Dynamique de l’occupation du sol et risque de disparition des écosystèmes dans les aires protégées

La destruction des habitats est la cause principale de l’érosion de la biodiversité (SCDB, 2010). En effet, la péjoration climatique (sécheresse) et les pressions anthropiques (déboisement, surpâturage, feux de brousse) ont entrainé une dégradation des ressources animales et végétales. Wezel, (2004) a montré que plus que les changements climatiques, ce sont les activités anthropiques qui seraient responsables de cette perte de biodiversité. En effet, celle-ci offre à l’humanité des valeurs économiques, environnementales et spirituelles essentielles à la survie de la communauté (SNAPS, 2012). Ces multiples services justifient la menace qui pèse sur elle. L’évaluation des écosystèmes pour le millénaire a fait remarquer que 60% des services éco-systémiques dans le monde étaient dégradés (MEA, 2005).

C’est pourquoi à l’issue de plusieurs rencontres internationales (Convention d’Alger en 1968, Convention de Rio en 1992), la rationalisation des activités de l’homme a été décidée avec la création des aires protégées. Les aires protégées protègent les habitats (UICN, 2013). Elles constituent une partie essentielle de la réponse aux changements climatiques parce qu’elles améliorent la résilience aux changements (adaptation) et elles protègent et augmentent les stocks de carbone (atténuation) (Dudley et al., 2010). En Afrique, l’établissement des premières aires protégées remontent au début du XIX siècle et s’est poursuivi jusqu’à maintenant (UICN, 2015). Ces aires protégées étaient sous le contrôle unique du gouvernement qui n’a pas tenu compte de la différence entre espace à protéger et espace nécessaire pour la survie d’une population en expansion (Medou, 2002). On constate que les arrêtés de classement avaient mis l’accent sur la protection des terres comme seule et unique finalité.

Au Sahel, l’importance des ressources naturelles comme facteur de développement économique et le caractére aléatoire du climat impliquent des pressions directes sur ces aires protégées induisant de graves conséquences à l’intérieur de ces dernières. Celles-ci sont peu à peu envahies et la pression anthropique contribue à fragiliser davantage les équilibres en cours. Il en résulte une perte aussi bien écologique qu’économique car les ressources naturelles sont exploitées en dehors de tout cadre réglementaire et sans durabilité (Pintus, 2009).

Dynamique spatio temporelle de l’occupation du sol des réserves sylvopastorale des six forages et de biosphère du ferlo

Au Sahel, l’une des principales activités économiques est l’élevage extensif qui dépend de la disponibilité en eau et en fourrage de la zone. Les ressources alimentaires dont dispose le bétail sont essentiellement naturelles et fournies par les végétaux spontanés. Donc développer l’élevage sans une bonne stratégie de gestion des ressources naturelles pourrait avoir comme conséquence une dégradation de l’environnement. Le Ferlo, constituant une partie du Sahel sénégalais par excellence regroupe plus de 2/3 du cheptel sénégalais (République du Sénégal, 2014). Il joue donc un rôle important dans l’approvisionnement en viande des marchès sénégalais et est d’un poids économique non négligeable (Magrin et al., 2015). L’élevage extensif constitue alors une des filières à mettre en valeur pour l’atteinte de la souveraineté alimentaire (Chardonnet, 2009). Cependant, les changements intervenus lors de ces dernières décennies ont profondément perturbé le mode de gestion de l’espace pastoral et ont accru également la vulnérabilité de ces pasteurs. En effet, leur sédentarisation suite à l’implantation des forages et les nombreuses sécheresses répétées ont causé une dégradation des ressources végétales. En période de sécheresse, il est noté une surexploitation des pâturages et une dégradation des ressources ligneuses dans l’aire de desserte des forages suite à une forte concentration du cheptel. Ces facteurs contribuent à la baisse des ressources pastorales disponibles et au surpaturage et compromettent ainsi la résilience de l’écosystème (Touré et al., 2013). Dès lors, le suivi de la végétation apparait nécessaire pour une gestion durable de l’élevage. Outre le coté économique, sur le plan écologique, les ressources sont en constante évolution aussi bien au niveau régional que local. Cette évolution dépend de plusieurs facteurs dont les changements climatiques et les activités anthropiques. Au Sahel, depuis plusieurs décennies, les écosystèmes ont subi beaucoup de stress dus à des épisodes de sécheresses très longues mais aussi à une pression anthropique croissante. Suite à l’amélioration des conditions pluviométriques depuis 1990 (Mahamadou, 2018), beaucoup d’études ont montré une reprise de la végétation au Sahel (Dardel, 2014), (Adey et al., 2018) et une sousestimation des superficies des formations boisées (Bastin et al., 2017).

