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DISTRIBUTION DES ESPECES VEGETALES SPONTANEES AUX PIEDS D’ARBRES D’ALIGNEMENT
Introduction:
Comprendre les mécanismes qui génèrent la distribution spatiale des organismes est l’un des principaux objectifs de l’écologie (Wiens et al., 1993). Les villes peuvent être particulièrement utiles pour élucider ces mécanismes pour les communautés végétales grâce à l’étude des filtres environnementaux décrits par Lortie et al. (2004). Ces filtres agissent donc sur la composition et la structure des communautés en sélectionnant les espèces selon leurs caractéristiques biologiques, et celles liés à l’environnement urbain fragmenté par les activités humaines (Williams, Hahs, & Vesk, 2015).
Afin d’identifier les déterminants de la composition de communauté de plantes et la distribution des espèces fréquentes des pieds des arbres d’alignement, nous avons en premier abordé cette question à travers une approche orientée sur les différents paramètres à l’échelle du pied d’arbre, de la rue et des traits biologiques liés à la dispersion des graines et à leur longévité dans la banque du sol.
D’après la littérature, il existe des liens étroits entre la présence des espaces verts ouverts (parcs, jardins, forêts, friches ferroviaires) en milieu urbain et la richesse spécifique (Pauleit & Duhme, 2000; Whitford, Ennos, & Handley, 2001). Notre objectif est donc aussi d’étudier si les principaux réservoirs de biodiversité urbaine locale de notre quartier d’étude (les berges de la Seine, le bois de Vincennes, le parc de Bercy et les gares de Lyon et de Bercy) pourraient avoir un impact sur la composition de communauté de plantes et la distribution des espèces fréquentes aux pieds des arbres d’alignement. Nos résultats visent à améliorer les pratiques de gestion de la biodiversité urbaine.
Drivers of the distribution of spontaneous plant communities and species within urban tree bases Publié dans la revue « Urban Forestry and Urban Greening »
Comme énoncé dans l’introduction, un des objectifs de cette thèse est d’étudier les facteurs influençant la composition des communautés des plantes ainsi que la distribution des 28 espèces les plus fréquemment observées dans un habitat urbain fortement fragmenté, que sont les rues avec leurs pieds des arbres d’alignement, surtout pour combler le manque patent de connaissances sur la flore sauvage des pieds des arbres urbains. Dans ce premier article, nous avons analysé, dans un premier temps, les données d’inventaires floristiques récoltées en 2014 de la flore aux pieds de 1474 arbres d’alignement mené dans 26 rues dans le quartier de Bercy, du 12ème arrondissement de Paris, afin d’évaluer : i) l’effet des caractéristiques des pieds des arbres (circonférence du tronc, présence ou absence de grille, compaction du sol, excrément animal, insolation, l’essence de l’arbre), ii) de la rue (orientation des rues par rapport aux vents dominants), iii) du quartier (distance aux espaces verts situé à proximité), iv) des caractéristiques biologiques des espèces (poids des graines, présence ou absence de dispositifs de dispersion associés aux fruits et la durée de vie des graines dans la banque du sol) sur la composition des communautés végétales et la distribution des espèces fréquentes aux pieds des arbres.
Synthèse, limites et perspectives:
A l’issue de cette étude, il apparaît donc que la flore des pieds des arbres serait relativement riche. La quantité d’espèces présentes dans ces micro-espaces en ville est due à la grande variété des conditions qui y coexistent à l’échelle du quartier, de la rue, du pied d’arbre et des traits biologiques des espèces.
Nous avons aussi pu mettre en évidence que les rues sont plus riches en plantes aux alentours des espaces verts. Ces plantes sont plus souvent pollinisées par des insectes que dans les quartiers où le bâti est prépondérant. Naturellement, les plantes sont trouvées plus nombreuses lorsque la terre n’est pas couverte par des grilles ou qu’elle n’est pas trop tassée par les piétons. C’est sous les Ailantes que le nombre d’espèces est le plus important, et sous les Robiniers qu’il est le plus pauvre. Les rues parallèles à la Seine, c’est à-dire dans le sens des vents dominants, sont les plus peuplées par les espèces anémochores, épizoochores et barochores, ainsi que celles les mieux enrichies par les déjections animales.
Mais ces résultats très généraux méritent d’être examinés sous l’angle des espèces elles-mêmes. Quelles sont les espèces bien disséminées dans tout le quartier et celles qui sont recluses uniquement dans quelques rues ? Les grandes gagnantes sont le Pâturin annuel, la Vergerette du Canada et le Pissenlit. Présentes dans pratiquement toutes les rues, elles dominent largement la flore du quartier. Le Plantain lancéolé ou le Chardon des champs sont eux davantage localisés. Les analyses montrent que paradoxalement, ce n’est pas la forme des fruits ou graines ni leur poids qui ont une incidence sur la répartition des espèces, mais bien plutôt leur capacité à rester dans le sol sous forme de graines dormantes, qui les aide à coloniser l’espace. Dans ces milieux très perturbés, les espèces capables de germer sur plusieurs saisons et d’attendre des conditions favorables réussissent à se maintenir sur de nombreuses années. Certaines espèces sont aussi capable de migrer d’espaces verts en espaces verts via les pieds des arbres d’alignement grâce à la dissémination de leurs graines, et assurer la survie des communautés végétales qu’elles constituent. De ce fait, découle l’importance d’aller plus loin et d’analyser leur dynamique en métapopulation dans ce même type d’habitat urbain. Ce sujet est traité dans le chapitre suivant.
Il reste toutefois à approfondir et inclure d’autres points dans notre étude, notamment certains facteurs écologiques urbains permettant aussi d’expliquer les patrons observés. Les plus importants sont les suivants : a) les dommages associés au piétinement, et à l’abandon des détritus, y compris les mégots de cigarettes contenant des substances allélochimiques ; b) Les relations sol-eau, en particulier la capacité de rétention d’eau, l’infiltration et le drainage, et donc la sensibilité des espèces à la sécheresse, avec une forte influence sur la colonisation végétale notamment en période de canicule ; c) Prélèvement des échantillons du sol afin de les analyser au laboratoire et déterminer la texture, la granulométrie, les paramètres physico-chimiques, les teneurs en oligo-éléments et des métaux lourds et de procéder ensuite à des tests biologiques afin de déterminer l’effet de tous ces paramètres sur la richesse floristique aux pieds des arbres.
DYNAMIQUE DES ESPECES VEGETALES SPONTANEES AUX PIEDS DES ARBRES D’ALIGNEMENT A PARIS
Introduction
Conjointement à notre étude sur les facteurs qui pourraient influencer la distribution de la flore aux pieds des arbres d’alignement décrite dans le chapitre précédent (article 1), nous nous sommes interrogés sur le rôle potentiel de corridor écologique que pourraient assurer ces micro-habitats publics pour ces espèces ainsi que le rôle de pluie de propagules des espaces verts situés à proximité (e.g. parcs). Une étude sur 4 ans à Montpellier a permis de paramétrer un modèle spatialement réaliste (Stochastic Patch Occupancy Model) pour l’espèce Crepis sancta (Dornier & Cheptou, 2012). L’extension de ces modèles à un nombre plus important d’espèces à partir des relevés accumulés sur 6 années afin d’analyser la dynamique en métapopulation de plantes dans une situation ou l’habitat favorable et fortement fragmenté est un des objectifs du travail de ma thèse. La géométrie régulière de cet habitat rend l’utilisation des modèles de métapopulation aisée.
Ce modèle de fonctionnement étudié repose sur le concept de métapopulation défini initialement par Levins (1969). Il met l’accent sur la dispersion des propagules dans l’espace comme moteur de la dynamique spatiale. Ainsi, les cartes d’occupation des habitats au cours du temps (vide ou occupé) permettent d’inférer les colonisations et les extinctions et d’en déduire le modèle de métapopulation sous-jacent (Hanski, 1982, 1994).
Les modèles de métapopulation ont été utilisés avec succès chez certains organismes (insectes par exemple), mais très peu chez les plantes (voir Husband & Barrett, 1996). Ces modèles présentent pourtant l’avantage d’être faciles à paramétrer et permettent une description de la dynamique spatiale sans information précise sur la démographie intra-patch.
Colonization and extinction dynamics among the plant species at tree bases in Paris (France)
Soumis dans la revue « Journal of Ecology and Evolution »
Dans ce deuxième article, nous avons étudié les modèles de métapopulation développés sur 15 espèces abondantes situées dans 15 rues. Ensuite, nous avons relié ces modèles de fonctionnement aux caractéristiques du quartier (distance à l’espace vert le plus proche), les traits biologiques des espèces, typiquement les stratégies de dispersion, le poids des graines ainsi que leur longévité dans la banque du sol et la taille maximale des plantes.
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Table des matières
Introduction générale
A. Qu’est-ce que c’est la biodiversité ?
B. Pourquoi s’intéresser particulièrement à l’écosystème urbain
C. L’écologie urbaine, qu’est-ce que c’est ?
I. L’écologie urbaine étudie la relation entre biodiversité et milieu urbain. En quoi consiste ce concept ? Pourquoi s’intéresser à ce domaine de l’écologie ? Quels en sont ses buts et son importance ?
II. Impacts de l’urbanisation sur la biodiversité. Quelles sont les menaces ?
III. Emergence de la conservation de la biodiversité urbaine et pratiques de gestion
D. Pourquoi s’intéresser à l’étude de la flore urbaine sauvage vasculaire ?
I. Eléments historiques
II. La prise en compte de la biodiversité végétale sauvage en ville, ses bienfaits et caractéristiques
III. La richesse floristique en espèces sauvages en ville et ses déterminants dans la littérature en écologie
E. Filtres urbains
I. Effets des filtres urbains sur la diversité végétale fonctionnelle
II. La ville vue comme une série de filtres
III. Apport de l’étude des traits fonctionnels pour expliciter les mécanismes de filtres urbains: Intérêts et perspectives de recherche sur l’influence de l’environnement urbain sur les traits fonctionnels des plantes
IV. Relation entre traits fonctionnels et environnement urbain
F. La flore des pieds des arbres d’alignement
I. Pourquoi s’intéresser à la flore spontanée des pieds des arbres d’alignement
II. La flore spontanée des pieds des arbres dans la littérature en écologie
G. La distribution et la dynamique des espèces végétales en milieu urbain
I. Les patrons de distribution et dynamique des espèces en milieu urbain
II. La théorie neutre de la biodiversité permet-elle d’expliquer la distribution et la dynamique des espèces ?
III. Critiques et avenir de la théorie neutre
H. Contexte et objectifs de cette étude
I. Problématique abordée
Chapitre 1 : Méthodologie générale
A. Zone d’étude
B. Inventaires floristiques
C. Utilisation de données de sciences participatives : Sauvage De Ma Rue
D. Les suivis de la biodiversité
I. Généralités
II. Utilité des données historiques
III. Présentation du travail de Joseph Vallot
IV. Utilité et limites des données d’inventaires
E. Les analyses statistiques et leurs difficultés : Limites des études corrélatives
F. SPOMSIM
Chapitre 2 : Distribution des espèces végétales spontanées aux pieds des arbres d’alignement
A. Introduction:
Article 1: Drivers of the distribution of spontaneous plant communities and species within urban tree bases
B. Synthèse, limites et perspectives:
Chapitre 3 : Dynamique des espèces végétales spontanées aux pieds des arbres d’alignement à Paris
A. Introduction
Article 2: Colonization and extinction dynamics among the plant species at tree bases in Paris (France)
B. Synthèse, limites de cette étude et son intérêt pour l’écologie urbaine
Chapitre 4 : Déterminants de changements de composition des communautés végétales sur 130 ans
A. Introduction
Article 3: Drivers behind temporal composition changes of plant communities over 130 years
B. Synthèse, limites et perspectives
Discussion générale
A. Pieds des arbres, habitat et/ou corridor écologique pour la flore sauvage urbaine ?133
B. La distribution et la dynamique des espèces végétales des pieds des arbres d’alignement sous influence urbaine
C. La longévité des graines dans la banque du sol, une lacune à combler dans l’étude de la dynamique de métapopulation
D. Gérer les pieds des arbres d’alignement d’une façon écologique
E. Les déterminants de changement de composition de communautés des plantes sur 130 ans
Conclusion générale et perspectives
Bibliographie générale (articles inclus)
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