Dynamique spatio-temporelle des stocks de petits thonidés exploités au Sénégal

La pêche joue un rôle primordial dans la lutte contre la pauvreté et la sécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest (FAO, 2008). Au Sénégal, 75% des protéines d’origine animale consommées par l’homme, proviennent des produits de la pêche. De plus, la pêche génère environ 600 000 emplois et d’importants revenus aux populations locales, ainsi que des devises et recettes à l’Etat sénégalais. Cette activité contribue à hauteur de 2,3% du PIB du Sénégal (Dème et Kébé, 2000). Elle occupe, depuis 1986, le premier poste des exportations devant les produits arachidiers et les phosphates combinés et assure plus du quart de la valeur des ventes à l’étranger.

Cette importance socio-économique de la pêche est liée aux potentialités du milieu qui se traduisent par une productivité élevée des eaux. Au niveau des côtes ouest africaines, la remontée des eaux engendre une forte production phytoplanctonique (Diouf, 1980a). La disponibilité saisonnière de la nourriture entraine le peuplement de ces côtes par plusieurs espèces de poissons. Le potentiel halieutique du Sénégal est ainsi estimé en moyenne à 450 000 tonnes par an (Dione et al. 2005). Une forte diversité biologique est également notée dans les eaux sénégalaises. Les espèces de poissons concernées par l’activité de pêche sont regroupées en ressources démersales et pélagiques. Les ressources pélagiques représentent généralement l’essentiel des débarquements annuels de poissons. Les petits thonidés en particulier sont importants aussi bien d’un point de vu socio-économique (ICCAT, 2011) qu’écologique (Fonteneau et al. 1988). Au Sénégal, ils sont exploités par les flottilles artisanales et industrielles (Diouf, 1980b) et contribuent ainsi au développement économique et social des populations. Par ailleurs, ces espèces constituent les proies des thons majeurs (Fonteneau et al. 1988) et contribuent au maintien de la biodiversité.

Malgré leur importance, les ressources halieutiques sont confrontées à des problèmes liés en grande partie à leur exploitation. Une augmentation progressive du nombre de stocks de poissons en état de surexploitation est constatée à l’échelle internationale (FAO, 2005). Au Sénégal, on note une diminution considérable des captures des espèces demersales (FAO, 2004). Cette raréfaction de la ressource pousse les acteurs de la pêche à adopter parfois des stratégies et pratiques de pêche illicites, non favorable à sa pérennité. Compte tenu de cette situation, de l’importance des petits thonidés, de même que du temps écoulé sans études portant sur ces espèces, il est grand temps d’analyser l’évolution de la biomasse de ces espèces en vue de déceler d’éventuelles modifications de leurs peuplements.

Les travaux déjà menés sur la problématique des petits thonidés (Diouf, 1980a ; Bard et al., 1988 ; Cayré et al., 1988 ; Fonteneau et al., 1988 ; Hattour, 2008 ; Ngessan et al., 2009) ont permis d’élargir les connaissances sur ces espèces car ayant abouti à de nombreux résultats. Les petits thonidés sont sensibles aux variations saisonnières des paramètres physico-chimiques du milieu marin. Ils ont une durée de vie longue et sont des prédateurs. Compte tenu du caractère migrateur de ces espèces, l’évaluation des stocks ne peut se faire que dans un contexte régional. La composition en tailles des débarquements de ces espèces présentent des variations spatio-temporelles.

Environnement, écologie, biologie et pêcheries des petits thonidés exploités au Sénégal 

Les thonidés mineurs sont important d’un point de vue socio-économique et écologique. Ils constituent la principale source d’alimentation pour de nombreuses communautés côtières (ICCAT, 2011). Au Sénégal, ces espèces sont exploitées par des flottilles commerciales des pêches industrielles et artisanales (Diouf, 1980b). De surcroit, ces petits thonidés servent de proie aux thons majeurs (Fonteneau et al., 1988) et jouent un rôle important dans le maintien de la biodiversité. Vu leur importance, plusieurs études concernant ces espèces ont étaient menées. Parmi ces études, nous avons les travaux de Diouf (1980a) ; Hattour (2008) ; Nguessan et al. (2009) qui ont fournies des connaissances relatives à la dynamique des populations des petits thonidés.

