Données démographiques et manifestations clinico-radiologiques globales

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Données radiologiques

Les données des radiographies standards, scanners, IRM (imageries par résonance magnétique) ainsi que des imageries corps entiers (TEP-scanners ou scintigraphies au technecium 99m) ont été relues par un radiologue spécialisé en ostéo-articulaire en aveugle des données cliniques et des traitements reçus par le patient.
Une atteinte osseuse était retenue lorsqu’il existait au moins une des 2 lésions élémentaires suivantes : une ostéite et/ou une hyperostose. L’ostéite était définie par la présence d’une ostécondensation (fibrillaire importante, homogène avec épaississement des travées osseuses) au scanner et/ou d’un œdème osseux à l’IRM de caractère extensif >20mm (cut-off utilisé dans les autres études portant sur le SAPHO[12]). L’ œdème osseux est un hypersignal T2 sans limite nette et sans destruction de l’os minéralisé sous-jaccent. L’hyperostose était définie par une hypertrophie des pièces osseuses et/ou par la mise en évidence d’ossifications ligamentaires.
Une atteinte articulaire d’origine inflammatoire était retenue à l’imagerie devant un pincement global de l’articulation, associé à la présence d’érosions +/- hyeperostosantes atteignant les 2 versants et centrées sur l’articulation. Ces lésions pouvaient être accomagnées par la présence de liquide articulaire si la modalité de l’imagerie permettait ces analyses [18]. A partir de ces définitions, nous avons classé les différentes atteintes observées en imagerie de la façon suivante :
– Atteinte osseuse thoracique : atteinte de la clavicule, du manubrium sternal, du sternum et ankylose sterno-costale (atteinte chondro-sternale..)
– Atteinte osseuse extra-thoracique axiale : spondylite, atteinte spondylodiscale et atteinte iliaque et/ou sacrée
– Atteinte osseuse extra-thoracique périphérique : atteinte intéressant les autres localisations osseuses (os longs….)
– Atteinte articulaire thoracique antérieure : atteinte des articulations sterno-claviculaires et manubrio-sternale
– Atteinte articulaire extra-thoracique axiale : atteinte des articulations costo-vertébrales, des articulations inter-apophsaires postérieures, des articulations sacro-iliaques, des articulations occipito-atloidienne (C0-C1) et atloido-axoidienne (C1-C2) et des articulations coxo-fémorales L’atteinte de l’articulation acromio-claviculaire n’a pas été considérée. Elle n’est habituellement pas touchée dans cette pathologie et est souvent le siège de remaniements dégénératifs d’interprétation difficile. Nous n’avons pas rapporté d’atteinte de la synchondrose ischio-pubienne qui peut églement être rencontrée dans le SAPHO.
Selon les données de l’imagerie ostéo-articulaire, nous avons classé les patients selon deux groupes. Le premier groupe était constitué de tous les patients présentant une atteinte osseuse prédominante. Le second regroupait les patients présentant une atteinte articulaire prédominante ou mixte lorsqu’il n’était pas possible de déterminer laquelle des atteintes (osseuse ou articulaire) dominait le tableau radiologique. Voici 3 exemples de patients classés selon la méthode présentée ci-dessus (Images 1 et 2).
Image 1 : Scanner thoracique (1A) et IRM thoracique (1B) d’un patient classé dans le groupe avec atteinte osseuse. Notez l’hyperostose claviculaire bilatérale (augmentation de taille des pièces osseuses), disparition de la dédifférenciation cortico-médullaire, minéralisation hétérogène associant des plages d’hyperdensité et d’ostéolyse, érosions des extrémités médiales claviculaires sans atteinte du versant sternal de l’articulation. Oedème osseux extensif de la partie interne de la clavicule droite accompagnée d’une inflammation des parties molles en regard à l’IRM (1B). Absence d’arthropathie sur les 2 modalités d’examens.
