DIVISIONS CELLULAIRES ET MATURATION MEIOTIQUE
GENERALITES
Le cycle cellulaire eucaryote est l’ensemble des processus qui permet aux cellules de se multiplier de façon clonale. Ainsi un organisme humain adulte est constitué de milliards de cellules, provenant toutes d’une même cellule: l’ovule fécondé. Avant qu’une cellule puisse se diviser, elle doit atteindre une taille critique et dupliquer son matériel génétique. Puis elle sépare ses chromosomes de manière équivalente entre les deux cellules filles. Tous ces processus sont coordonnés durant le cycle cellulaire. La mitose vise à répartir dans les cellules somatiques le patrimoine génétique, doublé lors de la phase de réplication, de manière équivalente dans chaque cellule fille. La méiose est une forme de division très particulière qui concerne les cellules germinales. Elle a pour but de répartir une version haploïde du génome dans les quatre cellules filles issues de deux séries de divisions méiotiques sans synthèse d’ADN intermédiaire. Elle permet le brassage génétique essentiel à diversité de l’espèce. La compréhension des mécanismes régulant la mitose et la méiose est donc fondamentale.
Tout au long de ma thèse, j’utiliserai des termes abrégés qui sont explicités à la page « liste des abréviations ».
LE CYCLE CELLULAIRE
Le mode de division cellulaire historiquement le plus étudié est la mitose, qui s’inscrit dans le cadre plus général du cycle cellulaire. Afin de pouvoir effectuer des comparaisons entre la mitose et la méiose, je vais brièvement introduire les évènements composant le cycle cellulaire, qui comporte deux phases principales: l’interphase et la mitose .
L’interphase
L’interphase est la phase de croissance de la cellule. Elle est subdivisée en trois phases, la phase G1 (G pour Gap), S (phase de synthèse de l’ADN) et G2 (figure 1). Durant la phase G1, la cellule croît. La synthèse d’ARNm et de protéines est très élevée. Lorsque la cellule atteint une taille critique, elle entre en phase S, phase réplicative. Lors de la phase réplicative, les deux brins d’ADN complémentaire se séparent et leur séquence est recopiée, donnant naissance à deux chromatides identiques, formant un chromosome. Au fur et à mesure de leur formation, les chromatides sœurs restent physiquement liées grâce à l’assemblage de complexes protéiques nommés cohésines. Cela permet aux chromatides de ne pas se mélanger, afin que chaque cellule fille hérite d’une chromatide soeur. Ces complexes contiennent au moins quatre protéines: Smc1, Smc3, Scc1 et Scc3. Ces cohésines sont retrouvées chez tous les eucaryotes (dont le génome a été séquencé), indiquant que le mécanisme de liaison des chromatides sœurs entre elles est très conservé. A l’issue de la phase S, chaque chromosome est donc formé de deux chromatides sœurs identiques liées par les complexes de cohésines. Parallèlement à la réplication de l’ADN, s’effectue la réplication du centrosome. Le centrosome est formé de deux centrioles et de matériel péricentriolaire; il constitue le centre de nucléation des microtubules (MTOC, MicroTubule Organizing Center). Les MTOCs organisent le réseau microtubulaire au cours des phases du cycle.
Durant la phase G2, la réplication de l’ADN est vérifiée afin de réparer les erreurs éventuelles survenues lors de la synthèse.
La mitose
La mitose ou phase M est une division clonale qui concerne les cellules somatiques et les cellules germinales pré-méiotiques. En phase M, l’ADN est sous forme condensée et les chromosomes s’individualisent et s’alignent sur la plaque équatoriale du fuseau de division. Ce fuseau est bipolaire et formé de deux centrosomes ou de deux MTOCs, un à chaque pôle et les microtubules qui le constituent sont dans un état métaphasique: courts et extrêmement dynamiques. Les chromatides sœurs constituant un chromosome sont ensuite séparées conduisant à la formation de deux cellules filles ayant le même contenu en ADN que la cellule mère. Après la division, les cellules retournent en phase G1 et le cycle cellulaire est bouclé. Je détaillerai les évènements morphologiques de la mitose ultérieurement.
