Dynamique spatio-temporelle du paludisme
Les dรฉterminants principaux qui expliquent lโรฉpidรฉmiologie du paludisme, son maintien, son extension, sa rรฉรฉmergence lร oรน il semblait รชtre maรฎtrisรฉ et son retour en lโabsence de stratรฉgie de lutte efficace sont : les mรฉcanismes climatiques (El Niรฑo, La Niรฑa ou ENSO), anthropiques (dรฉforestation, surpรขturage ou amรฉnagements hydrauliques) et anthropologiques (urbanisation, conflits ou migrations) qui peuvent avoir un impact sur lโรฉpidรฉmiologie mondiale du paludisme .
Paludisme dans le mondeย
En fin 2004, 107 pays et territoires comptaient des zones oรน il y avait un risque de transmission du paludisme. Environ 3,2 milliards de personnes vivaient dans des rรฉgions ร risque. LโAfrique reste la rรฉgion la plus touchรฉe par le paludisme, avec une proportion de 66% de population vivant dans des zones ร risque. Cependant, de 2000 ร nos jours avec le concours des partenaires, la mortalitรฉ et morbiditรฉ palustres ont connu une rรฉduction considรฉrable. En Europe, le paludisme a รฉtรฉ รฉradiquรฉ. Des rรฉintroductions temporaires et des cas isolรฉs peuvent subsister mais le principal catalyseur est le paludisme dโimportation (Shapira et al., 1993; Sabatinelli et al., 1999) En Amรฉrique, lโAmรฉrique du nord vit sans le paludisme mais, ce nโest pas le cas pour lโAmรฉrique centrale (P vivax surtout), et lโAmรฉrique du Sud oรน prรฉvalent dโimportants foyers dus ร P. falciparum et P. vivax. En Asie, le paludisme sรฉvit modรฉrรฉment en Asie mineure (Turquie), pรฉninsule indienne (P vivax surtout) et intensรฉment en Birmanie, Chine du Sud, Thaรฏlande, Vietnam, Cambodge, Laos (P.falciparum).
Le paludisme au Sรฉnรฉgal
Au Sรฉnรฉgal, la question du paludisme a รฉvoluรฉ globalement dans les mรชmes termes. Cette infection est responsable, en milieu rural, dโenviron 10% des dรฉcรจs chez les enfants de moins dโun an et de 20% des dรฉcรจs entre 1 et 9 ans. Parallรจlement, plusieurs รฉtudes sur diffรฉrents sites sentinelles indiquent des chloroquinorรฉsistances cliniques variant entre 15 et 45%. Compte tenu de ce nouveau contexte รฉpidรฉmiologique, le Sรฉnรฉgal a modifiรฉ en 2003 le traitement de premiรจre intention, en remplaรงant la chloroquine par lโassociation Amodiaquine + sulfadoxine pyrimรฉthamine. De plus, la prise en charge de la fiรจvre ร domicile nโest plus une recommandation du Programme national, qui incite dรฉsormais les familles ร se rendre au poste de santรฉ pour tout cas de fiรจvre chez lโenfant. Ce changement de stratรฉgie est majeur pour le systรจme de santรฉ et les malades. Il revient sur des principes de santรฉ publique รฉnoncรฉs depuis plusieurs dรฉcennies, comme la prise en charge ร domicile des cas de paludisme non compliquรฉs, par une distribution des mรฉdicaments sur base communautaire et lโutilisation de la chloroquine. Cโest dire par consรฉquent que ce nouveau traitement introduit aussi un changement profond dans les habitudes et les reprรฉsentations des praticiens et des patients.
