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Racines
Sa racine est ligneuse et blanchâtre. Elle se présente sous la forme d’une racine principale pivotante avec des branches latérales plus fines. Cette racine primaire peut atteindre jusqu’à deux mètres de profondeur, tandis que les racines secondaires font 10 à 60cm de hauteur dans le sol. Son développement dépend de la texture du sol, du compactage et la teneur en humidité9.
Feuilles
Cannabis sativa se distingue par une hétérophyllie marquée, avec des feuilles basilaires et médianes très caractéristiques, stipulées, palmatiséquées avec 3 à 7 segments inégaux allongés à bords dentelés de couleur verte plus ou moins foncée. Ces feuilles particulières rendent son identification assez aisée. Les feuilles sont simples avec plus ou moins de segments mais jamais entières10.
Au niveau de la partie inférieure de la plante, les feuilles sont opposées et stipulées.
Puis, vers le sommet, elles deviennent alternes, simples ou à 3 segments uniquement 11.
Trichomes
Au microscope optique, deux types de poils peuvent être observés à la surface des épidermes des feuilles et des sommités fleuries : des poils tecteurs et des poils sécréteurs de résine. Ces poils, aussi appelés trichomes, sont issus de cellules épidermiques végétales.
• Les poils tecteurs, nombreux sur les deux faces foliaires, sont unicellulaires, à paroi lisse et extrémité recourbée et pointue. Certains possèdent un renflement à la base, dû à la présence de cristaux de carbonate de calcium appelés cystolithes. Les trichomes cystolithiques se trouvent sur la face supérieure des feuilles de cannabis. Les trichomes non cystolithiques se situent principalement sur la face inférieure des feuilles, des bractées et des bractéoles. Ces poils tecteurs ont un rôle de protection. La présence simultanée de trichomes cystolithiques en forme de « griffe d’ours » sur la face supérieure des feuilles, et de trichomes non cystolithiques fins sur la face inférieure, est très caractéristique du cannabis12.
• Les poils sécréteurs sont des entités glandulaires que l’on retrouve en grande quantité au niveau des sommités fleuries mais peu sur les feuilles. Ces trichomes glandulaires sont des poils à pied pluricellulaire plurisérié. Chacun de ces poils se termine par une tête globuleuse pluricellulaire où s’accumule la résine. C’est dans ces structures que la résine est produite et stockée. Elle est riche en THC (Δ9-tétrahydrocannabinol), une substance psychotrope principalement responsable de l’activité psychoactive du cannabis. Bien que la feuille soit l’emblème du cannabis, ce sont les sommités fleuries qui sont les plus riches en substances psychotropes, de par leur distribution en poils sécréteurs. La teneur du cannabis en résine est très variable et peut aller de moins de 1% jusqu’à 10% selon l’origine géographique et les pratiques culturales 13.
Appareil reproducteur
Le chanvre est une plante le plus souvent dioïque. Cependant, il existe aussi des variétés monoïques. Les plants mâles et les plants femelles se distinguent très facilement les uns des autres. Les pieds mâles sont moins feuillus, moins hauts et plus grêles que les pieds femelles. Les fleurs présentent également de nombreuses différences14.
Fleurs mâles
Elles sont discrètes, regroupées en panicules axillaires, apétales, et composées d’un calice dialysépale à 5 sépales verdâtres et d’un androcée dialystémone à 5 étamines épisépales vertes, dressées dans le bouton floral. Les étamines sont constituées de filaments et d’anthères où se concentrent les sacs polliniques. La pollinisation est anémophile. Après la libération du pollen, le pied mâle meurt15.
Fleurs femelles
Elles sont disposées en cymes compactes entremêlées de bractées. Ce sont des fleurs nues, apétales, composées uniquement d’un pistil. Une « bractée périgonale » en forme de bec, densément recouverte de glandes sécrétoires, enveloppe chaque fleur femelle et deux longs fins stigmates se projettent verticalement au-dessus de cette bractée. Les pieds femelles délivrent plus de résine que les pieds mâles car ils sont plus riches en trichomes glandulaires. Contrairement aux plants mâles, les plants femelles vivent jusqu’à mûrissement du fruit.
