Éclaircissement dentaire sur dents vitales

Rappel sur la couleur physiologique de la dent

    La couleur naturelle d’une dent est caractérisée par trois composantes, d’après MUNSELL en 1909 (8) :
• La teinte : elle est déterminée par la longueur d’onde chromatique dominante de la lumière réfléchie. Elle fait partie du spectre visible, c’est à dire entre 400 et 700 nanomètres. Pour la dent, la teinte se situe dans le jaune-orange.
• La luminosité : elle correspond à la quantité de lumière réfléchie qui détermine le caractère plus ou moins sombre d’une couleur. Si tout le spectre de lumière est réfléchi, l’objet est observé blanc. A l’inverse, l’objet sera noir. La luminosité est le facteur le plus important dans la détermination de la couleur.
• La saturation : il s’agit de la quantité de teinte dans le matériau, c’est à dire la densité de couleur. La saturation est principalement due à la dentine, mais prend aussi en compte la translucidité et l’épaisseur de l’émail.
Cependant, ce système de trois composants ne prend pas en compte d’autres paramètres susceptibles de modifier la perception de la couleur. On peut ajouter trois autres paramètres au système colorimétrique : la fluorescence, la translucidité et l’opalescence.
• La fluorescence : lors d’une exposition à un rayonnement ultraviolet non visible, la dent réémet cette lumière dans un rayonnement du spectre visible. La dent présente une fluorescence bleutée, où la dentine en est à l’origine.
• La translucidité : appelée aussi transparence, il s’agit de la capacité de la lumière à traverser, totalement ou en partie, le matériau ou la dent.
• L’opalescence : il s’agit de la capacité de l’émail à différencier les longueurs d’ondes. Des reflets blancs bleutés sont visibles notamment au niveau du bord libre de la dent.
L’appréciation de la couleur d’une dent est souvent attachée à la subjectivité de l’opérateur mais aussi à des facteurs extérieurs comme la source lumineuse utilisée, l’angle d’observation de la dent, l’heure de la journée. (9) Une dent naturelle parfaite n’est ni blanche, ni homogène. Il existe une mosaïque de couleur autour d’une base « blanc-jaunâtre ». (11) La structure dentaire est stratifiée et non homogène. En effet, les phénomènes optiques sont conditionnés par l’arrangement des cristaux minéraux de l’émail et de la dentine, mais aussi par leur taille et leurs constituants. La structure des tissus conditionne donc la perception visuelle de la couleur. La couleur naturelle de la dent est majoritairement donnée par la dentine. En effet, au cours du vieillissement, l’aspect blanc bleuté de la dentine s’estompe à cause de translucide, voire transparent. La dentine devient, quant à elle, moins opaque et plus saturée. L’état de surface, plus précisément la microgéographie, est également important à prendre en compte dans la perception visuelle de la dent. En effet, plus la dent est jeune et rugueuse, plus la quantité de lumière sera importante. Une dent lise (dent âgée) sera moins lumineuse. Enfin, toute modification mécanique, chimique et/ou biologique d’un des tissus entraine un changement de la couleur de la dent, et ce, tout au long de la vie.

