Distinction entre jeu « plaisir » et jeu au service de l’enseignement

Une définition unique du jeu ? 

Dans son ouvrage, Jacques Henriot écrit que le « jeu est une chose dont chacun parle, que tous considèrent comme évidente et que personne ne parvient à définir » . Haydée Silva soutient le propos d’Henriot et va plus loin en ajoutant que le jeu est «un phénomène complexe, et toute parole sur le jeu doit être conçue comme une œuvre sociale de désignation et d’interprétation » . Il apparaît alors que proposer une définition unique et cadrée du terme jeu n’est pas une chose aisée, même pour les théoriciens spécialistes de la question. Par ailleurs, nombre d’entre eux proposent des définitions qui se recoupent entre elles, mais qui varient également en fonction de leur champ disciplinaire, comme la philosophie, l’anthropologie, la sociologie ou la psychologie. Ainsi, dans le cadre de ce travail, il nous paraît important de concentrer notre réflexion sur les définitions les plus courantes du terme que l’on peut trouver par exemple dans un dictionnaire.

Dans la langue française, le terme jeu est un mot polysémique : il recouvre en effet plusieurs significations différentes. Si l’on considère la définition proposée par le Larousse, le jeu désigne une :
– Activité d’ordre physique ou mental, non imposée, ne visant à aucune fin utilitaire, et à laquelle on s’adonne pour se divertir, en tirer un plaisir : Participer à un jeu.
– Activité de loisir soumise à des règles conventionnelles, comportant gagnant(s) et perdant(s) et où interviennent, de façon variable, les qualités physiques ou intellectuelles, l’adresse, l’habileté et le hasard : Jeu d’adresse. Jeu télévisé. Jeux d’argent. Jeux de cartes. Tricher au jeu.

À l’appui des définitions précédentes, on remarque que le mot français jeu couvre deux champs sémantiques à lui seul. Or, on peut noter que cette distinction sémantique est marquée en anglais, avec les termes game et play : le play comprend une plus grande liberté d’action et une organisation moins cadrée que le game. On retrouve d’ailleurs cette distinction chez Winnicott qui affirme qu’il n’existe que deux grands types de jeux : les jeux libres (play/playing) et les jeux plus organisés (game). Il apparaît toutefois, précise-il, que le play comprend également un peu de game, c’està-dire que la liberté du play n’exclut pas pour autant certaines règles et contraintes auxquelles les joueurs sont confrontés. Ces dernières ne sont en effet pas déterminées en amont du jeu.

Pour conclure, on peut voir que le mot jeu en français couvre bien des définitions tandis qu’en anglais, il existe deux termes pour le définir : le play sera pour s’amuser et le game pour se divertir en s’amusant. Pour autant, la définition qui nous intéresse, objet d’étude principal de cette recherche, est celle du jeu lorsqu’il est au service de l’enseignement.

Distinction entre jeu « plaisir » et jeu au service de l’enseignement

Il nous paraît important de différencier le jeu « plaisir », et le jeu au service de l’enseignement et, en particulier, l’enseignement des langues vivantes étrangères (L.V.E.) afin d’éviter de réduire le jeu à une simple activité de remplissage pour la classe.

Le jeu « plaisir »

Pendant longtemps, le jeu a été perçu comme étant l’aversion de l’école. En effet, héritage de la tradition judéo-chrétienne selon Jactat, l’école constituait un lieu de travail où l’acquisition de toute connaissance résultait d’un long et dur labeur, et où le jeu n’avait pas sa place. Le jeu était ainsi associé de facto aux notions d’amusement, de plaisir et de divertissement – comme nous l’avons montré précédemment, cette notion correspond en anglais au terme play –, entravant alors le chemin vers les savoirs intellectuels. Par ailleurs, cette distinction était également le reflet de la séparation entre le monde de l’enfance et le monde adulte, respectivement associés à la notion de « plaisir » et celle du « travail » ; et pour préparer au mieux l’enfant à prendre la route vers l’âge adulte, il fallait qu’il suive la voie du travail, de la rigueur et de l’effort.

C’est pourquoi le jeu en classe était fondamentalement proscrit des stratégies d’enseignements de l’époque, notamment à cause des étiquettes peu valorisantes que la société lui rattachait.

Le jeu au service de l’enseignement

La période allant des années 1970 jusqu’au début des années 2000 fut marquée par une tendance générale qui tendait à revaloriser le jeu en tant qu’outil pédagogique dans l’enseignement, en particulier celui du français langue étrangère (F.L.E.) où il fit ses début. En effet, on a vu apparaître abondamment les termes jeu(x) et ludique dans les textes pédagogiques et didactiques, mais également des formations autour du jeu, des manuels et des sites proposant des contenus autour du même sujet. La didactique des langues étrangères n’a, quant à elle, fait que suivre le mouvement général de la société même s’il n’y a que très peu de références des termes dans les textes officiels. Nonobstant, la revalorisation du jeu en tant qu’outil au service de l’enseignement a mis au jour trois composantes : le ludique, l’éducatif et le pédagogique. Le jeu ludique permet à l’enfant de mieux s’intégrer et développer son plaisir de jouer ; il permet aussi de développer ses connaissances et sa motivation pour faire la tâche qui lui est demandée. Le jeu éducatif contribue au développement de la compréhension des notions et concepts afin d’acquérir de nouveaux savoirs. Enfin, le jeu pédagogique développe chez l’apprenant son désir d’apprendre : il créé chez l’apprenant un plaisir de performance et renforce ses compétences. Mais pour plus de clarté dans notre travail, hormis exceptions, auquel cas nous le préciserons, nous nous contenterons de simplifier cette notion de jeu au service de l’enseignement par l’utilisation du mot jeu ou activité ludique.

Pour l’heure, on pourrait dire en guise de conclusion pour ce premier segment que l’évolution de la société change la perception traditionnelle de la notion de jeu. Celui-ci devient un moyen utile à l’enseignement et qui présente plusieurs avantages en situation d’enseignement.

Avantages du jeu sous différents champs disciplinaires

Au cours de ce second segment, nous proposerons un aperçu des avantages que nous avons pu déterminer, d’après les recherches existantes autour de la question du jeu. Trois domaines sont notamment mis en avant : la psychologie, la cognition et la sociologie.

Aspect psychologique : plaisir et créativité

De manière générale, la motivation est l’un des premiers facteurs qui poussent un individu à s’engager et surtout poursuivre son chemin d’apprentissage, quelque soit la discipline choisie. Dans notre cas, pour gérer cette problématique, il est possible de recourir au jeu dans l’enseignement des langues car le jeu est avant tout une source de plaisir et développe la capacité d’investissement chez un individu. Ces caractéristiques lui permettront toutes deux de constituer une personnalité. Tout d’abord, l’action de jouer « doit être un acte spontané, et non l’expression d’une soumission ou d’un acquiescement » . C’est sous ces conditions qu’elle procure une sensation de plaisir chez l’individu, qu’il soit adulte ou enfant. En ce sens, il s’adonne totalement à cette activité, ce qui le rend plus actif dans son apprentissage : l’apprenant lâche prise. Dès lors que le jeu n’est pas conçu comme un travail mais plutôt comme une activité, la dimension ludique permettra à l’individu de commettre des erreurs, de les gérer et d’en tirer des leçons pour mieux réussir.

Puis, dans son ouvrage, Winnicott indique que le jeu est une thérapie en soi : c’est «une expérience créative, une forme fondamentale de la vie. » Le jeu fait en effet partie du  processus d’humanisation de l’individu. Lorsqu’il s’agit d’un enfant, l’activité de jouer lui permet d’assimiler des codes et développer sa capacité à s’investir dans le jeu pour devenir adulte. Précisons que cette capacité d’investissement – la créativité – est universelle : « la créativité est l’un des dénominateurs communs […] qu’hommes et femmes se partagent ». Elle est inhérente au fait de vivre et permet à l’individu d’avoir une approche de la réalité extérieure. Enfin, l’utilisation du jeu est fondamentale dans la constitution de la personnalité : « C’est en jouant, et seulement en jouant, que l’individu, enfant ou adulte, est capable d’être créatif et d’utiliser sa personnalité tout entière. » Il apprendra à engager son corps et se mettre en scène, à combattre ses appréhensions et faire face au public. Le développement de la personnalité d’un individu par l’association du facteur ludique à celui de l’investissement alimente ainsi sa motivation d’apprendre.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE – CADRE THÉORIQUE GÉNÉRAL
1. Généralités lexicales
A. Une définition unique du jeu ?
B. Distinction entre jeu « plaisir » et jeu au service de l’enseignement
2. Avantages du jeu sous différents champs disciplinaires
A. Aspect psychologique : plaisir et créativité
B. Aspect cognitif : communication et interaction
C. Aspect sociologique : développer et renforcer le lien social
3. Compétences orales et jeux
A. Cadre général des compétences langagières orales
B. Lien entre le jeu et les compétences orales
C. Recensement des jeux exploitables pour l’oral
DEUXIÈME PARTIE – HYPOTHÈSES DE TRAVAIL
1. Conditions et limites du jeu en classe de langue
A. La gestion de l’espace
B. La gestion du temps
C. La gestion de classe
2. Intégration du ludique dans une séquence
A. L’équilibre entre dimension culturelle et ludique
B. Répondre aux objectifs de l’oral fixés par les programmes
3. Jeu et public d’apprenants : un choix minutieux
A. Comment choisir un bon jeu ?
B. Jeu à l’école, jeu au collège, jeu au lycée : peut-on jouer à tout âge ?
TROISIÈME PARTIE – EXPÉRIMENTATION ET RETOUR
1. Public d’élèves et jeu
A. Présentation globale du public en situation d’enseignement
B. Propositions des activités ludiques en fonction du niveau de classe
C. Choix du public et des jeux de travail
2. Mise en application des jeux et synthèse des écueils observés
A. Le jeu de rôle et la seconde LV3
B. Le « Match de boxe argumentatif » et la terminale LV2
C. Les problèmes observés quant à la mise en œuvre
3. Analyse et bilan des résultats
A. Analyse des résultats obtenus
B. Bilan des résultats
CONCLUSION

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