Ce reverdissement observé pourrait jouer un rôle important dans l’amélioration des conditions de vie des populations rurales et donner quelques renseignements concernant les capacités de résilience des écosystèmes sahéliens. De ce point de vue, il serait très intéressant de connaitre la dynamique de l’occupation du sol à travers d’autres méthodes que celles utilisées par ceux-là pour confirmer véritablement ce reverdissement du Sahel et à quel moment ce phénomène s’est produit. Des travaux utilisant l’approche spatiale dans une démarche diachronique ont été menés au ferlo et à différentes périodes : 1990-2002 dans des aires non protégées du bassin versant du Ferlo (Sarr, 2009), 1973-2010 sur un espace couvrant largement le ferlo (Fall, 2014), 1988-2000, 1984-2015 sur une portion de la zone protègée (Ruster, 2008), (Sylla, 2015), 1965-2015 sur l’ensemble du bassin du Ferlo (Ba, 2018). Cette étude s’interesse spécifiquement aux territoires classés à l’intérieur de lesquelles sont appliquées des restrictions.

Caractéristiques du peuplement ligneux des différentes formations végétales dans les réserves sylvopastorale des six forages et de biosphère du Ferlo 

Dans tous les domaines bioclimatiques et au niveau de tous les massifs classés ou protégés, les ressources ligneuses jouent un rôle important (Ngom, 2008, Ndiaye, 2013, Badji et al., 2014, FAO, 2017), car elles constituent un excellent réservoir pour la cueillette, l’alimentation humaine et fourragère, la collecte de bois…. Aujourd’hui, ces ressources font face aux aléas climatiques et à la pression anthropique qui entrainent leur dégradation. Cependant, les changements climatiques n’entraineraient qu’une réduction et une raréfaction de la diversité végétale (Chatelain et al., 1995, Sall, 1996, Hill et Curran, 2005, Cramer et al., 2007). En effet, la végétation présenterait de bonnes capacités de résiliences Poupon (1977), Miehe (1990), Benjaminsen (1997), Bakhoum (2013), Badji et al (2014) suite à une amélioration des conditions pluviométriques si ce n’étaient les activités anthropiques. En effet, Wezel, (2004) a montré que c’est l’action anthropique qui parachève la destruction des milieux naturels. Cette bonne capacité de résilience des ressources ligneuses fait qu’elles constituent un élément clé dans beaucoup de processus de restauration notamment dans la plantation allemande dans la RSSF au Ferlo, le reboisement des parcelles de la Grande Muraille Verte (GMV), l’établissement des réserves sylvopastorales au Ferlo et la création des réserves de biosphère.

Il importe donc après plusieurs années de conservation, de caractériser l’état actuel du peuplement ligneux de chaque formation végétale pour mieux évaluer le fonctionnement de ces espaces protégés (Bakhoum, 2013). C’est dans ce contexte que nous nous proposons d’étudier dans la réserve sylvopastorale des six forages et dans la réserve de biosphère du Ferlo, l’état actuel du peuplement ligneux de chaque formation végétale à travers des paramètres dendrométriques (diversité floristique, structure des ligneux), afin d’en tirer les conclusions adéquates.

Beaucoup d’études caractérisant la végétaion ligneuse ont été realisées ces dernieres années à différents endroits du ferlo : au niveau des communes de velingara Ferlo (Ngom, 2008), au niveau des plantations aménagées pour la production de gomme arabique (Diallo, 2011), en fonction des unités topographiques (Ndiaye et al., 2014), en suivant le long du tracé de la Grande Muraille Verte (GMV) (Niang et al., 2014), en fonction de l’utilisation des terres (Ndong et al., 2015) et autour des mares (Faye, 2017). Ces études ont apporté une contribution appréciable dans la connaissance de la végétation ligneuse au Ferlo, toutefois, ils ont été réalisés au sein de territoires non protègés et ceux qui le sont (Ngom et al., 2013) n’ont pas intégré la différence de richesse floristique qui existe au niveau des formations végétales.

Scénarii d’évolution des différents écosystèmes selon les critères de la liste rouge des écosystèmes de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) 