Elles comportent un ovaire bicarpellé avec avortement secondaire d’un carpelle, donnant un akène16.
Fruit
Le fruit est donc un akène ovoïde, lisse et grisâtre, mesurant 2,5 à 3,5mm de long sur 2,5 à 3mm de diamètre. Il est souvent considéré comme étant une graine, mais ce terme est impropre sur le plan botanique. Effectivement, l’akène contient une graine unique brunâtre et tachetée, occupant tout le volume, et recouverte d’une enveloppe dure, elle-même entourée du péricarpe du fruit. Le nom usuel de la graine est le chènevis. Il peut être utilisé comme appât par les pêcheurs et comme oléagineux à des fins alimentaires 17.
Variétés
L’analyse de la composition chimique de C. sativa a permis de définir une seule espèce incluant plusieurs variétés à chémotypes distincts, influençant leurs utilisations : chanvre à fibres ou chanvre à propriétés psychotropes. Dans la littérature scientifique, il est habituellement admis qu’il existe deux variétés ; Cannabis sativa var sativa et Cannabis sativa var indica, et parfois trois avec Cannabis sativa var ruderalis 18.
Ces variétés présentent des différences sur les plans morphologique et chimique.
Cannabis sativa var sativa et Cannabis sativa var indica19.
• Cannabis sativa var sativa : cette variété correspond au chanvre textile, industriel ou agricole, et est originaire des régions proches de l’équateur, comme la Colombie, la Jamaïque, le Nigéria ou la Thaïlande par exemple. Mais on le retrouve beaucoup dans des régions tempérées où il a été importé pour un usage industriel. Les plants sont grands (jusqu’à 6 mètres dans des conditions de culture optimales) et fins. Sa couleur va du vert grisâtre au brun verdâtre. Les feuilles sont longues, fines et de couleur claire. La floraison est lente (entre 10 et 16 semaines). Très riche en fibres, elle est beaucoup cultivée en Europe. Ses tiges et ses graines sont utilisées dans de nombreux domaines (cordage, papeterie, alimentation, etc.). A l’origine, les plants de cette variété sont pauvres en THC. Sa culture étant réglementée, les plants sont sélectionnés et produits de manière à ce qu’ils soient les plus pauvres possibles en THC et donc dénués d’activité psychotrope20.
• Cannabis sativa var indica : aussi connue sous le nom de chanvre indien ou chanvre à « drogue », provient de pays chauds tels que l’Asie du Sud, l’Afrique et l’Amérique latine. Cette variété a été exportée dans le monde entier et cultivée par l’humain. Ses pieds sont plus petits et plus trapus que ceux de la variété sativa. Ses feuilles sont courtes, larges et de couleur plus foncée. Elle est pauvre en fibres, mais sécrète, en plus ou moins grande quantité, une résine qui lui permet de résister à la dessiccation dans les zones chaudes. Cette résine est riche en THC, lui conférant une activité psychoactive21.
• Cannabis sativa var ruderalis : beaucoup moins répandue, proviendrait d’Asie Centrale. Cette variété est pauvre en THC, mais sa floraison est rapide. De ce fait, elle est parfois utilisée dans des croisements pour accélérer la floraison.
Il existe beaucoup d’autres variétés mais les trois que nous avons précédemment citées sont les plus connues. Étant difficilement différenciables sur le plan morphologique, la « race ou type chimique » (chémotype) permet de déterminer la composition chimique de ces différentes variétés. Les spécialistes décrivent une multitude d’écotypes ou chémotypes de l’unique espèce du chanvre, Cannabis sativa22.
Dans une classification selon les chémotypes, on distingue alors trois types chimiques de chanvre en se basant sur la teneur relative des deux cannabinoïdes les plus importants : le THC (psychoactif) et le CBD (CannaBiDiol) non psychoactif, mais bon marqueur d’identité.
