Ecologie du cacaoyer
MYCOTOXINES ET MYCOTOXINOGENESE
Mycotoxines
Les mycotoxines sont des substances toxiques issues du métabolisme secondaire de certaines espèces fongiques. Elles peuvent également être définies comme des métabolites produits après l’arrêt de la réduction des groupes cétoniques pendant la biosynthèse des acides gras chez les moisissures (Gimeno, 2000). Elles ont des effets toxiques sur l’organisme humain et animal (Eskola, 2002). La toxicité peut être aiguë, chronique, mutagénique ou tératogénique.
Les métabolites secondaires sont pour la plupart élaborés par famille de produits chimiquement voisins ; ceci s’explique par l’existence des « grilles métaboliques » (Bu’Lock et Jaquet, 1965). Certaines voies métaboliques servent ainsi d’exutoires permettant au microorganisme de ne pas accumuler des métabolites primaires potentiellement toxiques pour lui.
La présence inévitable des mycotoxines dans la nature fait qu’il est particulièrement difficile de garantir l’innocuité des aliments. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), au moins 25 % des cultures vivrières dans le monde sont contaminées par des mycotoxines. Les plus touchés sont le raisin et ses dérivés, les céréales et leurs dérivés, le cacao, le café, les arachides. Le volume mondial de produits à risque est estimé à 100 millions de tonnes, dont plus de 20 millions dans les pays en voie de développement (Park et Boutrif, 1999).
Les mycotoxines sont souvent classées en fonction des espèces fongiques qui les produisent et des produits qu’elles contaminent. De nos jours, environ 300 mycotoxines différentes ont été isolées et caractérisées. Les plus communes dans les aliments et les plus importantes au niveau sanitaire et économique sont : aflatoxines, ochratoxines, trichothécènes, zéaralénone, fumonisines, alcaloïdes de l’ergot, citrinine, patuline, stérigmatocystine (Gimeno, 2000).
Les principales mycotoxines, les espèces productrices et les denrées associées sont représentées dans le Tableau 1.
Mycotoxinogénèse
Les voies de biosynthèse des mycotoxines ne sont pas toutes bien élucidées. La méthode moléculaire est une méthode d’avenir pour leur étude (Taylor et al., 1999). Le séquençage de l’ADN a permis la préparation d’amorces ou de sondes spécifiques des espèces productrices (Edwards et al., 2002). La PCR, ainsi que la technique RAPD (Random Amplification of Polymorphic DNA) ont été utilisées pour l’identification des gènes impliqués dans la biosynthèse des mycotoxines (Morin et al., 1999 ; Lopes et al., 2000).
Les moisissures productrices de mycotoxines sont capables de se développer sur plusieurs substrats et dans différentes conditions d’humidité, de pH et de température. Cependant, elles ne colonisent que les tissus morts des plantes lorsque la culture a été infectée par des organismes pathogènes ou abîmés (Zimmerli et Dick, 1996). Ces moisissures peuvent se développer pendant la culture, le séchage (saprophytes) ou pendant le transport et le stockage (endophytes) des produits agricoles. De plus, certaines moisissures sont capables de synthétiser plusieurs mycotoxines (Eskola, 2002).
Trois types de facteurs conduisent à la colonisation fongique et à l’imprégnation mycotoxique d’une denrée : il s’agit des facteurs physiques, chimiques et biologiques (D’Mello et al., 1997).
Facteurs physiques
Activité de l’eau (Aw)
La toxinogénèse dépend fortement de l’activité en eau (Aw). Quand les autres facteurs ne sont pas limitants, la toxinogénèse croît d’une façon exponentielle avec l’Aw jusqu’à un maximum où on observe un ralentissement de la toxinogénèse due à un défaut d’oxygénation (Sùarez-Quiroz et al., 2004).
Les conditions optimales de toxinogénèse sont fonction de l’espèce et de la nature du substrat. L’Aw optimale pour Aspergillus ochraceus se situe entre 0,95 et 0,99 sur des milieux riches en sucre et 0,81 sur des milieux contenant du NaCl. Elle est de 0,82 chez A. carbonarius et est inférieure à 0,80 chez Penicillium verrucosum dans les mêmes conditions (Pitt et Hocking, 1997).