Dyschromies intrinsèques pré-éruptives

a. La fluorose : La fluorose est le résultat d’une ingestion excessive de fluor au niveau des tissus durs durant le développement de l’organe dentaire. En cas de surdosage, il peut apparaître des dents. La sévérité de la fluorose va dépendre de l’âge et de la durée d’exposition, mais aussi de la dose. Au moment de la phase pré-éruptive, c’est à dire jusqu’à l’âge de 8 ans, la fluorose est plus susceptible de se développer. Les fluoroses ont été classé en 3 types par Feinman et al. en 1987 :
• Fluoroses simples (coloration brunes, voiles ou tâches blanchâtres ; l’émail est lisse)
• Fluoroses opaques (dents grises avec tâches blanchâtres superficielles et plus ou moins opaques)
• Fluoroses avec porosité (piqueté de surface de l’émail)
Seules les fluoroses simples et opaques sont susceptibles d’être traitées par éclaircissement. Concernant les fluoroses avec porosité, elles seront traitées par recouvrement de surface. (15)
b. Les tétracyclines : La prise de tétracycline, du 4ème mois in utéro jusqu’à l’âge de 7-8 ans, provoque des dyschromies allant d’une coloration jaune uniforme à des bandes de couleur plus soutenue brunâtre/jaunâtre lors de la formation du bloc incisivo-canin. Un complexe tétracyclineorthophosphate de zinc s’incorpore aux cristaux d’hydroxyapatite dans la dentine en formation, entrainant ainsi des colorations. Ce complexe est formé par un phénomène de chélation entre un tétracycline et un calcium. Il existe des récidives après un traitement par éclaircissement. En effet, les molécules de tétracyclines sont capables de se fixer à l’os et peuvent s’incorporer à la dentine par voie sanguine. Les dyschromies par tétracyclines sont classées en quatre degrés par Boksman et Jordan en 1983 :
• Degré 1 : colorations jaunes ou marrons légères et uniformes, sans bandes
• Degré 2 : colorations plus saturées, uniformes et sans bandes
• Degré 3 : colorations gris-marrons / bleutées, très saturées, irrégulières avec bandes
• Degré 4 : colorations très fortes avec bandes et plages irrégulières allant du grismarrons très foncé à violet foncé
Le traitement par éclaircissement est possible pour les degrés 1 et 2 et présente un assez bon résultat. Cependant, il est difficile pour le degré 3, et impossible pour le degré 4. (11)
c. Les anomalies congénitales : Plusieurs anomalies apparues à la naissance sont à l’origine de colorations dentaires :
• Thalassémie : les dents présentent une coloration rose-rouge à la suite de l’infiltration de pigments sanguins dans les tubulis dentinaires.
• Porphyrie congénitale érythropoïétique : les dents sont colorées en brun rougeâtre par l’accumulation de pigments (porphyrines) au niveau des structures dentaires. Elle affecte majoritairement les dents temporaires, mais peut aussi toucher la denture permanente.
• Ictère hémolytique néonatal : il s’agit d’une maladie sanguine transitoire du nouveauné responsable d’une coloration jaune ou verte indélébile de la dentine des dents temporaires, et non des dents permanentes. Elle est due à l’incompatibilité Rhésus foeto-maternelle qui entraine une hémolyse.
• Rachitisme héréditaire vitamine D-dépendant : causée par une carence en vitamine D, cette pathologie peut entrainer des hypocalcémies (responsables d’hypoplasie de l’émail) et des hypophosphatémies (responsables de défauts de maturation de la dentine interglobulaire).
• Cardiopathie congénitale cyanogène : les incisives supérieures présentent une coloration anormale, d’aspect blanc crayeux ou blanc bleuté. Un appauvrissement du sang pulpaire en oxygène serait à l’origine de cette coloration.
• Dyschromies dues aux souffrances fœtales : Lors de la grossesse, il peut survenir des désordres qui peuvent être à l’origine de souffrances fœtales ayant pour conséquence des dyschromies intrinsèques. Ces désordres peuvent être les suivants :
o Les infections maternelles telles que la rubéole, la syphilis ou le cytomégalovirus.
o Les thérapies médicales médicamenteuses telles que les tétracyclines ou le fluor.
o Les troubles nutritionnelles ou toxiques de la mère.
d. Les anomalies génétiques : Les colorations d’origine génétique résultent d’une mutation génétique ou d’une anomalie chromosomique. La survenue d’anomalies de l’émail et de la dentine peut se traduire par les pathologies suivantes :
• L’amélogénèse imparfaite : pathologie génétique héréditaire concernant la structure de l’émail des dents temporaires et/ou permanentes. Sa coloration varie du blanc crayeux au jaune. Il existe trois formes d’amélogénèse : hypomature, hypoplasique et hypocalcifiée.
• La dentinogénèse imparfaite : maladie héréditaire qui affecte les dentures temporaires et permanentes. La dentine présente une structure anormale. En principe, l’émail n’est pas atteint. Les couronnes sont bulbeuses et de couleur grisbleutée à ambrée. Radiologiquement, les racines sont courtes avec des oblitérations pulpaires. Il existe trois types de dentinogénèses imparfaites.
• Les maladies héréditaires, à l’origine de coloration :
o L’érythroblastose fœtale : cette maladie liée à un facteur Rhésus provoque une destruction d’une partie des érythrocytes. Il en résulte une coloration de la dentine en cours de formation.
o L’épidermolyse bulleuse : l’émail présente un aspect hypoplasique.
o L’ichtyose congénitale : les dents présentent en surface une dilacération.
o L’ochronose héréditaire : les dents apparaissent jaunes.
e. Les désordres endocriniens
Les trois troubles endocriniens suivants entrainent une modification de la teinte des dents :
• hyperthyroïdie (coloration blanches laiteuses)
• hypothyroïdie (coloration bleue ou blanche)
• hyperpituitarisme (colorations grises et jaunâtre)
f. Les hypominéralisations traumatiques : Les traumatismes des dents temporaires entrainent des lésions des dents permanentes à l’état de germe et être à l’origine de dyschromies. Trois aspects sont possibles d’après Andreasen :
• décoloration blanche ou jaune de l’émail
• décoloration blanche ou jaune-brun de l’émail avec présence de défauts détectables cliniquement à la surface de l’émail
• décoloration blanche ou jaune-brun de l’émail avec hypoplasie circulaire de l’émail
g. Le syndrome de Turner : Il s’agit d’une pathologie qui atteint les dents temporaires et qui provoque une ostéomyélite locale. Les cellules inflammatoires sont au niveau du germe définitif et entrainent des zones dépourvues d’émail au niveau des dents permanentes.

