La dรฉcentralisation
ย ย La dรฉcentralisation est un processus qui vise le transfert de pouvoirs et de compรฉtences du pouvoir central vers les collectivitรฉs locales avec pour finalitรฉ le renforcement de lโautonomie de ces derniรจres. ยซ La Dรฉcentralisation nรฉcessite lโoctroi dโun pouvoir ร des entitรฉs infra-รฉtatiques, elle sous-tend lโidรฉe dโune autonomie locale et lโexistence dโintรฉrรชts spรฉcifiques ยป. Partant de cette dรฉfinition, on peut estimer que la dรฉcentralisation diffรจre de la dรฉconcentration. En effet dans le cadre de la dรฉconcentration, la dรฉlรฉgation de compรฉtences se fait au profit dโagents et dโorganismes locaux appartenant ร lโadministration de lโEtat. Dans ce cas de figure donc lโidรฉe dโautonomie est exclu รฉtant donnรฉ quโils demeurent sous lโautoritรฉ de lโEtat. Pour Christel Alvergne, la dรฉcentralisation constitue une entreprise de refonte dรฉmocratique : ยซ Elle est lโoccasion de renรฉgocier le contrat socialย qui unit les populations entre elles et leurs institutions en formulant un nouveau projet collectif.ยป Pris dans cette acception, la dรฉcentralisation revรชt une dimension politique dans la mesure oรน elle รฉtablit les bases dโun nouveau pacte social par le biais de la gestion participative quโelle induit. La dรฉcentralisation ร travers le transfert de compรฉtences aux collectivitรฉs locales constitue aussi une politique qui tend vers la revalorisation des acteurs locaux dans la gestion de leurs territoires afin de promouvoir le dรฉveloppement endogรจne. ยซ La dรฉcentralisation constitue la porte ouverte du dรฉveloppement local dans la mesure oรน elle induit un transfert institutionnel de compรฉtences ร de nouveaux acteurs conscients des enjeux territoriaux et qui mettent ainsi en ลuvre des stratรฉgies locales de dรฉveloppement ยป Pour nous, la dรฉcentralisation est un processus dรฉmocratique qui sโopรฉrationnalise par un transfert de compรฉtences du pouvoir central vers les collectivitรฉs locales et qui vise un meilleur partage du pouvoir grรขce ร la crรฉation et au renforcement de centres de dรฉcisions dans les rรฉgions, les communes et les communautรฉs rurales afin de promouvoir une participation pleine et effective des populations locales dans les politiques publiques
Le Dรฉveloppement local
ย ย Le dรฉveloppement local est une notion polysรฉmique qui renvoie ร plusieurs acceptions. Dโabord le dรฉveloppement local renvoie inรฉluctablement et ร un processus de dรฉcentralisation dont il est un corolaire. En effet la dรฉcentralisation est un prรฉalable au dรฉveloppement local dans la perspective oรน cโest elle qui รฉtablit le cadre institutionnel nรฉcessaire ร lโรฉmergence du dรฉveloppement local. ยซโฆle dรฉveloppement local suppose une volontรฉ populaire et une dรฉmarche collective sur et pour un espace. Cette volontรฉ correspond ร la capacitรฉ de lโensemble des habitants, ร รฉlaborer et mettre en ลuvre un projet collectif reflรฉtant leurs aspirations et leurs besoins, tout en tenant compte des ressources locales. Et cela ne peut รชtre possible quโavec la mise en place dโun cadre institutionnel, une responsabilisation des acteurs locaux mais รฉgalement une implication de la sociรฉtรฉ civile. Dรจs lors, la dรฉcentralisation qui correspond ร un transfert de compรฉtences, impliquant donc un partage du pouvoir et une responsabilisation des populations, trouve tout son sens. C’est-ร -dire quโelle constitue un outil permettant de stimuler le dรฉveloppement local ยป. Dโaprรจs Mbodj (M) : ยซ il (le dรฉveloppement local) reprรฉsente le processus par lequel, les efforts des peuples sont unis ร ceux des autoritรฉs gouvernementales des partenaires au dรฉveloppement telles que les Organisations Non Gouvernementales (ONG) afin dโaccroitre le potentiel รฉconomique, social et culturel de la communautรฉ, dโintรฉgrer cette communautรฉ ร la vie de la nation, et la rendre capable de participer pleinement au progrรจs national.ยป Cette dรฉfinition montre que le dรฉveloppement local renvoie forcรฉment ร lโimplication dโune pluralitรฉ dโacteurs localisรฉs que sont les acteurs locaux, nationaux et internationaux. Lโutilisation du terme local dans le nouveau concept laisse entrevoir la dimension spatiale de cette nouvelle politique. En effet le dรฉveloppement local prend pied dans un cadre spatial bien dรฉlimitรฉ socialisรฉ et appropriรฉ par ses habitants autrement dit dans un territoire. En tรฉmoigne ces รฉcrits de Samba (PC) : ยซ โฆ, le dรฉveloppement local est un processus de transformation socio-รฉconomique et culturelle opรฉrรฉe sur un espace bien dรฉfini en vue de promouvoir le mieux รชtre ยป. A la lumiรจre de ces diffรฉrentes dรฉfinitions, on peut considรฉrer le dรฉveloppement local comme รฉtant un processus politique, รฉconomique social et culturel qui place les acteurs locaux au dรฉbut et ร la fin de son action dans la mesure oรน dans un contexte de dรฉveloppement local, les acteurs de base conรงoivent par eux mรชme et pour eux-mรชmes leurs propres projets dans leurs territoires avec si nรฉcessaire le soutien de lโEtat et des partenaires extรฉrieurs.
Difficultรฉs dโaccรจs aux crรฉdits
ย ย Lโaffirmation du capitalisme nรฉo-libรฉral comme modรจle รฉconomique dominant dans le monde accorde une place incontournable aux capitaux dans les activitรฉs de production. Dรฉsormais, il demeure impรฉratif pour tout acteur dรฉsireux de jouer un rรดle majeur dans le processus de dรฉveloppement de disposer de moyens financiers consรฉquents. Dans cette perspective, les groupements de femmes en tant que structures crรฉรฉes dans la plupart des cas pour des raisons รฉconomiques se doivent donc dโรฉlaborer des stratรฉgies qui puissent leur permettre dโaccรฉder aux ressources financiรจres. Jusquโici, lโessentiel des fonds investis par les groupements proviennent de leurs fonds propres. Ce systรจme dโautofinancement est basรฉ sur les cotisations des membres des groupements. Cependant dรป fait de la pauvretรฉ des femmes, les sommes collectรฉes par le biais des cotisations ne sont pas suffisamment consรฉquentes pour permettre aux groupements de financer dans la durรฉe dโimportantes activitรฉs รฉconomiques. Dans cette situation, le recours aux institutions financiรจres devient une nรฉcessitรฉ pour les associations de femmes. Mais lโaccรจs aux financements passe par la satisfaction de plusieurs critรจres liรฉs au statut juridique de lโassociation, le suivi de procรฉdures administratives, lโexistence de garanties, etc. En effet pour contracter un prรชt auprรจs des banques et des mutuelles de crรฉdits, les groupements doivent entre autres รชtre reconnus sur le plan juridique et disposer de biens susceptibles lde servir de garantie. Ainsi tous les groupements qui ne disposent pas de reconnaissance juridique ne peuvent accรฉder aux crรฉdits. Lโaccรจs des groupements au marchรฉ financier formel est davantage compliquรฉ par les garanties exigรฉes. En effet les associations fรฉminines dans leur majoritรฉ ne disposent pas de biens pouvant servir de caution auprรจs des bailleurs privรฉs. Ce problรจme est dรฉcrit par les femmes comme รฉtant lโun de leurs plus sรฉrieux handicaps comme le confirme ces propos de cette prรฉsidente de groupement. ยซ Nous ne pouvons pas accรฉder aux crรฉdits car nous ne parvenons pas ร fournir les garanties que nous rรฉclament les banques et les mutuelles ยป. Le manque de financement est ร lโorigine de lโimmobilisme de beaucoup de groupements qui ne disposent pas de moyens pour investir. En tรฉmoigne cette dรฉclaration dโun membre du bureau dโune association de femmes : ยซ Prรฉsentement, notre GIE est en lรฉthargie car nous nโavons pas de financement ยป. A la question votre groupement bรฉnรฉficie t-il de crรฉdits allouรฉs par les institutions financiรจres, 68,4% des femmes interrogรฉes ont rรฉpondu par la nรฉgative.
Le dรฉficit de soutien des partenaires au dรฉveloppement
ย ย Lโรฉmergence des groupements de femmes a lieu dans un contexte marquรฉ par la disparition de lโEtat providence et le dรฉveloppement embryonnaire des collectivitรฉs locales. En effet, les crises รฉconomiques de ces derniรจres dรฉcennies ont engendrรฉ une dรฉliquescence des ressources de lโEtat et obligรฉ les autoritรฉs รฉtatiques ร appliquer une politique de rรฉduction des dรฉpenses publiques. Ainsi les services dรฉconcentrรฉs du pouvoir central, confrontรฉs ร un dรฉficit de moyens, ne peuvent plus jouer leurs rรดles dโappui-conseil et dโencadrement auprรจs des populations dans leurs initiatives de dรฉveloppement. Le cas du Service Dรฉpartementale du Dรฉveloppement Communautaire (SDDC) en est une illustration. En effet lโencadrement de lโensemble des groupements de femmes de lโArrondissement des Parcelles Assainies (les communes des Parcelles assainies, Grand Yoff, Patte dโOie et Cambรฉrรจne) qui compte plusieurs centaines de groupements est dรฉvolu ร un seul agent. Aussi le fait que les membres des groupements de femmes soient obligรฉes de se cotiser pour acheter le matรฉriel nรฉcessaire aux sessions de formations que leurs assurent le service, tรฉmoigne des difficultรฉs financiรจres que traverse la SDDC. En outre, les nombreux organismes crรฉรฉs, par le pouvoir central pour faciliter lโaccรจs des femmes aux crรฉdits, tardent ร dรฉmontrer leurs efficacitรฉs car peu de groupements parviennent ร obtenir un financement de lโEtat. A titre dโexemple, le ministรจre de lโentreprenariat fรฉminin nโa financรฉ au cours de lโannรฉe 2011 quโun seul groupement dans la CA de Grand Yoff. A lโimage de cette dรฉclaration dโune prรฉsidente dโun groupement : ยซ lโEtat fait beaucoup dโopรฉrations de communication sur le soutien financier quโil apporte aux femmes. Mais sur le terrain la rรฉalitรฉ est toute autre ; peu de groupements bรฉnรฉficient des financements publics ยป, les associations de femmes estiment que lโappui que leur apporte lโEtat demeure insuffisant. Dโaprรจs les rรฉsultats de nos enquรชtes, 51, 3% des femmes interrogรฉes estiment le soutien que leur apporte lโEtat est peu satisfaisant.