Température
La température optimale de toxinogénèse est généralement voisine (légèrement inférieure) de la température optimale de croissance des souches productrices (Samson, 1991). Aspergillus ochraceus est une espèce mésophile – xérophile. Il se développe entre 8 et 37°C, avec un optimum entre 24 et 37°C. Peu d’informations sont disponibles sur A. carbonarius car sa capacité à produire l’OTA n’a été rapportée que récemment. Des études préliminaires récentes indiquent des conditions optimales entre 32 et 35°C (Téren et al., 1996 ; Varga et al., 1996 ; Heenan et al., 1998). Aspergillus niger se développe de façon optimale à des températures hautes, avec un optimum entre 35-37°C. P. verrucosum, quant à lui, est capable de croître à basse température (entre 0 et 31°C, l’optimum est à 20°C). La patuline, l’acide pénicillique et l’OTA sont élaborés à des températures généralement inférieures à celles de la croissance. Les températures optimales de croissance et de production d’aflatoxines chez A.
flavus sont proches (Samson, 1991). Pour d’autres toxines (trichothécène et zéaralénone), la température optimale de toxinogénèse peut être jusqu’à 10°C inférieure à celle de la croissance (Samson, 1991).
Facteurs chimiques
Oxygène
La réduction de la pression partielle en oxygène a un effet inhibiteur bien plus important sur la toxinogénèse que sur la croissance du champignon. La production d’aflatoxine est fortement inhibée lorsque la concentration en oxygène est inférieure à 1 % (D’Mello et MacDonald, 1997).
Traitements agricoles
L’utilisation des produits phytosanitaires sur les plantes pendant les traitements agricoles a une action préventive sur l’apparition des mycotoxines. L’emploi des pesticides protège des lésions dues aux insectes et acariens et réduit la contamination par les souches toxinogènes ou la production des mycotoxines (Blateyron et al., 2001 ; Molot, 2003). Nature du substrat.La toxinogénèse est plus étroitement liée à la composition chimique de la denrée que la croissance fongique. La biosynthèse de certaines mycotoxines peut être favorisée par la présence des glucides dans le substrat, puis des lipides et enfin les protéines qui ont une moindre influence (Pitt et Hocking, 1997).
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Table des matières
SOMMAIRE
LISTE DES ABREVIATIONS
LISTE DES TABLEAUX ET FIGURES
INTRODUCTION GENERALE
REVUE DE LA BIBLIOGRAPHIE
1- CACAO
1-1- Eléments de botanique
1-2- Ecologie du cacaoyer
1-3- Les principaux types de cacaoyers cultivés
1-3-1- Groupe des Criollo
1-3-2- Groupe des Forastero Amazoniens
1-3-3- Groupe Trinitario
1-4- Fruit du cacaoyer
1-5- Certains constituants chimiques du cacao
1-5-1- Théobromine
1-5-2- Caféine
1-5-3- Epicatéchine
1-6- Récolte et préparation du cacao marchand
1-6-1- Récolte des cabosses
1-6-2- Ecabossage
1-6-3- Fermentation
1-6-4- Séchage
1-7- Cas spécifique du Cameroun
2- MYCOTOXINES ET MYCOTOXINOGENESE
2-1- Mycotoxines
2-2- Mycotoxinogénèse
2-2-1- Facteurs physiques
2-2-2- Facteurs chimiques
2-2-3- Facteurs biologiques
3- OCHRATOXINE A
3-1- Structure chimique et propriétés physico-chimiques
3-2- Toxicologie de l’OTA
3-3- OTA dans les aliments
3-4- OTA et cacao
3-4-1- Occurrence de l’OTA dans le cacao et produits dérivés
3-4-2- Estimation de la consommation de l’OTA à partir du cacao
3-5- Législation sur l’OTA
4- MOISISSURES PRODUCTRICES DE L’OCHRATOXINE A