Image 2 : IRM thoracique d’une patiente classée dans le groupe atteinte articulaire (2A) présentant une arthropathie sternoclaviculaire avec œdème osseux extensif centré sur l’articulation et présence de liquide articulaire. Scanner thoracique d’un patient classé dans les atteintes mixtes (2B) présentant à la fois des signes d’arthropathies sternoclaviculaire et manubriosternale (pincement articulaire global, érosions…), ainsi que des signes osseux (ankylose, hyperostose et ostéite claviculaire et manubriale).
Image 3 : Scanner thoracique d’une patiente classée dans le groupe atteinte osseuse. Ankylose globale du thorax antérieur.
Lorsqu’aucune donnée radiologique n’était disponible pour la relecture, le classement du patient a été réalisé sur la base de la description de l’imagerie disponible dans le compte rendu radiologique (4 patients).

Les données cliniques rhumatologiques

Chaque patient du groupe « atteinte osseuse » a fait l’objet d’une seconde analyse selon les données cliniques disponibles dans leur dossier. La présence d’une atteinte articulaire périphérique clinique associée à l’atteinte osseuse reclassait le patient dans le groupe articulaire/mixte. Était considérée comme une atteinte périphérique, les arthrites et synovites cliniques des articulations du carpe, des MCPs (métacarpo-phalangiennes), IPPs (inter-phalangiennes proximales, IPDs (inter-phalangiennes distales), des coudes, des épaules, des genoux, des chevilles et des articulations des pieds.

Traitements

Tous les traitements per os pris par le patient et la durée de leur maintien ont été recueillis. Pour réaliser une analyse statistique pertinente avec des effectifs suffisants, il a été décidé de regrouper l’ensemble des immunosuppresseurs et de constituer 2 groupes de traitements spécifiques basés soit sur les DMARDs (Disease modifying anti-rheumatic drugs), soit sur les bisphosphonates. Les DMARDs regroupent à la fois les DMARDs conventionnels, les cs-DMARDs (méthotrexate, hydroxychloroquine, léflunomide, sulfasalazine), les biomédicaments, les b-DMARDs (anti-TNFa, Anti-IL-12/23, Anti-IL-17, Anti-IL-1, anti-IL6R) ainsi que les DMARDs ciblés synthétiques, les ts-DMARDs (inhibiteurs de JAK/STAT Janus kinase/signal transducers and activators of transcription).
La réponse à chacun des traitements a été définie de façon qualitative selon 2 modalités : efficacité ou échec. Un traitement a été considéré comme efficace s’il apportait une amélioration des symptômes ostéo-articulaires d’au moins 50% (cut-off admis dans la littérature [8]), avec une maintenance thérapeutique sans échappement tout au long du suivi. A été considéré comme échec, la survenue d’un effet indésirable, une inefficacité ou un échappement après une efficacité initiale observée. L’amélioration des symptômes cutanés n’a pas été prise en compte dans l’évaluation de l’efficacité.

Aspect éthique

L’étude a reçu l’approbation du Comité d’Ethique local pour la recherche non interventionnelle sur données existantes et/ou hors loi Jardé (Protocole E2021-40).

Analyses statistiques

Les données qualitatives ont été exprimées en effectif (n) et en pourcentages. Toutes les variables quantitatives sont exprimées en médiane avec leur deuxième et troisième quartile après avoir vérifié par un test de Shapiro-Wilk que ces données ne suivaient pas une loi normale. Nous avons comparé les données démographiques, cliniques et thérapeutiques dans les deux groupes définis par l’atteinte osseuse ou l’atteinte articulaire/mixte. Ont été utilisés un test du c2 pour les données qualitatives, et un test non paramétrique de Mann-Withney pour les données quantitatives. Afin d’identifier un éventuel effet centre, nous avons comparé les attitudes thérapeutiques dans chaque centre, en utilisant un test du X2. Un test exact de Fisher a été utilisé lorsque les conditions du c2 n’étaient pas respectées (effectif inférieur à 5). Dans chaque groupe, pour rechercher une influence de certains facteurs sur la survenue d’une rémission (exposition tabagique, durée entre les premiers symptômes de la maladie et le diagnostic, présence d’une atteinte cutanée, première ligne de traitement spécifique utilisée DMARD ou BP…), nous avons utilisé un test d’indépendance du c2 pour les variables qualitatives, et un test de Mann-Withney pour les variables quantitatives.