Les Agents pathogรจnes
Classification
Les agents pathogรจnes du paludisme humain sont des parasites protozoaires appartenant au phylum des Apicomplexa. Ils se distinguent par la prรฉsence dโun complexe apical ร certains stades de leurs cycles de dรฉveloppement. Il existe quatre espรจces qui diffรฉrent par leur pathogรฉnie et leur cycle dโรฉvolution :
โ Plasmodium falciparum : est lโespรจce la plus redoutable puisque responsable des accรจs pernicieux et peut entraรฎner la mort en favorisant sa sรฉquestration dans les microvaisseaux de certains organes profonds (cerveau, rein, poumons). Elle est largement rรฉpandue autour de lโรฉquateur et domine en Afrique subsaharienne ou elle est responsable de 80 ร 99 % des cas.
โ Plasmodium vivax : les conditions climatiques nรฉcessaires ร son dรฉveloppement expliquent sa rรฉpartition du 37 รจme degrรฉ de latitude nord au 25 รจme degrรฉ Sud. Une infection ร vivax nโest pas fatale mais pourrait resurgir 4 ร 5 ans aprรจs la primo infection
โ Plasmodium ovale : Comme vivax, il ne tue pas, mais est responsable des rechutes par latence hรฉpatique (hypnozoรฏte)
โ Plasmodium malariae: moins frรฉquent que P. falciparum et P. vivax, la schizogonie dure 72heures dโoรน le nom de fiรจvre quarte des accรจs intermittents, il ne tue pas, mais provoque parfois des rechutes jusqu’ร 20 ans aprรจs la primo-infection par latence รฉrythrocytaire .
Cycle de vie
Au cours de son dรฉveloppement, Plasmodium falciparum connaรฎt un cycle complexe au cours duquel il passe de stades sexuรฉs chez lโanophรจle aux stades asexuรฉs chez lโhomme (fig. 2). Cycle Chez le moustique : aprรจs piqรปre dโun individu atteint du paludisme, lโanophรจle ingรจre des gamรฉtocytes mรขles et femelles qui sont stockรฉs dans lโintestin moyen oรน ils deviennent des gamรจtes. Leur fรฉcondation donne naissance ร un ookinรจte. Aprรจs multiplication cellulaire, les ookinรจtes traversent la paroi de lโintestin et forment des oocystes qui aprรจs รฉclatement, libรจrent de nombreux sporozoรฏtes. Ces derniers migrent jusquโaux glandes salivaires et seront injectรฉs lors de la prochaine piqรปre.
Cycle Chez lโhomme : lors de la piqรปre du moustique, l’homme est infectรฉ par des sporozoรฏtes de Plasmodium prรฉsents dans les glandes salivaires de l’insecte. Le dรฉveloppement du parasite se fait en deux phases :
– la phase hรฉpatique ou schizogonie exo รฉrythrocytaire : les sporozoรฏtes parviennent trรจs rapidement au foie oรน se dรฉroule un cycle de multiplication asexuรฉ, le sporozoรฏte se transforme en trophozoรฏte endocytoplasmique qui grossit et dont le noyau se divise de nombreuses fois. Aprรจs une durรฉe moyenne de 8 ร 15 jours le cytoplasme de l’hรฉpatocyte est envahi par plusieurs milliers de noyaux. A maturitรฉ, chaque noyau s’individualise pour donner des mรฉrozoรฏtes (ou cryptozoรฏtes). L’hรฉpatocyte parasitรฉ รฉclate et les mรฉrozoรฏtes sont libรฉrรฉs dans la circulation sanguine et envahissent les hรฉmaties. Dans chaque hรฉmatie envahie par un mรฉrozoรฏte va se dรฉrouler une phase de prolifรฉration intense.
– la schizogonie รฉrythrocytaire :
Dans chaque hรฉmatie envahie par un mรฉrozoรฏte va se dรฉrouler un cycle de reproduction asexuรฉe. Elle permet le passage par les diffรฉrents stades parasitaires en se basant sur des critรจres morphologiques et biochimiques (fig. 2).
Les diffรฉrents stades รฉrythrocytaires sont :
-Anneau : le mรฉrozoรฏte s’enferme dans une vacuole parasitophore dans laquelle il se nourrit et croรฎt. L’anneau ainsi formรฉ exporte des molรฉcules ร la surface du globule rouge qui favoriseraient l’adhรฉsion des cellules non infectรฉes.
-Trophozoรฏte : c’est le stade de multiplication et de modification du parasite dans le globule rouge. De nouvelles molรฉcules sont exportรฉes ร la surface de l’รฉrythrocyte. Le parasite se maintient dans une vacuole parasitophore de plus en plus large au sein de laquelle les produits de dรฉgradation de l’hรฉmoglobine sont accumulรฉs.
-Schizonte : ce stade est caractรฉrisรฉ par une division nuclรฉaire intense et une individualisation des mรฉrozoรฏtes dans le globule rouge infectรฉ qui en รฉclatant libรจre 8 ร 32 mรฉrozoรฏtes qui rapidement rรฉinfectent des รฉrythrocytes sains.
-Gamรฉtocyte : parfois les mรฉrozoรฏtes libรฉrรฉs aprรจs รฉclatement du globule rouge se diffรฉrencient en gamรฉtocytes dans un nouvel รฉrythrocyte. Les gamรฉtocytes reprรฉsentent la forme sexuelle, prรฉcurseur de la maladie.
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Table des matiรจres
Introduction
1รจre partie : Gรฉnรฉralitรฉs
I- Gรฉnรฉralitรฉs sur le paludisme
I-1 – Dรฉfinition et historique
I-1-1 Dรฉfinition
I-1-2 Historique
I-2 Dynamique spatio-temporelle du paludisme
I-2-1 Paludisme dans le monde
I-2-2 Le paludisme au Sรฉnรฉgal
I-3 Les Agents pathogรจnes
I-3-1 Classification
I-3-2 Cycle de vie
I-4 La lutte contre le paludisme
I-4-1 Lutte anti-vectorielle
I-4-1-1 les larves
I-4-1-2 les adultes
I-4-2 La chimiothรฉrapie
I-4-2-1 Modรจles et mรฉthodes in vitro dโรฉtude de lโefficacitรฉ des antipaludiques
I-5- La chimiorรฉsistance
I-5-1 Rรฉsistance ร la chloroquine
I-5-2 Proguanil et pyrimethamine
I-5-3 Rรฉsistance ร la quinine
I-5-4 Rรฉsistance ร la mรฉfloquine
I-5-5 Rรฉsistance aux composรฉs dโartรฉmisine
I-5-6 Protocole de suivi de la rรฉsistance
I-6 Quelques facteurs favorisant la chimiorรฉsistance
I-7: Diversitรฉ gรฉnรฉtique
I-7-1 Le polymorphisme chromosomique
I-7-2 Le polymorphisme allรฉlique
I-7-3 La variation antigรฉnique
I-7-4 la recombinaison sexuรฉe
I-8 Gรฉnรฉralitรฉs sur lโinvasion รฉrythrocytaire
I-8-1- Quelques voies mรฉtaboliques et nouvelles cibles thรฉrapeutiques
โย Rรฉplication de lโADN
โย Voie de rรฉcupรฉration des purines
โย Synthรจse des pyrimidines
โย Mรฉtabolisme de lโacide folique
โย Mรฉtabolisme des lipides
โย Nouveaux mรฉcanismes de transport
โย Stress oxydatif
โย Cycle cellulaire
โย Inhibiteurs des protรฉases
I-8-2 Les inhibiteurs de protรฉases prรฉviennent lโinvasion
I-8-3 Les protรฉases malariques : de nouvelles cibles pour la chimiothรฉrapie ?
I-8-3-1 Quelques Candidats vaccinaux : exemples des protรฉines de surface
I-8-3-1 1 MSP1
I-8-3-1-2 AMA1 (Apical Membrane Antigen1
I-8-3-1-3 Les sรฉrines protรฉases
โย PfSUB-1
โย PfSUB2
โย PfSUB-3
I-9 Vaccins contre le paludisme : Utopie ou rรฉalitรฉ ??