Dans le contexte de dégradation de la biodiversité observée dans tous les biomes, il est nécessaire de redéfinir les priorités de conservation en mettant en place un système de suivi de référence reconnu mondialement. L’objectif étant de promouvoir une gestion efficace de ces écosystèmes et de proposer des solutions fondées sur la nature pour lutter contre le changement climatique (atténuation et adaptation), (MEA, 2005 et TEEB, 2010). C’est ainsi que l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) a jeté les bases d’une réflexion mondiale pour l’élaboration d’une liste rouge des écosystèmes. Il s’agit d’évaluer ces derniers à partir de cinq critères et les classer dans les huit catégories définies par l’union (UICN, 2013). Ces cinq critères sont : la réduction de la répartition spatiale, l’étendue restreinte, la dégradation de l’environnement abiotique, la perturbation des interactions biotiques et l’estimation du risque de disparition par analyse quantitative (modélisation). Cette méthode est conçue pour l’évaluation de tous les types d’écosystèmes (marins, fluviaux, terrestres, écosystèmes de mangroves, zones humides, zones sahéliennes etc). Elle permet de mesurer le degré de menace qui pése sur la biodiversitè à l’échelle de l’écosystème. C’est une méthode qui permet de mobiliser toutes les données qui existent sur un écosystème à évaluer (allant des données de télédétection, des enquètes auprés des populations, des données d’inventaires jusqu’aux prévisions du Groupe d’Experts Intergouvernementaux sur l’Evolution du Climat (GIEC).

Ecosystème

Par définition, les écosystèmes représentent des ensembles d’organismes et de leur environnement physique associés au sein d’une aire géographique (Tansley, 1935). Ils sont ainsi composés d’un milieu biotique, d’un milieu abiotique, des interactions mutuelles entre et au sein de ces deux milieux et d’un espace physique dans lequel ils opèrent (Pickett et Cadenasso 1995). Selon cette définition, de grands écosystèmes comme les océans, les forêts peuvent aussi renfermer d’autres écosystèmes comme des flaques d’eau, des haies, des fossés… . D’où l’importance d’identifier impérativement et explicitement le biotope caractéristique et les processus clés qui le distinguent d’autres écosystèmes, ainsi que de déterminer les variations naturelles de ses propriétés biotiques et abiotiques.

Ainsi, l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) et dans d’autres évaluations pour la conservation (keith et al., 2013, ferrez et al., 2019), les auteurs associent les termes : communautés écologiques, habitats, biotopes et (dans un contexte terrestre) les types de végétation comme étant des écosystèmes. Ces formations végétales (savane arborée, savane arbustive…) peuvent être considérées comme des synonymes opérationnels des types d’écosystème, tant qu’ils sont définis selon les procédures décrits dans le processus d’évaluation (Nicholson et al., 2009).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
Problèmatique et contexte
Objectifs et Hypothèses
Organisation du manuscrit
CHAPITRE 1. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
1.1. Dynamique spatio temporelle de l’occupation du sol des réserves sylvopastorale des six forages et de biosphère du ferlo
1.2. Caractéristiques du peuplement ligneux des différentes formations végétales dans les réserves sylvopastorale des six forages et de biosphère du Ferlo
1.3. Scénarii d’évolution des différents écosystèmes selon les critères de la liste rouge des écosystèmes de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN)
1.4. Définition des mots clés
1.5. Présentation de la zone d’étude
CHAPITRE 2. MATERIEL ET METHODES
2.1. Dynamique spatio temporelle de l’occupation du sol de la réserve sylvopastorale des six forages et de la réserve de biosphère du Ferlo de 1965 à 2017
2.2. Caractérisation du peuplement ligneux dans les réserves sylvopastorale des six forages et de biosphère du Ferlo
2.3. Evaluation des scénarii d’évolution
CHAPITRE 3. EVOLUTION DE L’OCCUPATION DU SOL
3.1. Dynamique spatio-temporelle de l’occupation du sol des deux réserves
3.2. Scénarii d’évolution des écosystèmes de la RBF et de la RSSF selon les critères de la LRE
CHAPITRE 4. COMPOSITION ET CARACTERISTIQUES DE LA VEGETATION LIGNEUSE DANS LA RESERVE DE BIOSPHERE DU FERLO
4.1. La forêt ripicole relique
4.2. Les savanes de la réserve de biosphère du Ferlo
4.3. Les steppes
4.4. Répartition des individus de toutes les formations selon la hauteur
4.5. Répartition des individus de toutes les formations de la réserve de biosphère en fonction de la circonférence
CHAPITRE 5. COMPOSITION ET CARACTERISTIQUES DE LA VEGETATION LIGNEUSE DANS LA RESERVE SYLVOPASTORALE DES SIX FORAGES
5.1. Les savanes
5.2. Les steppes
5.3. Répartition des individus de toutes les formations de la réserve sylvopastorale des six forages selon la hauteur
5.4. Répartition des individus de toutes les formations de la réserve des six forages en fonction de la circonférence
CHAPITRE 6. DISCUSSION
6.1.Dynamique spatio-temporelle de l’occupation du sol des deux réserves de 1965 à 2017
6.2.Scénarii d’évolution des écosystèmes dans les deux réserves
6.3. Caractèristiques dendromètiques de la végétation ligneuse dans les différentes formations végétales
CONCLUSION GENERALE

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