Le paludisme est l’affection parasitaire touchant le plus de personnes au monde. Selon l’organisation mondiale de la santé (OMS) la moitié de la population mondiale vit en zone à risque de paludisme, 198 millions de cas ont été recensés en 2013 dont 584.000 décès. 90% des cas se sont produits en Afrique et 78% des décès sont survenus chez des enfants de moins de cinq ans [74]. Il est un problème majeur de santé publique touchant principalement les pays les plus pauvres surtout en Afrique Sub-Saharienne et qu’il est une entrave sérieuse à leur développement économique [40, 60].
Au Sénégal, le paludisme est responsable de 5,62% des motifs de consultations des services de santé et 7,14% des cas de décès chez les patients hospitalisés [53]. Dans les régions sud, il sévit de manière quasi permanente avec une recrudescence saisonnière pendant l’hivernage et constitue, la première cause de morbidité avec 5,41% en 2013 [55].
Depuis 2003, de nombreuses interventions sont mises en œuvre par le Programme National de Lutte contre le Paludisme (PNLP) sous le guide de l’OMS pour faire reculer le paludisme au Sénégal. Ces programmes ont pour objectif de lutter contre la maladie en limitant la transmission vectorielle par la distribution massive de Moustiquaires Imprégnés d’Insecticide à Longue durée d’Action (MILDA), la pulvérisation intra domiciliaire d’insecticide à effet rémanent, les Tests de Diagnostic rapide (TDR), la prise en charge thérapeutique du paludisme simple par les Combinaisons Thérapeutiques à base d’Artémisinine (CTA), le Traitement Préventif Intermittent (TPI) pour les femmes enceintes et chez les enfants de moins de cinq ans (5), et récemment la Chimioprévention du paludisme Saisonnier (CSP) [7, 45]. C’est ainsi qu’entre 2008 et 2013, la prévalence parasitaire nationale a baissé de 5,9% à 2,8%. Cette prévalence présente une disparité entre les zones du sud qui ont des chiffres élevés allant jusqu’à 9,1% et les zones ouest-nord où elle est de 2,2% [55].
Cependant malgré les progrès considérables accomplis, le risque d’exposition d’infection palustre est toujours présent et la population de P. falciparum demeure diversifiée. La grande diversité du parasite est à l’origine de sa résistance aux antipaludiques couramment utilisés et de l’évasion immunitaire contribuant ainsi à la difficulté de lutte contre le paludisme.
Ainsi de nombreuses méthodes pour déterminer le profil génétique des souches de Plasmodium sont mises au point dont le barecode moléculaire par la fusion à haute résolution (molecular barcode by High Resolution Melting; HRM). Normalement cette technique utilise 24 SNPs pour établir l’identité génétique d’une souche, et pour des raisons de logistique nous testons sa faisabilité en zone endémique en réduisant le nombre de SNPs étudiés de vingt-quatre (24) à huit (8): Minima Barecodes.
Généralités sur le paludisme
Définition
Le paludisme est une érythrocytopathie fébrile et hémolysante due à un hématozoaire du genre Plasmodium. Ces parasites sont inoculés à l’homme par piqure d’un moustique; anophèle femelle infecté [11]. Quatre (4) espèces de Plasmodium ont été pendant longtemps les seules impliquées en pathologie humaine. La forme la plus grave du paludisme est causée par P. falciparum, responsable d’une grande majorité des décès. P. vivax, P. ovale, P. malariae provoquent des formes de paludisme « bénignes » qui ne sont généralement pas mortelles [24]. P. knowlesi est l’agent du paludisme chez les primates, couramment rencontré en Asie du Sud–Est. En effet il infecte des macaques (Macaca fascicularis), mais aussi l’homme. C’est donc la cinquième espèce de Plasmodium pouvant parasiter l’homme [13, 28, 71].