Pour l’ensemble des tests, nous avons retenu un seuil de significativité à 5%. Le logiciel de statistique utilisé était SPSS d’IBM version 23.

Distributions des atteintes articulaires périphériques
Les sites des atteintes articulaires périphériques et leur fréquence dans le groupe articulaire/mixte sont présentés Tableau 5.
Seize patients présentaient des atteintes articulaires périphériques, soit 76 % du groupe articulaire/mixte ou 47% si l’on considère l’ensemble de la cohorte des 34 patients. La présentation la plus fréquente était une polyarthrite (12 patients/16).
Le carpe était la localisation la plus fréquemment touchée (10 patients/16).
Analyse des thérapeutiques utilisées dans le SAPHO
Analyse des habitudes de prescription
Traitements reçus avant introduction de BPs ou de DMARDs
Le nombre de patients ayant reçu des AINS et/ou des antibiotiques ainsi que leur durée de maintien avant l’introduction d’un DMARD ou d’un bisphosphonate sont présentés dans le Tableau 6. La plupart des patients de la cohorte (31/34) ont bénéficié d’un traitement par AINS dans les premières lignes de traitements avant introduction d’un immunosuppresseur ou d’un BP. La durée médiane de maintien dans le groupe « atteinte osseuse » et articulaire/mixte n’était pas significativement différente (de l’ordre de quelques mois) (p=0,993). Quatre patients de la cohorte ont reçu des antibiotiques que ce soit avant les AINS ou en relais. Tous ont échappé au traitement. Parmi les antibiotiques utilisés, 2 patients ont reçu un macrolide, 2 autres ont reçu des tétracyclines. Seuls 3 patients n’ont pas reçu d’AINS en première intention car (i) un patient présentait une maladie de Crohn précédant les symptômes rhumatologiques, (ii) un autre présentait un pyoderma gangrenosum traité par corticothérapie per os puis par anti-TNFa avant de développer l’atteinte ostéo-articulaire, et (iii) le dernier a reçu plusieurs mois de corticothérapie puis du méthotrexate et du tocilizumab pour une pseudopolyarthrite rhizomélique corticodépendante avant que le diagnostic de SAPHO ne soit redressé.
Choix thérapeutiques des prescripteurs en fonction de l’atteinte ostéo-articulaire dominant le tableau clinique
La classe thérapeutique du premier traitement spécifique introduit parmi les BPs et les DMARDs a été analysée dans les groupes articulaire/mixte et os (Tableau 7).
Concernant les BPs, tous les patients ont bénéficié d’une administration par la voie IV (intra-veineuse). Le pamidronate a été introduit chez 11 patients et l’acide zolédronique chez 2 patients. Lorsqu’ils ont été retrouvés dans les dossiers, les dosages utilisés étaient du 60 mg par perfusion pour le pamidronate le plus souvent et du 4 mg pour l’acide zolédronique. Les schémas d’administration étaient très variables : 3 patients avec un schéma d’administration d’une perfusion unique, 1 patient avec 2 perfusions à un mois d’intervalle, 1 patient avec une perfusion par mois pendant 6 mois, 5 patients avec un schéma thérapeutique d’une perfusion par mois pendant 3 mois. Trois patients ont bénéficié d’une perfusion trimestrielle pendant 2 à 3 ans.