• Le type « drogue » : à forte teneur en THC (>1%) et dépourvu de CBD. Ce type de chanvre pousse dans les zones climatiques chaudes (Mexique, Afrique du Sud, etc.) et produit beaucoup de résine.
• Le type « intermédiaire » : à teneur en THC et CBD importante (THC et CBD >0,5%). Ce type de composition est caractéristique du chanvre originaire du bassin méditerranéen (Maroc, Liban, etc.).
• Le type « fibre » : à très faible teneur en THC et teneur élevée en CBD (THC<0,25% et CBD>0,5%). Il est cultivé dans les zones tempérées telles que la France ou la Hongrie où il est utilisé pour l’industrie textile et papetière 23.
Habitat et culture
Milieux et variations
Les plantes de la famille des Cannabaceae apprécient les milieux humides. D’ailleurs, le terme « Cannabis » vient d’un mot grec signifiant « eau croupissante »24.
Cannabis. sativa est une plante cosmopolite. Elle affectionne les climats chauds, une forte exposition au soleil, un sol riche en substances organiques et minérales et à PH acide à légèrement alcalin (compris entre 6 et 8). Cependant, comme nous l’avons vu précédemment, sa morphologie ainsi que sa composition varient en fonction de sa localisation et du climat dans lequel elle évolue.
Ainsi, les plants de cannabis cultivés dans une zone climatique chaude auront tendance à être plus petits et plus denses car ils n’ont pas besoin de lutter pour capter le soleil. Leurs fibres sont plus courtes et plus fragiles et de ce fait, impropres à l’usage textile. En revanche, pour se protéger de la chaleur, ils produisent plus de résine.
À l’inverse, le chanvre croissant dans une zone tempérée sera plus élancé, haut, plus pauvre en résine et riche en fibres utilisées dans l’industrie25.
Une question se pose alors ; est-il possible que le genre Cannabis ne soit constitué que d’une seule espèce dénuée de sous-espèces et de variétés, mais possédant une multitude de formes qui dépendent uniquement du climat ? La possibilité qu’il n’existe véritablement qu’un seul chanvre se présentant sous différentes formes adaptatives a longtemps été admise.
Un plant de cannabis pourrait alors devenir « fibre » avec un climat froid et « drogue » en climat chaud. Pourtant, il semblerait que cette hypothèse soit exclue. En effet, la qualité « fibre » ou « drogue » serait génétiquement fixée bien qu’elle pourrait varier dans certaines limites en fonction de l’environnement. Le génotype de la plante serait donc déterminant. Par conséquent, un chanvre dont le génome code pour le type « drogue » pourra évoluer selon sa localisation et, par exemple, devenir moins riche en THC, mais il en contiendra toujours plus qu’un plant de type « fibre »26.
Culture du chanvre industriel et réglementation
Réglementation autour de la culture du chanvre
La France est le deuxième producteur mondial de chanvre industriel, derrière la Chine, avec une culture très encadrée, soumise à la législation européenne. De nos jours, il est interdit de cultiver du cannabis à fibre ou à drogue, que ce soit sur le plan individuel ou industriel.
La culture, l’importation, l’exportation et l’utilisation industrielle et commerciale de certaines variétés de Cannabis sativa à fibres peuvent être autorisées dans le cadre d’une dérogation fixée par un arrêté du 22 août 1990. Cet arrêté permet la culture du chanvre mais l’utilisation de ce dernier est exclusivement destinée à un usage industriel27. Pour ce faire, plusieurs conditions doivent être remplies :
– Seules les variétés listées par l’arrêté sont autorisées. Ces variétés correspondent, en réalité, à des cultivars. Depuis l’arrêté du 23 janvier 2020 Article 1, elles sont au nombres de 26 variétés : Carmagnola, C.S., Delta-Llosa, Delta-405, Dioïca 88, Earlina 8 FC, Epsilon 68, Fedora 17, Fedora 19, Fedrina 74, Felina 32, Felina 34, Ferimon, Fibranova, Fibrimon 56, Fibror 79, Finola, Futura, Futura 75, Futura 83 ,Orion 33, Santhica 23, Santhica 27, Santhica 70, Uso 31, et Muka 76.