Epidémiologie
Agents pathogènes
Classification
Les agents pathogènes du paludisme sont des protozoaires appartenant à l’embranchement des Apicomplexa caractérisés par un complexe apical, à la classe des Sporozoea, à la sous-classe des Coccidia, à l’ordre des Haemosporida, à la famille des Plasmodiidae, au genre Plasmodium avec deux sous-genres dont: le sous-genre Plasmodium comportant 4 espèces P. malariae P. ovale, P. vivax et P. knowlesi et le sous-genre Laverania qui renferme une seule espèce pathogène P. falciparum [58].
Au Sénégal P. falciparum est l’espèce la plus retrouvée et est responsable de 98% mortalité [72].
Morphologie
Les parasites appartenant au genre Plasmodium sont des protozoaires très petits (1-2µm) qui présentent plusieurs formes: trophozoïte, schizonte, gamétocyte. La morphologie de ces formes évolutives et des hématies parasitées varie en fonction de l’espèce plasmodiale.
La coloration de May Grunwald-Giemsa montre qu’ils sont constitués d’un cytoplasme bleu pâle entourant une vésicule nutritive de teinte claire et contenant un noyau rouge et du pigment brun doré ou noir (hémozoïne).
Biologie
Habitat
Les parasites se trouvent successivement chez l’homme qui est l’hôte intermédiaire et chez le moustique qui est l’hôte définitif. Chez l’homme on observe une phase hépatique et une phase sanguine au cours de laquelle les parasites sont intraérytrocytaires.
Cycle évolutif
Le cycle des parasites du genre Plasmodium est essentiellement identique. Il comprend une phase exogène sexuée: la sporogonie qui se déroule chez l’anophèle femelle, vecteur du paludisme, et une phase endogène asexuée appelée schizogonie rencontrée chez l’homme. Cette dernière phase durant laquelle le parasite est constamment haploïde, comprend une phase de développement dans les hépatocytes (schizogonie péri ou exo érythrocytaire) et un cycle de développement dans les érythrocytes (schizogonie érythrocytaire).
➤ Chez le moustique
Lors de son repas de sang chez l’individu infecté, l’anophèle femelle absorbe plusieurs formes du parasite dont les gamétocytes mâles et femelles. Dans son estomac, ils se transforment en gamètes alors que les éléments asexués du parasite sont digérés. Le gamétocyte femelle ne se divise pas et produit un gamète femelle appelé macrogamète alors que le gamétocyte mâle peut produire par exflagellalation après division du noyau, huit gamètes mâles ou microgamètes.
Les gamètes mâles et femelles se conjuguent dans l’estomac de l’insecte. Cette reproduction sexuée donne alors naissance à un zygote, unique phase diploïde (présence de 2N chromosome) du parasite. Cette brève phase diploïde est l’occasion de nombreuses recombinaisons méiotiques. Si deux gamètes ayant fusionné sont issus de clones différents du parasite (en cas de multiparasitime chez le patient source), ce réassortiment de chromosomes différents produit une nouvelle combinaison allélique et donc une diversité ou polymorphisme génétique [65]. Le zygote évolue ensuite rapidement en ookinète qui traverse l’estomac de l’anophèle pour gagner l’hémolymphe et s’y transformer en oocyste. Ce dernier produit alors une très grande quantité de sporozoïtes qui migrent vers les glandes salivaires, à partir desquelles ils sont prêts à être injectés à l’homme à l’occasion d’une nouvelle piqûre. Ces différentes étapes constituent la phase sporogonique du cycle, dont la durée varie pour P. falciparum entre 8 et 21 jours selon la température (minimum 18°C, maximum 33°C). Pour qu’une femelle puisse transmettre le paludisme il faut donc qu’elle ait une durée de vie supérieure au cycle sporogonique. Mais une fois celui-ci complété, la femelle reste infectante toute sa vie. Ainsi, plus une femelle est âgée, plus elle est à risque d’être infectée, et plus elle est à risque de transmettre la maladie lors de ses repas sanguins ultérieurs [10, 15, 37].
➤ Chez l’homme
● Phase péri-érythrocytaire ou hépatique
Au cours de la piqûre [10, 37], le moustique infesté injecte avec sa salive des centaines de parasite, sous formes de sporozoïtes fusiformes (8 à 12µm) qui gagnent la circulation sanguine et y restent pendant une demi-heure environ. Ils gagnent le foie où ils effectuent le cycle exo-érythrocytaire. Dans l’hépatocyte, le sporozoïte entre alors dans une phase de réplication, au sein de la vacuole parasitophore, et de prolifération intracellulaire qui repousse en périphérie le noyau de la cellule donnant ainsi le trophozoïte dont le noyau continue de se diviser et finit par constituer une masse multinucléée appelée schizonte qui conduit à la libération de plusieurs mérozoïtes dans la circulation. Cette phase de multiplication est asymptomatique et dure de 8 à 15 jours selon les espèces. P. vivax et P. ovale, peuvent rester en dormance dans les hépatocytes sous forme d’hypnozoïtes. Ces derniers peuvent donner naissance à des schizogonies hépatiques et sont à l’origine de rechutes et de réviviscences schizogoniques [17].
|
Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE: Généralités sur le paludisme
I. Définition
II. Epidémiologie
II.1 Agents pathogènes
II.1.1 Classification
II.1.2 Morphologie
II.1.3 Biologie
II.1.3.1 Habitat
II.1.3.2 Cycle évolutif
II.1.3.3 Diversité génétique de Plasmodium
II.2 Vecteur
II.3. Modalités épidémiologiques
II.4 Modalités de transmission
II.5. facteurs favorisants
II.6. Répartition géographique
III. Physiopathologie
IV. Manifestations cliniques
IV.1. Accès primo-invasion
IV.2. Accès palustre simple
IV.3 Accès pernicieux
IV.4 Paludisme viscéral évolutif
IV.5 Fièvre bilieuse hémoglobinurique
V. Diagnostic biologique
V.1. Diagnostic parasitologique
V.1.1 Frottis mince et goutte épaisse
V.1.2 Quantitative Buffy Coat (QBC)
V 2. Tests de Diagnostic Rapide (TDR)
V.3 Diagnostic moléculaire: Polymerase Chain Reaction (PCR)
VI. Traitement
VI.1 Traitement du paludisme simple
VI.1.1 Principales molécules antipaludiques
VI.1.2 Autres molécules antipaludiques
VI.2 Traitement du paludisme grave
VI.3 Directives thérapeutiques au Sénégal
VI.3.1 Instructions pour l’application des protocoles de traitement du paludisme
VI.3.2 Directives relatives au traitement du paludisme simple au Sénégal
VI.3.3 Directives relatives au traitement du paludisme grave au Sénégal
VII. Chimiorésistance du paludisme
VII.1 Notions de définition
VII.2 Mécanisme
VII.3 Apparition
VII.4 Propagation
VIII Prophylaxie
VIII.1 Chimioprophylaxie
VIII.2 Lutte anti vectorielle
VIII.3Vaccination
DEUXIEME PARTIE: NOTRE ETUDE
I. Méthodologie
I. 1. Cadre d’étude, région de Thiès
I.1.1 Généralités sur la ville de Thiès
I.1.1.1 Description de la ville de Thiès
I.1.1.2 Situation sanitaire
I.1.1.3 Endémicité palustre
I.1.2 Présentation de la Section de Lutte Anti-Parasitaire (SLAP)
I.2 Description du projet ICEMR
I.3 Considérations éthique
I.4 Population d’étude
I.4.1 Critères d’inclusion
I.4.2 Critères de non inclusion
I.5 Extraction de l’ADN parasitaire
I.6 Génotypage par High Resolution Melting (HRM)
I.6.1 Principe
I.6.2 Mode opératoire
I.6.3 Préparation des milieux réactionnels
I.6.4 Etape de la PCR et de la fusion
I.6.5. Analyse et interprétation des données
I.6.6 Analyse statistique
II Résultats
II.1 Résultats relatifs aux patients
II.1.1Caractéristiques de la population d’étude
II.1.2 Répartition selon le sexe
II.1.3 Répartition des patients selon l’âge
II.2 Résultats relatifs au génotypage
II.2.1 Identification des Barecodes génétiques
II.2.2 Polyclonalité: Prédiction d’infections multiples
III Discussion
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES