«La nature est le médecin des malades». Depuis qu’Hippocrate a prononcé cette phrase, il y a vingt-cinq siècles, la pratique médicale a certes considérablement évolué. L’affirmation du médecin grec reste toutefois d’actualité car les plantes occupent toujours une place de choix dans le traitement médicamenteux. Depuis l’Antiquité, la nature constitue la source et la base de la médecine traditionnelle. Les premiers rapports faisant état de l’utilisation de plantes dans un but médicinal proviennent de Mésopotamie et sont datés de 2600 av. J.C. environ. Bien que les médecines chinoise et égyptienne relatent l’emploi de plantes comme médicament, cette médecine traditionnelle s’est largement développée sous l’impulsion gréco romaine.
Après avoir dans un premier temps isolé les substances actives de certains végétaux et autres organismes vivants, l’homme s’est mis à les fabriquer lui-même, puis à inventer de nouvelles molécules médicinales qui ne se trouvent pas dans la nature. La date de naissance de la synthèse organique généralement acceptée est 1828, l’année de préparation de l’urée par l’Allemand Wöhler . A partir de ce moment, des millions de molécules organiques ont été synthétisées parmi lesquelles on compte de nombreux médicaments utilisés aujourd’hui. Il y a par exemple l’aspirine ou acide acétylsalicylique, analgésique et antipyrétique bien connu, synthétisé pour la première fois en 1853 par le Français Gerhardt , qui est un dérivé de la salicine isolée du saule (Salix alba) au début du XIXème siècle. La quinine, extraite en 1820 du quinquina jaune Cinchona calisaya. Sa première synthèse par Woodward sera publiée en 1944 et la première synthèse énantiosélective en 2001 par Stork . Elle est encore utilisée dans le traitement du paludisme. La pénicilline G, aux propriétés antibiotiques, découverte par Flemming en 1928, sera isolée en 1939 par Florey, Chain et Fleming à partir du champignon Penicillium notatum, est la première de la famille des pénicillines qui a marqué une révolution dans la lutte contre les infections bactériennes.
La L-DOPA isolé en 1913 de Vicia faba par le jeune chimiste suisse Marcus Guggenheim, et dont la première synthèse du mélange racémique date de 1911, est utilisée depuis près de 40 ans pour traiter les personnes atteintes de la maladie de Parkinson. La morphine découverte simultanément par le pharmacien allemand Sertürner et les français Courtois , Seguin , à partir de Papaver somniferum au début du XIXème siècle, synthétisée en 1952 , est un analgésique beaucoup plus puissant que l’aspirine, et utilisé entre autres pour calmer les sévères douleurs des malades en phase terminale de cancer. L’artémisinine isolée en 1972 d’Artemisia annua est actuellement commercialisée sous forme de dérivés d’hémisynthèse, synthétisée en 1983 et s’est montré très utile dans le traitement du paludisme à souches de Plasmodium falciparum résistantes aux autres traitements. En 2001 l’Organisation mondiale de la santé (OMS) déclare l’artémisinine « le plus grand espoir mondial contre le paludisme ». En 2006, elle recommandait toutefois d’arrêter la monothérapie afin d’éviter les risques de résistance : l’artémisinine affaiblit le parasite mais ne le tue pas systématiquement, et elle présente son efficacité maximale en association avec d’autres anti-paludiques. Malgré cela, en mai 2009 deux études indépendantes ont rapporté pour la première fois une augmentation significative de la résistance à l’artémisinine de P. falciparum sur le terrain, au Cambodge, probablement en conséquence de pratiques et de traitements incorrects, tel que cela avait été prédit en 2006 par l’OMS Nombreux sont les autres exemples que l’on peut citer .
Les scientifiques ne cessent d’explorer les règnes végétal (plus de 80% des médicaments) et animal à la recherche de nouvelles substances pour combattre les pathologies qui n’ont pas encore aujourd’hui de remède efficace. C’est donc tout naturellement que la diversité chimique offerte par le monde végétal s’est révélée une aide précieuse dans la lutte contre un des grands fléaux de notre époque : « le cancer », qui est devenu la troisième cause de mortalité en Algérie, après les maladies cardiovasculaires et les accidents de la route, a assuré Mr. Ould Abbes, ministre de la santé le 24 décembre 2011 .
Les végétaux constituent une source considérable de substances chimiquement définies et même d’extraits qui enrichissent la pharmacopée actuelle. C’est ainsi que dans le domaine des antitumoraux, le paclitaxel (isolé l’écorce de tronc de l’if américain Taxus brevifolia en 1971 est obtenu par hémisynthèse en 1988 par Pierre Potier à partir de la 10-désacétylbaccatine III isolée des feuilles de l’if européen. Ce même chercheur a permis la production industrielle d’autres antitumoraux isolés en faible quantité des parties aériennes de la pervenche de Madagascar Catharantus roseus en 1958 ( vinblastine) et en 1961 (la vincristine). Enfin, la camptothécine isolée en 1966 de Camptotheca acuminata est actuellement utilisée sous forme de dérivés comme l’irinotécan ou le topotécan dans le traitement de tumeurs.
Le cancer constitue l’une des principales causes de décès dans l’ensemble des pays développés puisqu’il représente la deuxième cause de mortalité après les maladies cardiovasculaires. De par l’importance du nombre de personnes qu’il atteint, il constitue un problème majeur de santé publique. En effet, en Algérie on dénombre environ 40.000 nouveaux cas de cancer recensés annuellement dont 20.000 cas chez les femmes et plus de 19.000 chez les hommes, selon les déclarations du Professeur Kamel Bouzid, président de la société algérienne d’oncologie.
Le cancer appartient au groupe des maladies néoplasiques, c’est-à-dire liées à une prolifération cellulaire anormale de type anarchique. Ce dérèglement de la division de quelques-unes des milliards de cellules qui constituent l’organisme humain, issu de mutations génétiques successives, échappe donc au mécanisme normal du contrôle par les cellules voisines et par l’ensemble de l’organisme. Si les cellules se divisent sans besoin, il y a apparition d’une masse de tissus excédentaires nommée tumeur.
Aujourd’hui plus de cent types de cancers, dont les causes, les évolutions et les conséquences s’avèrent très diverses, ont été décrits. Ils peuvent être répartis en groupes principaux en fonction de la nature du tissu atteint: les tumeurs solides (carcinomes, environ 85%) et/ou les leucémies et lymphomes (environ 8%). Dans ce dernier cas, les cellules malignes sont disséminées dans l’organisme dès leur apparition. Quant aux tumeurs solides, elles se localisent dans un tissu ou un organe. Deux cas se présentent :
♦ Si cette prolifération se fait sans envahissement destructif des tissus environnants ni dissémination, la tumeur est dite bénigne.
♦ Si, au contraire, la tumeur s’accroît aux dépens des tissus adjacents, il s’agit d’une tumeur maligne.
Division cellulaire et le cancer
Dans un corps sain certaines cellules peuvent se diviser pour en produire des nouvelles. Ceci est un processus très contrôlé qui permet au corps de grandir et de remplacer les cellules perdues ou endommagées pendant la vie adulte. Dans le cas du cancer, les cellules se divisent d’une façon non contrôlée, formant, éventuellement, une masse anormale de cellules, ce qu’on appelle une tumeur . Les cellules cancéreuses sont hors contrôle à cause de mutations (changements) dans leurs gènes.
Les mutations s’accumulent au fur et à mesure que nos cellules se divisent et vieillissent, mais certaines combinaisons de mutations génétiques peuvent conduire au cancer. Ces mutations génétiques s’accumulent au cours du temps en raison d’événements indépendants. Par conséquent, le chemin d’accès à un cancer implique de multiples étapes. En fait, de nombreux scientifiques considèrent la progression du cancer comme un processus micro-évolutif.
Comment les cellules cancéreuses se propagent à d’autres tissus?
Au cours des stades précoces du cancer, les tumeurs sont généralement bénignes et restent confinées dans les limites normales d’un tissu. Cependant, comme les tumeurs se développent et deviennent malignes, elles acquièrent la capacité de briser les membranes et envahir ainsi les tissus voisins. C’est l’étape de formation de métastases. Les cellules se déplacent vers d’autres parties du corps (figure 10). Contrairement à la plupart des cellules normales de l’organisme, les cellules cancéreuses peuvent pénétrer la membrane qui sépare les différents tissus (première flèche en haut à gauche de l’illustration). Après avoir envahi les tissus adjacents, les cellules cancéreuses pénètrent dans le sang et les vaisseaux lymphatiques ou les cavités du corps. Lorsque les cellules s’échappent des vaisseaux dans les tissus environnants, ils peuvent former des tumeurs secondaires loin de l’emplacement d’origine de cancers.
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Table des matières
Introduction générale
CHAPITRE I : GENERALITES
1. Introduction
2. Cancer
3. Division cellulaire et le cancer
4. Comment les cellules cancéreuses se propagent à d’autres tissus?
5. Tumorigenèse : Dommages à l’ADN
6. Différents traitements du cancer
6.1. Historique de la chimiothérapie
6.2. Cibles thérapeutiques classiques
6.3. Les nouvelles cibles thérapeutiques
7. La famille des anthracyclines
7.1. Rappel bibliographique
7.2. Structure
7.3. Relation structure activité
8. La famille des alcaloïdes dérivés de l’ellipticine
8.1. Rappel bibliographique
8.2. Structure
8.3. Relation structure activité
8.4. Méthodes de synthèse de l’ellipticine et de ses dérivés
8.4.1 Synthèses d’ellipticine
8.4.2 Analogues de l’ellipticine et dérivés
9. Carbazole et dérivés
9.1 Origine naturelle du carbazole
9.2 Synthèse des carbazoles et de leurs dérivés
9.2.1 Synthèse de Graebe−Ullmann
9.2.2 Réactions électrocycliques
9.2.3 Cyclisation catalysée
9.2.4 Réaction de Diels-Alder
CHAPITRE II : ESSAI DE SYNTHESE DU CROCOLION
1. Introduction
2. Synthèse de la molécule chirale : 1,2,3,4-tetrahydro-2-hydroxyméthyl-2,4-dihydroxy-5,7- diméthyl-9-méthoxy-6H-benzo[b]carbazole
2.1 Préparation de l’aldéhyde
2.1.1 Préparation de (5S)-8-(hydroxyméthyl)-2,2-diméthyl-1,3,7-trioxaspiro[4.4]nonan-6-one 12’
2.1.2 Préparation de l’aldéhyde 11
2.2 Préparation du 3-bromo-6-méthoxy-1,4-diméthyle-9H-carbazole 7
2.3 Essai de condensation de l’aldéhyde 11 avec le bromo-carbazole 7a
3. Synthèse de la (±) 4-hydroxy-9-methoxy-5,11-dimethyl-6H-1,2,3,4-tetrahydrobenzo[b]carbazole
3.1 Condensation avec l’acide 1- chloro-4 penténoïque b selon la réaction de Friedel-Crafts
3.1.1. Chloration de l’acide
3.1.2. Essai de condensation
3.2. Condensation avec le 4-chloro-4-oxobutanoate d’éthyle c
3.3. Réduction de Clemmensen
3.4. Suite de la synthèse selon la voie A
3.4.1. Oxydation de l’alcène
3.4.2 Cyclisation intramoléculaire de l’aldéhyde 16
3.5. Suite de la synthèse selon la voie B
3.5.1 Saponification de l’ester 19
3.5.2 Cyclisation à partir de l’acide
3.5.3 Réduction de la cétone 21
4. Reprise de la synthèse de la molécule chirale (crocolion)
4.1. Création de la première liaison carbone-carbone par condensation
4.1.1 Par acylation de Friedel et Crafts
4.1.2 Par échange halogène-métal
4.2. Déshydroxylation
CHAPITRE III : CONCLUSION ET PERSPECTIVES
1. Conclusion
2. Perspectives
CHAPITRE IV : PARTIE EXPERIMENTALE
1. Considérations générales
2. Modes opératoires
6-méthoxy-1,4-diméthyl-9H-carbazole 8 Chlorure de pent-4-énoyle b
1-(6-Methoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazol-3-yl) pent-4-en-1-one 14a
1-(6-Methoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazol-7-yl) pent-4-en-1-one 14a’
1-(6-Methoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazol-8-yl) pent-4-en-1-one 14a’’
6-methoxy-1,4-dimethyl-3-pent-4-enyl-9H-carbazole 15
4-(6-Methoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazol-3-yl)butanal 16
9-methoxy-5,11-dimethyl-6H-1,2,3,4-tetrahydro-benzo[b]carbazole 17
4-(6-méthoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazol-3-yl)-4-oxobutanoate d’éthyle 18
4-(6-méthoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazol-7-yl)-4-oxobutanoate d’éthyle 18a’
4-(6-méthoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazol-8-yl)-4-oxobutanoate d’éthyle 18a’’
4-(6-méthoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazol-7-yl)-4- butanoate d’éthyle 19
Acide 4-(6-methoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazol-3-yl) butanoïque 20
2,3-dihydro-9-methoxy-5,11-dimethyl-6H-benzo[b] carbazole-4(1H)-one 21
1,2,3,4-tétrahydro-4-hydroxy- 9-methoxy-5,11-diméthyl-6H-benzo[b] carbazole 22
3-bromo-6-methoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazole 7
3,8-dibromo-6-methoxy-1,4-dimethyl-9H-carbazole 7’’
6-méhoxy-1,4,9-triméthyl-9H-carbazole 8’
6-méhoxy-1,4,9-triméthyl-9H-carbazole 8’’
(R)-3-((4’-allyl-2’,2’-dimethyl-1’,3’-dioxolan-4’-yl)hydroxymethyl)-6-methoxy-1,4,9-trimethyl-9Hcarbazole 6’
(R)-3-((4’-allyl-2’,2’-dimethyl-1’,3’-dioxolan-4’-yl)
methyl)-6-methoxy-1,4,9-trimethyl-9H-carbazole 5’
Conclusion générale