– Il n’y a que les graines et les fibres qui peuvent être utilisées.
Technique « sinsemilla »
Une autre technique est beaucoup utilisée, la « sinsemilla » (qui signifie « sans graines » en espagnol). Elle consiste à isoler les pieds femelles des pieds mâles lors de la floraison dans le but d’éviter la pollinisation et donc de donner des fleurs femelles non fertilisées qui, par conséquent ne contiennent pas de graines. Ces dernières comportent alors des taux exceptionnels de THC. Pour ce faire, les pieds mâles sont coupés dès que l’identification est possible, permettant alors de préserver les plantes femelles du pollen35.
Clonage
Le clonage, aussi appelé « bouturage », est une pratique courante en botanique. Le principe est d’obtenir une copie génétique d’une plante mère, à partir de laquelle il est possible de faire d’autres boutures. Cette technique se déroule de la manière suivante : l’extrémité d’une branche de la plante mère en pleine croissance est coupée, permettant de récupérer la bouture, qui est ensuite placée dans un substrat d’enracinement afin de produire des racines à partir de sa tige. Un nouveau plant est alors obtenu, identique au plant mère. La pratique du clonage a fourni un élan à la production « sinsemilla ». Un mètre carré de plantes mères peut produire un grand nombre de clones par semaine36.
Hermaphrodites produits artificiellement
Des hermaphrodites produits artificiellement sont développés à la fois pour la culture de chanvre industriel et celle de chanvre à drogue. Théoriquement, une plante est génétiquement prédisposée à devenir mâle ou femelle. Cependant, certains facteurs environnementaux tel que le cycle de lumière diurne, peuvent modifier le genre. Ainsi, des plantes rendues artificiellement hermaphrodites sont produites, elles ne comportent pas de chromosome mâle mais possèdent des organes reproductifs fonctionnels (contrairement aux hermaphrodites naturels qui sont stériles la plupart du temps). Il est aussi possible de traiter les graines au thiosulfate d’argent ou avec des hormones. Les plantes qui pousseront à partir de ces graines ne possèderont que des pistils37. L’analyse botanique étant terminée, il est pertinent d’aborder l’histoire du cannabis ainsi que ses utilisations afin de comprendre son statut actuel.
Histoire et utilisations
Le chanvre est l’une des plus anciennes plantes domestiquées par l’Homme. Les traces archéologiques, les plus anciennes de son utilisation, ont été retrouvées en Chine, dans l’un de foyer de la révolution agricole néolithique. Il s’agissait de poteries décorées de fibres spiralées de chanvre, datant de 8000 av. J-C, qui ont été découvertes durant les fouilles du site de Xianrendong 38.
L’origine géographique du chanvre n’est pas certaine : certains pensent qu’il provient des plaines d’Asie centrale près du lac Baïkal, d’autres dans la région du fleuve Jaune en Chine, ou encore dans les contreforts indiens de l’Himalaya.
Il est prouvé que le chanvre fût domestiqué très tôt en Chine (il y a des millénaires), et bien plus tard en Europe où il s’est répandu 500 ans après J-C. En Asie du Nord et en Europe, Cannabis sativa était cultivé pratiquement exclusivement pour ses fibres et parfois pour ses graines comestibles. En Asie du Sud et en Afrique, la fibre et des graines oléagineuses étaient un peu exploitées, mais la plante était particulièrement utilisée à des fins thérapeutiques, récréatives, culturelles et spirituelles39.
Comme il est illustré ci-dessus, le cannabis est principalement utilisé pour sa fibre. Il est également utilisé dans différents secteurs. Par exemple, l’huile extraite de ses graines possède un fort pouvoir nutritif, ou encore dans le domaine médical pour ses propriétés pharmacologiques ou pour un usage récréatif en lien avec son action psychoactive.
