Ecole Nationale de Santé Publique

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Type d’étude

Il s’agit d’une étude observationnelle, elle n’entraîne pas une modification de la prise en charge du patient. C’est une étude descriptive où nous nous attachons à faire un état des lieux de la fréquentation des urgences au centre hospitalier de Trinité et en même temps c’est une étude analytique car à travers un questionnaire nous recherchons une étiologie au passage des patients à travers ce service.
L’enquête est transversale car elle s’attache à évaluer une prévalence à un temps donné. Il n’y a pas de suivi des patients dans le temps et l’on peut parler de « cliché d’une population ». Finalement l’étude est à la fois qualitative car elle s’applique à étudier les comportements et les motivations d’un groupe restreint d’individus mais également quantitative.

Période et lieu de l’étude

L’étude s’est déroulée dans le Service d’Accueil des Urgences du Centre Hospitalier de Trinité du lundi 16 juin 2014 à 8h au lundi 23 juin 2014 à 8h.
Le Centre Hospitalier de Trinité est le centre d’accueil des urgences du Nord Atlantique (adultes, pédiatriques et gynécologiques) qui est désormais intégré dans le CHUM (Centre Hospitalier Universitaire de Martinique).
Il propose les activités suivantes : soins intensifs, diabétologie endocrinologie, pédiatrie et néonatalogie, maternité, chirurgie gynécologique, cardiologie, neurologie, rhumatologie, gériatrie (dont 30 lits d’Unité de Soins Longue Durée) et gastro-entérologie, ainsi qu’un service de médecine polyvalente. Ces activités s’articulent autour d’un plateau technique récent avec notamment une IRM.
L’hôpital de Trinité compte également une maison médicale de garde et abrite l’un des deux sites du Centre de Soins, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA) du CHU de Martinique.
Le service des urgences comporte 4 box et 2 box de déchocages qui regroupent urgences médicales et chirurgicales adultes ainsi que les urgences pédiatriques chirurgicales. Bien que la chirurgie ait disparu du centre hospitalier de Trinité, l’accueil des urgences continue à les recevoir et peut si besoin les orienter secondairement vers le CHU.
Les urgences comprennent également un service d’UHCD (unité d’hospitalisation de courte durée) contenant 5 lits.
Le territoire « Nord Atlantique » concentre 22 % de la population, Il dessert un bassin de population estimé à 90 000 habitants52.
L’activité de l’hôpital de la Trinité représente 11 % de l’ensemble des séjours en MCO du département13.

Recueil des données

temps de recueil

Les données ont été recueillies en temps réel du lundi 16 juin 8h au lundi 23 juin 2014 à 8h inclus. Nous étions présents sur place de 7h du matin à 20h le soir pour répertorier toutes les entrées. Celles de la nuit étaient reprises le matin à notre arrivée.

Données examinées

Pour chaque arrivée d’un patient majeur et de nationalité française, nous avons noté les données socio-démographiques que nous pouvions récupérer dans le cahier d’admission du service (âge, sexe, commune, mode d’arrivée et devenir).
Nous avons tout d’abord fait une distinction entre les patients consultant par leurs propres moyens et ceux amenés véhiculés (ambulance, pompiers, SAMU).
Pour tous les patients, nous avons repris les données d’âge, sexe, commune, heures d’arrivées, devenir et nous sommes parvenus à établir une « photographie » sociale et démographique d’une population totale.
Puis pour les patients consultant par leurs propres moyens, nous leur avons soumis un questionnaire afin de mieux comprendre leur démarche quant au recours au SAU.
Ensuite nous avons donné un avis personnel sur la justification de leur passage dans ce service et ainsi déterminé le caractère « approprié » ou non de la consultation pour ce sous-groupe.

Avis urgentiste et médecin hospitalier

Pour chaque usager arrivé aux urgences par ses propres moyens et ayant répondu au questionnaire, nous avons pris l’avis d’un médecin urgentiste soit le jour même de la consultation soit a posteriori sur dossier pour avoir leur avis sur la justification ou non selon eux du passage au SAU.
Pour les dossiers où nous avons eu un désaccord, un troisième avis d’un praticien hospitalier a été demandé.
Nous avons pu ainsi répondre à l’objectif principal concernant la proportion de consultations dites « appropriées ».

Questionnaire

Concernant les objectifs secondaires, un questionnaire a été remis systématiquement aux patients venant aux urgences par des moyens personnels. Un consentement a été demandé à chacun d’eux afin d’obtenir leur accord pour participer à cette étude et qui leur a été fait signer. Les documents sont présentés en annexe 1 et 2. Concernant les patients de nuit, le questionnaire pouvait leur être soumis à notre arrivée le matin s’ils étaient toujours présents, sinon un rappel téléphonique systématique a été réalisé pour les interroger.
Ce dernier reprend les données socio-démographiques des patients et répond à plusieurs questions :
– L’existence ou non d’une couverture sociale
– Pour les patients de moins de 60 ans nous leur avons demandé s’ils avaient un emploi
– La prise ou non d’un traitement au long cours
– S’ils ont ou pas un médecin traitant
– S’ils ont pris un avis médical avant de se rendre au SAU et si oui de quelle manière et dans le cas contraire pour quelles raisons
– La durée d’apparition de leurs symptômes
– S’ils considèrent venir au SAU pour un problème urgent
– Les raisons pour lesquelles ils ont préféré venir aux urgences plutôt que de consulter un médecin généraliste
– Combien de fois ont-ils consulté au SAU en une année
– S’ils connaissent l’existence de la MMG et dans l’affirmative pourquoi ne s’y sont-ils pas rendus.
Il est à noter que pour les patients ne sachant ni lire, ni écrire, le questionnaire leur a été formulé verbalement et nous avons noté nous-mêmes les réponses.
Pour ceux qui n’étaient pas en mesure de répondre leur capacité intellectuelle ne leur permettant pas, ou leur état de santé les en empêchant, le questionnaire a été soumis à l’entourage.

Exploitation des données et outils statistiques

Toutes les données ont été reportées dans un tableau type Excel® avec l’accord de la CNIL (récépissé de déclaration 1792296). Ce récépissé est produit en annexe 3.
Nous avons ensuite repris tous ces résultats sous forme de statistiques en établissant des tableaux et graphiques.

Résultats

Nombre global de patients

Durant la semaine de l’étude le nombre total de passages s’était élevé à 367.
42 mineurs et 3 étrangers avaient été exclus de l’étude.

Avis global sur les consultations par moyens personnels

Un avis hospitalier avait été pris sur les consultations qui avaient créées une divergence entre l’avis du libéral et celui du médecin urgentiste. 24 consultations avaient nécessité un 3ème avis. Le caractère « approprié » ou non avait été retenu à la majorité. 67.5% des consultations étaient « inappropriées » après avis de 3 médecins sur 154 consultations par moyens personnels et ayant répondu au questionnaire, soit 104 consultations.
Pour rappel comme le montre la figure 14, 14 patients soit 9% jugeaient leur consultation « inappropriée ».

Les biais de l’étude

Le biais de sélection

Il existe bien un biais de recrutement au niveau de cette étude. Les patients véhiculés n’ont pas été soumis au questionnaire. Ils représentent tout de même 46% de l’ensemble des consultations.
C’est pourquoi l’étude s’est appliquée à surtout analyser le caractère « approprié » ou non des passages aux urgences des usagers spontanés.
Le taux de réponse au questionnaire est de 89% avec 19 patients n’ayant pas répondu ou souhaité répondre à ce dernier au cours de l’étude.
Il est à noter également que l’étude s’est déroulée pendant les phases qualificatives de la coupe du monde de football au Brésil. Nous avons noté une affluence beaucoup moins importante pendant les horaires des matchs.
D’autre part la durée de l’étude sur une semaine représente un biais important. En effet la période est trop courte pour être représentative d’une tendance générale aux urgences du Centre Hospitalier de Trinité et sur un comportement de ses usagers.

Le biais de classement

La méthode de mesure

On peut parler de biais de mesure quant à la standardisation des procédures. En effet la notion d’urgence bien que parfaitement définie par les 5 stades CCMU n’est pas identique pour un praticien libéral, urgentiste ou même hospitalier.
Dans notre étude, ces différents avis ont été pris sans répondre à une classification bien précise. Les avis ont été donnés spontanément ou a posteriori sur dossier et ont fait appel à l’avis personnel de chaque médecin ou encore à sa pratique de la médecine.
Nous avons d’ailleurs pris l’avis de plusieurs médecins urgentistes et les réponses fournies ne sont donc pas « standardisées ».
C’est pourquoi nous avons souhaité « départager » en prenant un troisième avis pour en dégager une moyenne et ainsi minimiser ce biais.

La subjectivité de l’enquêteur

Lors du questionnaire soumis aux patients la subjectivité de l’enquêteur entre en compte. Pour certains ne sachant pas lire ou écrire, le questionnaire leur a été soumis verbalement et l’enquêteur peut avoir entraîné la suggestion en posant les questions.
Ces dernières ont pu donc être posées différemment pour certains sondés. C’est pourquoi les questions posées ont été les plus simples possibles.
Entre dans cette subjectivité la notion même d’urgence comme nous le précisions précédemment.

La subjectivité de l’enquêté

Il y a eu un biais concernant l’enquête dans le refus de répondre. Ce biais est minime et négligeable puisqu’il représente 19 patients qui soit n’ont pas souhaité répondre par téléphone soit ne nous ont pas recontacté malgré plusieurs appels téléphoniques et message sur répondeur.
Par ailleurs au moment du questionnaire il existe un biais de mémorisation obligatoire sur certaines questions.
D’autre part on peut également parler de biais de minimisation (déni, culpabilité) conscient ou non chez certains sondés. Certains patients ont pu penser que le questionnaire allait entraîner une modification de leur prise en charge.
De plus il existe une anxiété chez les patients consultant aux urgences, ce qui les rend moins objectifs quant à leur réponse comme le montre l’étude de Gerdes en 1987 28, selon laquelle plusieurs facteurs sont générateurs d’anxiété plus importante comme l’incertitude quant à son état de santé, l’inconfort physique, l’orientation passive à l’égard de la visite, les temps d’attente plus courts, ou encore la connaissance antérieure du fonctionnement du service. Nous noterons également que le questionnaire n’était pas anonyme. Le nom du patient apparaissant en haut de page nous a permis une relecture des dossiers.
Ce non anonymat signalé au patient pouvait orienter ses réponses et donc être considéré comme un biais négatif d’influence.

Discussion et analyse du profil des patients

Age

Nous remarquons dans notre étude que les plus de 80 ans représentent 21,7% de l’ensemble des consultations et sont la tranche d’âge la plus importante (Figure 2).
Nos résultats sont donc relativement en accord avec ce que dévoilait une étude sur les usagers des urgences en 2003 menée par la DREES54. Selon cette dernière, les personnes qui consultent aux urgences sont majoritairement situées aux âges extrêmes de la vie.
Excluant dans notre étude les mineurs de moins de 18 ans nous ne tiendrons donc pas compte de la fréquentation importante des nourrissons et jeunes enfants dans les services d’accueil des urgences.
Par contre si nous tenons compte des consultations par moyens personnels ce sont les 18-30 ans qui consultent le plus à 20,1% (Figure 7). Les plus de 80 ans ne représentent que 7,8% des consultations par moyens propres.
Selon cette étude 40% des patients consultant aux urgences ont plus de 80 ans et les personnes consultant le moins (12%) ont entre 51 et 70 ans. Toujours dans cette enquête les moins de 25 ans représentent 43% des usagers des urgences.
Nous pouvons expliquer le recours important des personnes âgées aux urgences par le vieillissement de la population, même si notre échantillon est beaucoup moins important que dans l’étude de la DREES.
En effet, selon une étude de l’INSEE 32 , le rythme de croissance démographique en Martinique est inférieur à la moyenne nationale (0,7% par an). Au 1er janvier 2008 28,3 % de la population a moins de 20 ans et 19% a plus de 60 ans. Le vieillissement de la population se poursuit, l’âge moyen des martiniquais est de 37,8 ans ce qui en fait le département d’outre-mer le plus âgé.

