leurs repas sanguins, ils peuvent transmettre divers agents pathogènes comme des virus, des bactéries et des protozoaires qui peuvent infecter les animaux et les humains (Beugnet et Marié, 2009; Sobrino et al., 2012). Dès lors, Le profil Urban adapter de l’espèce semble compromis : certes, l’espèce s’adapte parfaitement à l’expansion du milieu semi urbain caractéristique du site de Berrihane, et qui est connu pour l’élevage des bovins, des ovins et des Caprins (6602, 2770et 555 têtes respectivement)Bouazouni, (2004). Mais l’anthropisation effrénée de ces localités confronte l’espèce à d’autres animaux tels que les chats, les chiens errants ou domestiques, les souris ou les rats ; autant de possibilités pour un brassage parasitaire, et une transmission vectorielle dont les risques ne sont plus à négliger (Gozet al., 2016 ; Anton,2019).
|
Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
MATERIEL ET METHODES
1. DESCRIPTION GENERALE DES ZONES D’ETUDE
1.1. Le Parc National d’El Kala
1.1.1. Cadre géographique
1.1.2. Aperçu climatique
1.1.3 Couvert Végétal
1.1.4 Faune
1.2. Le massif montagneux de l’Edough
1.2.1. Situation géographique
1.2.2. Caractéristiques physiques
1.2.3. Couvert végétal
1.2.4 faune
2. PRESENTATION DU MODELE BIOLOGIQUE
2.1. Systématique
2.2. Description morphologique
2.3 Répartition géographique
2.4. Habitats naturels et nids
2.5. Données bioécologiques
2.5.1. Dimorphisme sexuel
2.5.2. Reproduction
2.5.3. Longévité
2.5.4. Rythme d’activité
2.5.5. Régime alimentaire
2.5.6. Hibernation
2.5.7. Mécanismes de défense
3. METHODOLOGIE
3.1. Description des localités d’échantillonnage
3.1.1. La localité de Berrihane
3.1.2. La localité de Seraidi
3.2. Mesures morpho-métriques
3.3. Etude du système ectoparasites – Hérisson d’Algérie
3.3.1. Déparasitage
3.3.2. Identification taxonomique des parasites
3.3.3. Identification des sites préférentiels de fixation des ectoparasites
3.3.4. Indices parasitaires
3.4. Analyses statistiques
RESULTATS
1. Données bioécologiques globales de l’hôte
1.1. Évolutions des captures par mois
1.2. Données morphométriques de l’hôte
2. Caractérisation taxonomique des ectoparasites chez Atelerix algirus
3. Dynamique Globale des ectoparasites chez Atelerix algirus
4. Analyse de l’interaction spécifique « TIQUES – Atelerix algirus »
4.1. Zones préférentielles de fixation des tiques sur le corps de l’hôte
4.2. Analyse des indices parasitaires chez la population des tiques
5. Analyse de l’interaction « Siphonaptères – Atelerix algirus »
DISCUSSION GENERALE
1. Atelerix algirus : espèce phare en écologie urbaine
2. Atelerix algirus : excellent échantillonneur de biodiversité ectoparasitaire
3. Facteurs abiotiques et biotiques vs infestation parasitaire chez Atelerix algirus
4. Atelerix algirus urbanisé et surinfesté: quels risques sanitaires potentiels ?
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
REFERENCE BIBLIOGRAPHIQUE
ANNEXES
Télécharger le rapport complet