Échelle de comportement verbal en vie quotidienne de patients neurodégénératifs présentant un trouble du langage

Le vieillissement pathologique de la population ne cesse d’augmenter, avec des répercussions très importantes dans la vie des patients. Les pathologies neurodégénératives entraînent des troubles cognitifs et comportementaux, provoquant des nombreux impacts sur la communication langagière, qui à son tour porte atteinte à leur vie sociale et professionnelle. Aujourd’hui, en France, plus de 900 000 personnes sont touchées par la maladie d’Alzheimer (MA) (https://institutducerveau-icm.org/fr/). L’aphasie primaire progressive (APP) touche environ 7 personnes sur 100 000 chaque année (http://institutmemoire.aphp.fr). D’authentiques troubles du langage sont présents dans ces deux pathologies. Dans la MA, le trouble du langage survient de manière précoce dans 10% des cas (Cardebat et al., 1995 ; Colette et al., 2008). Quant à l’APP, le trouble du langage est au premier plan, au moins les premières années d’évolution. Ces troubles concernent les différents aspects linguistiques selon les variantes d’APP (syntaxe, lexique, phonologie) et dans la MA, ce qui retentit sur les aspects communicationnels du langage (Macoir et al., 2014). Selon le DSM-5 (2013), ces aspects concernent l’utilisation sociale de la communication verbale (et non verbale), la capacité à suivre les règles de la conversation et comprendre ce qui n’est pas explicitement indiqué. Les répercussions sur la vie des patients, notamment sur leur vie sociale, entrainent souvent un isolement au sein même de leur famille. La prise en charge orthophonique de ces maladies neurodégénératives est préconisée (HAS,2009) avec comme enjeu majeur le maintien de la communication fonctionnelle le plus longtemps possible afin de garantir le maintien du lien social.

En neurologie, il existe des échelles destinées à évaluer l’impact des troubles du langage dans la vie quotidienne des patients avec une atteinte vasculaire comme « l’Échelle de la communication verbale de Bordeaux » (ECVB) (Darrigrand et Mazaud, 2000) ou l’« EcoMim » (Gaudry, 2010). Cependant, elles se heurtent à l’incapacité du patient avec une atteinte mnésique de porter un regard rétrospectif sur son trouble et d’autre part, au biais lié au trouble de la compréhension orale qui rend le résultat de ces échelles largement inexploitable, et elles sont destinées uniquement au patient (Macoir et al., 2009).

Matériel (Echelle NVBS)

Présentation de l’échelle

Le questionnaire est une échelle verbale constitué de 57 questions réparties en trois domaines : la vie quotidienne, la pragmatique et les aspects fonctionnels du langage. La partie vie quotidienne comprend 13 questions et s’intéresse à l’impact des troubles de la communication sur les activités de tous les jours, sur la vie sociale et sur les loisirs du patient. Les questions sont orientées sur des activités faisant appel au langage (le téléphone, la télévision, la lecture, faire les courses, la cuisine, des sudokus). La partie pragmatique comprend 25 questions. Ici, nous nous intéressons à la prise de parole, la gestion de l’échange verbal ainsi qu’à la gestion de l’information en contexte. Les questions portent sur l’activité verbale et l’évaluent quantitativement et qualitativement (pertinence, informativité, intelligibilité, cohérence, et but). Nous cherchons aussi à savoir si le patient parvient à maintenir une discussion et arriver au bout de ce qu’il veut dire. Un autre volet de la NVBS mesure, lors des échanges verbaux, la capacité du patient à reformuler ses propos en cas de « pannes » conversationnelles, qu’elles soient hétéro- ou allo déclenchées. La forme du contenu verbal fait également l’objet de ce volet comme le recours à des formules stéréotypées ou vides de sens. Dans le volet « gestion de l’information », les questions concernent plus particulièrement la pragmatique sociale: respect des tours de parole, le partage de nouvelles connaissances, des persévérations sur un sujet de prédilection, l’utilisation des déictiques, la maîtrise de l’implicite et de l’humour (en expression et en compréhension), l’adaptabilité langagière en situation formelle et informelle, l’attention à autrui dans le choix des propos et des formes, ainsi que la présence d’une agressivité verbale injustifiée dans un contexte formel ou informel. Enfin, le volet fonctionnel comprend 17 questions. Elles concernent la perception de la part de l’aidant de difficultés liées à ces différents niveaux du langage. Il s’articule en quatre parties : la production langagière, la morphosyntaxe, le lexique et une partie s’intéressant à la voix, la prosodie et la phonologie. La production langagière permet de renseigner sur la présence de disfluences (pauses vides, hésitations, retours en arrière) et leur impact sur la continuité du discours. Pour la voix, la phonologie et la prosodie, il est question des changements du débit, de la modulation de l’intonation, l’intensité vocale ainsi que l’articulation. Les questions portant sur le système syntaxique s’intéressent à l’utilisation appropriée du genre grammatical, des temps verbaux et des mots fonctionnels (articles, prépositions). L’accès lexical est abordé de manière qualitative par le biais de questions sur des substitutions, déformations et logatomes et par le recours aux définitions au sein d’un échange verbal.

Cotation

Les aidants répondent selon une échelle basée sur la fréquence du trouble. Les questions s’orientent soit sur l’évaluation et l’évolution du trouble déjà présent (exemple : maintientil la discussion sans s’égarer dans des commentaires) soit sur l’apparition d’un trouble (exemple : Le patient cherche-t-il ses mots plus qu’avant ?). Une question sur la présence d’un trouble connaît un score maximal de 4 et renvoie à la fréquence « jamais » et un score minimal « toujours », en revanche, une question sur l’absence du déficit requiert un maximal de 4 et renvoie à la fréquence «jamais ». Les réponses sont cotées de 0 à 4, le score 0 équivaut à une atteinte sévère alors que le score 4 à l’absence du trouble ou l’absence de changement. Le score maximal de la NVBS est de 228, un sous-score est calculé pour chacune des sous-parties (volets) : la vie quotidienne avec un score maximal de 52, la pragmatique avec un score maximal de 104 et le volet fonctionnel avec un score maximal de 72. Le calcul pondéré des sous-parties des volets a également été appliqué.

Score total – (score patient x 10) divisé par score total. 

Le score total correspondant au score maximal global de l’échelle ou du maximal du sousscore s’il s’agit de la pondération d’un volet, ou de la sous-partie d’un volet. Les sous-parties du volet Vie Quotidienne sont les activités de tous les jours (ATJ) et la vie sociale et les loisirs (VSL). Dans le volet Pragmatique, nous avons la prise de parole et la gestion de l’échange verbal (PGV) ainsi que la gestion de l’information en contexte (GIC). Enfin, pour le volet Fonctionnel, nous avons les sous-parties de la production langagière (PL), la voix, prosodie et phonologie (VPP), la syntaxe (M) et le lexique (L). Plus la valeur de cette pondération est élevée, plus l’atteinte est sévère. A titre d’exemple, un des sujets contrôle a eu un score total de 220/228, sa pondération s’élève à 0,35. A l’inverse, le patient le plus touché de notre cohorte à un score total à la NVBS de 93/228, sa pondération s’élève à 5,92.

Population

Le recrutement des aidants s’est déroulé de janvier à mars 2021 au sein de l’Institut de la Mémoire et de la Maladie d’Alzheimer (IM2A) de l’hôpital de la Pitié Salpêtrière, centre référent du diagnostic de la maladie d’Alzheimer et centre de référence national « démences rares ou précoces ». Vingt-deux aidants de patients avec une plainte langagière présentant un diagnostic de MA ou APP, et des sujets sains appariés en âge sans antécédents neurologiques ont répondu à l’échelle. Trois groupes de sujets ont été recrutés :
– Un groupe de patients MA (N=11) ; Un groupe de patients APP (N=11)
– Un groupe de sujets sains contrôles (N=3)

Des critères suivants ont été retenus pour tester la comparabilité des groupes (MA) et APP : la moyenne d’âge, et la durée d’évolution de la maladie, le niveau d’instruction ainsi que le score de MMS et de la BREF. Comme illustré   les patients MA et APP sont comparables selon tous les critères retenus. Concernant le critère de l’âge et du niveau d’étude, les groupes sont comparables avec une significativité respective de 0, 459 et 0, 451. Les groupes sont également significativement comparables sur le critère du nombre d’années d’évolution de la maladie avec une p value de 0,721. Enfin, concernant la moyenne du MMS et de la BREF, les groupes sont significativement comparables avec une p-value de respectivement 0,171 et 0,648.

Protocole de passation

La NVBS a été directement présentée aux aidants principaux lors de leur présence à l’M2A. Un formulaire de consentement leur a également été transmis et signé par chaque participant. Le temps de passation moyen chronométré de la NVBS est de 10 minutes, suivi d’un entretien avec l’aidant, afin de faire un retour sur les questions. Étant donné le contexte sanitaire, certains formulaires nous sont parvenus par mail et les entretiens approfondis se sont déroulés par téléphone pour quatre patients. Les aidants ont jugé que les questions étaient claires et précises. De nombreux aidants ont trouvé les questions très pertinentes et certaines les ont amenés à réfléchir à des situations de langages qui posaient des difficultés aux patients, auxquelles ils n’avaient pas forcément fait attention.

Méthode statistique

Les tests statistiques ont été réalisés avec le logiciel IBM SPSS. Étant donné notre faible échantillon et malgré une distribution normale des données, nous avons opté pour des statistiques non paramétriques pour les analyses de comparaison entre les groupes de sujets. Le premier volet d’analyse statistique porte sur une analyse descriptive des sujets (âge, nombre d’années d’étude, nombre d’années d’évolution de la maladie) afin de déterminer si nos trois groupes sont comparables. Nous avons ensuite effectué une analyse comparative entre les trois groupes en utilisant le test de Kruskall-Wallis. Le seuil de significativité a été fixé à p<0,05. Enfin, nous avons corrélé les scores à la NVBS et les scores de certaines épreuves des bilans orthophoniques et neuropsychologiques, considérés comme les plus évocateurs. Pour cela, nous avons recueillis pour chaque patients les scores aux épreuves du MMS, de la BREF, de la déno40 et DO80, des fluences littérales et sémantiques ainsi que le score en discrimination verbale. Le MMS permet d’évaluer l’efficience cognitive globale (Derouesné et al. 1999), la BREF permet d’établir et mesurer un syndrome frontal (Dubois et al., 2000). Les épreuves de dénominations avec la DO80 (Deloche et Hannequin, 1997) et la deno40 (Merck et al., 2011) et de fluences permettent d’évaluer les capacités lexico-sémantiques du patient et la discrimination verbale de la BDAE évalue la compréhension orale des patients (Goodglass et al. 1972). Concernant les analyses de corrélation, étant donné que la distribution des données suit une loi normale et que l’ensemble de données correspond à des données quantitatives, nous avons opté pour des corrélations paramétriques de régression linéaire de Pearson, en appliquant une correction de Bonferroni avec le seuil de significativité fixé à p < 0,01.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

I)INTRODUCTION
II) GENERALITES
III) METHODOLOGIE
IV) RESULTATS
V) COMMENTAIRES ET DISCUSSION
VI) CONCLUSION  
VII) REFERENCES
ANNEXES
RESUME

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *