Entretien libre avec le « lonaky » du village de Matambalahy
Il a déjà été mentionné dans le précédent chapitre que se rapprocher du leader social nous est incontournable puisqu’il est le plus ancien de la génération des ancêtres de son village. Considérant le statut social de notre enquêté, le sujet était totalement centré sur la dimension culturelle de la pratique traditionnelle du tsenan’ampela . Par la suite, l’entretien qui a duré pendant une trentaine de minutes se résumaient sur les points suivants :
Les liens de solidarité au sein du fokontany ;
Les facteurs qui ont contribué aux changements de cette pratique ;
Son opinion par rapport à cette pratique ;
S’il peut parler de l’état actuel des choses ;
Si pour lui le changement de la pratique traditionnelle du tsenan’ampela est une fatalité ;
S’il constate de quelconque ressemblance entre le tsenan’ampela et la prostitution en milieu urbain.
La grille d’orientation des questions :
Etablir préalablement cette grille d’orientation s’avère indispensable et méthodique pour nous afin d’éviter toute possibilité de s’écarter du sujet et de trainer dans des détails inutiles qui vont entraîner une grande perte de temps. Pour se faire nous avons souligné de manière explicite toutes informations que nous espérions obtenir auprès d’elles. Les points saillants de ces informations attendues se résumaient sur ces quelques lignes :
Une brève historique personnelle ;
Son autoestimation par rapport à son activité ;
Son image du futur.
Ces témoignages constituent la pièce maîtresse de notre approche qualitative en terme de recherche d’homologie structurale dans l’aspect dynamique du tsenan’ampela. Pour que cette recherche soit fondée, il est impératif de partir sur des bases théoriques.
L’anthropologie du développement
Les théories développées dans le précédent paragraphe, nous a donné un aperçu du côté anthropologique de notre recherche, et en toute évidence il y a obligatoirement l’implication de cette discipline. La spécificité de notre zone d’investigation nous a obligés à adopter une approche anthropologique. A l’instar des préoccupations du monde urbain, le milieu social est à la fois par ses potentialités une minorité source de développement et par sa vulnérabilité constitue un blocage pour le développement. De ce fait, les différentes théories anthropologiques orientent nos pistes de réflexions dans la mesure où l’action de la minorité soit source de développement.
La fréquence de prestation de chaque partie
Pour mieux définir l’intitulé, la fréquence de prestation est le nombre de partenaire que chaque partie dans une journée est il/elle est arrivé(e) à séduire. Le jour de notre observation, nous avons constaté le fait que le matin tous les partis sont préoccupés par d’autres activités. Les prétendants se soucient de leurs bovins qu’ils vont vendre ou acheter. C’est seulement l’après midi que les jeux de séductions commencent. Après avoir franchi l’étape de la séduction, en guise de galanterie et n’est pas incluse dans le coût de la prestation, le prétendant emmène sa proie dans un bar du coin et ils vont finir la nuit ensemble. Toute cette anecdote va mettre en évidence le fait qu’une seule prestation dans la journée est largement suffisante pour eux.
Les fondements structurels du groupe
Comme il a été dit dans le précédent paragraphe concernant le coté proxémique ; des normes bien qu’étant pas rigide et formelles régissent la vie en groupe des filles de marché.
Au niveau micro : C’est-à-dire à l’intérieur du groupuscule, elles sont toutes issues du même village et elles se déplacent de village en village au rendez-vous du jour de marché. A l’intérieur du groupe existe une hiérarchie qui dépend essentiellement de l’âge et c’est la doyenne qui a symboliquement l’autorité surtout en termes de résolution de conflit interne ou externe.
au niveau méso : Chaque groupuscule est déjà circonscrit dans un territoire fixe. En pratique, chaque « tsirimbelo » est tenu de ne s’exercer que dans son territoire pour ne pas susciter de quelconques conflits intergroupes.
Au niveau macro : Même, s’il y a cette image caricaturale de ces filles de marché comme étant des prostitués, leur activité ne porte pas préjudice à leur vie sociale. Elles s’affichent d’autant plus que leur activité se passe en plein jour, elles ne se sentent point exclue dans aucun des deux mondes. Afin de pouvoir interpréter objectivement ces données pour un essai de modélisation nous allons effectuer une approche quantitative des résultats obtenus.
L’endogènéité des demandes sociales
L’objet de réflexion dans ce paragraphe est de relier nos analyses par rapport aux facteurs externes qui ont favorisé la pratique tant au niveau du fond et au niveau de la forme. Si à l’origine, le tsenan’ampela était un simple lieu de rencontre entre célibataires, désormais il est devenu actuellement un lieu de prostitution où l’on attribue une valeur marchande à la femme. Etant donné que le tsenan’omby est le lieu fixé par ses pratiquants, un raccourci est vite fait avec la valeur matérielle de la femme. Beaucoup de facteurs ont accompagné l’évolution de cette pratique entre autres la monétarisation. Sur ce, beaucoup d’effets en résultent puisque toutes les demandes sociales doivent se faire de manière endogène mais non le contraire. En d’autres termes, la hiérarchisation des besoins est souvent le reflet d’une vision culturellement biaisée. Par conséquent, nous pouvons parler de dérive culturelle dans la définition des besoins ; si ce besoin en question s’introduit de manière inopinée ou imposée. En guise d’illustration, nous allons figurer dans le schéma ci-dessus l’effet de ces besoins inadaptés. Dans ce cheminement, théoriquement nous devons voir un grand nombres d’acteurs qui ont chacun un très grand rôle dans l’encadrement de la vie rurale rencontrant des problèmes dans leur chemin de modernisation. Les principaux acteurs avec leurs rôles spécifiques sont répartis dans les catégories suivantes :
Secteur publique ou étatique
Secteur privée lucratif
Secteur associatif
Secteur confessionnel
Secteur informel
Au terme de ce chapitre, les explications approfondies sur la perception de la pratique a permis d’étendre des propositions de solutions pragmatiques pour remédier ou à la limite réduire la pratique. La nécessité d’un encadrement spécifique pour l’environnement social des filles de marché est une priorité pour faire en sorte que chaque acteur joue son rôle dans la socialisation de ces dernières.
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Table des matières
Introduction générale
1ère partie : approche conceptuelle et contextuelle
Chapitre I : présentation générale du cadre de la recherche
Section 1 : brève présentation du district d’Ihosy
Sous section 1 : délimitation géographique
Sous section 2 : profil historique
Section 2 : données démographiques diachroniques
Sous section 1 : aspects humains des lieux d’investigations
Sous section 2 : quelques traits de l’organisation sociale des lieux d’investigations
Sous section 3 : environnement physique
Chapitre II : principaux caractéristiques de la population des deux fokontany
Section 1 : caractéristiques sociologiques des villageois
Sous section 1 : croyances
Sous section 2 : mode de vie et situation économique
Section 2 : présentation de la population d’enquête
Sous section 1 : les filles de marché
Sous section 2 : les prétendants
Sous section 3 : les tierces personnes
Sous section 4 : quelques habitants des deux fokontany
Sous section 5 : les filles de nuit en milieu urbain
Chapitre III : appareillage méthodologique
Section 1 : les étapes de la recherche
Sous section 1 : processus préparatoire
Sous section 2 : la phase exploratoire
Sous section 3 : la phase de la perception immédiate de la réalité
Sous section 4 : la dernière phase de l’enquête proprement dite
Section 2 : typologie des recueils des données
Sous section 1 : la technique d’observation directe méthodique
Sous section 2 : les techniques d’entretiens dirigés
a. Interview avec les filles de marché