Utilisation de la fibre
Le chanvre est l’une des plus anciennes sources de fibres, avec des restes de tissus de chanvre datant de 6000 ans av. J-C. Sa fibre fût massivement utilisée, durant des siècles, dans de nombreux domaines comme l’industrie textile, la marine ou encore la papeterie. En effet, la fabrication de vêtements, de cordages, de voiles, de papiers, à partir du chanvre, était très courante. S’il suscite tant d’engouement, c’est grâce à la qualité de sa fibre, sa robustesse, sa durabilité et sa résistance à l’eau. D’ailleurs, jusqu’au milieu du XIXe siècle, le chanvre rivalisait avec le lin en tant que principale fibre textile d’origine végétale. Il fût l’une des principales cultures de fibres dans les régions tempérées, du XVIe au XVIIIe siècle, et représentait une part importante de la culture européenne jusqu’au milieu du XIXe siècle.
Cependant, la culture de Cannabis sativa pour sa fibre, a pratiquement cessé après la Seconde guerre mondiale, dans les pays occidentaux, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, sa plantation, sa récolte et sa transformation exigeaient une main d’œuvre dotée d’une grande force. C’est pourquoi, les prisonniers et les esclaves se voyaient très souvent attribuer ces tâches. Lorsque l’esclavage et le travail forcé furent abolis, le travail du chanvre fût limité, ce qui a contribué à sa diminution. De plus, l’avènement de « l’ère industrielle » a largement accéléré sa quasi-disparition de l’agriculture des pays industrialisés. Effectivement, dans de nombreux domaines, le chanvre fût remplacé par de nouvelles découvertes, ce qui limita son utilisation, nous verrons cela plus en détail en fonction des secteurs d’application. Enfin, au début du XXe siècle, l’utilisation croissante de la plante de cannabis comme source de drogue donna une très mauvaise image au chanvre, ce qui entraina une législation interdisant sa culture40.
Industrie textile
Pendant des millénaires, la culture du chanvre était très respectée en Chine où sa fibre était devenue très importante pour la conception de vêtements, mais aussi pour faire des ficelles, des cordes, d’autres textiles pouvant servir d’emballage, entres autres, ou encore de linge de maison. Son usage s’est ensuite propagé un peu partout dans le monde. Aujourd’hui, la Chine est toujours le principal producteur mondial de chanvre. Le tissu d’habillement confectionné à partir de fibre de chanvre, était grossier mais durable.
Depuis le XIXe siècle, des tissus plus doux ont envahi le marché de l’habillement, notamment le coton qui est considéré comme plus attrayant pour les vêtements. Ainsi, avec l’invention de l’égreneuse de coton moderne par Eli Whitney en 1793, la production de coton a considérablement augmenté, contribuant à la disparition du chanvre. Plus tard, au cours du XXe siècle, les fibres synthétiques (nylon en 1936, acrylique en 1944, polyester dans les années 1950) sont devenues de plus en plus importantes et ont concurrencé toutes les fibres naturelles. Le polyester représente, désormais, plus de 50% du marché total des fibres textiles41.
Marine
Durant « l’ère des voiliers », du XVIe au XIXe siècle, le chanvre fût une ressource de base aussi bien à des fins civiles que militaires. L’industrie du transport maritime dépendait des produits à base de chanvre. Il était indispensable à la fabrication des voiles et des gréements (ensemble du matériel nécessaire à la manœuvre des navires à voiles, à l’amarrage et à la sécurité). Un seul navire pouvait nécessiter jusqu’à 60 tonnes de fibres de chanvre. Les câbles d’ancrage en chanvre pouvaient dépasser les 60cm de diamètre.
Puis, les navires motorisés à vapeur et à pétrole ont fait leur apparition, engendrant une considérable réduction des besoins en fibres de chanvre à des fins navales. De surcroît, les cordes en chanvre furent remplacées par des cordes en abaca (bananier originaire des Philippines) car elles étaient plus légères, pouvaient flotter et avaient une plus grande résistance à la corrosion par l’eau salée42.