CONCLUSION GENERALE
ย ย Les observateurs du processus de dรฉveloppement ont dรฉsignรฉ les femmes par le terme sexe faible en rรฉfรฉrence ร leurs marginalisations dans le processus de dรฉveloppement. En effet, elles ont pendant longtemps, jouรฉ un rรดle mineure dans la gestion des affaires publiques. Dรฉsireux de remรฉdier ร ce problรจme qui constitue une entrave ร lโefficacitรฉ des projets de dรฉveloppement quโils initient, les bailleurs de fonds et lโEtat vont expรฉrimenter une nouvelle approche axรฉe sur la prise en compte de la dimension genre dans leurs programmes afin dโamรฉliorer la condition fรฉminine. Le processus de dรฉcentralisation et de dรฉveloppement local, en favorisant lโinstauration dโun nouveau pacte social basรฉ sur la multiplication des centres de dรฉcisions et lโimplication de toutes les composantes de la sociรฉtรฉ, a offert ร cette volontรฉ politique de lโEtat et des bailleurs de fonds, un cadre propice ร sa matรฉrialisation. Ainsi depuis deux dรฉcennies, on assiste ร un processus dโorganisation des femmes en groupements dont lโobjectif est la satisfaction de leurs aspirations รฉconomiques et sociales. Cette dynamique organisationnelle des femmes a permis la crรฉation de plusieurs centaines de groupements dans la CA de Grand Yoff. Ces structurent sโactivent principalement dans les petites activitรฉs รฉconomiques, les actions sociales, etc. Dans lโagglomรฉration de Grand Yoff, les groupements qui constituent des cadres de rencontres et dโรฉchanges, ont favorisรฉ lโaffermissement des relations sociales entre les femmes qui sont dรฉsormais conscientes de leurs besoins dโagir ensemble pour dรฉfendre leurs intรฉrรชts. En outre, on note une mise en rรฉseau des groupements qui permet aux femmes dโรชtre prรฉsentes ร tous les niveaux dโรฉchelles spatiales c’est-ร -dire du quartier ร lโรฉchelon national. Ceci facilite leurs implications dans lโensemble des projets de dรฉveloppement quelque soit leurs รฉchelles dโapplication. Cette mise en rรฉseau des groupements stimule lโimplication de plus en plus effective des femmes dans la gouvernance locale. Aussi les associations de femmes, en permettent ร leurs membres dont la plupart ne disposent pas de qualifications professionnelles de bรฉnรฉficier de formations dans plusieurs secteurs dโactivitรฉs et de disposer de petits crรฉdits pour financer leurs activitรฉs รฉconomiques, contribuent ร la rรฉduction de la pauvretรฉ. Cependant force est de constater que lโaction des groupements de femmes est handicapรฉe par de nombreux facteurs. En effet, les groupements de femmes รฉprouvent des difficultรฉs pour accรฉder aux financements du secteur privรฉ institutionnel ce qui les empรชchent de dรฉvelopper dans la durรฉe dโimportantes activitรฉs รฉconomiques. En plus le faible niveau dโinstruction des membres des groupements de femmes ne favorise pas une gestion formelle et moderne des structures. A cela sโajoute lโinstrumentalisation des groupements ร des fins politiciennes qui les รฉcartent de leurs vocations premiรจres. Enfin lโabsence dโune maison communautaire dans la CA de Grand Yoff, lโinsuffisance du soutien de lโEtat et le dรฉficit de partenaires extรฉrieurs constituent aussi des obstacles ร lโaffirmation des groupements en tant quโacteurs majeurs dans le processus de dรฉveloppement. Ces diffรฉrents constats issus de notre de travail, infirment nos hypothรจses de recherche et tรฉmoignent si besoin en est du dรฉcalage qui existe entre les discours officiels et la rรฉalitรฉ du terrain. Dโoรน lโintรฉrรชt de ce travail qui loin dโรชtre exhaustif รฉbauche plusieurs thรจmes qui pourraient faire lโobjet de rรฉflexions futures et parmi lesquelles on peut citer entre autres : la place des groupements de femmes dans le jeu des acteurs ; les orientations futures des groupements : vont-ils continuer ร sโintรฉresser davantage aux prรฉoccupations รฉconomiques de leurs membres ou vont-ils au contraire dรฉvelopper une vocation plus politique en devenant des instruments de conquรชte du pouvoir pour les femmes ?
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Table des matiรจres
CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
PROBLรMATIQUE
PREMIรRE PARTIE : Caractรฉristiques gรฉnรฉrales du territoire de la CA de De Grand Yoff
CHAPITRE I : Le cadre administratif et physique de la CA de Grand Yoff
CHAPITRE II : Caractรฉristiques dรฉmographiques et socio รฉconomiques de la CA de Grand Yoff
DEUXIรME PARTIE : Le dynamisme des groupements de femmes
CHAPITRE I : Les vocations des groupements de femmes
CHAPITRE II : Les partenaires des groupements de femmes
TROISIรME PARTIE : bilan de lโaction des groupements de femmes
CHAPITRE I : Les acquis des groupements de femmes
CHAPITRE II : les handicaps des groupements de femmes
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
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