b. Interview avec les prétendants
c. Interview avec quelques habitants des deux fokontany
d. Interview avec les filles de nuits en milieu urbain
Sous section 3 : la technique d’entretien libre
a. Entretien libre avec le chef fokontany de Dangovato
b. Entretien libre avec le lonaky du village de Matambalahy
c. Entretien libre avec le représentant religieux
d. Entretien libre avec le chargé de programme au sein de l’ONG EISA
Sous section 4 : le récit de vie
a. Fiche signalétique des enquêtés
b. Grille d’orientation des questions
Chapitre IV : cadre théorique
Section 1 : les repères théoriques et conceptuels
Sous section 1 : l’interactionnisme symbolique
Sous section 2 : le structuro fonctionnalisme
Sous section 3 : le diffusionnisme
Sous section 4 : le culturalisme
Section 2 : domaines impliqués
Sous section 1 : l’anthropologie du développement
Sous section 2 : la sociologie classique
Section 3 : choix de la triangulation
Sous section 1 : au niveau méthodologique
Sous section 2 : au niveau de la population d’enquête
Sous section 3 : au niveau de l’appareillage conceptuel
2ème partie : dynamique représentationnelle du tsenan’ampela
Chapitre V : approche qualitative des résultats
Section 1 : les données obtenues à partir des entretiens dirigés
Sous section 1 : points de vue des filles de marché
Sous section 2 : points de vue des filles de nuits en milieu urbain
Sous section 3 : points de vue des prétendants
Sous section 4 : points de vue des simples villageois
Sous section 5 : points de vue des proches des filles de marché
Section 2 : données obtenues à partir des entretiens libres
Sous section 1 : points de vue du chef fokontany de Dangovato
Sous section 2 : points de vue du lonaka du village de Matambalahy
Sous section 3 : points de vue d’un représentant religieux
Sous section 4 : points de vue du chargé de programme au sein de l’ONG EISA
Sous section 5 : récits de vie
Section 3 : les données obtenue à partir de la techniques d’observation
Sous section 1 : le code de communication des deux parties
a. Les filles de marché
b. Les prétendants
Sous section 2 : la fréquence de prestation de chaque partie
Sous section 3 : les formes d’interactions
Sous section 4 : les fondements structurels du groupe
Chapitre VI : approche quantitative des résultats
Section 1 : la méthode de khi-deux
Sous Section 1 : recherche de corrélation entre les variables niveau d’instructions et raisons du passage à l’acte
Sous section 2 : recherche de corrélation entre les variables raisons du passage à l’acte et situation familiale
Sous section 3 : recherche de corrélation entre les variables degré niveau de vie et raisons du passage à l’acte
Sous section 4 : recherche de corrélation entre les variables degré d’intégration sociale et raisons du passage à l’acte
Sous section 5 : recherche de corrélation entre les variables origine ethnique des filles de nuit et les raisons du passage à l’acte
Section 2 : étude comparative entre l’activité des filles de marché et des filles de nuits
3 ème partie : compétences relationnelles de la pratique traditionnelles
Chapitre VIII : interprétation transversale
Section 1 : approche socio anthropologique
Sous section 1 : le niveau d’instruction ne favorise pas le passage à l’acte
Sous section 2 : le degré de conservatisme favorise le passage à l’acte
Sous section 3 : les échanges tripolaires véhiculées à travers le tsenan’ampela
Section 2 : la portée psychologique du tsenan’ampela
Section 3 : dimension économique
Chapitre VIII : causes conjoncturelles de l’évolution du tsenan’ampela
Section 1 : dynamique du dedans
Sou section 1 : facteurs démographiques
Sous section 2 : le mode de mise en valeur do territoire d’agriculture
Section 2 : dynamique du dehors
Sous section 1 : les échanges humains
Sous section 2 : la monétarisation
Chapitre IX : stratégie de remédiation
Section 1 : une éducation contextualisée
Section 2 : l’endogènéité des demandes sociales
Conclusion générale
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