Concernant les DMARDs, 16/34 patients de la cohorte soit 47% ont reçu au moins un cs-DMARD : 1 patient du léflunomide, 2 patients de la salazopyrine, 13 patients du méthotrexate. 28/34 patients soit (82%) ont suivi un traitement par b-DMARD. Pour 24 d’entre eux, la séquence thérapeutique comportait au moins un anti-TNFa. Quatre patients ont recu un traitement par anti-IL-17 (secukinumab). Celui-ci a été instauré à 4 reprises en relais d’un échec de traitement par anti-TNFa. Quatre patients ont été traités par un traitement par anti-IL-12/IL-23 (ustékinumab), à 3 reprises en relais d’anti-TNFa, une fois en relais du méthotrexate. Un patient a reçu un anti-IL6R (tocilizumab) en relais du méthotrexate. Un anti-IL1RA (anakinra) a été instauré à une reprise. Enfin, un patient a bénéficié d’un inhibiteur JAK/STAT (tofacitinib).
La prescription de BPs en première ligne est significativement plus fréquente dans le groupe « atteinte osseuse » que dans le groupe articulaire/mixte (5/13 et 2/21 patients respectivement). A l’inverse, la prescription de DMARDs en première intention est plus fréquente dans le groupe articulaire/mixte (19/21 patients) (p=0,043).
Le nombre de patients ayant reçu des BPs et des DMARDs au cours de leur suivi dans chacun des groupes a ensuite été étudié. Un nombre plus important de patients dans le groupe « atteinte osseuse » a bénéficié d’un traitement par BPs comparativement au groupe articulaire/mixte (7 et 6 patients respectivement). Cette différence n’est cependant pas significative (p=0,193). A l’inverse, les patients du groupe articulaire/mixte ont reçu plus fréquemment et de façon significative des DMARDs que ceux du groupe « atteinte osseuse » (p=0,029).
Ainsi, l’atteinte ostéo-articulaire influence l’attitude des prescripteurs qui sont plus enclins à mettre un BP en première intention lorsque le patient présente une atteinte osseuse prédominante et un DMARD lorsque l’atteinte est articulaire ou mixte.
La question se pose maintenant de savoir s’il existe un effet centre concernant les prescriptions de BPs et de DMARDs.
Face à une même maladie, l’attitude des prescripteurs diffère-elle d’un centre à un autre ?
Les prescriptions de DMARDs et de BPs indépendamment des atteintes ostéo-articulaires présentées par le patient, ont été comparées entre les 3 principaux centres de la région (CHU de Rouen, CHU de Caen, CH Le Havre/Lillebonne) et figurent dans le Tableau 8.
Il n’y a pas de différence significative de prescription de la première ligne de traitement entre les différents centres (p=0,218). Il n’y a pas non plus de différence significative sur le nombre de patients dans chacun des centres ayant reçu au moins un BP ou un DMARD pendant leur suivi (p= 0,621 et p=0,117 respectivement). Face à un patient atteint de SAPHO, quelle que soit l’atteinte ostéo-articulaire qui prédomine, il ne semble pas y avoir d’effet centre sur le volume de prescription de BPs ou de DMARDs ainsi que sur leur répartition selon la ligne de traitement (1ère ligne et au-delà de la 1ère ligne). Il n’a cependant pas été possible de réaliser une sous analyse par centre selon le type d’atteinte compte tenu des faibles effectifs.
Analyse d’efficacité
Efficacité des traitements selon les atteintes rhumatologiques prédominantes présentées par le patient (articulaire/mixte versus osseuse)
Concernant l’efficacité des traitements, 10/13 patients du groupe « atteinte osseuse » ont bénéficié d’un traitement efficace avec maintien thérapeutique sans nouvelle ligne de traitement instaurée au cours de leur suivi. Ce qui n’était pas significativement différent du groupe articulaire/mixte (17/21). Dans le premier groupe, 2 patients sont actuellement en échec thérapeutique et un patient est entré spontanément en rémission. Dans le second groupe, 2 patients sont en échec thérapeutique et 2 autres sont entrés spontanément en rémission.
Les BP ont permis d’obtenir une efficacité sans échappement dans un nombre de cas significativement plus élevé dans le groupe « atteinte osseuse » alors qu’il s’agissait des IS dans le groupe articulaire ou mixte (p= 0,002).
Le nombre de lignes de traitements spécifiques (DMARD vs BP) selon l’atteinte ostéo-articulaire prédominante a fait l’objet d’une analyse présentée également dans le Tableau 9. Le groupe « atteinte osseuse » a eu recours à un nombre de lignes de traitements spécifiques (DMARD ou BP) significativement plus faible que dans le groupe articulaire/mixte (1 ligne spécifique 1 [1 -2]vs au moins 2 [1 – 3,5] respectivement) (p =0,036). Ainsi, l’atteinte osseuse semble plus facile à gérer que l’atteinte articulaire ou mixte dans le syndrome SAPHO de l’adulte.
Nous nous sommes intéressés ensuite à la recherche de facteurs pouvant influencer la réponse d’un patient à un traitement comme cela a été mis en évidence pour les autres rhumatismes inflammatoires chroniques (RIC).
Rémission du SAPHO en fonction de l’atteinte ostéo-articulaire et du nombre de lignes de  traitements utilisés
A été représentée graphiquement, la proportion de patients entrant en rémission en fonction du nombre de lignes de traitements reçues dans chacun des groupes « atteinte osseuse » et « articulaire/mixte » (Figure 2A).
La rémission a tendance à être obtenue avec un nombre de lignes thérapeutiques plus restreint dans le groupe os que dans le second groupe.
La proportion de patients entrant en rémission en fonction du premier traitement reçu a été représentée dans le groupe « atteinte osseuse » (Figure 2B) et articulaire/mixte (Figure 2C).
Quel que soit le groupe concerné, l’utilisation des BP en première intention semble permettre au cours du suivi, un contrôle plus rapide de la maladie avec moins de lignes de traitements reçues.
Discussion
La population sélectionnée pour cette étude centrée sur la thérapeutique du syndrome SAPHO de l’adulte parait comparable aux données disponibles dans la littérature à la fois en terme d’effectif (> 20 patients) mais également sur les caractéristiques démographiques (prédominance féminine, âge du début dans la 3e décennie, durée de suivi, atteinte osseuse initiale localisée au thorax antérieure, présentation dermatologique, autres atteintes d’organes (MICI) habituellement associées aux spondyloarthrites [4]. Lors de la constitution des 2 groupes, les patients du groupe « atteinte osseuse » entraient dans la maladie à un âge significativement plus jeune que ceux du groupe articulaire/mixte. Ce groupe réunissait la plus part des ostéomyelites uni/multifocales chroniques récidivantes qui débutent généralement dans l’enfance ou l’adolescence [19]. Le délai entre les premiers symptômes et le diagnostic était également plus élevé dans ce groupe bien que non statistiquement significatif du fait des faibles effectifs de l’étude. En effet, il n’est pas rare que le symptôme initial soit une atteinte osseuse inflammatoire isolée fréquemment confondue avec un processus infectieux ou malin, ce qui a pour conséquence un retard diagnostic de 2 ans en moyenne [20].
La grande difficulté de ce travail a été de répertorier l’ensemble des imageries dont a bénéficié chaque patient et de réaliser le classement selon les données radiologiques disponibles. En effet, il n’existe pas de critères radiologiques spécifiques permettant d’une part d’affirmer le diagnostic de SAPHO avec certitude, et d’autre part de déterminer de façon quantitative et objective quelle est l’atteinte, osseuse ou articulaire prédominante.
Le signe radiologique le plus caractéristique de la maladie est l’hyperostose [18]. Celle-ci est habituellement associée à l’ostéite. Lorsque l’hyperostose se situe dans la région sterno-costo-claviculaire, elle évoque d’autant plus la maladie. Ce signe n’est pas toujours présent. Il est aussi moins bien appréhendé par certaines modalités d’imagerie (comme l’IRM). Dans l’étude, les modalités d’évaluation par imagerie pouvaient différer entre les patients rendant plus difficile l’analyse et le classement a posteriori fait par le radiologue.
Certains patients présentaient des atteintes articulaires de contiguïté secondaires à l’extension d’une ostéite complexifiant leur classement dans chacun des deux groupes. Les 2 régions les plus concernées étaient la région médiale de la clavicule où l’extension de l’ostéite provoque fréquemment une arthrite sternoclaviculaire de voisinage et la région iliaque où l’ostéite atteint généralement l’articulation sacro-iliaque [21] [22].
Malgré les difficultés évoquées précédemment, les attitudes de prescriptions en fonction de l’atteinte radio-clinique rhumatologique, ont été évaluées pour la première fois dans cette pathologie. Le choix thérapeutique semble guidé par l’atteinte dominante présentée par le patient. Face à une atteinte osseuse symptomatique, un BP est prescrit plus fréquemment en relai des anti-inflammatoires ou des antibiotiques. Lorsque le patient présente une atteinte articulaire prédominante, un DMARD est plus fréquemment introduit (Tableau 7). Il n’était pas possible de vérifier si cette attitude thérapeutique guidée par l’atteinte radio-clinique était consensuelle dans chacun des centres de la région compte tenu du faible nombre de patients. Cependant, il n’y a pas d’effet centre lorsqu’on analyse les volumes de prescriptions de BP et DMARD dans les 3 hôpitaux les plus importants de la région (Rouen, Caen, Le Havre) indépendamment de l’atteinte ostéo-articulaire présentée (Tableau 8).
Les BPs semblent plus efficaces pour contrôler la maladie dans le groupe « atteinte osseuse » alors que ce sont les immunosuppresseurs dans le groupe articulaire/mixte (Tableau 9). L’atteinte articulaire/mixte semble plus difficile à manager avec un nombre plus important de lignes thérapeutiques utilisées (Tableau 9). Cependant, lorsqu’un BP est prescrit dans ce groupe, le patient bénéficie d’un nombre plus limité de lignes de traitement pour atteindre la rémission (Figure 2C). Ce résultat semble aller dans le même sens que ceux rapportés dans l’étude de Zwaenepoel et al. Ce travail avait analysé, sur une cohorte de 21 patients, le degré de rémission des symptômes rhumatologiques selon les différents traitements introduits. Les BPs apparaissaient comme une option thérapeutique remarquable, à la fois en terme de nombre de patients entrant en rémission à la fin du suivi (67%) mais également sur le nombre de lignes de traitements introduites (3 lignes versus 4 ou 5 pour les autres traitements) [23].
Les BPs sont efficaces dans les pathologies à remodelage osseux important comme la dysplasie fibreuse [24] ou la maladie de Paget [25]. Il apparait légitime de les utiliser dans le syndrome SAPHO où l’atteinte primitive est l’os [9]. Solau-Gervais et al. avaient mesuré les marqueurs de remodelage osseux dans le sérum de patients atteints de SAPHO. Le sCTX (serum crosslaps), marqueur de la résorption osseuse, était augmenté chez 7 des 13 patients de la cohorte. Les répondeurs aux BPs avaient un taux avant la perfusion plus élevé que les non-répondeurs. Plus récemment, l’équipe de Li et al. a montré une réduction significative des sCTX chez des patients atteints de SAPHO après traitement par BP mais également de l’ostéocalcine (marqueur de formation osseuse) soulignant l’importance du remodelage osseux dans cette pathologie [26]. Toutefois, même lorsque les BP sont introduits dans le groupe articulaire/mixte, les symptômes semblent évoluer favorablement avec moins de lignes de traitements utilisées. Ceci pourrait s’expliquer par l’action anti-inflammatoires des BP sur l’ostéite. Le SAPHO est classé par certains auteurs dans les maladies osseuses auto-inflammatoires. Son appartenance à ce groupe est justifiée par le fait que le SAPHO présente des similitudes cliniques avec des pathologies où sont retrouvées des mutations dans les voies d’activation de l’inflammasome s’associant à une élévation marquée d’IL-1b (Syndrome de Majeed, DIRA Déficience de  l’Antagoniste du Récepteur de l’Interleukine-1)[27][28]. Se produit alors une activation incontrôlée du système immunitaire inné en réponse à un trigger restant inconnu jusqu’à lors et conduisant à un processus inflammatoire osseux chronique. Certains auteurs évoquent la persistance de Propionobacterium acnes dans les cellules mésenchymateuses et osseuses qui relargueraient en réponse plus IL-1b [29]. Lorsqu’une biopsie osseuse de l’ostéite est réalisée, l’analyse de l’échantillon note de façon constante des cellules de l’immunité innée, des polynucléaires neutrophiles et des monocytes sécréteurs d’IL-1b. À des stades tardifs d’ostéite, les biopsies retrouvent également des lymphocytes et plasmocytes [30]. Il a également été mis en évidence une expression accrue du TNFa dans les prélèvements osseux [31]. Les BPs auraient également une action anti-inflammatoire, découlant de l’inhibition de l’enzyme farnesyl diphosphate synthetase bloquant la voie du mévalonate nécessaire à la prénylation des protéines de liaison au GTP (guanosine triphosphate). Cela perturberait en outre l’activité ostéoclastique, mais aussi la voie Ras impliquée dans la transduction des messages cytokiniques de la surface cellulaire vers le noyau des monocytes et macrophages [32]. Les BPs joueraient également un rôle sur la vascularisation en perturbant l’angiogénèse indispensable pour véhiculer les médiateurs de l’inflammation (blocage de la prénylation et perturbation de la voie ras) [33]. Cette composante anti-inflammatoire des BPs dépendrait de la voie d’administration (la voie per os ne permettrait pas une biodisponibilité suffisante du médicament pour obtenir cet effet), de la dose et du type de BP (amino versus non amino bisphosphonate [34]). L’effet anti-inflammatoire des BPs serait plus marqué sur les sites de renouvellement osseux élevé qui bénéficieraient d’une concentration du médicament plus importante [15]. Par conséquent, les patients souffrant de RIC où l’ostéite est une composante essentielle comme le SAPHO sont plus susceptibles de répondre à un traitement par BP que les patients atteints par d’autres types de RIC [36].
Étant donné l’implication des cytokines pro-inflammatoires dans la physiopathologie de l’ostéite et du SAPHO, de nombreux immunosuppresseurs ont été testés en utilisant ce rationnel. Dans cette étude, les immunosuppresseurs apparaissent plus efficaces dans le groupe articulaire/mixte pour contrôler la maladie que dans le groupe osseux (Tableau 9). Leur action semble cependant aléatoire dans la littérature. Certains auteurs rapportent la grande efficacité des anti-TNFa dans certaines formes réfractaires aux AINS [37]. D’autres travaux moins fréquents (biais de publication ?) rapportent au contraire des sous-groupes de patients atteints de SAPHO réfractaires à ce traitement [26]. L’IL-1 qui joue un rôle central dans la physiopathologie de l’ostéite est finalement peu ciblé dans l’arsenal thérapeutique utilisé par les praticiens (seulement un patient dans notre étude avec une excellente efficacité sur les symptômes articulaires). Le blocage de l’IL-1b semble pourtant avoir une action prometteuse [39] [40]. Il parait également logique de cibler la voie de l’IL-23/l’IL-17 dans cette affection compte tenu de l’ implication des Th17 à la fois dans la génèse du psoriais [41] mais également dans le remodelage osseux [42]. Dans la série de cas de Wendling et al. (6 patients), bien que les anti-IL23 et anti-IL17 aient contribué à améliorer les symptômes cutanés, aucune amélioration n’a été notée sur les symptômes rhumatologiques [43]. L’utilisation des JAK/STAT inhibiteurs restent pour l’instant anecdotique dans la littérature [44]. Dans notre étude, ils avaient été introduits chez un patient et n’ont pas permis d’améliorer les symptômes rhumatologiques.
Bien que ce travail soit multicentrique et original dans la question posée (en distinguant 2 sous-groupes d’atteintes rhumatologiques dans le SAPHO, ce qui à notre connaissance n’a jamais été réalisé), il possède de nombreux biais inhérents à un travail rétrospectif sur une maladie rare : données cliniques et radiologiques manquantes, classement des patients dans les 2 groupes selon des modalités d’imageries différentes, faibles effectifs dans chacun des 2 groupes limitant la puissance de l’étude. Il n’a pas également été possible du fait des faibles effectifs, de réaliser une analyse en sous-groupes de l’efficacité des immunosuppresseurs selon la classe pharmacologique (c-DMARDs versus b-DMARDs) ou selon les différentes modalités de ciblage cytokinique. Concernant les BPs, les protocoles thérapeutiques n’étaient pas standardisés. La molécule utilisée était principalement le pamidronate. La voie IV était systématiquement privilégiée. En revanche, la rythmicité d’administration était très variable d’un centre à l’autre, en général 3 perfusions à un mois d’intervalle. Cela pouvait aller de la perfusion unique à un traitement d’entretien tous les 2 mois sur plusieurs années rendant l’analyse d’efficacité délicate.
Il n’y a d’ailleurs pas de critère de jugement consensuel objectif pour définir l’efficacité ou l’inefficacité d’un traitement dans le SAPHO. Nous avons choisi une définition de l’inefficacité large en incluant les effets indésirables afin d’être le plus exhaustif possible sur le nombre de lignes de traitements reçu par le patient. Cela nous a permis d’identifier une forme ostéo-articulaire difficile à traiter : les SAPHO avec atteintes mixtes à la fois osseuses et articulaires associées ou non à des arthrites périphériques (Tableau 9 et Figure 2).
Conclusion
En conclusion, les attitudes de prescription semblent guidées par l’atteinte rhumatologique radio-clinique dominante. En effet, les BPs sont introduits plus fréquemment en première intention devant une atteinte osseuse et les immunosuppresseurs devant une atteinte articulaire ou mixte. Concernant l’efficacité, les BPs apparaissent comme une thérapeutique plus efficace dans le SAPHO avec atteinte osseuse prédominante. Cette forme radio-clinique semble plus facile à traiter comparativement aux formes articulaires ou mixtes de SAPHO avec un recours à un nombre de lignes de traitements moindre pour obtenir la rémission. Un travail sur une cohorte nationale multicentrique avec des effectifs plus importants est nécessaire pour valider ces résultats.

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Table des matières

REMERCIEMENTS
TABLE DES MATIERES
LISTE DES ABREVIATIONS
I. INTRODUCTION
II. MATERIELS ET METHODES
1. Patients
2. Données radiologiques
3. Les données cliniques rhumatologiques
4. Traitements
5. Aspect éthique
6. Analyses statistiques
III. RESULTATS
1. Données démographiques et radio-cliniques de la cohorte des 34 patients adultes atteints de SAPHO en considérant la population totale et les 2 groupes d’intérêt
a) Inclusion des patients dans l’étude et classement dans les groupes définis par une atteinte osseuse ou articulaire/mixte
b) Données démographiques et manifestations clinico-radiologiques globales
c) Répartition des atteintes ostéo-articulaires
(1) Distribution des atteintes osseuses
(2) Distributions des atteintes articulaires axiales
(3) Distributions des atteintes articulaires périphériques
2. Analyse des thérapeutiques utilisées dans le SAPHO
a) Analyse des habitudes de prescription
(1) Traitements reçus avant introduction de BPs ou de DMARDs
(2) Choix thérapeutiques des prescripteurs en fonction de l’atteinte ostéo-articulaire dominant le  tableau clinique
(3) Face à une même maladie, l’attitude des prescripteurs diffère-elle d’un centre à un autre ?
b) Analyse d’efficacité
(1) Efficacité des traitements selon les atteintes rhumatologiques prédominantes présentées par le patient
(articulaire/mixte versus osseuse)
(2) Recherche de facteurs influençant la survenue de la rémission
(3) Rémission du SAPHO en fonction de l’atteinte ostéo-articulaire et du nombre de lignes de traitements utilisés
IV. DISCUSSION
V. CONCLUSION
VI. BIBLIOGRAPHIE
RESUME

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