Sexe

Lors de notre enquête, les femmes ont consulté autant que les hommes (Figure 1).
Elles étaient majoritaires en ce qui concerne les admissions par moyens personnels à 58%. (Figure 6)
Toujours dans cette étude de la DRESS54 les femmes, à toute tranche d’âge, consulteraient moins que les hommes.
Dans notre étude nous ne retrouvons donc pas cette tendance, que nous pouvons expliquer par le biais important que représente la courte durée de l’enquête.
Même si nos résultats ne sont pas statistiquement significatifs avec un p-value à 0.59, nous remarquons dans le tableau 10 que les femmes ont plus consulté de manière « inappropriée » que les hommes.
Dans certaines études, l’âge et le sexe sont des facteurs prédictifs d’une consultation inappropriée aux urgences. Dans l’étude de Bianco et al 9 parue en 2003 sur une population de 541 patients, l’âge jeune et le sexe féminin sont des facteurs significatifs pronostiquant une consultation inappropriée.
Cette tendance est confirmée par d’autres études dont celle de Carret 14 en 2007. 6.2.3 Commune de résidence
Comme le montre notre étude 83,5% des patients consultant aux urgences de Trinité sont originaires de la région Nord Atlantique. (Tableau 1)
Il est évident que les patients pour une question de proximité vont consulter dans un Service d’Accueil des Urgences le plus proche de leur domicile.
Selon une étude de l’ARS2 Martinique parue en 2011 le Nord Atlantique est la zone la moins peuplée en termes de médecins généralistes avec 65 généralistes libéraux pour 100000 habitants dont 51% ont 55 ans ou plus ainsi que 14 spécialistes.
Nous avons réactualisé ces chiffres de 2011 et selon l’annuaire santé outre-mer 2014 50 nous avons retrouvé 41 médecins généralistes pour la région « nord-atlantique », ainsi que 17 spécialistes dont 3 radiologues et 5 médecins biologistes concentrés essentiellement sur Trinité et le Robert.
Cette faible démographie médicale peut expliquer un recours plus important aux urgences. Une étude parue en 2010 et publiée par l’ARS 4 montre que seuls 20 médecins généralistes participeraient à la PDSA dans le Nord Atlantique, ce qui peut favoriser un recours plus fréquent à un service d’accueil des urgences.
Un rapport du Conseil National de l’Ordre des Médecins 46 publié en 2014 confirme une tendance générale à la baisse de la PDS. Seuls 2/3 des départements rapportent un taux de volontaires supérieur à 60%, sur près d’un tiers des territoires il y aurait moins de 10 volontaires pour assurer la permanence de soins. La prise en charge des patients est donc alors assurée par les médecins urgentistes et régulateurs.
D’autre part comme le montre un rapport de la DREES en 2000 19 il existe un lien entre les visites à domicile et les passages aux urgences, ces derniers pouvant être conditionnés par l’absence de déplacement de leur médecin traitant habituel.
La répartition des visites de nuit, dimanches et jours fériés est nulle en Nord Atlantique selon l’ARS4 suite à un rapport en 2011 et pouvant s’expliquer par un vieillissement des praticiens dans les zones déjà désavantagées sur le plan de la démographie médicale. Ces résultats sont corroborés par un rapport de la DREES paru en 200019.

Horaires et jours de consultation.

Au cours de notre étude, 26.7% des consultations ont eu lieu le week-end 73.3% ont eu lieu durant la semaine. Le test de Student retrouve un p-value à 0.26 ce qui est non significatif. (Figure 4)
Selon une étude de la DREES55 en 2003, la fréquentation aux urgences est pratiquement identique la semaine et le week-end ce qui est confirmé par notre étude.
Nous avions observé une diminution progressive de la fréquentation au cours de la journée avec une légère augmentation des passages au petit matin (Graphique 1).
Toujours selon cette même étude le rythme des consultations varie au cours de la journée. Elles augmentent rapidement à partir de 7 heures pour atteindre leur maximum vers 10-11 heures, puis diminuent un peu pendant la pause déjeuner pour connaître une nouvelle hausse vers 14 heures. Au cours de l’après-midi, le flux se réduit progressivement avec un palier vers 16-18 heures. Une remontée s’observe vers minuit, puis vers 1 heure du matin le rythme est au plus bas et stagne jusque 7 heures.
Dans notre étude, nous avons remarqué une augmentation de la moyenne d’âge à l’approche du week-end (Graphique2). En effet 31,4% des consultations chez les plus de 80 ans ont eu lieu le samedi et le dimanche, contre seulement 20.5% chez les moins de 50 ans.
Une étude de la Fondation Nationale de Gérontologie3 en 2006 montre que le recours aux urgences chez les personnes âgées est marqué par de fortes temporalités aussi bien annuelles qu’hebdomadaires. En effet le facteur anxiogène à l’approche du week-end aussi bien pour le patient que pour les accompagnants concernant l’absence de médecin traitant est un facteur prédictif de passage dans un SAU.
De plus, l’aide à domicile ne passe pas le week-end ce qui contribue à amplifier ce phénomène, tout comme l’absence de proches.
Une étude de l’ORS Nord-Pas de Calais24 en 1990 a dénombré que 5% des hospitalisations des personnes âgées s’effectuaient la veille du départ en vacances de leurs enfants.