La présente synthèse bibliographique a pour objectif de faire l’état des lieux sur les connaissances scientifiques relatives aux petits thonidés, notamment la thonine commune, Euthynnus alletteratus, la bonite à dos rayé, Sarda sarda et le maquereau bonite, Scomberomorus tritor. Elle constitue ainsi une étape cruciale du travail permettant de synthétiser les résultats scientifiques, en rapport avec le sujet, obtenus précédemment. D’abord, les conditions environnementales des eaux côtières ouest africaines sont décrites. Ensuite, les informations relatives aux caractéristiques écologiques et biologiques des petits thonidés sont mentionnées. Enfin, des pêcheries artisanales de petits thonidés de l’Atlantique Centre Est sont décrites.

Conditions physiques et hydroclimatiques du milieu 

Caractéristiques physique du milieu 

La presqu’île du Cap-Vert, située à la latitude 14°40’N, sépare le domaine maritime sénégalais en deux régions aux caractéristiques topographiques distinctes (Roy, 1989 ; Dème-Gning et al., 1990 ; Thiaw, 2010). Autour du Cap-Vert, on retrouve des roches volcaniques d’extrusion tandis qu’au niveau de la Grande Côte, la ligne de rivage, régulière et courbe est caractérisée par une dérive de sable (Diouf, 1980a). Au Sud, elle est formée d’une série de Systèmes estuariens. Le domaine d’étude concerne essentiellement le plateau continental sénégalais bien que les pêcheries thonières couvrent une zone beaucoup plus large (Diouf, 1980a). La façade maritime de ce plateau continental est environ égale à 240 miles nautiques et est orienté Nord-Sud, entre les latitudes, 12°20’ et 16°03’N (Rébert, 1983). Toutefois, sa largeur est variable suivant la côte. L’isobathe 200 (Fig. 1) qui le délimite est ainsi très proche des côtes au large de Dakar et est plus éloigné de celles-ci, en moyenne, pour les autres partie (nord et sud). Ce plateau continental est environ large de 27 miles (6 500 km2 de surface) au large de la grande Côte, 5 miles au large de Dakar et 54 miles (21 500 km2 ) devant la Casamance (Diouf, 1980a)

Conditions hydroclimatiques

Au Sénégal, on note généralement une succession de deux saisons marines aux caractéristiques bien définies (Rebert, 1983). La saison froide va de novembre à mai et la saison chaude et pluvieuse, de juillet à octobre (Dème-Gning et al., 1994 ; Thiaw, 2010). Ces deux saisons sont séparées par une période de transition (Rebert, 1983). La saison chaude et pluvieuse est marquée par le passage de la mousson, vent chaud et humide en provenance de l’anticyclone de Saint Hélène. Quant à la saison froide, elle est marquée par les alizés (Samb et Demarcq, 1991), vents de secteur nord-ouest à nord-est qui s’établissent et engendrent à la côte une remonté d’eaux, communément appelée Upwelling. Ce phénomène hydroclimatique est à l’origine du développement de la biomasse phytoplanctonique qui est à la base de la chaine trophique. Environ, 50% de la production mondiale de poisson provient des zones d’upwelling (Teisson, 1985). En plus, un système de grands courants aux caractéristiques différentes est retrouvé dans cette zone ouest africaine. Il s’agit du courant des Canaries qui transporte les eaux froides vers l’Ouest et du contre courant équatorial qui transporte les eaux chaudes vers l’Est (Rebert, 1983).

Les conditions du milieu sont favorables au développement des espèces de poissons. En effet, les eaux abritent une importante diversité biologique, ce qui donne à la pêcherie son caractère multispécifique. Ainsi, les espèces exploitées de même que les techniques de pêche pratiquées sont nombreuses et variées. Par ailleurs, ces conditions hydroclimatiques ont une grande influence sur le comportement des petits thonidés.

Écologie des petits thonidés 

Habitat

La thonine est une espèce épipélagique et néritique. Elle peuple habituellement les eaux littorales présentant des courants rapides, à proximité des hauts-fonds et autour des eaux plus chaudes associées aux fronts thermiques et aux affleurements (Valeiras et Abad, 2006b). Cette espèce est retrouvée à des profondeurs allant de 1 à 150 m. Elle a un comportement plus côtier que d’autres espèces de thonidés. La bonite à dos rayé est un poisson marin épipélagique océanodrome. Elle vit en bancs dans les zones néritiques et peut pénétrer dans les estuaires. Ce poisson est retrouvé à des profondeurs de 80 à 200 m (Maigret et Ly, 1986).

La température est un des principaux facteurs du milieu marin qui déterminent la distribution des thonidés. La thonine est une espèce assez tolérante par rapport aux variations de ce facteur physique. La gamme de température idéale pour sa survie est comprise entre 17 et 28°C (Diouf, 1980a). Cette espèce apparaît plus sensible à la salinité qui doit être supérieure à 34,5 %0 (Postel, 1955 ; Marchal, 1963). Sur la côte nord du Sénégal notamment à Saint-Louis, le passage de la salinité, au cours de l’année 1979 de 35,9 au mois de juillet à 33,8 au mois d’août, a poussé les thonines à s’éloigner de la côte. Elles sont présentes dans le secteur du Cap-Vert où la dessalure est moindre (35,7 à 35,4) en saison chaude. Quant à la bonite à dos rayé, elle peut s’adapter à des températures allant de 12 °C à 27 °C et à des salinités de 14 à 39%0 (Bianchi et al., 1999 ; Valeiras et Abad, 2006a).

Le maquereau-bonite est une espèce marine (Riede, 2004) qui vit à des profondeurs de 1 à 40 m et est retrouvé habituellement non loin des côtes (Diouf, 1980a). Cette espèce côtière présente une large tolérance à la salinité mais apparait plus sensible à la température qui doit être normalement supérieure à 17°C pour sa survie. Les larves de même que les juvéniles de maquereau-bonite sont essentiellement côtières. Ils peuvent être collectés à des profondeurs de 100 mètres ou exceptionnellement à 50 mètres de profondeur (Jhudova, 1969 ; Fonteneau et al., 1988). Au Sénégal, un nombre important de juvéniles est capturé à la senne de plage pendant la saison chaude (Diouf, 1980a).

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 : Environnement, écologie, biologie et pêcheries des petits thonidés exploités au Sénégal
Introduction
1.1. Conditions physiques et hydroclimatiques du milieu
1.2. Écologie des petits thonidés
1.2.1. Habitat
1.2.2. Répartition géographique
1.2.3. Migrations
1.3. Biologie des petits thonidés
1.3.1. Systématique des espèces
1.3.2. Reproduction
1.3.3. Alimentation
1.3.4. Croissance
1.4. Pêcheries de petits thonidés
1.4.1. Historique des pêcheries
1.4.2. Captures et gestion des stocks de petits thonidés
1.4.3. Commercialisation
Chapitre 2 : Dynamique spatio-temporelle des stocks de petits thonidés basée sur les spectres de tailles
Introduction
2.1. Donnés et méthodes
2.1.1. Source et nature des données
2.1.2. Prétraitement des données
2.1.3. Tests statistiques
2.2. Résultats
2.2.1. Spectres de taille des petits thonidés suivant les engins de pêche
2.2.2. Évolution de la dynamique des populations de petits thonidés
2.2.3. Dynamique spatiale des populations de petits thonidés
2.3. Discussion et conclusion
Chapitre 3 : Dynamique spatio-temporelle de l’abondance des petits thonidés
Introduction
3.1. Données et méthodes
3.1.1. Données
3.1.2. Méthodes
3.2. Résultats
3.2.1. Ajustement des modèles
3.2.2. Schéma de répartition spatio-saisonnier de l’abondance des petits thonidés
3.2.3. Évolution de l’abondance des petits thonidés
3.3. Discussion et conclusion
Conclusion générale
Annexes

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