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Géologie et sol
Sur le plan géologique, le site d’étude appartientau plateau calcaire de Mahafaly du Sud de l’Onilahy. Il est constitué principalement de la zone de Karoo (composée des forma-tions secondaires de l’ISALO et de SAKOA), du plateau calcaire proprement dit et de la zone côtière (Besairie, 1972). Soalara-Sud est recouvert par des sols de nature dunaire et/ou sableux peu évolués constitués des sables beiges et des sables roux, et de nature calcaire sur affleurement de grès calcaires (Besairie, 1972). Vers l’Est, le plateau Betio-ky-Sud est constitué par des sols ferrugineux provenant de l’altération des grès ferrugi-neux indurés (Besairie, 1972, Obs.pers) et d’un plateau calcaire recouvert d’une carapace calcaire plus ou moins altérée (Besairie, 1972 ; Obs. pers).
Contexte biotique
La végétation du site d’étude est formée par des urrésfo xérophiles qui se caractérisent par des formes d’adaptation plus ou moins marquées à la sécheresse (Koecklin et al. 1974, Guillaumet et Koecklin, 1971, Salomon, 1987). Un taux exceptionnel d’endémicité (Koecklin et al., 1974), allant jusqu’à 90% au niveau spécifique (Salomon, 1987), carac-térise également cette formation végétale. Troispesty de fourrés xérophiles peuvent être distingués selon le type de substrat (Salomon, 1987) :
– Le fourré sur sable calcaire (dune encrouté et sable beige) : la végétation est plutôt do-minée par Euphorbia stenoclada Baill (Euphorbiaceae), Commiphora lamii H. Perrier (Burseraceae), Alluaudia comosa Drake (Didieraceae) et Leptadenia madagascariensis Decne. (Apocycenacea); elle est aussi caractérisée par une strate supérieure discontinue de hauteur moyenne 3-4 m ;
– Le fourré sur sable décalcifié (sable roux) : c’est un fourré dominé parDidierea mada-gascariensis (Didieraceae) (photo 1), Adansonia fony Baill. ex H. Perrier (Malvacea) (photo 2), Euphorbia laro Drake (Euphorbiaceae), Pachypodium geayi Costantin & Bois (Apocynaceae), Gyrocarpus americanus Jacq. (Hernandiaceae), Chadsia grevei Drake (Fabaceae), et Acacia sp Mill. (Fabaceae). Elle est aussi caractérisée par des strates supé-rieures discontinues constituées d’arbustes de 6-7 m de hauteur, mais quelques arbres dépassent 10 m de haut, tels que lesA. fony et les E. laro ;
– Le fourré sur dalle calcaire : sur les croutes calcaires particulièrement aride et sub-aride, le fourré se fait rabougri de type arbustif de 3-4 m de hauteur avec des espèces buissonnantes telles que Stereospermum bernierri DC. (Bignoniaceae), Commiphora sp, Euphorbia milii Des Moul. (Euphorbiaceae), les Alluaudia comosa (Drake) Drake (Di-dieraceae) et les Croton sp Müll. ( Euphorbiaceae).
Contexte humain
Population
La Commune de Soalara-Sud est peuplée en majorité arp les Tanalana et dans une moindre mesure de Vezo. Les Tanalana semblent se rattacher à la migration Mahafaly de l’époque Maroserana (XVI-XVIII siècle) et probablement à une séparation et/ou rup-ture avec les anciennes dynasties Mahafaly et Maroserana (Bernard, 1978). Les Tanalana sont des agro-éleveurs mais le contact avec la mer et l’influence des Vezo poussent plu-sieurs d’entre eux à s’orienter vers la pêche (Raoliarivelo et al., 2010). Les Vezo, surtout les jeunes, ont tendance à migrer vers les zones pl us poissonneuses pendant une période de l’année tandis que les Tanalana sont plutôt sédentaires.
Par contre, la commune de Betioky-Sud est peuplée majoritairement par des Mahafaly, qui sont des agro-éleveurs (Bernard, 1978).
