Dynamique de la phénologie des manguiers
Le CIRAD
Le CIRAD (Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement) est un Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial (EPIC) créé en 1984 qui est aujourd’hui sous la double tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche, et de l’Innovation et du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. Comme son nom l’indique, ses recherches sont centrées sur l’agronomie et le développement durable pour les zones tropicales et méditerranéennes. La création de ce centre de recherche résulte du regroupement de neuf instituts de recherche datant des années après-guerre déjà spécialisés dans la recherche agronomique tropicale. Il compte 1650 salariés répartis entre le centre principal basé à Montpellier, le siège social à Paris et les 11 directions régionales à travers le monde, comme nous pouvons le voir sur la carte ci-dessous (voir figure 1). Parmi ces directions régionales deux regroupent les départements et régions d’outre-mer (DROM) françaises que sont la Guyane, la Guadeloupe et la Martinique pour l’une et Mayotte et la Réunion pour la deuxième. Le CIRAD est en effet très actif dans les DROM, l’environnement étant tropical tout en restant sur le territoire français.
Le CIRAD se divise en trois départements scientifiques : le département Systèmes biologiques (Bios), le département Performances des systèmes de production et de transformation tropicaux (Persyst) et le département Environnements et Sociétés (ES). Le département Persyst regroupe tous les projets et études concernant la durabilité et les performances de tous les systèmes de productions tropicales. Il s’intéresse à l’introduction de pratiques agroécologiques dans la production et la transformation de ces cultures tropicales. Dans ce département, les études sont à l’échelle d’une parcelle, d’une exploitation ou d’un territoire. En comparaison, le département Bios étudie le fonctionnement et la biologie des organismes liés à l’agriculture afin de mieux comprendre leurs interactions (par exemple la relation plante-hôte et parasites, le génome d’une bactérie). L’échelle d’étude est donc replacée à l’échelle moléculaire ou de l’individu. Le département ES s’attache à comprendre les relations entre les différents acteurs et parties prenantes de ces systèmes de productions. Il joue un rôle important dans le développement rural des pays dans lesquels le CIRAD est implanté pour favoriser le lien et l’entente durable entre producteurs, territoires et acteurs de la filière.
Le département ES travaille sur l’organisation des marchés, l’établissement d’une norme ou d’un cahier des charges, ou encore sur la mise en place d’un dialogue entre tous les membres de l’amont à l’aval d’une filière de production. Ces départements sont eux-mêmes subdivisés en 33 unités de recherche (URs) qui peuvent être soit mixtes, c’est-à-dire en partenariat avec un établissement d’enseignement supérieur et un ou plusieurs autres organismes de recherche, soit propres au CIRAD. La direction générale ainsi que le conseil d’administration du CIRAD sont dirigés depuis 2013 par Michel Eddi (voir annexe 1). Cette direction est encadrée par un conseil scientifique et un comité d’éthique commun à l’INRA et l’Ifremer (Eddi, 2018). Alors que dans les pays étrangers, les URs du CIRAD interviennent essentiellement dans le cadre de Dispositifs d’enseignement et de recherche en Partenariat (DPs), les activités du CIRAD à La Réunion sont organisées en quatre Dispositifs de Programmation de la recherche en Partenariat (DPPs), coordonnés par la direction régionale Réunion-Mayotte & Océan indien. Cette programmation de la recherche s’effectue dans le cadre d’accords-cadres entre l’Etat (Direction de l’Agriculture et de la Forêt), la Région Réunion, le Département de La Réunion et le CIRAD.
Missions
Les principales missions du CIRAD se basent sur la recherche de solutions aux problématiques actuelles que sont la sécurité alimentaire, la gestion des ressources naturelles, le changement climatique ou encore la lutte contre la pauvreté. Nous pourrions résumer l’objectif du CIRAD à la proposition de : « bâtir une agriculture durable, adaptée aux changements climatiques, capable de nourrir 10 milliards d’êtres humains en 2050, tout en préservant l’environnement » (Eddi, 2019). En effet, les missions du CIRAD portent sur les enjeux mondiaux et actuels. Elles sont donc en accord avec les 17 objectifs du développement durable mis en place par l’Organisation des Nations Unies (ONU) ainsi qu’avec les accords de Paris sur le changement climatique signé en 2015 à la suite de la COP21. Le CIRAD tente d’agir avec les politiques publiques internationales autour de l’agriculture des pays du Sud pour garantir à ses habitants une vie décente tout en améliorant la durabilité de leur système. Concrètement, le CIRAD met en place des recherches expérimentations directement avec ses partenaires des pays du Sud pour développer l’agroécologie, améliorer les systèmes de production ainsi que les systèmes de transformation et de distribution.