Mode d’arrivée

Lors de notre étude, 54% des patients sont arrivés par moyens personnels (Figure 5). Ces résultats sont tout à fait semblables à ceux retrouvés dans une thèse 10 parue en 2007 avec une évaluation de 1018 passages aux urgences de l’hôpital Cochin, 550 patients ont consulté par leurs propres moyens et n’ont pas été véhiculés, ce qui représente 54% des patients.
Un rapport du ministère de la santé55 de 2003 évalue à 25% le taux de consultations véhiculées aux urgences, comme le confirme une étude de S.Gentile21 en 2007. Ces chiffres de 2002 et 2007 ont pu évoluer car les dépenses concernant les transports sanitaires sont en augmentation constante comme le montre un rapport de l’ARS 5 publié en 2011.
Nous concernant, 82.8% des patients de plus de 80 ans ont été véhiculés au SAU. Ce même rapport montre une augmentation du recours aux transports sanitaires par rapport à l’âge et l’évalue à près de 50% chez les plus de 80 ans.
Les particularités démographiques et socio-économiques de la Martinique peuvent éventuellement être prises en compte pour expliquer cette différence.

La couverture sociale

A travers notre étude, les patients sans couverture sociale ou ne sachant pas s’ils en possèdent une consultent majoritairement de manière « inappropriée ». (Tableau 12)
Pour autant, la couverture sociale n’est pas un facteur que l’on peut étudier dans notre enquête. En effet le nombre de questionnaires n’est pas suffisamment important pour permettre d’établir des données statistiques.
Dans l’étude de Mandelberg41 en 2000, ce dernier montre que la précarité est bien un facteur prédictif de consultations répétées aux urgences.
Pour autant l’étude Pisarek51 publiée en 2003 ne semble pas retrouver d’excès de consultations aux urgences chez les patients n’étant pas couvert par une assurance maladie.
Seule l’étude de Lang36 parue en 1996 montre par contre que l’absence de couverture sociale est un facteur prédictif de consultations inappropriées.

Devenir des patients

Lors de notre étude, nous retrouvons un pourcentage d’hospitalisation à 24.4% pour l’ensemble des consultations. (Figure 3)
Ce taux d’hospitalisation augmente de façon significative avec l’âge puisque 39% des patients de plus de 70 ans sont hospitalisés suite à notre étude. (Tableau 7)
Nous parvenons à des résultats similaires sur le taux d’hospitalisation par rapport à une étude de la DREES de 200353 qui estime à 20% le taux d’hospitalisation suite à un passage dans un service d’accueil des urgences.
Ce même rapport établit à près de 50 % le taux d’hospitalisation chez les plus de 70 ans. 6.2.8 Durée des symptômes
Dans notre étude, 76% des consultations dites « appropriées » s’avèrent être des patients présentant des symptômes depuis moins de 48 heures.
60% des consultations « inappropriées » sont des patients qui présentent des symptômes évoluant depuis plus de 48 heures. (Tableau 10)
Ce critère est souvent utilisé par les experts pour déterminer le caractère urgent de la consultation. En effet l’étude de Carret et al14 tend à démontrer que le taux de consultations inappropriées est plus élevé si les patients consultent pour des problèmes survenus à plus de 24 heures.