Activités économiques
Pour Soalara-Sud, l’élevage extensif des petits ruminants (caprins et ovins), la fabrica-tion de charbon de bois et dans une moindre mesure, la pêche et l’agriculture sont les principales activités des populations locales de lacommune (Raoliarivelo et al., 2010 ; Rabeniala et al., 2009). La quasi-totalité du charbon produit dansla commune est évacué vers la ville de Toliara. D’autres activités telles que les petits commerces, les transports terrestre (charrette à boeufs ; kibaroa) et maritime, sont également pratiquées par une minorité. Les projets d’exploitation minière dans el site d’étude, aboutissant à la construction d’un port d’évacuation des produits à Soalara (calcaire de Soalara et charbon de terre de Sakoa), vont bouleverser les activités économiques des populations de cette commune.
Pour Betioky- Sud, l’activité est agro-pastorale. L’agriculture y est plus développée car les précipitations sont relativement plus importantes. La culture du maïs (Zea mays, Gramineae), du manioc (Manihot durcis, Euphorbiaceae), de la patate douce (Ipomea batatas, Convolvulaceae), du melon (Cucumis melo, Cucurbitaceae), des légumineuses, le pois du Cap (Phaseolus lunatus L, Fabaceae), le haricot (Phaseolus vulgaris, Faba-ceae) et l’arachide ( Arachis hypogaea. L., Fabaceae) constituent les principales activités agricoles des populations locales (Bernard, 1978). Une partie des récoltes des produits vivriers (manioc, patate douce, maïs) est consacréeà la consommation humaine et l’autre partie est vendue aux marchés locaux pour subveniraux besoins du ménage (Op. cit.), et écoulée ensuite vers Toliara par les collecteurs Bernard,( 1978). L’élevage extensif de bovin prédomine aussi dans la commune de Betioky-Sud, parfois associé à l’élevage des petits ruminants (Op. cit.) et des volailles. Pour les Mahafaly, les bovins sont utilisés comme une épargne et ils ne les vendent qu’en cas d’évènements exceptionnels (funé-railles, mariage, maladie, année de mauvaise récolte, etc.). Les bovins symbolisent la richesse et, leur vente se traduit par un amoindrissement du statut social de leurs proprié-taires (Bernard, 1978). L’existence de savane herbeuse assure la survie des troupeaux bovins et leur présence est une source d’insécuritéliée au vol de zébus par des bandits (dahalo ou malaso). La fabrication de charbon de bois est aussi une activité importante à Betioky-Sud. Elle assure l’approvisionnement en charbon de bois du marché local des villes de Toliary (WWF, 2012), d’Ilakaka, et de Sakaraha (Mana, 2001). L’exploitation de la mine de charbon de terre de Sakoa offre également des emplois à la population de Betioky-Sud.
METHODES
Rappel des problématiques et des hypothèses de re- cherches
Les questions de recheches qui ont été posées sont:
(1) Est-ce que l’écosystème des fourrés xérophilesest résilient au niveau paysager ?
(2) Qu’est-ce qui conditionne son fonctionnement (diversité, structure et composition floristique) au niveau parcellaire ?
Trois hypothèses ont été émises pour y répondre:
– Les fourrés xérophiles présentent une faible résilience : Ils tendent à disparaître car leur régénération ne comble pas la perte de couverture forestière causée par les activités anthropiques (conversion en terrain agricole et coupe de bois pour diverses raisons). Des classifications d’images satellitaires de différentes dates et des détections de changments ont été réalisées pour tester cette hypothèse.
– Le type de sol et la précipitation liée à la localisation selon un gradient Est/Ouest, conditionnent la structure, la diversité et la composition floristique des fourrés xé-rophiles.
– Les activités anthropiques qui se traduisent parles usages des terres affectent éga-lement le fonctionnement des écosystèmes des fourrés xérophiles (diversité, struc-ture, composition floristique). Des relevés floristiques le long de gradients de précipita-tion, de types de sols (facteurs maîtrisés) et selon les différents usages des terres (facteur aléatoire) ont été faits pour vérifier ces 2 dernières hypothèses.
Etude des dynamiques du couvert forestier
Les données satellitaires et la classification
Des images Landsat 7 de 30 m de précision, provenant des catalogues d’images d’archives issues des capteurs ETM+ ont été exploitées : ETM+ de Landsat des scènes 160-076 et 160-077, pour les dates du 11 Avril 1989, 06 Mai 2001 et 07 Mai 2010. Des corrections atmosphériques ont été faites afin d’éliminer les effets liés aux angles d’incidence solaires et ceux des variations des conditions atmosphériques, lesquels chan-gent les propriétés spectrales spécifiques des catégories d’occupation des sols sur les images. Des corrections radiométriques ont également été faites afin d’améliorer la visi-bilité des images. Le traçage des zones d’entraînement a été fait à l’aide d’images Google Earth et des visites de terrain effectuées en Octobre 2011. Des travaux de vérité-terrain, réalisés en Avril 2012, ont permis de mettre en place les zones de validation. Une classification supervisée utilisant l’algorithme SVM (Séparateur à Vaste Marge) a en-suite été appliquée aux images, pour les 3 dates considérées. Une matrice de confusion et un coefficient kappa () ont été calculés pour estimer l’exactitude de classification des images 2010. Ce coefficient mesure l’intensité de la concordance entre deux jugements catégoriels. Il est proche de 0 lorsque la concordance est faible et de 1 lorsqu’elle est très forte (Girard et Girard, 1999 ; Pontus, 2000). Tous ces traitements d’images satellitaires ont été réalisés avec les logiciels ENVI 4.8 et ArcGis 9.3. Les classes prédéfinies sont :
– Bas-fourrés (BF): Formation arbustive de 3 à 5 m de hauteur, se développant sur des substrats calcaires (dalle calcaire) ou sableux (sables roux et beige) et occu-pant la partie ouest du site d’étude ;
– Bas-fourrés dégradés (BFD) : Formation arbustive de3 à 5 m de hauteur, se déve-loppant sur les mêmes substrats que les bas-fourrés, mais avec une densité de li-gneux plus faible et un spectre biologique plus restreint (dominance des arbustes et absence des autres formes biologiques telles que les lianes). La dégradation provient de la pratique de la fabrication de charbon de bois et dans une moindre mesure, le paturage de petits ruminants. Les BFD peuvent également provenir de l’abandon définitif de parcelles qui ont servi de vala (espace clos, entouré de haies vives, cultivé en partie et pouvant égalementservir de réserve de fourrage herbacé pour les ruminants) il y a longtemps ;
– Haut-fourrés (HF) : Ce sont des formations arbustives de 5 à 8 m de haut avec des émergeants de plus de 10 m, se développant sur dessols calcaires ou sur des sols ferrugineux. Elles dominent la partie est du site d’étude (Betioky-Sud) ;
– Haut-fourrés dégradés (HFD) : Formations arbustivesde moins de 5 m de hauteur et se développant sur les mêmes substrats que les auth-fourrés mais avec une den-sité de ligneux plus faible et un spectre biologique plus restreintes (absence de lianes). Elles se localisent dans la parties est du site d’étude (Betioky). La dégra-dation est essentiellement causée par la fabrication de charbon de bois et l’agriculture sur brûlis ( hatsake) et dans une moindre mesure par le pâturage bo-vin ;
– Zone agricole et d’habitation : Il s’agit de mosaïq ue terrain cultivé/sol nu/recrû post-agricole ;
– Savane : Formation herbeuse avec un tapis graminéende 20-40 cm de hauteur et recouvrant complètement le sol pendant les saisons de pluie.
Analyse diachronique: Détection de changement (Landsat de 1989, 2001 et 2010)
Deux matrices de transition ont été élaborées pouranalyser les changements d’occupation des sols en 1989-2001 et 2001-2010 (ENVI 4.8). C’est une matrice carrée qui résume les changements d’occupation des sols pendant une période donnée. Les cel-lules de la matrice contiennent les proportions, en terme de superficie, des classes d’occupation des sols OS i, à l’instant initial t 0, ayant passé à d’autres classes d’occupation des sols 0S j à l’instant final t 1.(Bamba et al., 2008). Les colonnes de la ma-trice indiquent les états initiaux d’occupation des sols (OSi(t0)) et les lignes montrent les états finaux (OSj(t1)). Les détails de la méthode sont développés parontusP et al. (2004). Des schémas de transition ont également été établisàpartir des classes prédéfinies de la classification et sont présentés ci-dessous.