4-1- Généralités sur les moisissures
4-2- Grands groupes producteurs d’OTA
4-3- Moisissures productrices de l’OTA dans le cacao
4-4- Aspergillus noirs de la section Nigri
4-5- Approche génotypique
MATERIEL ET METHODES
MATERIEL
1- CACAO
2- SOUCHES FONGIQUES
METHODES
1- FERMENTATIONS DU CACAO
2- ETUDE DE LA MICROFLORE FONGIQUE
2-1- Echantillonnage
2-2- Milieux de culture
2-3- Numération par ensemencement des milieux en surface
2-4- Conditions de l’essai avec inoculation
2-5- Ensemencement direct
3- IDENTIFICATION DES MOISISSURES
3-1- Caractères culturaux sur milieu PDA
3-2- Caractères morphologiques microscopiques
4- ETUDE DE LA PRODUCTION ET DOSAGE DE L’OCHRATOXINE A
4-1- Production d’OTA sur milieux gélosés
4-2- Production d’OTA sur milieu riz (Méthode FDA)
4-3- Production d’OTA sur milieu cacao
4-4- Dosage de l’OTA dans les fèves de cacao
5- TECHNIQUES D’ETUDE DES FACTEURS INFLUANT LA CROISSANCE ET LA PRODUCTION D’OTA
5-1- Incidence de l’activité de l’eau
5-2- Effet des alcaloïdes
6- TECHNIQUES DE BIOLOGIE MOLECULAIRE
6-1- Production du mycélium
6-2- Extraction de l’ADN
6-3- Purification de l’ADN par Geneclean
6-4- Détermination des Aspergillus noirs
6- 4- 1- PCR avec des amorces spécifiques
6- 4- 2- Séquençage du fragment amplifié
6- 4- 3- Amplification partielle d’un fragment PKS
6-5- RAPD-PCR
6-6- Construction des dendrogrammes
RESULTATS
1- ETUDE DE LA MICROFLORE FONGIQUE ET DES ASPERGILLUS NOIRS PENDANT LE TRAITEMENT DU CACAO
1-1- Campagne cacaoyère 2005
1-1-1- Evolution qualitative de la microflore fongique
1-1-2- Evolution quantitative de la microflore fongique
1-1-3- Etude du taux de contamination des fèves de cacao par les moisissures
1-2- Campagne cacaoyère 2006
1-2-1- Etude de la microflore fongique au cours du traitement
1-2-2- Etude du taux de contamination des fèves
1-2-3- Etude de la microflore fongique au cours du stockage
1-3- Campagne cacaoyère 2007
1-3-1- Etude de la microflore fongique au cours des traitements
1-3-2- Etude du taux de contamination des fèves
1-3-3- Microflore fongique de l’environnement
1-4- Discussion
2- ETUDE DE LA PRODUCTION D’OCHRATOXINE A
2-1- Production d’OTA par les moisissures isolées
2-2- Teneur en OTA des fèves de cacao
2-3- Discussion
3- INCIDENCE DES FACTEURS CHIMIQUES ET ENVIRONNEMENTAUX SUR LA CROISSANCE ET LA PRODUCTION DE L’OCHRATOXINE A DANS LE CACAO
3-1- Influence de l’activité de l’eau sur la croissance et la toxinogénèse
3-1-1- Chez Aspergillus niger agg
3-1-2- Chez Aspergillus carbonarius
3-2- Influence de certains alcaloïdes et de l’épicatéchine sur la croissance et la toxinogénèse
3-2-1- Caféine
3-2-2- Théobromine et épicatéchine
3-3- Discussion
4- ETUDE DE LA BIODIVERSITE DES ASPERGILLUS NOIRS
4-1- Etude phénotypique et choix des souches
4-1-1- A. niger aggregate
4-1-2- A. carbonarius
4-2- Etude génotypique
4-2-1- Extraction et purification de l’ADN génomique
4-2-2- Identification des Aspergillus noirs
4-3- RAPD – PCR
4-4- Traçabilité de la souche inoculée lors de la campagne 2006
4-5- Discussion
4-5-1- Présentation globale de la diversité et relation avec l’OTA
4-5-2- Incidence des paramètres environnementaux et post-récolte sur la biodiversité chez A. niger agg
4-5-3- Incidence des paramètres environnementaux et post-récoltes sur la biodiversité chez A. carbonarius
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
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