Dynamique du mercure dans les neiges de hautes et moyennes latitudes

En raison des besoins sans cesse croissants exigés par les développements industriels et technologiques de ces deux derniers siècles, nous avons abondamment puisé dans les ressources de la Terre. Nous en avons extrait les éléments nécessaires sans nous imaginer que nous allions irrémédiablement perturber leurs cycles biogéochimiques naturels. Le mercure a contribué, comme d’autres métaux, aux progrès qui ont fait de notre civilisation ce qu’elle est. Mais nos activités ont répandu de grandes quantités de ce métal dans l’atmosphère, les eaux et les écosystèmes. Bien sûr, le mercure est également émis par de nombreuses sources naturelles (volcanisme, volatilisation des sols et des océans), mais l’Homme a bouleversé, sur une échelle de temps réduite, le cycle naturel du mercure par les combustions de carburants fossiles, l’extraction intensive des minerais et la production de déchets.

Les conséquences de notre intervention sont importantes sur l’environnement, car si le mercure est un composé d’une grande utilité, c’est aussi un toxique puissant. Ses propriétés physico-chimiques favorisent de plus sa dispersion globale et son intégration aux écosystèmes. En effet, dans l’atmosphère, majoritairement présent sous forme élémentaire gazeuse, il est dispersé sur une grande échelle. Sous forme divalente – en milieu aqueux par exemple – il est facilement assimilé par les organismes vivants, et accumulé sous des formes organiques très toxiques. Ces espèces ont la faculté de se bioconcentrer dans les chaînes alimentaires aquatiques. Ainsi partant de quelques ng/l de mercure dans l’eau, on pourra mesurer des concentrations 1 million de fois plus élevées dans les poissons. Il a fallu cependant attendre plusieurs décennies et de nombreuses victimes en 1956 à Minamata, au Japon (Osame et Takizawa, 2001), ou en 1970 en Irak (Bakir et al., 1973), pour que l’on se rende compte du danger potentiel de ce polluant pour l’Homme et les êtres vivants. Aujourd’hui encore, les empoisonnements au mercure sont toujours une réalité chez les populations travaillant ou vivant à proximité de mines d’or (en Asie du Sud-Est, en Amazonie, etc.).

Historique 

Le mercure est un métal connu depuis des temps anciens. Utilisé par les Chinois et les Tibétains à des fins thérapeutiques, on retrouve du mercure dans des tombes égyptiennes vieilles de 3500 ans. Le mot « mercure » provient du dieu romain Mercure (Hermès dans la civilisation grecque), messager des dieux et dieu du commerce. Son symbole Hg réfère au latin hydrargyrum signifiant argent liquide. Connu par ailleurs sous la dénomination de vifargent, cette appellation, aujourd’hui désuète dans la langue française, existe encore dans de nombreuses langues (Quecksilber en allemand, Kvicksilver en suédois, etc.). Ses appellations diverses illustrent parfaitement bien les caractéristiques physiques et chimiques de ce métal : sa volatilité, son caractère impalpable.

Les propriétés spécifiques de cet élément naturel mais aussi les pouvoirs qu’on a pu lui attribuer au cours des siècles confèrent au mercure des applications aussi nombreuses que variées dans les domaines de la métallurgie, la médecine (comme antiseptique par exemple), les cosmétiques ou encore l’alchimie. Il possède par ailleurs la propriété étonnante de s’amalgamer avec certains métaux précieux comme l’or et l’argent. Cette faculté lui accorde une place de choix dans la bijouterie et dans la prospection de l’or.

Propriétés physiques et chimiques du mercure 

L’atome de mercure (Hg) de numéro atomique 80 (masse atomique 200,59 g/mol) est un élément de transition du groupe IIB (colonne 12) situé sous le zinc et le cadmium dans la classification périodique des éléments. Sous sa forme pure, le mercure est un métal gris-blanc dense (13,58 g/cm3 ). Il compte sept isotopes stables et quatre instables. Il est le seul métal liquide à pression et température ambiantes. Sa forte tension de vapeur (14 mg/m3 à 20°C) excède largement les concentrations moyennes de vapeurs de mercure tolérées dans l’air lors d’une exposition occasionnelle (0,05 mg/m3 ) ou permanente (0,015 mg/m3 ) de l’Homme à ce polluant (WHO, 1976) .

Le cycle du mercure dans l’environnement 

L’omniprésence du mercure dans notre environnement est une conséquence directe de ces caractéristiques physico-chimiques précédemment citées. Converti ou échangé, c’est un composé très mobile dans les différents compartiments (air, eau, faune et flore, etc.) de la planète. Il en résulte un cycle biogéochimique très complexe, en évolution perpétuelle, que nous allons essayer de décrire. Examinons d’abord quelles sont les origines du mercure au sein de ce cycle, c’est-à-dire ses sources naturelles mais aussi les apports supplémentaires générés par les activités humaines.

Les sources de mercure 

Les sources naturelles
Les sources naturelles produisent essentiellement le mercure sous forme élémentaire gazeuse (Lindberg et Stratton, 1998). Le mercure est émis par la volatilisation depuis les sols, les océans, les étendues d’eau douce et par les activités volcaniques et géothermales (Nriagu, 1989). Il est cependant difficile de parler de sources naturelles lorsque l’on se réfère à la volatilisation du mercure depuis les océans par exemple, car le cycle naturel du mercure a été largement perturbé par les activités humaines. Seuls les émissions volcaniques et le dégazage depuis les zones terrestres non perturbées par les activités anthropiques sont à proprement parler des sources naturelles véritables (Ebinghaus et al., 1999b). Parmi les régions fortement émettrices de mercure, on trouve bien entendu les gisements de mercure situés sur les zones de convergences tectoniques (Jonasson et Boyle, 1972). Ainsi, sur l’une de ces « ceintures mercurielles » (« mercuriferous belt ») est localisée l’une des mines les plus anciennes et des plus importantes de mercure : la mine de Almadén en Espagne. Sur ces zones, on trouve également des mines en Slovénie (Idrija), en Californie (New Almaden), en Algérie, en Chine ou au Kirghizstan.

Le flux mondial de mercure, provenant des sources naturelles et émis vers l’atmosphère, est de l’ordre de 2500 t/an (Nriagu, 1989). Cette valeur est à prendre avec la plus  grande précaution car l’incertitude sur ce chiffre est de l’ordre de 100%. Par ailleurs, les estimations peuvent varier fortement (entre 2000 et 30 000 t/an) selon les études (Travnikov et Ryaboshapko, 2002).

Les sources anthropiques
De manière générale, le mercure originellement contenu dans un combustible sera rejeté au cours de sa combustion à l’air libre. On associera à chaque combustible un facteur moyen d’émission f, comme étant la masse moyenne de mercure rejetée par la combustion d’une tonne de combustible. Les combustions de charbon (f ~ 0,02-1,0 g/t), mais aussi celles de pétrole (f ~ 0,06 g/t), de gaz naturel (f très faible) ou de bois (f ~ 0,03 g/t) sont responsables de la majorité des émissions anthropiques mondiales (Pirrone et al., 1996; Pacyna et Pacyna, 2002). L’incinération de déchets (ménagers, agricoles, hospitaliers), avec un facteur d’émission entre 1 et 5 g/t, est également une source importante de mercure. A l’heure actuelle, elle constitue la première source de mercure atmosphérique (1/5 des émissions anthropiques, soit entre 3 et 6 t/an) en France (CITEPA, 2002).

Aux combustions s’ajoutent la production de métaux, l’extraction de minerais et les procédés à haute température. Le mercure est également utilisé de manière directe pour la production de chlore et de soude par électrolyseur à mercure, l’extraction de l’or et par des industries variées (peintures, batteries, thermomètres, produits chimiques et pharmaceutiques, etc.).

Les émissions anthropiques mondiales de mercure dans l’air sont estimées à environ 2000 t/an (Pirrone et al., 1996; Pacyna et Pacyna, 2002). L’incertitude associée à ces estimations est de l’ordre de 25-30%. Les combustions représentent à elles seules plus des ¾ des émissions globales. Selon la nature des combustibles ou des processus de combustions, les formes élémentaires et divalentes du mercure pourront être émises.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE I INTRODUCTION AU CYCLE DU MERCURE DANS L’ENVIRONNEMENT
I.1 Historique
I.2 Propriétés physiques et chimiques du mercure
I.3 Le cycle du mercure dans l’environnement
I.3.1 Les sources de mercure
I.3.1.a Les sources naturelles
I.3.1.b Les sources anthropiques
I.3.1.c Intensité des perturbations anthropiques
I.3.2 Concentrations en mercure dans divers compartiments de notre environnement
I.3.3 Cycle global du mercure dans l’environnement
I.3.3.a Cycle atmosphérique
I.3.3.b Cycle dans les milieux aqueux, les sols et les sédiments
I.3.3.c Cycle dans la cryosphère
CHAPITRE II PROCESSUS DE DÉPÔTS, DE TRANSFERT ET RÉACTIVITÉ DU MERCURE DANS UN MANTEAU NEIGEUX. ETAT ET LIMITES DE NOS CONNAISSANCES.
II.1 Dynamique du mercure dans l’atmosphère et mécanismes de dépôts dans les manteaux neigeux
II.1.1 Les espèces mercurielles présentes dans l’atmosphère
II.1.2 La réactivité atmosphérique du mercure
II.1.2.a Les équilibres entre phases
II.1.2.b Les réactions en phase gazeuse
II.1.2.c Les réactions en phase aqueuse
II.1.3 Dépôt du mercure atmosphérique
II.1.3.a Les dépôts humides
II.1.3.b Les dépôts secs
II.1.4 Le dépôt accéléré du mercure atmosphérique au lever du soleil polaire lors des « Mercury Depletion Events »
II.2 Dynamique du mercure dans un manteau neigeux et ses interactions avec l’atmosphère, la glace et les autres milieux
II.2.1 L’importance du manteau neigeux pour la chimie atmosphérique
II.2.2 Processus physico-chimiques impliquant le mercure dans un manteau neigeux
II.2.2.a La réactivité chimique
II.2.2.b Processus physiques à l’intérieur du manteau neigeux
II.2.3 Les interactions entre l’atmosphère et le manteau neigeux
II.2.4 Les interactions entre la neige et la glace ou comment relier les concentrations en mercure dans la glace aux niveaux atmosphériques
II.2.5 Les interactions entre la neige et les autres milieux à la fonte de ce réservoir
II.3 Positionnement de notre étude dans le cadre des connaissances actuelles et des lacunes soulevées précédemment
CHAPITRE III MÉTHODES D’ANALYSE DU MERCURE EN PHASE GAZEUSE ET AQUEUSE. DÉVELOPPEMENT ANALYTIQUE ET APPLICATIONS AUX MESURES DANS UN MANTEAU NEIGEUX.
III.1 Détermination des espèces du mercure dans l’atmosphère
III.1.1 Définition des différentes fractions gazeuses mesurables
III.1.2 Mesure du TGM par spectrophotométrie d’absorption atomique vapeur froide (CVAAS). Principe de l’analyseur Gardis.
III.1.2.a Principe analytique du Gardis
III.1.2.b Applications et exemples d’utilisation du Gardis
III.1.3 Mesure du TGM par spectrophotométrie de fluorescence atomique vapeur froide (CVAFS). Principe de l’analyseur Tekran.
III.2 Détermination des espèces du mercure dans un manteau neigeux
III.2.1 Définition des différentes fractions du mercure mesurées en phase aqueuse
III.2.2 La mesure de la spéciation du mercure (HgR, HgT et MeHg+ ) en phase aqueuse. Applications à la neige.
III.2.2.a Collecte et traitement des échantillons de neige
III.2.2.b Principales méthodes analytiques
III.2.3 La mesure du mercure élémentaire gazeux présent dans l’air interstitiel du manteau neigeux
III.2.3.a Présentation de l’article 1
III.2.3.b Article 1 : First investigation of an original device dedicated to the determination of gaseous mercury in interstitial air in snow
CHAPITRE IV DYNAMIQUE DU MERCURE DANS UN MANTEAU NEIGEUX SAISONNIER DE HAUTE LATITUDE À LA FIN DE LA NUIT POLAIRE. CAS DE STATION NORD (GROENLAND, 81°N) DU 25 FÉVRIER AU 15 MARS 2002.
IV.1 Introduction
IV.2 Consommation du mercure et hypothèses de réactivité dans un manteau neigeux saisonnier après le lever du soleil polaire
IV.2.1 Présentation de l’article 2
IV.2.2 Article 2 : Mercury distribution in the snowpack at Station Nord, Greenland shortly after polar sunrise: observation of a permanent Mercury Depletion Event in the air of snow
IV.3 Dynamique du mercure dans un manteau neigeux faiblement irradié. Emergence de périodes de production de Hg°.
IV.3.1 Présentation de l’article 3
IV.3.2 Article 3 : Night-time Production of Elemental Gaseous Mercury in Interstitial Air of Snow at Station Nord, Greenland.
IV.4 Conclusions
CONCLUSION

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