Examen clinique et consentement éclairé

Le praticien doit débuter la séance par un interrogatoire pour connaître :
• L’étiologie de la dyschromie (tabac, chlorhexidine, tétracyclines, amalgames…) ;
• Les habitudes de vie (fumeur, thé, café…) ;
• La motivation du patient : il est indispensable de cerner la demande esthétique et les attentes du patient.
Ensuite, un examen clinique est nécessaire. Il comporte :
• Un bilan parodontal : le parodonte doit être sain ;
• La recherche de caries et d’obturations défectueuses : si elles existent, elles doivent être traitées avant le traitement d’éclaircissement ;
• L’évaluation des sensibilités au chaud et au froid : s’il existe une hypersensibilité dentinaire, l’éclaircissement peut la majorer (23) ;
• L’évaluation d’éléments contre-indiquant l’éclaircissement (fêlures, érosions ou abrasions importantes…) ;
• Le niveau global d’hygiène ;
• L’évaluation des restaurations en résine et des prothèses en céramique.
Un examen radiographique est aussi réalisé dans le but d’écarter toute pathologie carieuse ou péri-apicale. Il est essentiel d’avertir le patient sur les résultats et sur les contraintes du traitement. Un consentement éclairé écrit et signé est indispensable.

Altération superficielle de l’émail

   Le type d’agent éclaircissant utilisé et la concentration de celui-ci en peroxyde d’hydrogène ont une influence significative sur la microdureté amélaire. (39) Dans la majorité des études, il est noté une perte de minéraux de l’émail pendant le traitement d’éclaircissement externe. Néanmoins, grâce aux mécanismes de reminéralisation de la cavité buccale, cette perte de minéralisation ne constitue pas un risque significatif. Il a été montré grâce au microscope électronique à balayage peu de changements de la surface de l’émail à la suite de l’éclaircissement. Ces changements de surface varient selon le produit d’éclaircissement utilisé. (31) Une étude clinique utilisant quotidiennement un gel de peroxyde de carbamide à 10% pendant 6 mois n’a pas montré d’effets néfastes sur la surface amélaire. Des études ont démontré que les jus de fruits ou boissons gazeuses peuvent être à l’origine de déminéralisation de l’émail. Cette déminéralisation et l’altération morphologique de la surface amélaire sont comparables à celles résultant du traitement d’éclaircissement, mais peuvent aussi être supérieures à celui-ci. (31) Une étude de Kwon en 2015 montre que l’utilisation de peroxyde de carbamide 8 heures par jour pendant 15 jours entraine une déminéralisation de la surface amélaire sur une profondeur de 50 micromètres. Le peroxyde d’hydrogène provoque une déminéralisation de la surface de l’émail, mais celle-ci est réversible, notamment lors de l’utilisation de fluoride de sodium. (29) Malgré le fait que le peroxyde de carbamide ait un impact sur la morphologie de la surface amélaire, celui-ci reste léger par rapport aux altérations importantes provoquées lors de l’utilisation d’acide phosphorique sur l’émail. (40) Dans une étude in vitro, lors de l’utilisation de gel de peroxyde de carbamide à 10%, sous microscope électronique à balayage (SEM), la surface amélaire présente des changements dans sa structure et sa morphologie. L’émail présente une diminution de la microdureté et une augmentation de la rugosité de surface. Les clichés sous microscope ont montré une surface amélaire rugueuse, présentant des piqures et des ondulations. Ces altérations sont plus importantes lors de concentration plus élevée en peroxyde d’hydrogène dans le gel, pouvant aller jusqu’à des érosions. (41) Après l’éclaircissement dentaire, pour permettre une récupération de la microdureté de l’émail, l’utilisation de solutions reminéralisantes est de rigueur telles que les fluorures et la salive artificielle. Cependant, aucun traitement reminéralisant ne permettra de récupérer la rugosité initiale de la surface amélaire. (41) La thérapie quotidienne de fluorure peut se faire sous plusieurs conditionnements, comme par exemple par bain de bouche ou dentifrice. Cependant, le dentifrice doit être sans abrasif. En effet, il est nécessaire de ne pas brosser immédiatement après le traitement les dents avec un dentifrice contenant des abrasifs. Ils pourraient éliminer l’émail ramolli par l’éclaircissement et augmenter l’érosion ou l’usure. (42) Pour redurcir l’émail ramolli, la salive artificielle a aussi montré son efficacité. Néanmoins, la salive présente dans la cavité buccale, du fait de son pouvoir de reminéralisation, permet de palier les pertes de microdureté. Dans les études portant sur les effets des éclaircissants sur l’émail, 71% d’entre elles ont noté une récupération complète de l’émail après le traitement. (43) Il est possible aussi pour réduire la perte de microdureté d’utiliser des gels éclaircissants à base de fluor. En effet, les gels de peroxyde de carbamide fluorés sont capables de réduire la perte de microdureté, mais aussi d’accélérer la récupération de celle-ci après le traitement d’éclaircissement. Ces gels contenant du fluor permettent à l’émail une acquisition en fluorure.

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Table des matières

I. Introduction
II. Généralités
1. Rappels sur la couleur physiologique de la dent
2. Étiologie des colorations dentaires
2.1. Dyschromies extrinsèques
2.2. Dyschromies intrinsèques
2.2.1. Dyschromies intrinsèques pré-éruptives
a. La fluorose
b. Les tétracyclines
c. Les anomalies congénitales
d. Les anomalies génétiques
e. Les désordres endocriniens
f. Les hypominéralisations traumatiques
g. Le syndrome de Turner
2.2.2. Dyschromies intrinsèques post-éruptives
a. La mélanodontie
b. Le vieillissement physiologique
c. Les endodontopathies
d. Les dyschromies iatrogènes
3. Indications et contre-indications à l’éclaircissement dentaire externe
3.1. Indications
3.2. Contre-indications
III. Techniques avec recours au chirurgien-dentiste
1. Les différents agents éclaircissants et leurs mécanismes d’action
1.1. Peroxyde d’hydrogène, ou eau oxygénée
1.2. Peroxyde de carbamide, ou peroxyde d’urée
2. Réglementations européennes
3. Technique au fauteuil
4. Technique ambulatoire
4.1. Étapes préalables à l’éclaircissement dentaire
4.1.1. Examen clinique et consentement éclairé
4.1.2. Nettoyage prophylactique
4.1.3. Enregistrement de la couleur initiale
4.2. Mise en œuvre de l’éclaircissement ambulatoire
4.2.1. Séance 1
4.2.2. Séance 2
4.2.3. Séance 3
4.3. Technique ambulatoire à l’aide de gouttière pré-chargée
5. Efficacité, innocuité, complications
5.1. Efficacité
5.2. Innocuité et complications
5.2.1. Sensibilités dentaires
5.2.2. Effets sur les tissus mous
5.2.3. Effets sur les matériaux de restaurations dentaires
5.2.4. Altération superficielle de l’émail
5.2.5. Les risques généraux
IV. Techniques sans recours au chirurgien-dentiste
1. Produits en vente libre
1.1. Règlementation européenne
1.2. Les différents produits en vente libre dans le commerce
1.2.1. Les dentifrices
a. Efficacité
b. Innocuité et complications
1.2.2. Les bains de bouche
a. Efficacité
b. Innocuité et complications
1.2.3. Les chewing gum
a. Efficacité
b. Innocuité et complications
1.2.4. Les gouttières universelles
a. Efficacité
b. Innocuité et complications
1.2.5. Les bandes
a. Efficacité
b. Innocuité et complications
1.2.6. Les vernis
a. Efficacité
b. Innocuité et complications
1.2.7. Le fil dentaire
a. Efficacité
b. Innocuité et complications
1.2.8. Les brosses à dents
a. Efficacité
b. Innocuité et complications
2. Le « fait maison »
2.1. Le citron
2.1.1. Efficacité
2.1.2. Innocuité et complications
2.2. Le bicarbonate de sodium
2.2.1. Efficacité
2.2.2. Innocuité et complications
2.3. Le charbon
2.3.1. Efficacité
2.3.2. Innocuité et complications
2.4. Autres
3. Les bars à sourire
V. Tableaux de synthèse
VI. Conclusion

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