En plus de ces missions de recherche, le CIRAD s’attache à partager ses connaissances par le biais de ses dispositifs de recherche et enseignement en partenariat. C’est-à-dire que le CIRAD est à la fois engagé sur des projets auprès de ses partenaires du Sud – comme le projet d’agroforesterie au Cameroun ou le projet d’hévéaculture en Thaïlande – et qu’il dispense aussi un programme de formation auprès de ces pays-là. A ce jour, 150 institutions dans 100 pays répartis entre l’Afrique, l’Amérique latine et l’Asie permettent de former de futurs chercheurs dans le monde. Le CIRAD accueille chaque année environ 400 doctorants dont plus de la moitié (57%) sont issus des pays du Sud. Cette capitalisation du savoir et des connaissances passe aussi par la diffusion de l’information et des solutions à grande échelle. La diffusion se fait tout d’abord par la publication d’articles scientifiques mais aussi par l’édition d’ouvrages en partenariat avec les éditions Quae. Pour exemple, au cours de l’exercice de l’année 2017, 198 millions d’euros de budget ont amené à la publication de 830 articles scientifiques, à de nombreuses heures de cours dispensées et à des missions de terrain (Eddi, 2018).
Cadre et contexte scientifiques de l’étude à La Réunion
Le stage s’inscrit dans le cadre du DPP COSAQ (cadre dont relève l’UR HortSys à La Réunion, avec quatre autres URs du CIRAD). Ce DPP (COSAQ : CO-construction de Systèmes Agroalimentaires de Qualité) a notamment pour objectif de « Produire mieux » qui passe par une réduction des impacts environnementaux des systèmes techniques, notamment par la mise en oeuvre de méthodes agroécologiques, en particulier pratiques culturales à effet essentiellement « Bottom-up » (taille pour synchronisation de la floraison et aération de la canopée, couverture du sol à l’aplomb des arbres comme barrière physique, récolte prophylactique précoce pour rupture du cycle, récolte au stade optimal, optimisation de l’irrigation pour un meilleur compromis entre floraison et gestion d’un enherbement afin de mettre en place la lutte biologique par conservation. Notre étude s’inscrit plus précisément dans le projet COSAQ 1 (financé par le FEDER) qui s’intéresse aux bases biologiques et techniques de cette co-conception, et dans le cadre du projet Ecoverger est financé par l’ONEMA dans le cadre de l’APR 2014 « Résistance et pesticides » piloté par le MEDDE. L’objectif de ce projet (« Conception d’itinéraires techniques économes en pesticides en vergers guidée par les contraintes et les objectifs des agriculteurs ») conduit de 2015 à 2019 est d’élaborer une méthode pour concevoir des itinéraires techniques en vergers évalués sur leur capacité à limiter le développement et les dommages des bioagresseurs et à satisfaire les obligations d’efficacité agronomique, de viabilité économique et de durabilité. La conception d’itinéraires techniques passe par la connaissance des processus biologiques impliqués dans la régulation des bioagresseurs de la floraison du manguier et donc de l’effet de pratiques culturales sur ces processus.
A ce titre, ce stage s’inscrit à la suite du stage de fin d’études de Lucie Brustel, réalisé entre juin et décembre 2017 (Brustel, 2018) avec les mêmes financements et le même objet. En effet, l’étude mise en place en 2018 a suivi le même protocole que celui défini en 2017, année où la floraison des manguiers a été insuffisante (se traduisant par seulement environ 950 t de mangues à La Réunion pour une production annuelle moyenne normale de 3000 t), imposant une reconduction de l’étude en 2018. Cependant, l’un des deux sites d’expérimentation suivis en 2017 a dû être abandonné car il s’est avéré que tous les manguiers observés n’appartenant pas au même cultivar. Toutefois, un nouveau dispositif expérimental, plus léger, a été mis en place en 2018, chez un producteur.