I-9-1 Vaccins contre les stades prรฉ-รฉrythrocytaires ou antisporozoรฏtes
I-9-2 Vaccins anti-mรฉrozoรฏtes
I-9-3 Vaccins bloquant la transmission
2รจme partie : Travaux personnels
II Travaux personnels
II-1 Objectifs principaux
II-2 Etude 1 : Analyse du polymorphisme du site actif de SUB2 et des sites de maturation de MSP1 et AMA1
II-2-1 Introduction
II-2-2 Matรฉriels et mรฉthodes
II-2-2-1 Zone dโรฉtude et sรฉlection des sujets
II-2-2-2 ETUDE MOLECULAIRE
II-2-2-2-1 Lโextraction dโADN plasmodial
II-2-2-2-2 Etude du polymorphisme de Plasmodium
II-2-2-2-3 Sรฉquenรงage et analyse
II-2-3 Rรฉsultats
II-2-3-1 รtat dโavancement ร la conception du travail
II-2-3-2 Dรฉtection des mutations associรฉes aux diffรฉrents gรจnes
II-2-3-3 Position des mutations par rapport aux sites dโintรฉrรชt
II-2-3-4- Analyse des mutations dans les populations dโรฉtude
II-2-4 Discussion
II-3 Etude 2 : Dรฉveloppement de nouvelles cibles thรฉrapeutiques
II-3-1- Dรฉveloppement dโun nouveau test
II-3-1-1 Introduction
II-3-1-2 Matรฉriel et mรฉthodes
II-3-1-2-1 Origine des parasites
II-3-1-2-2 Dรฉcongรฉlation de souches
II-3-1-2-3 Culture des parasites in vitro
II-3-1-2-4 Synchronisation
II-3-1-2-5 Test de chimiosensibilitรฉ in vitro
1) Principe
2) Mรฉthodes utilisรฉes
โข Le test isotopique
โข Le test cytomรฉtrique
II-3-1-3 Rรฉsultats
II-3-1-3-1 Mise au point
1- dรฉterminer la concentration optimum de fluorochrome
2- Estimer la sensibilitรฉ de lโanalyse par cytomรฉtrie de flux des รฉchantillons de culture
3- vรฉrifier lโimpact de la synchronisation sur la viabilitรฉ cellulaire
4- Prรฉciser lโimpact du nombre de leucocytes sur la parasitรฉmie mesurรฉe
5- Discrimination des leucocytes ou faux positifs
II-3-1-3-2 Analyse dโune culture asynchrone vs culture synchrone : visualisation des diffรฉrents stades parasitaires
II-3-1-3-3 Etude de la chimiosensibilitรฉ aux antipaludiques par cytomรฉtrie
II-3-1-3-3-1 Reproductibilitรฉ du test cytomรฉtrique vs test isotopique sur des souches de culture
II-3-1-3-3-2 test sur des souches sauvages
โย paramรจtres dโanalyse
โย Effets des leucocytes et rรฉticulocytes
โย Le test de maturation
โย Corrรฉlation
II-3-1-4 Discussion
II-3-2 Dรฉveloppement de molรฉcules inhibitrices : peptides synthรฉtiques
II-3-2-1 Introduction
II-3-2-2 Matรฉriel et Mรฉthodes
II-3-2-3 Rรฉsultats
II-3-2-3 -1 Mise au point
โข Choix du milieu de culture (albumaxI vs HSAB)
โข Capacitรฉ de maturation cloche vs รฉtuve
โข Confirmation du test par la chloroquine (CQ)
II-3-2-3 -2 Inhibition de la rรฉinvasion par les peptides synthรฉtiques
II-3-2-4 Discussion
Discussion gรฉnรฉrale et perspectives
Conclusion
Rรฉfรฉrences Bibliographiques
Annexes