Les facteurs affectant la répartition de la végétation des fourrés épineux (composition floristique, diversité etsructure)
Echantillonnage
Les facteurs qui peuvent potentiellement affecter la végétation dans le site d’étude sont :
(i) la précipitation qui augmente d’ouest en est, (ii) les types de sols et (iii) les usages des terres. La précipitation a été classée en 3 modalités : (i) Faible (P<500 mm/an), à l’ouest, près de la mer, (i) Moyenne, au milieu et Forte (P>600 mm/an), à l’est, du coté de Betio-ky-Sud. Ce gradient de précipitations peut également être assimilé à un gradient de posi-tions géographiques d’ouest en est. Les types de sols sont : (i) Sols calcaires, dominés par des dalles calcaires, (ii) Sols calcaires altérés avec des blocs de roches calcaires de taille plus modeste (<50 cm), (iii) Sable roux, et (iv) Sols ferrugineux. L’échantillonnage de la végétation s’est basé sur ces 2 facteurs (Sols et précipitation ; Tableau 1). Seules les formations ligneuses ont été échantillonnées.
Relevés floristiques
Les relevés floristiques ont été faits à la fin dela saison de pluie (mars et avril 2012). Les placeaux de relevé ont été mis en place dans des zones homogènes qui se caractérisent par l’uniformité de leurs conditions écologiques aparentes (type sol, climat et homogé-néité de la physionomie de son couvert végétal). Lafigure 4 montre le dispositif de relevés. Les arbustes de plus de 1,3 m de hauteur, ains que les lianes adultes, que l’on quali-fie d’individus semenciers, ont été inventoriés surune surface de 20 m X 20 m partagée en quatre placettes de 10 m X 10 m. Ensuite, une placette (partie hachurée, Figure 4) a été choisie au hasard pour l’étude de la régénération qui consiste à inventorier tous les individus de moins de 1,3 m ainsi que les lianes jeunes, qui sont les individus de régéné-ration.
Le recouvrement global des herbacées (Rg) a été évalué par la méthode de relevé linéaire le long d’une ligne de 10 m pris au hasard dans le placeau d’étude (Daget et Poissonet, 1971 ; Rakotoarimanana et al., 2008). Des observations de présence ou d’absence de plante herbacée ont été effectuées tous les 10 cme long d’un transect de 10 m de long répétés 3 fois, ce qui correspond à un échantillonnage de N=300 points par placeau. Le recouvrement global est donné par la relation suivante : Rg=100*(N-n)/N
Avec, n le nombre de points où le sol nu a été observé.
Au total, 30 points de relevés ont été inventoriés(Tableau 1). Les paramètres de relevé dans les placeaux (nom vernaculaire, la hauteur totale, l’origine et le type biologique ; Annexes III) ont permis de calculer les variables de diversité et de structure résumés dans le Tableau 2. Des herbiers ont été récoltés ntdoles identifications ont été faites au Parc Botanique et Zoologique de Tsimbazaza (PBZT) d’Antananarivo et avec l’aide de la base des données floristiques Tropicos du Missouri Botanical Garden (MBG).
Facteurs conditionnant la diversité et la structurede la végétation ligneuse
Le coefficient de corrélation entre les variables de structure et de diversité et celles du milieu est hautement significatif (ρ=0,81 ; P<0,001). Le premier axe qui explique plus de 75% de la co-inertie totale est le seul qui a été onsidéréc (Annexe X). En effet, les co-inerties expliquées par les autres axes sont inférieures à la moyenne des co-inerties asso-ciées à tous les axes (Annexe V). Le premier axe de co-inertie oppose l’indice de régula-rité (R) à (i) la densité des lianes (Dl), (ii) à celle des ligneux, à (iii) la richesse spéci-fique (S) et à (iv) la hauteur moyenne (Hm ; Figure 8a). Le premier axe oppose égale-ment (i) les placeaux sur sols calcaires (SC), sous une faible précipitation (PFb) et sur des sites de fabrication de charbon de bois et de pâturage de petits ruminants (CPR) aux placeaux sur sols calcaires altérés et ferrugineux(SCa et SF), sous une précipitation forte (PFt) et sur des sites de fabrication de charbon de bois et de pâturage de bovin (CB ; Fi-gure 8b). Les facteurs qui affectent le plus la diversité et la structure de la végétation ligneuse du site d’étude sont : les types de sols, le gradient de précipitation et dans une moindre mesure l’usage des terres.
Les paramètres les plus sensibles à ces facteurs sont : la densité de lianes, la densité des ligneux, la richesse spécifique, la hauteur moyenneet l’indice de régularité. Les analyses de variance confirment globalement ces résultats.
DISCUSSION
Classification fiable d’images satellitaires de faible résolution
L’analyse des dynamiques de la couverture forestière par la méthode de classification d’images satellitaires à différentes dates est courante en milieu tropical humide (Green et Sussman, 1990 ; Vagen, 2006 ; Eckert et al., 2010 ; Ferraz et al, 2005 ; Texeira et al, 2009) et plus rare en zone semi-aride (Sanchez et al, 2005 ; Boletta et al., 2006 ; Gaspar-ri et Grau, 2009 ; Quesada et al, 2009 ; Songer et al, 2009). Les précisions de la classifi-cation des images 2010 sont bonnes (=0,94 et précision globale>95%). Par contre celles des classifications des dates précédentes (1989 et2001) n’ont pas été évaluées faute de zone de validation. C’est une faiblesse des méthodes diachroniques de détection de changements sur des images satellitaires : Le traça ge des zones d’entraînement des images des périodes précedentes dépend de l’expérience et de la connaissance du terrain du thématicien (forestier et/ou écologue) et du téldetecteur et leur véracité ne peut pas être vérifiée. Les classes d’occupation des sols entifiéesid ne tiennent pas compte des types de sols qui peuvent affecter la diversité, lastructure et la composition floristique de la végétation en zone semi-aride (Tableau 4, 5 et 8; Brinkman et al., 2009 ; Zemmrich et al., 2010 ; Cheng et al., 2011). En effet, la classe des BF recouvrent deux substrats bien distincts : les dalles calcaires et les sables roux et celles des HF sont supportés par des sols calcaires avec des roches plus altérées et pardes sols ferrugineux. Une fusion des classes de fourrés en BF et HF avec leurs états dégradés a été adoptée à cause de la faible résolution des images utilisées (30 m). En effet,al prise en compte des types de sols dans la classification des fourrés (BF sur sable roux etsur dalle calcaire, HF sur sols calcaire et sur sols ferrugineux) a occasionné d’importantes confusions et a mis en évidence des transitions abérrantes lors de la détection de changements (sable roux/dalle calcaire et vice versa ou sols calcaires/sols ferrugineux et vice versa). En effet, les transitions pos-sibles concernent les classes fourrés/fourrés dégradés/zone agricole et d’habitation mais aucune transition entre les différents types de sol ne doit avoir lieu. En effet, l’alteration des calcaires pour aboutir au sable roux ou aux sols ferrugineux est un processus pédo-génétique long (Lamouroux, 1975 ; Reolid etal, 2008) qui ne serait pas observable pen-dant les 21 ans d’étude et l’évolution des sables ouxr et sols ferrugineux en sols calcaires est quasi-impossible puisque les premiers sont des sols plus évolués qui proviennent en partie de l’altération des seconds (Lamouroux, 1975 ; Reolid et al, 2008). Cette non prise en compte des types de sols dans la classification du couvert forestier engendre une perte d’information. En effet, certaines activités comme la fabrication de charbon de bois et l’agriculture se pratiquent de façon sélective par rapport aux types de sols. Par exemple, la fabrication de charbon de bois se pratique essentiellement sur des fourrés sur sable roux dans la commune de Soalara Sud (Radosy, 2013). Aussi, les fourrés sur sable roux peuvent-ils subir des pressions anthropiques plus élevées et peuvent être associés à une vitesse de déforestation plus importante.
