Écologie, évolution et contrôle des maladies tropicales négligées

En dépit des succès de la lutte contre les maladies infectieuses au cours du XXème siècle (May, 2007), il n’est probablement aucune population humaine qui ne soit affectée par au moins un agent pathogène (World Health Statistics, 2011) Les conséquences de ces infections continuent de représenter un lourd fardeau pour l’humanité. En 2008, le nombre de morts dues aux maladies infectieuses était estimé à plus de 8,7 millions par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), soit plus d’un sixième de la mortalité mondiale.

L’impact de ces maladies est bien entendu distribué de manière très inégale au sein de la population mondiale. Pour la majorité des maladies infectieuses, les plus forts taux de morbidité et de mortalité sont observés dans les pays émergents, plus particulièrement ceux situés dans les zones tropicales (OMS). Parmi les facteurs expliquant cette hétérogénéité, les différences de statuts socio-économiques entre populations sont depuis longtemps mises en avant (Winslow, 1951). En effet, non seulement les maladies infectieuses touchent les populations les plus pauvres, mais bien souvent elles contribuent à renforcer leur pauvreté (Hotez, 2008), et se placent ainsi comme des obstacles supplémentaires au développement de pays qui sont déjà les moins riches (Conteh et al., 2010). Malgré tout, la vulnérabilité de l’homme face aux maladies infectieuses semble vouée à demeurer un souci d’ordre mondial. L’intensité actuelle des migrations humaines (Arguin et al., 2009) et animales (Alitzer et al., 2011), ainsi que celle des échanges commerciaux (Tatem et al., 2006), participent à la dissémination des agents pathogènes et de leurs hôtes vecteurs à travers le monde. Les prédictions sur l’évolution du climat sont régulièrement associées à une augmentation des populations à risque de rencontrer certains pathogènes (Cooney, 2011), et l’urbanisation ainsi que les multiples modifications de l’environnement sont souvent associées à des risques accrus de zoonoses (Colwell et al., 2011). Enfin, le développement de résistances des pathogènes (Goldberg et al., 2012) ou de leurs vecteurs (Raghavendra et al., 2011) aux stratégies de contrôle mises en place contribue à la persistance de certaines maladies. Dans un monde connaissant de nombreux et rapides changements globaux, la lutte contre les maladies infectieuses ne se conjugue donc pas seulement au présent, mais constitue bel et bien un des défis majeurs pour le futur de l’ensemble de l’humanité (Varmus et al., 2003 ; May, 2007).

Si l’impact des maladies infectieuses est distribué de manière inégale entre les populations humaines, il l’est aussi entre maladies. En 2008 le nombre de morts dus aux seuls sida, malaria et tuberculose était estimé à plus de 3,9 millions, soit près de la moitié de la mortalité due aux maladies infectieuses (OMS). Le poids combiné de ces 3 maladies dans les bilans sanitaires est devenu si important qu’il leur a été données le nom de « big three » (Hotez et al., 2006). Ces « big three » constituent bien entendu la cible prioritaire de nombreuses campagnes de sensibilisation et de programmes de contrôle (Hotez et al., 2006). Justifiée ou non, la concentration de ces efforts sur ces trois maladies est telle que d’autres maladies infectieuses sont «négligées », tant en termes de fonds investis et de programmes de recherche, que de politiques de santé publique (Payne & Fitchett 2010). Beaucoup de ces maladies affectent tout particulièrement les populations vivant dans les zones rurales ou les zones urbaines à faibles revenues d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine (First WHO report on neglected tropical diseases, 2010). Depuis le milieu des années 2000, ces maladies sont communément regroupées sous le terme de « maladies tropicales  négligées » – ou « NTD » pour « Neglected Tropical Diseases ». Ceci a probablement contribué à une prise de conscience de l’importance de ces maladies et de la nécessitée d’y apporter des réponses scientifiques et politiques. Ceci a notamment conduit à la création d’un département « Maladies Tropicales Négligées» au sein de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), et à la naissance d’un journal scientifique, « The Public Library of Science – Neglected Tropical Diseases» (PLoS NTD), entièrement dédié à ces maladies.