Les Projets Ecoverger et COSAQ1, dans leur composante « manguier », s’inscrivent eux-mêmes à la suite du projet Ecofrut. Ce projet (Nouveaux systèmes de culture ECOlogiques et durables pour des productions FRUitières de qualité en milieu Tropical), conduit de 2010 à 2015, a été financé par le Fonds européen pour le développement rural (Feader). Il a visé notamment à améliorer les méthodes de production de mangues. Il a traité de la maitrise de la production, de la phénologie et de la qualité des mangues par une meilleure efficience de l’irrigation, ainsi que des problèmes phytosanitaires, notamment les cochenilles à sécrétions cireuses et la cécidomyie des fleurs. C’est dans le cadre de ce projet qu’une thèse réalisée par Paul Amouroux de 2011 à 2013 a permis de faire le point sur la biologie et la dynamique des populations de la cécidomyie des fleurs (Procontarinia mangiferae) à La Réunion (Amouroux, 2013). Cette thèse, en partie réalisé sur le principal verger sur lequel ont été conduites notre étude et celle de Lucie Brustel, a permis, entre autres, de comprendre les mécanismes d’entrée et de levée de diapause des larves de cécidomyies pour assurer la survie de l’espèce d’une année sur l’autre, ainsi que de mieux comprendre le mode de dispersion des femelles dans un verger. Ce travail d’approfondissement des connaissances sur les cécidomyies des fleurs du manguier a été à l’origine de la réflexion sur les stratégies de gestion agroécologique de ce bioagresseur.
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Table des matières
Sigles et abréviations
Introduction
1 Le CIRAD
1.1 Organisation
1.2 Missions
1.3 L’UR HortSys
1.4 Cadre et contexte scientifiques de l’étude à La Réunion
2 L’île de La Réunion
2.1 Contexte géographique
2.2 Contexte pédoclimatique
2.3 Contexte économique
3 La culture de la mangue
3.1 Importance mondiale
3.2 Culture du manguier à La Réunion
3.2.1 Biologie
3.2.2 Physiologie
3.2.3 Principales variétés cultivées
3.2.4 Pratiques culturales du manguier
3.2.5 La production de mangues
4 Les principaux bioagresseurs du manguier à La Réunion
4.1 Insectes
4.1.1 Cécidomyies
4.1.2 Punaises
4.1.3 Mouches des fruits
4.2 Maladies cryptogamiques
4.2.1 Oïdium
4.3 Maladies bactériennes
5 La problématique de l’étude
1 Contexte général des suivis et dispositifs expérimentaux
1.1 Le matériel végétal
1.2 Les couvertures du sol1.2.1 L’enherbement ras ER
1.2.2 L’enherbement haut EH
1.2.3 Le paillage synthétique PS
1.3 Les sites d’expérimentations
1.3.1 Site 1 : CPEA
1.3.2 Site 2 : Piton Defaud
1.4 Outils d’analyses statistiques
2 Suivi 1 : dynamique de la phénologie des manguiers
2.1 L’étiquetage des UC
2.2 Les paramètres édaphiques
2.2.1 Les Bait lamina tests
2.2.2 Les capteurs de température
2.3 Caractérisation de la flore et de l’entomofaune sur les modalités d’enherbement (ER et EH)
3 Suivi 2 : dynamique des populations de cécidomyies
4 Suivi 3 : infestation précoce des jeunes fruits
1 Climat global des suivis
2 Suivi 1 : dynamique de la phénologie des manguiers
2.1 Phénologie
2.1.1 Dynamique de floraison
2.1.2 Taux de floraison
2.1.3 Taux de fructification
2.2 Environnement
2.2.1 Analyse de l’activité biologique du sol
2.2.2 Analyse des températures du sol
2.2.3 Analyse de la caractérisation de la flore et de l’entomofaune sur les modalités d’enherbement (ER et EH)
3 Suivi 2 : dynamique des populations de cécidomyies
4 Suivi 3 : infestation précoce des jeunes fruits
1 Discussions et limites de l’étude
1.1 L’effet des couvertures du sol sur la phénologie et l’environnement du manguier
1.2 L’effet des couvertures du sol sur la population de cécidomyies
1.3 L’effet des couvertures du sol sur les populations de mouches des fruits
1.4 Limites des différentes modalités de couvertures du sol
2 Perspectives d’amélioration et propositions
2.1 Amélioration du protocole expérimental actuel
2.2 Propositions générales relatives à la lutte contre les bioagresseurs du manguier
2.2.1 Déployer l’étude auprès des producteurs de mangues pour améliorer l’acquisition de connaissances sur le sujet
2.2.2 Développer les collaborations et les projets autour de la gestion des bioagresseurs du manguier
2.2.3 Communiquer et conseiller sur les suivis pour l’appropriation d’innovations agroécologiques par les producteurs
Conclusion
Références bibliographiques
Table des figures
Table des tableaux
Table des matières
Table des annexes
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