Discussion et analyse du comportement des patients et de leur connaissance des urgences

Consultation préalable chez le médecin traitant

Dans notre enquête, 41% des patients disent avoir pris un avis soit physiquement soit par téléphone auprès de leur médecin traitant ou d’une autre compétence médicale. Ce résultat peut bien entendu être biaisé par un déni ou une sensation de culpabilité mais peut également démontrer un rapport différent au corps médical par des situations socio-économiques ou culturelles différentes. Cette hypothèse n’étant que purement spéculative.
Selon un rapport du Ministère de la Santé55 paru en 2003 concernant des échantillons en France métropolitaine, moins d’un quart des patients consultant aux urgences ont pris un avis médical auparavant.

Nombre de recours aux urgences

Dans notre étude nous retrouvons 58% de primo consultants. Cette différence n’est pas suffisamment significative, les patients n’ayant jamais consulté aux urgences, fréquentent ce service dans les mêmes proportions que les autres.
Nous pouvons tout de même parler de l’étude de Lucas et al39 en 1998 qui montre sur une population de 6523 patients que ceux qui fréquentent régulièrement les urgences ont des pathologies chroniques et sont plus susceptibles d’hospitalisation.
Cette tendance est confirmée dans notre étude avec la notion de traitement quotidien en lien avec la fréquentation du SAU. (Tableau 8). Même si cette dernière est à nuancer car tous les patients présentant une pathologie chronique ne prennent pas nécessairement un traitement quotidien.
Dans le même cadre, on peut parler d’une étude parue en 2000 par Mandelberg41 qui a étudié une population pendant 5 ans consultant plus de 5 fois dans un service d’urgences. Il montre que la précarité, l’alcoolisme et des pathologies chroniques sont des facteurs prédictifs de consultations dans un SAU.
La répétition des consultations dans les services d’accueil des urgences seraient le reflet de plusieurs dysfonctionnements.
Soit il s’agit d’une utilisation consumériste des usagers comme nous le montre E. Lesigne38 dans sa thèse de 2001, soit d’une mauvaise orientation par les urgentistes concernant le devenir post urgences, c’est-à-dire l’orientation des patients après leur consultation dans un SAU vers une structure ambulatoire pour un éventuel suivi.

Pourquoi avoir choisi les urgences plutôt qu’une autre filière de santé ?

Le rapport de la DREES54 de 2003 veut étudier de manière plus approfondie le choix du recours au SAU.
Pour cela il regroupe en 6 catégories les recours aux urgences :
Tout d’abord les patients usagers à qui on n’a pas demandé leur avis et qui représente dans cette étude près de 19%. Dans ce rapport il s’agit essentiellement des patients de plus de 70 ans amenés par les pompiers ou d’autres moyens de transport médicalisé le plus souvent.
Il est donc difficile d’en apprécier la mesure dans notre étude et d’établir une comparaison puisque les patients véhiculés ont été exclus et que l’avis familial a été pris quand la personne n’était pas en mesure de répondre.
La deuxième catégorie concerne les usagers qui ont consulté sur avis médical. Dans notre étude ils représentent 41%. Le rapport de la DREES chiffre cette catégorie à 23% des patients. Nous avons discuté de ces résultats dans le chapitre 6.3.1.
Ensuite il y a les patients qui évoquent un échec des solutions précédentes et qui représentent selon notre étude 10% des usagers. Dans ce rapport ils représentent près de 15%. Nous sommes sur un échantillon de 99 patients ayant consulté spontanément sans avoir eu recours à un médecin généraliste auparavant. Nous nous référons au tableau 4 et notons au total que 10 patients sur 99 ont consulté leur médecin et n’ont pas noté d’amélioration avant de se rendre au SAU.
La quatrième catégorie représente les patients qui ont consulté au SAU comme une alternative à la médecine de ville, soit parce que leur médecin était absent, soit parce qu’ils n’ont pas de médecin traitant.
Dans notre étude 43 usagers déclarent ne pas avoir eu recours à leur médecin traitant soit parce qu’il était absent, soit parce que leur cabinet était fermé ou encore parce qu’ils n’avaient pas de médecin traitant ou enfin que leur médecin était décédé, soit 28% des consultations spontanées. (Tableau 4)
Pour l’étude de la DREES elle représente 14% des usagers des urgences.
Dans une étude menée dans les Hôpitaux Nord de Marseille22, ils estiment ce taux à 24%.
Nous expliquons cette différence comme par le déficit de médecin dans la zone « Nord-Atlantique » comme nous l’avons déjà mentionné précédemment.
Viennent ensuite les patients motivés par un plateau technique et une permanence de soins qui représentent dans notre étude 61 sondés sur 99 patients (Tableau 5), ce qui représente 39.6% de l’ensemble des consultations par moyens personnels.
Selon ce rapport, ils représenteraient 25% de l’ensemble des usagers des SAU et dans l’étude de Gentile27 en 2004 ce taux est estimé à 43,1%.
Finalement on trouve les usagers qui n’avouent pas leur recours aux urgences. Nous retrouvons 1 patient sur les 99 n’ayant pas pris d’avis médical avant de se rendre au SAU qui ne sait pas pourquoi il s’est rendu aux urgences. Cela représente 0,6% de l’ensemble des consultations par moyens personnels. Le rapport de la DREES les estime dans une proportion qui s’élève à 4%.