Les transitions BF/HF incluant leurs états dégradés, mises en évidence par les détections de changements (Figures 5 et 6), ne correspondent probablement pas à des phénomènes écologiques effectifs et peuvent être attribuéesl’imprécisionà des classifications due à la grande taille des pixels des images Lansat utilisée (30 m). En effet, les BF et HF sont des formations climaciques conditionnées par la précipitation.
La classification des formations ligneuses en BF et HF, avec leurs états dégradés (BFD et HFD), et la connaissance des principales activités des populations locales des sites d’études ont permis d’analyser globalement les processus de déforestation qui sont en œuvre.
Des classes synthétiques, mais représentatives desoccupa-tions des sols
La séparation des BF des BFD a été assez aisée (<2%de confusion ; Tableau. 4). Les BFD correspondent globalement aux fourrés sur sableroux où s’exercent préférentielle-ment des activités de fabrication de charbon de bois dans la commune de Soalara (Rado-sy, 2013). Par contre, il existe une confusion assez importante entre les HF et les HFD (~19% ; Tableau 4). La plus grande fragmentation des fourrés du côté de Betioky (Carte 4) liée en partie au nombre élevé de villages qui’ys trouvent (relativement à la commune de Soalara-Sud) et leur éparpillement, est en partie à l’origine de cette confusion. De plus les HFD regroupent des formations végétales assez étérogènes,h (i) les recrus post-agricoles ou post-feux et (ii) les fourrés dégradéspar la pratique de la fabrication de charbon de bois, qui n’ont pas pu être séparées lors de la classification.
La classe zone agricole et d’habitation (ZAH) est également assez hétérogène. En effet, elle regoupe les terrains cultivés, les sols nus pour diverses raisons (feux, défrichement, exploitation minière, village…) et les recrûs post- agricoles de nature herbacée. De plus, les ZAH de betioky et de Soalara doivent être distinguées : les premières sont dominées par des terrains de culture cultivés ou en jachère(herbacée) et les secondes sont domi-nées par des vala (surface clôturée par des haies vives) dont une partie est cultivée (<50%) et le reste sert de réserve de fourrage herbacé. Les ZAH de Soalara-Sud ne pour-ront jamais évoluer en HFD ou HF et celle de Betioky-Sud ne devra jamais aboutir à des BFD ou à des BF.
Faible résilience, au niveau paysager, des fourrésxérophiles
La dynamique du paysage forestier du site d’étude est associée à une vitesse de défores-tation élevée (Tableau 5 ; Cartes 2, 3 et 4). Le taux moyen de déforestation pendant la période 1989-2010 est de 1,19 %.an (Tableau 5). Cette déforestation s’est accélérée pendant la décennie 2001-2010, surtout pour les haut-fourrés de Betioky. Ces derniers ont subi une perte annuelle de couverture forestière proche de 4% pendant cette période (Tableau 5). Ces résultats confirment ceux de Lasryet al. (2004) et ceux de Masezamana et al. (2013) qui ont trouvé des taux de déforestation supérieurs à 1%.an-1 respectivement dans la forêt des Mikea à plus de 100 km au nord du site d’étude et dans le District de Toliara II dont le site d’étude fait partie. A ce rythme, les haut-fourrés de Betioky-Sud disparaîtraient vers 2037. Cette prévision est soutenue par l’étude du WWF sur la dyna-mique des fourrés xérophiles du plateau de Mahafaly qui prévoit une perte de l’intégralité du couvert forestier d’ici 2040 (WWF,2002). Au niveau international, des résultats semblables ont également été trouvés dansle forêts sèches de l’Argentine (5% de perte annuelle de couverture forestière ; Boletta et al., 2006 ; Gasparri et Grau, 2009). Plus généralement, la fragilité et la faible résilience de l’écosystème des forêts sèches face à la perturbation d’origine anthropique est un phénomène largement observé dans les zones semi-arides (Fajardo et al., 2005 ; Blanc-Pamard et al., 2005 ; Boletta et al., 2006 ; Gasparri et Grau, 2009 ; Songer et al., 2010). La baisse de la surface des forêts sèches résulte principalement de leur conversion enterrain agricole (Blanc-Pamard et al., 2005 ; Songer et al., 2009). A cela s’ajoute la fabrication de charbon de bois dans le site d’étude (Raoliarivelo et al., 2010 ; Masezamana et al., 2013). La première hypothèse, sur la faiblesse de la résilience des fourrés xérophiles a donc été vérifiée.
Déforestation à deux vitesses, conditionnée par lesfacteurs écologiques et les pratiques humaines
La perte de couverture forestière associée aux haut-fourrés, à l’Est (Betioky-Sud) est nettement plus importante que celle correspondant aux bas-fourrés, à l’Ouest (Soalara ; Tableau 5 ; Figure 6). Les pratiques humaines, liées aux conditions écologiques (surtout la précipitation) peuvent expliquer en partie ce phénomène. La pratique de l’agriculture itinérante sur brûlis (hatsake) et celle de la fabrication de charbon de bois sont les princi-pales causes de la déforestation dans le Sud-Ouest malagasy (Casse et al., 2004 ; Blanc-Pamard et al., 2005). La pratique de la fabrication de charbon de bois se fait dans les 2 types de fourrés. Par contre, le défrichemement pour l’agriculture est assez limité à Soa-lara-Sud car cette activité y est entravée par l’aridité plus poussée du climat (P<500 mm.an-1). Le défrichement sert surtout à l’aménagement de vala (espace clos de 2-3 ha, entouré de haie vive ; Rabenialaet al., 2009), dont une faible partie est cultivée pendant la courte saison de pluie et le reste sert de reserve de fourrage herbacé. En effet, les bes-tiaux, petits ruminants et zebus, malades y sont placés jusqu’à leur retablissement, pen-dant la saison sèche aucours de laquelle prévaut une faible disponibilité fourragère Op(. cit.). Par contre, le climat plus humide de Betioky (P>600 mm.an-1) favorise mieux la pratique de l’agriculture et plus particulièrement celle itinérante sur brûlis. De plus, les villages dans la commune de Betioky-Sud sont nettement plus nombreux que ceux de la commune de Soalara et sont associés à une densité de population plus élevée (EPM, 2004). En effet, la démographie peut être considérée comme un facteur exogène d’altération des milieux naturels (Monza, 1996 ; Bamba et al., 2008) : Une population pauvre plus dense exploite plus intensément les ressources naturelles à leur disposition. L’augmentation des populations entraîne celle des exigences alimentaires et peut con-duire à un raccourcissement de la durée de la jachère et à une transition vers une agricul-ture permanente (Songer et al., 2009). Ce n’est pas encore le cas dans le site d’étude puisque la pratique d’une agriculture permanente nécessiterait l’usage d’intrants (fertili-sants et herbicide) qui ne sont pas à la portée de la bourse des paysans, d’où la persis-tance du système de culture temporaire (hatsake). Ce dernier commence par le défriche-ment et le brûlis de la biomasse ligneuse et la mise en culture de la parcelle correspon-dante pendant un certain nombre d’années (<10 ans ; Blanc-Pamard et al., 2005) avant de l’abandonner définitivement. L’infestation des plantes adventices, la baisse de la ferti-lité et celle du rendement agricole conduisent à l’abandon de la parcelle (Op. cit. ; Le-prun et al., 2008) et à la recherche de nouvelles parcelles à dé fricher. Au cours de la 40 phase post-culturale, les successions végétales secondaires correspondent à une évolution regressive aboutissant à des formations mixtes lign eux-herbacées ouvertes, à caractère savanicole (Grouzis et al., 2001 ; Leprun et al., 2009). La transition zone agricole-fourré est donc quasi-inexistante et celle montrée par la matrice et le schéma de transion peut être attribuée à l’imprécision de la classification(<10% de la superficie totale ; Figure 5, 6 et Annexe V et VI) qui, elle-même est liée à lagrande taille du pixel des images Land-sats utilisées (30×30 m²). La restauration des fourrés dégradés (transition fourré degradé-fourré) est possible mais se produit rarement dans le site d’étude (<40% du site d’étude ; Figure 5 et 6). Au final, les changements d’occupation des sols dans le site d’étude sont surtout caractérisés par la conversion des fourrésen zones agricoles qui sont plus in-tenses à l’Est (Betioky-Sud) où prédominent les haut-fourrés.