Coordination des différentes phases du cycle cellulaire
La durée globale du cycle cellulaire ainsi que la durée respective de chaque phase du cycle varient suivant les types cellulaires. Les cellules en phase G1 ne poursuivent pas toujours le cycle cellulaire. Elles peuvent en effet quitter le cycle cellulaire et entrer en phase de quiescence (phase G0) si les conditions extérieures ne sont pas propices à leur multiplication. Les différentes phases du cycle cellulaire sont donc précisément coordonnées. La succession des phases doit être respectée et une phase doit être achevée avant l’enclenchement de la phase suivante. Des erreurs de coordination peuvent conduire à une instabilité génomique observée dans les cellules cancéreuses. Pour coordonner le cycle cellulaire, il existe des points de contrôle ou « checkpoints » qui surveillent le bon déroulement du cycle. Ces points de surveillance assurent le contrôle de qualité du cycle cellulaire. En cas d’anomalies, ces mécanismes de surveillance stoppent la progression du cycle et activent soit des processus de réparation, soit de mort cellulaire par apoptose. Schématiquement, ce système de régulation est organisé en trois niveaux, avec des détecteurs (qui sont sensibles aux anomalies de l’ADN, aux défauts du cytosquelette ou aux perturbations métaboliques), des transmetteurs (qui sont généralement des protéines kinases et des molécules régulatrices fonctionnant comme des adaptateurs) et enfin des effecteurs, qui modifient directement les molécules impliquées dans le déroulement du cycle cellulaire, la réplication et la réparation de l’ADN, ou l’apoptose (pour revue voir Pommier and Kohn, 2003). Trois points de contrôle du cycle cellulaire ont été pour l’instant mis en évidence (figure 1). Le premier intervient avant la transition G1/S, c’est le point « START » chez la levure, appelé point de restriction chez les eucaryotes supérieurs. Il dépend de la compétence de la cellule à entrer en phase S, donc de sa taille, de la qualité de l’ADN et de facteurs externes. Le second intervient à la transition G2/M et surveille si l’ADN a été endommagé au cours de la réplication. Le troisième se situe en mitose et vérifie que les cellules filles reçoivent la même quantité d’ADN en vérifiant l’alignement des chromosomes sur la plaque métaphasique du fuseau de division. Je détaillerai ce dernier point de contrôle plus tard.
Contrôle moléculaire du cycle cellulaire
Le cycle cellulaire est contrôlé par l’activité des complexes CDK/Cyclines. La CDK (Cyclin Dependent Kinase) est la sous-unité catalytique possèdant l’activité kinasique et la Cycline est la sous-unité régulatrice. Ces kinases vont phosphoryler des substrats spécifiques en des phases précises du cycle. La concentration intracellulaire des protéines CDK ne variant pas au cours du cycle cellulaire, l’activité des complexes CDK/Cyclines est modulée par quatre types de régulations:
Régulation par phosphorylation
Il existe deux niveaux de régulation par phosphorylation les complexes CDK/Cyclines: une phosphorylation inhibitrice (sur les résidus Tyrosine et/ou Thréonine) ou activatrice (sur les résidus Thréonine ou Sérine) directe sur les CDK, ou bien une régulation indirecte via la phosphorylation inhibitrice ou activatrice du complexe CDK/Cycline.
Régulation par association aux Cyclines et par la stabilité des Cyclines
Les Cyclines sont caractérisées par leur apparition périodique à des moments précis du cycle. Ces variations sont fonction des niveaux de transcription des ARNm codant pour les Cyclines et de la dégradation de ces protéines. D’une manière générale, les Cyclines favorisent l’expression des Cyclines de la phase suivante et répriment l’expression ou favorisent la dégradation des Cyclines de la phase précédente (Murray, 2004). Des mécanismes de dégradation de ces protéines sont mis en place afin d’assurer la progression de la cellule dans le cycle. La dégradation des Cyclines permet l’inactivation du complexe CDK/Cycline correspondant (je détaillerai ce mécanisme de dégradation plus loin). L’activité des CDK est régulée par leur liaison aux Cyclines. Cette liaison induit des changements conformationnels de la CDK permettant l’accès au site catalytique et aux sites de phosphorylation activateurs ou inhibiteurs pour certaines CDK.
Régulation par les CKI
Les inhibiteurs de CDK, les CKI, assurent un autre niveau de régulation des complexes CDK/Cyclines. Ces CKI exercent leur activité inhibitrice en interagissant avec les CDK ou le complexe CDK/Cycline. Ils peuvent bloquer l’engagement d’une phase, mais peuvent également agir au cours d’une phase du cycle cellulaire.
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Table des matières
INTRODUCTION
DIVISIONS CELLULAIRES ET MATURATION MEIOTIQUE
I. GENERALITES
II. LE CYCLE CELLULAIRE
1. L’interphase
2. La mitose
3. Coordination des différentes phases du cycle cellulaire
4. Contrôle moléculaire du cycle cellulaire
41. Régulation par phosphorylation
42. Régulation par association aux Cyclines et par la stabilité des Cyclines
43. Régulation par les CKI
44. Régulation par localisations différentielles
III. LA MATURATION MEIOTIQUE
1. L’ovogénèse et les différents arrêts du cycle
2. Généralités sur la maturation méiotique chez la souris
21. Les différentes phases de la mitose
22. Les différents évènements de la maturation méiotique chez la souris
3. Reprise de la méiose
31. La levée du blocage en prophase: diminution de l’AMPc et de l’activité PKA
32. Activation et régulations du MPF en réponse à la baisse d’activité PKA
a) Le MPF
b) Formation de l’amorce de MPF
i. Formation d’une amorce de MPF à partir du pré-MPF
ii. Formation d’une amorce de MPF à partir de CDK1 monomérique
c) boucle d’auto-amplification
d) Différences xénope/souris
i. Les néo-synthèses protéiques
ii. Candidats pour les néo-synthèses protéiques chez le xénope
33. L’entrée en mitose
4. Première phase M de méiose
41. Cas général de la formation des fuseaux de division et de l’alignement des chromosomes
a) Les microtubules et les protéines associées
i. Les microtubules
ii. Facteurs stabilisants et déstabilisants
iii. Les moteurs associés.
b) Les différents types de microtubules dans un fuseau de division
c) Changement d’état des microtubules en début de division cellulaire
d) Mise en place du fuseau
i. cas des cellules avec centrosomes pourvus de centrioles
ii. Sans centrioles: quelles cellules?
iii. Un système dépendant de la chromatine
iiii. effet chromatine et la voie Ran.
iiiii. les cibles de la voie Ran
e) Les kinétochores et les mouvements des chromosomes dans le fuseau
i. Congression
f) Fuseaux et MAP Kinase
42- Cas particulier de l’ovocyte de souris: formation, migration du fuseau de méiose I et division asymétrique
a) Formation du fuseau de méiose I chez la souris
b) Migration du fuseau
i. Migration du fuseau et voie Mos/…/MAPK
ii. Migration du fuseau et Formine
5. Sortie de première phase M
51. Le point de contrôle du fuseau en mitose
a) Point de contrôle du fuseau et dégradation.
b) Les cibles du point de contrôle
i. La Cycline B
ii. La sécurine
iii. La séparase, cible de la sécurine
c) les composants du point de contrôle.
d) défauts détectés
e) Interactions des protéines du point de contrôle.
f) L’APC et ses régulations
i. APC/CDC20
ii. APC/CDH1.
iii. phosphorylations et déphosphorylations de l’APC.
52. Alignement et séparation des chromosomes homologues en méiose I
53. Existence d’un point de contrôle du fuseau en méiose I?
a) Cas du xénope
b) Cas de la levure et du nématode
c) Cas de l’homme et de la souris
6. Transition entre les deux phases M de méiose
61. CDC6
62. Rôle des Cyclines
63. Rôle de la voie Mos/…/MAPK
64. Wee1
7. Seconde phase M de méiose et arrêt CSF en métaphase II
71. Reformation du fuseau de division et alignement des chromosomes
72. Arrêt en métaphase II
a) Le CSF
b) Voie Mos/…/MAPK et établissement de l’arrêt CSF
c) Emi1 et le maintien de l’arrêt CSF
d) CDK2/Cycline E
73. fécondation
RESULTATS
ARTICLE 1
ARTICLE 2
ARTICLE 3
CONCLUSIONS
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