Les travaux effectués au cours de ce doctorat portent sur l’écologie, l’évolution et le contrôle des maladies infectieuses, et pour l’essentiel, des maladies tropicales négligées. L’approche adoptée est celle de la biologie théorique, et repose sur la modélisation par les systèmes dynamiques. Il existe une littérature théorique, relativement riche qui met en relation l’écologie, l’évolution et le contrôle des 3 principales maladies infectieuses évoquées cidessus. C’est le cas notamment pour la malaria dont l’étude est depuis longtemps associée à des développements théoriques (Smith et al., 2012), ou encore le sida (Pinkerton 2011), dont la première épidémie n’a pourtant été identifiée que dans les années 1980. L’usage de la modélisation pour comprendre la transmission des maladies tropicales négligées est lui considérablement plus réduit (Kealey & Smith 2010) et ceci constitue un paradoxe. En effet, dans des contextes économiques et éthiques contraignant les approches expérimentales tant en laboratoire qu’en milieu naturel, l’approche théorique offre la possibilité, à des coûts excessivement modestes, de mettre à l’épreuve quantitative des hypothèses sur les processus naturels. Elle permet en effet d’intégrer des données empiriques accumulées au cours du temps par des suivis épidémiologiques et/ou entomologiques réalisés par différentes équipes de recherche ou par les services de surveillance entomologique et de santé publique (Lord 2007; Luz et al., 2010). Elle permet également de tester in silico des stratégies de contrôle qui ne pourraient tout simplement pas l’être in situ pour des raisons purement matérielles et/ou éthiques (Cohen 2004). Elle permet finalement d’étudier, de façon plus abstraite, et dans une certaine mesure de façon plus indépendante des données, l’influence de processus naturels et de leur interactions sur l’écologie, l’évolution et le contrôle des pathogènes, et de leurs hôtes et vecteurs (Diekmann & Heesterbeek, 2000; Dieckmann et al., 2002).

Les maladies tropicales négligées (NTD) peuvent être définies comme un groupe de maladies infectieuses que l’on rencontre surtout dans les zones rurales ou dans les zones urbaines et pauvres des pays à revenu faible et intermédiaire (Frew et al., 2009), et qui constituent elles-mêmes des facteurs aggravant de pauvreté. A ce jour, le département Maladies Tropicales Négligées de l’OMS a constitué une liste de 20 conditions dont 18 maladies infectieuses qui répondent à cette définition. Au sein de cette liste 9 maladies sont dues à l’infection par un organisme viral, bactérien ou protozaire: la dengue, la rage, la lèpre, le pian, le trachome, l’ulcère de Buruli, la maladie de Chagas (souvent appelée trypanosomiase américaine), la leishmaniose et la trypanosomiase humaine africaine (souvent appelée maladie du sommeil); et 9 maladies sont dues à l’infection par un ver, appelées aussi « helminthiases » : la cysticercose, la dracunculose (ou ver de Guinée), l’échinococcose, la fasciolase, la filariose lymphatique, l’onchocercose, la schistosomiase (aussi appelée bilharziose), les helminthiases intestinales (l’ascaridiose, la trichocéphalose et l’ankylostomose) et la strongyloïdose (aussi appelée anguillulose).

Outre le fait qu’elles touchent surtout les populations les plus défavorisées des zones tropicales, les maladies tropicales négligées ont en commun de nombreux effets sur la santé et l’histoire de vie des individus qui les contractent. Celles-ci ont tendance à se manifester sous diverses formes d’infirmité et de séquelles perdurant à long terme (défigurement, cécité), à affaiblir le développement infantile et détériorer le déroulement des grossesses, et à réduire la productivité des travailleurs malades, tous ces stigmates contribuant eux-mêmes à renforcer la pauvreté des populations touchées (Hotez et al., 2007 ; First WHO report on neglected tropical diseases, 2010).

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction générale
Positionnement général et contribution spécifique de cette thèse
1 Les maladies tropicales négligées : mises en perspectives de leur impact sanitaire avec la production scientifique et théorique
1. Les maladies tropicales négligées (« NTD »)
1.1 Diversité et similitudes
1.2 Risques et impact sanitaires
1.3 Contrôle des maladies tropicales négligées
2. Production scientifique sur les maladies tropicales négligées
2.1 Publications scientifiques
2.2 Travaux théoriques sur l’écologie, l’évolution
et le contrôle des maladies tropicales négligées
3. Principales problématiques abordées sur l’écologie, l’évolution et le contrôle des maladies tropicales négligées
4. Conclusion générale
2 Émergence et prévalence des maladies vectorielles humaines transmises dans des populations de vecteurs puits
2.1 Introduction
2.2 Article publié
3 Compétition et diversification intra-hôte des macro-parasites
3.1 Introduction
3.2 Article accepté pour publication
Conclusion générale

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *