Dispositions relatives au médicament et au monopole

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Evolution de la définition du médicament en droit français

A l’image de la définition du médicament qui a connu une importante extension jurisprudentielle, celle du médicament dans le système français évolue en permanence, et en fonction d’une jurisprudence abondante. Cette évolution traduite par certaines modifications notamment des termes « produit », « fonction organique », une clarification des produits frontières; a permis de préciser la définition juridique du médicament.
Le terme « produit » est substitué par lřexpression « toute substance ou composition » terminologie qui reprend celle employée pour le médicament par présentation.
Lřexpression « fonctions organiques » est remplacée par celle de « fonctions physiologiques » dont la définition est plus large puisquřelle recouvre lřensemble des phénomènes vitaux. La définition du médicament par fonction devient « toute substance ou composition pouvant être utilisée chez lřhomme ou pouvant lui être administrée en vue de restaurer, de corriger ou de modifier des fonctions physiologiques, en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique, soit dřétablir un diagnostic médical »
Dans un souci précision, la directive souligne que le médicament aura une action pharmacologique, immunologique mais aussi métabolique. Le métabolisme se définit comme lřensemble des modifications chimiques qui ont lieu dans lřorganisme, destinées à subvenir à ses besoin en énergie, à la formation, à lřentretien, à la réparation des tissus, à lřélaboration de certaines substances (hormones, enzymes, anticorps, etc.) »56 .

Les produits frontières

Dřautres produits liés au monopole entrent pour l’essentiel dans la définition du médicament, notamment les produits de la parapharmacie, les désinfectants, les aliments spéciaux, les plantes, les appareils et instruments à usage sanitaire ou corporel, les produits dřhygiène ou les cosmétiques. Ces produits à la frontière de la notion juridique du médicament, font pour la plupart lřobjet de réglementations susceptibles dřinterférer avec le droit du médicament.
« La notion de médicament, centrale en droit pharmaceutique, est interprétée largement; » et de nombreux procès ont eu lieu pour préciser la notion des produits dits « frontière ». La Cour de Justice des communautés européennes en se prononçant pour la première fois sur la définition du médicament, a confirmé la prédominance de la définition du médicament dans lřaffaire Van Bennekom57. Cet arrêt permet de montrer que le juge communautaire qui consacrait les notions de présentation implicite et de médicament par nature, entendait sauvegarder les intérêts de la santé publique58.
Ce sont aux Etats membres de décider du degré de gravité, de sévérité des contrôles à effectuer. Dans les cas où le produit nřentre pas dans la définition communautaire du médicament, doivent être pris en compte, selon la jurisprudence Delattre59,
Toutefois, en raison dřune absence de définition ou de situations juridiques non harmonisées pour des produits frontières, les réflexions doctrinales se sont concentrées autour de la seule définition du médicament, afin de déterminer s’ils sont ou non des médicaments. Il en a été ainsi pour les denrées alimentaires, et notamment pour les compléments alimentaires et les produits diététiques destinés à des fins médicales spéciales qualifiés de produits frontières.
La définition du médicament est double. Un produit peut être qualifié de médicament en considération de la présentation qui en est faite ou, sur la base de la fonction qui lui est attribuée : « Un produit est qualifié de médicament sřil entre dans lřune ou lřautre de ces définitions qui sont donc alternatives ».60
On entend donc par médicament, « toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à lřégard des maladies humaines ou animales, ainsi que toute substance ou composition pouvant être utilisée chez lřhomme ou pouvant lui être administré en vue soit de restaurer, de corriger ou modifier des fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique, soit dřétablir un diagnostic médical. »

Les limites de la définition du médicament

La définition du médicament du Sénégal inspirée de celle de la France présente certaines imprécisions. En effet, pendant que la France a apporté plusieurs modifications à sa définition, celle du Sénégal n’a pas évolué de 1994 à nos jours. Les modifications ont concerné certains termes notamment, « préparations », « produits », « fonction organique », mais aussi les produits assimilés à des médicaments.

Modifications apportées à la définition du médicament en France

 »Le cas des préparations »

Les chambres réunies de la Cour de Cassation avaient englobé les compositions et les préparations dans une même définition, parce que la loi de Germinal applicable à l’époque les réunissait dans une même catégorie pour leur attribuer le régime identique78. Cependant,  »compositions » et  »préparations » correspondent à deux notions différentes. On peut considérer que les préparations pharmaceutiques ressortissent à deux types: des préparations extractives: teintures, extraits, eaux distillées, etc…
des préparations en vue de leur mise en forme pharmaceutique d’une substance: solutés, comprimés, etc…
La loi de 1941 et les énoncés ultérieurs, y compris la définition actuelle du médicament, ont omis de reprendre le terme de préparations. Cette difficulté est rendue sensible par un arrêt de la Cour rendu en 196879 à propos de produits se présentant sous la forme d’extraits fluides et de teintures de plantes: (produits donc obtenus sans aucun mélange, par macération puis concentration dans l’alcool utilisé comme solvant): la Cour a considéré que cette préparation « n’implique pas de connaissances pharmaceutiques, que de la sorte lesdits produits constituent des drogues simples » dont la préparation est libre (on se souvient de la définition de la drogue: produit brut naturel ou obtenu au moyen d’opérations matérielles naturelles simples ne nécessitant pas de connaissances pharmaceutiques) alors que pour tout pharmacien il s’agit, à l’évidence, d’une préparation galénique. Au moment où les préparations ont été omises par le législateur, elles suivent le régime des compositions.
Le législateur Sénégalais par souci de cohérence et d’harmonisation et en l’absence de précision de la loi française, a préféré maintenir le terme de  »préparation » dans sa nouvelle définition du médicament.

« La notion de « produit »

En France, la directive de 2004 transposée en droit français et modifiée par la loi n° 2007-248 du 26 février 2007, en précisant la définition du médicament, a substitué le terme « produit » par lřexpression « toute substance ou composition » terminologie qui reprend celle employée pour le médicament par présentation.

La notion de « fonction organique »

Elle est floue lorsqu’elle est comparée dans la définition française à l’expression « fonction physiologique » dont la définition est plus large, puisquřelle recouvre lřensemble des phénomènes vitaux.

Les produits assimilés à des médicaments par l’article 511 nouveau du CSP sénégalais

Lřarticle 511 nouveau du livre V pharmacie étend expressément la définition du médicament à dřautres produits dont certains sont qualifiés de médicaments que par la loi :

Les produits considérés ailleurs comme de la parapharmacie

En France, les dispositions particulières aux produits cosmétiques médicamenteux qui figuraient encore à l’article L 511, 2è alinéa, ont finalement été abrogées par la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998, art. 2, II.
Au Sénégal, la loi de 1994 a considéré les produits cosmétiques comme des médicaments, alors qu’ils relèvent dans d’autres pays de la parapharmacie. C’est pourquoi, le législateur sénégalais conscient de ce fait et pour des raisons de santé publique, a décidé de restreindre lesdits produits de la définition du médicament. Ainsi un arrêté a été pris pour préciser la composition desdits produits80. Toutefois, l’arrêté ne prend pas en compte toutes les autres la teneur en fluor autorisée dans les produits cosmétiques était fixée par lřarrêté ministériel n°8807 du 28 septembre 1994 qui dispose que les concentrations de fluor et dérivés inférieures ou égales à 0.15g sont autorisées dans la composition des produits cosmétiques.
substances pouvant entrer dans la composition des produits cosmétiques et les teneurs autorisées, ni ne mentionne les substances interdites dans la composition desdits produits. S’agissant de la parapharmacie, depuis lřavis du Conseil national de la consommation (CNC)81 mentionné dans son rapport du 9 février 2005, la réglementation communautaire et nationale a évolué concernant la parapharmacie. Ainsi, « les pansements », « les produits destinés à lřapplication des lentilles oculaires de contact » ont désormais des statuts bien définis. Ceux sont des dispositifs médicaux qui relèvent de la directive 93/42/CEE du Conseil du 14 juin 1993 modifiée en dernier lieu par la directive 2003/32/CE du Conseil du 23 avril 2003. Cette directive sřapplique aux dispositifs médicaux et à leurs accessoires. Les dispositifs médicaux peuvent être commercialisés dès lors quřils ont obtenu une certification de conformité attestant de leurs performances et de leur conformité aux exigences de sécurité définies par la directive. Ils portent alors le marquage CE. Leur distribution est libre. Toutefois, il faut noter quřen France les pansements présentés comme conforme à la pharmacopée sont réservés à la vente officinale.
Les tests de diagnostic rapide (dispositifs de diagnostic in vitro destinés à être utilisés par le public) relèvent de la directive 98/79/82 qui définit des exigences essentielles de sécurité. Les conditions de mise sur le marché de ces produits sont identiques à celle de la directive sur les dispositifs et leur distribution est également libre.
Toutefois au Sénégal, les produits précités se retrouvent toujours dans la nouvelle définition du médicament de l’article L.511.

Les produits assimilés à des médicaments

Le législateur français avait estimé que ces produis devaient faire lřobjet dřun régime analogue à celui qui est applicable au médicament et les a expressément assimilé à des médicaments83. Selon Jean CALVO, « Il sřagit dřun certain nombre de produits ne répondant pas à la définition de médicament sus analysée, que le législateur a jugé nécessaire dans lřintérêt de la santé publique dřinclure dans le monopole pharmaceutique. Le mieux est de les analyser successivement. « 84

« Les produits présentés comme supprimant l’envie de fumer ou réduisant l’accoutumance au tabac »

Au Sénégal, il existe une nouvelle loi qui encadre la fabrication et l’usage du tabac85. En outre à l’image du législateur français, le tabagisme même s’il représente un fléau social, nřest à proprement parler une maladie humaine. Nous proposons compte tenu de ce qui précède la suppression de l’alinéa « 4 » de la définition de lřarticle L.511.

« Les eaux minérales86

Les eaux minérales naturelles ne sont pas en principe considérées comme des médicaments. Toutefois, les eaux minérales artificielles et leurs sels sont considérés comme des médicaments s’ils prétendent à des propriétés thérapeutiques.

« Les produits de bioterrorisme »

Dans le droit français, cřest un décret du 23 décembre 1939 qui intègre ces produits dans la catégorie des médicaments. Ils ne peuvent être préparés et vendus que par des pharmaciens après enregistrement au laboratoire national de contrôle des médicaments. Cet enregistrement n’est effectué qu’après avis de l’état-major de l’armée87. Il sřagit donc dřune catégorie particulière de médicaments dont lřexploitation est soumise à des conditions supplémentaires.
Une définition officielle émanant de l’OMS, décrit les agents biologiques comme étant « ceux dont les effets sont fonction de leur aptitude à se multiplier dans l’organisme attaqué, et qui sont destinés à être utilisés en cas de guerre pour provoquer la mort ou la maladie chez l’homme, les animaux ou les plantes ». De leur côté, les toxines sont des produits toxiques qui, à la différence des agents biologiques, sont inertes et incapables de se reproduire.
Pour rappel, à lřépoque des guerres mondiales, il y avait les effets dévastateurs liés à l’usage des armes nucléaires sur la santé et la vie des personnes. Maintenant, à l’ère de la mondialisation, les conflits existent toujours, mais la possibilité d’être confronté aux produits toxiques résultant du bioterrorisme demeure limitée en général. Au Sénégal, l’existence d’un cadre juridique et institutionnel spécifique aux produits de bioterrorisme88, restreint ces produits de la définition du médicament.

Sur les produits exclus de la définition du médicament

« Les produits du corps humain  » l’article L.511

Le Sénégal s’est ici inspiré de la tradition française89 qui exclut les produits d’origine humaine: sang humain et dérivés, organes prélevés à des fins de greffe, lait de femme…. (hors commerce en raison de leur origine noble font l’objet d’une réglementation particulière) sans pour autant préciser les produits. Or, si ces produits ne constituent pas des médicaments au sens de lřarticle L 511 du CSP, ils sont soumis dans lřintérêt de la santé publique, à certaines règles juridiques qui intéressent le droit pharmaceutique. Cřest le cas des produits sanguins dřorigine humaine90, notamment le sang humain et ses dérivés qui ne peuvent être considérés comme des médicaments. Par conséquent, ce refus par le législateur sénégalais de reconnaître aux produits dérivés du sang le statut de médicaments résulterait de leur régime particulier d’origine humaine, motivé tant par le souci d’assurer une qualité convenable, que par celui de leur rareté.
A partir du sang humain ou de ses composants peuvent être préparés des produits sanguins labiles, difficilement commercialisables, ainsi que des produits stables ayant le statut de médicament compte tenu de leur finalité thérapeutique91. Au Sénégal l’alinéa 6 de la loi92 relative au don et à la transplantation, définit l’organe par sa capacité d’assurer des fonctions physiologiques. Aujourd’hui, où la médecine offre de nouvelles perspectives permettant d’utiliser des produits d’origine humaine pour sauver des vies, ce choix du législateur sénégalais n’est plus pertinent pour des raisons de santé publique.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPEL SUR LE DROIT PHARMACEUTIQUE
CHAPITRE I : LE LIVRE V-PHARMACIE
Section I : Présentation du Livre V- pharmacie
Section II : Dispositions objets de notre travail
Paragraphe 1 : Dispositions générales relatives au médicament et au monopole
A. La nouvelle définition du médicament du Sénégal
B. Le Monopole pharmaceutique
Paragraphe 2 : Lřordre des pharmaciens du Sénégal
A. Les conseils de section
B. Le Code de déontologie
Paragraphe 3 :Dispositions particulières aux divers modes d’exercice de la pharmacie
A. Des officines de pharmacie
B. Propriété et direction dřun établissement pharmaceutique
CHAPITRE II : LE DROIT COMMUNAUTAIRE
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
CHAPITRE I : ETAT DES LIEUX DU DROIT PHARMACEUTIQUE
Section I : Dispositions relatives au médicament et au monopole
Paragraphe 1. Dispositions relatives au médicament
A. Evolution de la définition du médicament en Europe
B. La nouvelle définition du médicament en droit Sénégalais
Paragraphe 2 : Dispositions relatives au monopole
A. Étendue du monopole pharmaceutique
B. Les dérogations au monopole
Section II : La Loi portant ordre des pharmaciens
Sous section 1 : Fonctionnement de l’Ordre des pharmaciens
Paragraphe 1 : Défense des intérêts de la profession
A. L’indépendance et la transparence de l’ordre
B. Contrôle de l’accès à la profession
Paragraphe 2 : Le respect de la compétence professionnelle
A. Sur la formation initiale (stages officinaux)
B. La formation continue
Sous section 2 : Le respect des devoirs professionnels
Paragraphe 1 : Le Code de déontologie pharmaceutique
A. Les spécificités du Code de déontologie
B. Respect des règles de déontologie
Paragraphe 2 : Le fonctionnement des chambres de discipline
A. Comparution en chambre de discipline
B. Les décisions des chambres de l’ordre
Section III : Dispositions particulières aux divers modes d’exercice de la pharmacie
Sous section 1 : Des officines de pharmacie
Paragraphe 1 : L’exercice personnel du pharmacien titulaire
B. La convention collective de la pharmacie d’officine au Sénégal
Paragraphe 2 : Les activités du pharmacien d’officine
A. La vente des produits de parapharmacie
B. La vente des médicaments par internet
Sous section II : Des établissements de fabrication et de distribution en gros de médicaments
Paragraphe 1 : Les limites dřordre public de l’article L596
A. L’insécurité juridique dans la vie des affaires
B. La finalité de la loi
Paragraphe 2 : Les limites tenant à lřintérêt de la société
A. L’intérêt de la société
B. La gouvernance de la société
Section IV : Lřapplication du droit communautaire.
CHAPITRE II : ESSAI DE CODIFICATION DU LIVRE V
Section I : Ordonnancement des textes régissant la pharmacie
Sous section 1 : Ordonnancement des textes législatifs et réglementaires de la veille des indépendances à nos jours
Paragraphe 1: Répertoire chronologique des textes législatifs
Paragraphe 2: Répertoire chronologique des textes réglementaires
A. Répertoire des décrets
B. Répertoire des arrêtés
Sous section 2 : Répertoire chronologique des textes communautaires
Paragraphe 1: Ordonnancement des Règlements et directives
Paragraphe 2: Ordonnancement des décisions
Section II : Codification des dispositions objets de notre étude
Sous section 1 : Dispositions générales
Paragraphe 1: Dispositions relatives au médicament .
A. La définition du médicament
B. Nouvelle définition du médicament
Paragraphe 2: Dispositions relatives au monopole
Paragraphe 3: Organisation de la profession de pharmacien
A. Sur la défense des intérêts de la profession
B. Le respect des devoirs professionnels
Sous section 2 : Dispositions particulières aux divers modes dřexercice de la pharmacie
Paragraphe 1 : Des officines de pharmacie
A. L’obligation d’exercice personnel de la pharmacie
B. L’activité des officines
Paragraphe 2 : Des établissements de fabrication et de distribution en gros
A. Les droits financiers pour la limitation statutaire de la puissance des actionnaires
B. Les options statutaires
Sous section 3 : Les textes communautaires
Paragraphe 1: Lignes directrices relatives aux produits cosmétiques
A. Déclaration de l’établissement
B. Composition des produits
C. Etiquetage
Paragraphe 2 : Lignes directrices relatives aux compléments alimentaires
A. Législation des compléments alimentaires
B. Réglementation des compléments alimentaires
CONCLUSION
REFERENCES BILIOGRAPHIQUES

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