La notion d’urgence pour le patient

On peut affirmer que le ressenti du patient joue un rôle important dans sa motivation à consulter dans un service d’accueil des urgences.
Les usagers des SAU pensent très souvent que leur pathologie est grave.
Pour 88% des patients leur état de santé nécessite un avis médical en urgence (Figure14).
9.7% des patients consultant spontanément pensent que leur pronostic vital est en jeu ou que leur état de santé nécessite une hospitalisation. (Tableau 5)
La culture médicale qui peut être apportée par les médecins pourrait modifier ce rapport entre ressenti et urgence réelle, l’anxiété générée par la situation étant un facteur d’incompréhension pour le patient vis-à-vis des explications fournies comme le montre l’étude de Byrne 12 en 1997. Les chiffres que nous retrouvons sont similaires à ceux retrouvées dans la thèse de M.
D’après la thèse du Dr Desjardins 18 en 2003, l’attitude des patients est de plus en plus consumériste avec une demande de technicité, de rapidité et d’efficacité de la permanence de soins. Les patients auraient tendance à utiliser les urgences et non plus les consulter.
Nous ne retrouvons pas cette attitude consumériste dans notre thèse, puisque plus de 40% des patients ont cherché un avis médical avant de se rendre aux urgences. Il est important de rappeler le facteur « stress, anxiété ». Le ressenti du patient sur le degré d’urgence de sa situation est subjectif et souvent non adapté à la réalité médicale. Ceci influence de manière non négligeable le nombre de passages au SAU comme le montrent plusieurs études 12 28, en concluant qu’il est aussi important dans un service d’accueil de considérer l’état physique du patient que le facteur psychologique pour éventuellement les orienter vers d’autres structures.
Dans l’étude de Byrne 12 sur 96 patients, 69 ont rapporté un état d’angoisse pour des facteurs multiples qui peuvent aller de la douleur, à ne pas savoir ce qui allait leur arriver, ou encore ignorer leur état de santé et qui les a amenés à consulter dans ces structures.

Méconnaissance des maisons médicales de garde

Nous retrouvons au cours de cette étude que 67% des patients interrogés ne connaissent pas la maison médicale de garde. Cette MMG est pourtant située à l’entrée du centre hospitalier de Trinité et les patients sont obligés de passer devant pour se rendre au SAU. Elle est ouverte depuis près d’un an au moment de notre étude.
L’étude de Northington 44 en 2005 analyse les motivations de 563 patients considérés « non urgents ». 66% des patients dans cette étude ne connaissent pas d’alternative aux urgences pour le problème de santé qui les concerne.
Finalement ces résultats peuvent être liés soit à une réelle méconnaissance du patient lié à un manque d’information des autorités sanitaires et des médias concernant ces structures, soit au ressenti du patient. L’anxiété comme nous l’avons déjà évoqué, la douleur ou les sentiments peuvent altérer le jugement et contraindre le patient à accéder à une structure d’urgence. Dans un rapport de 2006 sur les maisons médicales de garde, le Professeur Jy Grall31 , conseiller général des établissements de santé au Ministère de la Santé, termine en disant « une information grand public est indispensable pour bien faire connaître le nouveau système de permanence de soins ».

