Droits des personnes handicapées

Définition du handicap

« Par personnes handicapées on entend des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres » (ONU, 2006, p.4).

Dans la révision de la classification du handicap en 2001, lʼOMS (Organisation Mondiale de la Santé) décompose le handicap en deux éléments : dʼune part lʼorganisme, de lʼautre ses activités et participations. Ces composantes vont être impactés par des facteurs environnementaux et personnels. La CIF (Classification Internationale du Fonctionnement, du handicap et de la santé) définit donc lʼétat de handicap dʼune personne comme étant « le résultat de l’interaction dynamique entre son problème de santé et les facteurs contextuels » (OMS, 2001, p.8). Elle ajoute que les facteurs environnementaux peuvent aussi bien faciliter quʼentraver le quotidien de la personne concernée. Ces deux définitions considèrent donc le handicap comme le résultat dʼune inadéquation entre la personne et son milieu. Nous pouvons ainsi en conclure que «si lʼenvironnement général dans lequel une personne porteuse de déficiences vit, se déplace, apprend, … est totalement aménagé, alors le handicap disparait, la personne peut vivre normalement ses activités quelles quʼelles soient.» (FERTE, 2008, p.4). Dès lors, une distinction peut sʼétablir entre le handicap et la situation de handicap : par exemple, une mauvaise vue peut représenter le premier terme, lʼoubli des lunettes peut constituer le deuxième terme, alors que le port de celles-ci fera disparaitre le handicap. Dʼaprès lʼOMS, «plus dʼun milliard de personnes vivent avec un handicap, sous une forme ou une autre, soit environ 15 % de la population» (2011, p.7). Si lʼon considère les situations de handicap qui regroupent toutes les réductions de mobilité, alors ce chiffre atteint 30 à 40% (LA CAMBRE, 2004).

Droits des personnes handicapées

Le 13 décembre 2006, la Convention relative aux droits des personnes handicapées est adoptée au siège de l’organisation des Nations Unies à New-York avec pour principes généraux (ONU, 2006) : La non-discrimination; La participation et lʼintégration pleines et effectives à la société; Le respect de la différence et lʼacceptation des personnes handicapées comme faisant partie de la diversité humaine et de lʼhumanité; Lʼégalité des chances; Lʼaccessibilité; Lʼégalité entre les hommes et les femmes; Le respect du développement des capacités de lʼenfant handicapé et le respect du droit des enfants handicapés à préserver leur identité;

En ratifiant la Convention le 2 juillet 2009, la Belgique sʼengage à respecter celle-ci ainsi ses principes généraux.

Par ailleurs, dans lʼarticle 4 relatif aux obligations générales, la Convention oblige les Etats Parties à «entreprendre ou encourager la recherche et le développement de biens, services, équipements et installations de conception universelle  qui devraient nécessiter le minimum possible dʼadaptation et de frais pour répondre aux besoins spécifiques des personnes handicapées, encourager lʼoffre et lʼutilisation de ces biens, services, équipements et installations et encourager lʼincorporation de la conception universelle dans le développement des normes et directives » (ONU, 2006, p. 5 ‒ 6)

Catégories principales de besoins spécifiques

Une personne dont la situation de handicap a une incidence sur le déplacement dans lʼespace est également appelée « personne à mobilité réduite ». Ce terme regroupe différentes catégories de besoins spécifiques en rapport avec lʼenvironnement, définies par le CAWaB. Celles-ci sont décrites succinctement ci-dessous :

Lʼenfance et la petite enfance : Cette catégorie se réfère à plusieurs autres catégories de besoins : la poussette nécessite des aménagements proches du fauteuil roulant, le jeune enfant appartient également à la catégorie des personnes marchant difficilement, et enfin, lʼenfant éprouve des difficultés de compréhension.

Les personnes vieillissantes : Le vieillissement, comme lʼenfance, peut engendrer différents types de besoins repris dans les catégories suivantes. Cette tranche de population est non négligeable car lʼespérance de vie en Belgique nʼa cessé dʼaugmenter ces dernières décennies. Actuellement, la moyenne a atteint 81,5 ans pour lʼensemble de la population (STATBEL, 2019). Dʼici 2040, le nombre de personnes âgées de plus de 65 ans aura doublé et celui des personnes de plus de 80 ans triplé (CHARLOT, GUFFENS, Le Bien Vieillir asbl, 2006). Rappelons également que chaque individu est destiné à vieillir et rencontrer ainsi cette catégorie de besoins.

Les personnes en fauteuil roulant :Lʼutilisation dʼun fauteuil roulant, quʼil soit manuel ou électrique, nécessite une série dʼaménagements conséquents dans un projet dʼarchitecture (largeurs de passage, aires de rotation, inclinaison des pentes, etc.) .

Les personnes marchant difficilement :Lorsque lʼusage des membres inférieurs nʼest pas entièrement perdu mais tout de même réduit, la personne peut se déplacer sans fauteuil roulant mais aura également besoin dʼaménagements relatifs à son déplacement (espace dépourvu dʼobstacles, trajectoire simple, disponibilités dʼappuis, etc.).

Les personnes aveugles :Privée de sa vue, la personne aveugle doit se repérer dans lʼespace par ses autres sens, principalement le toucher et lʼouïe. Lʼespace doit donc fournir les informations qui lui permettront de sʼorienter en sécurité en prévenant, par exemple, des variations de niveau, dangers, changements de directions, etc. par un relief au sol ou un son.

Les personnes malvoyantes :Dans ce cas-ci, la vue nʼest pas absente mais défaillante. Les couleurs contrastées et la qualité de la lumière sʼajoutent alors aux besoins repris dans la catégorie précédente.

Les personnes sourdes :Comme pour la perte de la vue, la perte de lʼouïe engendre une compensation des besoins par les autres sens, en particulier la vue.

Les informations sonores (alarmes, appels, etc.) doivent être retranscrites visuellement et la lecture de lʼespace doit être efficace pour se repérer.

Les personnes malentendantes : Souvent équipées dʼun appareil auditif, les personnes malentendantes peuvent être soulagées par un système de boucles à induction magnétique par exemple. De manière générale, les dispositifs qui améliorent la perception spatiale des personnes malvoyantes ou sourdes rendent également plus confortable la situation des personnes malentendantes.

Les personnes en difficulté de compréhension :La dernière catégorie de besoins concerne les personnes qui présentent un trouble dʼordre cognitif (le traitement et le stockage de lʼinformation, la communication et lʼaction). Les espaces doivent donc simplifier les usages et la localisation mais aussi proposer une signalétique limpide.

Accessibilité et conception universelle

Accessibilité

Si certaines pathologies ne peuvent se passer dʼune aide au quotidien, quʼelle soit humaine ou technique, dʼautres peuvent sʼatténuer ou disparaitre si les lieux sont aménagés pour ces types de pathologies et offrir ainsi à la personne concernée le maintien dʼune forme dʼautonomie (ROOSEN, 2017).

« Lʼaccessibilité consiste à fournir un accès égal aux environnements physiques et numériques en offrant des lieux et des ressources sûrs, sains et adaptés à la diversité des personnes susceptibles dʼen faire usage » (FOLCHER, LOMPRÉ, 2012, p. 89 ‒ 90). Lʼaccès, la circulation et lʼutilisation des espaces sont les trois composantes indissociables de lʼaccessibilité (CHARTER, 2003).

La dimension accessible est celle qui lie lʼarchitecte au handicap. En effet, les définitions du handicap de lʼONU et de lʼOMS démontrent que lʼarchitecture va déterminer ou supprimer certaines situations de handicap selon sa conception et son exécution. Le rôle de lʼarchitecte est donc majeur dans la bonne application de la convention relative aux droits des personnes handicapées : lʼarchitecte sera un générateur dʼexclusion en concevant inaccessible et, à lʼopposé, dʼintégration en concevant accessible (ROOSEN, 2017).

Les exigences de lʼaccessibilité sont différentes selon le public auquel lʼespace est destiné. Les espaces ouverts au public ou à usage collectif sont destinés à accueillir le plus grand nombre et doivent alors respecter une série de normes. Pour les espaces privatifs, lʼadaptation se fera sur mesure, en fonction des besoins réels de la personne et sans normes. « Lʼâge, lʼactivité, le mode de vie, la pathologie et son évolutivité, sont autant de facteurs qui concourent à la personnalisation de toute situation et donc de toute solution » (MARCONNET, 2011, p.40).

Le CAWaB (Collectif Accessibilité Wallonie Bruxelles) identifie cinq actions à réaliser pour un bâtiment accessible : « stationner », « entrer », « circuler », « utiliser » et « évacuer » (CAWaB, 2013).

Conception universelle

« Dans les années 90, lʼarchitecte américain Ronald Mace utilise pour la première fois le terme « Universal Design ». Se déplaçant en chaise roulante depuis lʼâge de 9 ans, il a conscience quʼil vit dans un monde qui nʼest pas conçu pour lui » (SCHUMAN & VANDECANDELAERE, 2012, p.7).

La conception « inclusive », « pour tous », « transgénérationnelle », … sont de multiples termes dont la signification est identique (SCHUMAN & VANDECANDELAERE, 2012). Nous choisirons pour cette définition le terme de « conception universelle » utilisé dans les obligations de la convention de lʼONU qui définit le concept comme tel : « conception de produits, dʼéquipements, de programmes et de services qui puissent être utilisés par tous, dans toute la mesure possible, sans nécessiter ni adaptation ni conception spéciale. La « conception universelle » nʼexclut pas les appareils et accessoires fonctionnels pour des catégories particulières de personnes handicapées là où ils sont nécessaires » (ONU, 2006, p.4).

« Rendre les bâtiments accessibles aux personnes ayant des incapacités, cʼest la conception adaptée aux personnes handicapées. Rendre les bâtiments plus sûrs et plus confortables pour tous les usagers y compris les personnes ayant des incapacités, cʼest la conception universelle » (S. Goldsmith, 2000, cité dans GROSBOIS, 2003, p.57). La conception universelle va donc au-delà du concept dʼaccessibilité ; il ne concerne plus lʼaménagement pour les personnes en situation de handicap mais bien un aménagement unique qui convient à chacun. Dans la conception, les besoins des personnes concernées par lʼaccessibilité sont intégrés avec ceux de tous pour exclure toute forme de discrimination. « Dʼune manière générale, il est très rare que lʼautonomie et le confort de lʼun restreigne celui des autres. Le plus fréquemment lʼinverse se produit. » (ANAH, 2006, p.3).

La collaboration en architecture

Le concept de collaboration peut se définir comme « une forme solidaire de travail. Lʼaction est individuelle mais intégrée afin de réaliser une œuvre collective ; lʼindividu participe au résultat mais sans que sa participation puisse être identifiée, ni même mesurée. Il sʼagit en conséquence dʼun mode de partage, partage des savoirs, des contributions et des résultats. » (GANGLOFF-ZIEGLER, 2009, p.100). De tout temps, lʼhomme a collaboré pour survivre et se développer. La psychologue Sally Augustin définit la chasse comme le premier processus de collaboration répondant à des besoins dʼalimentation. Elle souligne également que nous devons la plupart de nos grandes réalisations scientifiques, artistiques et autres à la collaboration de plusieurs individus (AUGUSTIN, 2014).

Toute réalisation architecturale découle dʼun travail collaboratif plus ou moins important selon la complexité de la conception (CHAMPY, 2001). Le projet dʼarchitecture est donc le support dʼun réseau de spécialistes parmi lesquels peuvent intervenir lʼingénieur en stabilité, lʼingénieur HVAC, le géomètre, lʼacousticien, lʼarchitecte dʼintérieur, le coordinateur sécurité-santé, le responsable PEB, lʼentrepreneur et une multitude dʼautres professionnels (Ordre des Architectes, 2020). Chacun renforce le projet selon les compétences qui lui sont propres afin dʼoptimiser qualitativement la réalisation architecturale. Lʼarchitecte coordonne ces interventions à lʼimage dʼun chef dʼorchestre afin de les synthétiser dans un même projet. Cette pluridisciplinarité « implique inévitablement que les moyens d’interactions en place dans une organisation permettent la fluidité et la transparence des échanges pour le bon fonctionnement du groupe, car la communication est la clé pour le développement des liens interpersonnels qui, eux, sont la fondation des relations de confiance et de respect. » (PLOURDE, 2014, p.18). De plus, chaque spécialiste utilise un vocabulaire et des outils qui lui sont propres et que lʼinterlocuteur ne maitrisera pas nécessairement. Dʼune manière générale, quʼils sʼadressent aux autres concepteurs ou au maitre dʼouvrage, les différents intervenants devront adapter leur communication pour partager au mieux leur savoir et lʼintégrer dans le développement du projet (ROOSEN, 2015).

Lʼaccessibilité, précédemment définie, est une dimension de lʼarchitecture, obligatoire pour les bâtiments publics et accessibles au public, confortable dans le domaine privé. Lʼergothérapeute intervient à sa manière sur les espaces en vue de les rendre accessibles. Dès lors, les deux disciplines peuvent lier leurs compétences en conception spatiale pour augmenter le champ de réflexion et développer de nouvelles solutions pour les personnes qui présentent des besoins spécifiques.

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Table des matières

INTRODUCTION
CADRE THÉORIQUE
1. Situation de handicap et besoins spécifiques
1.1. Définition du handicap
1.2. Droits des personnes handicapées
1.3. Catégories principales de besoins spécifiques
2. Accessibilité et conception universelle 
2.1. Accessibilité
2.2. Conception universelle
3. Ergothérapie
4. Collaboration en architecture 
MÉTHODOLOGIE 
1. Récolte des données
1.1. Grand-Duché de Luxembourg (ADAPTH asbl) ‒ Observation participante
1.1.1. Terrain dʼétude
1.1.2. Méthode
1.2. Territoire wallon ‒ Entretiens et littérature scientifique
1.2.1. Terrain dʼétude
1.2.2. Méthode
2. Interprétation des données 
RÉCOLTE DES DONNÉES
1. Grand-Duché de Luxembourg
1.1. LʼAssurance Dépendance
1.1.1. Lʼarchitecte sous-traitant de lʼergothérapeute
1.1.2. La co-traitance de lʼarchitecte et de lʼergothérapeute
1.2. Le projet de révision de loi
1.3. Conclusions des observations récoltées
2. Territoire wallon
2.1. LʼAViQ Handicap
2.2. Les services conseils
2.2.1. Les services conseils subventionnés par lʼAViQ
2.2.2. Les services conseils non subventionnés par lʼAViQ
2.3. Le CAWaB
2.4. Conclusion des observations récoltées
3. Conclusion des données récoltées 
INTERPRÉTATION DES DONNÉES
1. Dimension économique
1.1. Forces
1.2. Faiblesses
1.3. Opportunités
1.4. Menaces
2. Dimension légale
2.1. Forces
2.2. Faiblesses
2.3. Opportunités
2.4. Menaces
3. Dimension sociale 
3.1. Forces
3.2. Faiblesses
4. Dimension territoriale
4.1. Forces
4.2. Faiblesses
4.3. Opportunités
4.4. Menaces
5. Conclusion des interprétations 
CONCLUSIONS
1. Constats généraux
2. Recommandations sur l’environnement 
3. Propositions de modèles qualitatifs 
3.1. Modèle de collaboration pour lʼaccessibilité du domicile
3.2. Modèle de collaboration pour lʼaccessibilité des lieux soumis à la règlementation
4. Limites de l’étude et réflexions pour un approfondissement de la recherche

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