Le gradient Est-Ouest, principal facteur conditionnant la diversité, la structure et la composition floristique des fourrés xé-rophiles, au niveau parcellaire
Le sol est le principal facteur qui affecte la composition floristique des fourrés xérophiles (Figure 8). L’analyse de co-inertie a permis de distinguer les espèces caractéristiques des sables roux et celles des sols ferrugineux. Par contre, les effets des pratiques humaines sur la composition floristique des fourrés xérophiles n’ont pas été mis en évidence. Ces résultats vont dans le même sens que ceux d’étudessur les facteurs affectant les commu-nautés végétales en zone semi-aride (Parker, 1991 Anderson; et Hoffman, 2007 ; Brinkman et al., 2009 ; Zemmrich et al., 2010 ; Cheng et al., 2011) : Le type de substrat et l’altitude qui conditionne la précipitation sont les principaux facteurs affectant la di-versité et la composition des communautés végétales.
Les 3 facteurs affectent significativement la diversité et la structure des fourrés épineux (Figure 8 ; Tableau 8, 9 et 10). La dépendance entre les facteurs écologiques et les pra-tiques humaines (p<0,001 ; tests Khi-2) empêche l’isolement des effets de ces dernières sur le fonctionnement des écosystèmes des fourrés pineuxé. En effet, les sables roux et les sols calcaires ainsi que la faible précipitation se localisent dans la partie Ouest du site d’étude (Soalara-sud) et les sols ferrugineux et calcaires altérés ainsi que la précipitation plus élevée sont associés à la partie Est (BetiokySud)-. Aussi, les variations des para-mètres de diversité et de structure (Tableau 8, 9 te 10) sont-elles, l’expression de chan-gement de conditions écologiques globales incluant le sol et le climat qui conditionnent les pratiques. Ainsi, une augmentation globale de la richesse spécifique, de la densité et de la hauteur des fourrés épineux est constatée lelong du gradient Ouest-Est (Tableau 8, 41 9 et 10). La seconde hypothèse sur la prépondérancedes facteurs abiotiques quant à l’explication du fonctionnement des fourrés épineux, au niveau parcellaire a également été vérifiée. Par contre, la dernière hypothèse quisouligne l’importance des effets des activités anthropiques sur la diversité, la structure et la composition floristique des four-rés épineux a été partiellement infirmée. En effet,les analyses des impacts des partiques humaines sur les fourrés xérophiles doivent se faire dans des zones écologiquement ho-mogènes (type de sol et précipitation). Des étudesplus approfondies sur les successions végétales dans le site d’étude doivent être faitespour mieux comprendre la résilience des fourrés xérophiles au niveau parcellaire.
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Table des matières
INTRODUCTION
1. MATERIELS ET METHODES
1.1. MILIEU D’ETUDE
1.1.1. Localisation géographique
1.1.2. Contexte physique
1.1.3. Contexte biotique
1.1.4. Contexte humain
1.2. METHODES
1.2.1. Rappel des problématiques et des hypothèses de recherches
1.2.2. Etudes des dynamiques du couvert forestier
1.2.3. Les facteurs affectant la répartition de la végétation des fourrés épineux (composition floristique, diversité et structure)
2. RESULTATS
2.1. Dynamiques de la couverture forestière de Betioky-Sud et de Soalara-Sud
2.2. Schéma de transition
2.3. Les facteurs conditionnant la composition floristique de la végétation ligneuse
2.4. Facteurs conditionnant la diversité et la structure de la végétation ligneuse
3. DISCUSSION
3.1. Classification fiable d’images satellitaires de faible résolution
3.2. Des classes synthétiques, mais représentatives des occupations des sols
3.3. Faible résilience, au niveau paysager, des fourrés xérophiles
3.4. Déforestation à deux vitesses, conditionnée par les facteurs écologiques et les pratiques humaines
3.5. Le gradient Est-Ouest, principal facteur conditionnant la diversité, la structure et la composition floristique des fourrés xérophiles, au niveau parcellaire
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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