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Table des matières

Liste des acronymes
I-Introduction
II-Généralités sur les urgences
2.1 Définition de l’urgence
2.1.1 Dictionnaire
2.1.2 Ecole Nationale de Santé Publique
2.1.3 Conseil National de l’Ordre des Médecins
2.2 Les Services d’Accueil des Urgences
2.3 Une fréquentation exponentielle
2.4 Les Maisons Médicales de Garde
2.4.1 Définition
2.4.2 En Martinique
2.4.3 Fréquentation
III-Objectifs
3.1 Objectif principal
3.2 Objectifs secondaires
IV-Matériels et méthodes
4.1 Population étudiée
4.2 Méthodes
4.2.1 Type d’étude
4.2.2 Période et lieu de l’étude
4.2.3 Recueil des données
4.2.3.1 Temps de recueil
4.2.3.2 Données examinées
4.2.3.3 Avis urgentiste et médecin hospitalier
4.2.3.4 Questionnaire
4.2.3.5 Exploitation des données et outils statistiques
V-Résultats
5.1 Nombre global de patients
5.2 Données générales sur l’ensemble des usagers
5.2.1 Sexe
5.2.2 Age
5.2.3 Commune de résidence
5.2.4 Devenir
5.2.5 Nombre de passage par jour
5.2.6 Répartition des consultations selon les horaires
5.2.7 Proportion de consultations par moyens personnels
5.3 Questionnaire
5.4 Résultats des consultations par moyens personnels
5.4.1 Sexe
5.4.2 Age
5.4.3 Commune de résidence
5.4.4 Devenir des consultations par moyens personnels
5.5 Résultats du questionnaire
5.5.1 Couverture sociale
5.5.2 Emploi
5.5.3 Traitement quotidien
5.5.4 Médecin traitant
5.5.5 Avis médical avant passage SAU
5.5.6 Pourquoi ne pas avoir consulté son médecin traitant ?
5.5.7 Durée d’évolution des symptômes
5.5.8 Pensez-vous venir pour un problème urgent ?
5.5.9 Motivations à consulter au SAU plutôt qu’un médecin généraliste
5.5.10 Nombre de consultations aux urgences en une année
5.5.11 Connaissance des Maisons Médicales de Garde
5.5.12 Pourquoi ne pas être allé à la MMG ?
5.6 Croisement des résultats
5.6.1 Comparaison âge et modes de consultations
5.6.2 Moyenne d’âge sur la semaine
5.6.3 Nombre de consultations par tranche d’âge et sexe
5.6.4 Mode de consultation sur la semaine
5.6.5 Devenir des patients selon l’âge
5.7 Justification de l’urgence
5.7.1 Avis du médecin généraliste exerçant en libéral
5.7.2 Avis urgentiste sur les consultations par moyens personnels
5.7.3 Avis global sur les consultations par moyens personnels
VI-Discussion
6.1 Les biais de l’étude
6.1.1 Les biais de sélection
6.1.2 Les biais de classement
6.2 Discussion et analyse du profil des patients
6.2.1 Age
6.2.2 Sexe
6.2.3 Commune de résidence
6.2.4 Horaires et jours de consultations
6.2.5 Mode d’arrivée
6.2.6 La couverture sociale
6.2.7 Devenir des patients
6.2.8 Durée des symptômes
6.3 Discussion et analyse du comportement des patients et de leur connaissance des urgences
6.3.1 Consultation préalable chez le médecin traitant
6.3.2 Nombre de recours aux urgences
6.3.3 Pourquoi avoir choisi les urgences plutôt qu’une autre filière médicale ?
6.3.4 Notion d’urgence pour le patient
6.3.5 Méconnaissance des maisons médicales de garde
6.4 Discussion et analyse sur les consultations inappropriées
VII-Conclusion
Références bibliographiques
Tables des illustrations
Annexes
N°1 : Questionnaire remis aux patients
N°2 : Consentement
N°3 : Déclaration au CNIL
N°4 : Courrier adressé au chef de service des urgences
N°5 Demande imprimatur
Serment d’Hippocrate

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