Papeterie
Les chinois furent les premiers à transformer la fibre de chanvre en papier. Du papier fabriqué à partir de fibres de chanvre, datant de plus de 2000 ans, a été retrouvé en Chine. Le papier de chanvre est d’une très grande qualité ; il est doté d’une résistance élevée à la déchirure et à l’humidité. D’ailleurs, ces qualités lui ont valu d’être le support d’un certain nombre d’écrits prestigieux comme la Déclaration d’Indépendance des États-Unis, la Constitution de la République française ou encore la première Bible de Gutenberg. Jusqu’au début du XIXe siècle, le chanvre et le lin étaient les principaux matériaux de fabrication du papier.
Ensuite, un procédé de fabrication à partir de pâte de bois fût inventé et remplaça le papier de chanvre, trop onéreux. Aujourd’hui, près de 95% du papier est conçu à partir de pâte de bois. Le papier de chanvre est encore utilisé pour des applications spécialisées telles que le papier à monnaie et le papier à cigarette, qui nécessitent une grande résistance43.
Nouvelles applications
Néanmoins, depuis les années 1990, un regain d’intérêt pour la culture du chanvre est observé. En effet, la reconnaissance de nouveaux modèles économiques privilégiant des ressources renouvelables, en fait un très bon candidat, notamment grâce à sa culture écologique nécessitant peu d’eau. Bien que l’utilisation traditionnelle de sa fibre pour les vêtements, le cordage et le papier continue, elle reste restreinte car ces produits sont chers. Mais, de nouveaux usages lui sont trouvés et c’est ainsi que de nouveaux produits à base de fibres de chanvre voient le jour, par exemple, dans la construction (isolants, enduits, cloisons), le jardinage (litière, extrait fermenté), l’élevage (alimentation du bétail, litière) et la biomasse (bioénergie). Dans l’industrie automobile, la fibre de chanvre est utilisée pour renforcer les composites de type plastique. Effectivement, après le sisal (fibre extraite des feuilles d’Agave sisalana), le chanvre est la fibre naturelle la plus sollicitée pour cet usage.
Les automobiles représentent environ 15% du marché de la fibre de chanvre produite dans l’Union Européenne 44.
Utilisation des graines
Des graines de cannabis ont été retrouvées dans des tombes chinoises datant de plus de 4500 ans, prouvant qu’elles ont longtemps été utilisées comme nourriture aussi bien pour l’Homme que pour les animaux. Les preuves archéologiques de leur utilisation alimentaire en Europe durant l’Antiquité, sont limitées. Toutefois, l’existence de recettes européennes à base de graines de chanvre montre qu’elles étaient utilisées à des fins alimentaires, dans une moindre mesure. Ces graines étaient, généralement, considérées comme un aliment des classes sociales pauvres ou lors de famine.
Traditionnellement, elles servaient à nourrir les oiseaux et les volailles. De nombreux récits historiques décrivent l’usage des graines de chanvre à des fins médicinales, en tant qu’analgésique, antitussif, traitement contre les coliques, etc. Cependant, on ignore si elles étaient utilisées seules ou avec la bractée contenant des cannabinoïdes. Récemment, en Chine, elles se sont avérées efficaces pour traiter la constipation. Jusqu’en 1800 environ, l’huile extraite des graines de chanvre était l’une des huiles d’allumage les plus populaires. C’était même l’huile de lampe la plus utilisée en Europe et aux États-Unis. Mais, elle fût ultérieurement remplacée par le kérosène. Du XIXe au début du XXe siècle, la culture du chanvre comme oléagineux a atteint son apogée, en Russie, car en plus de ses utilisations comestibles, l’huile de chanvre a été exploitée pour fabriquer du savon, des peintures et des vernis45.
Au cours des dernières décennies, la production de graines de chanvre a augmenté grâce à la reconnaissance des bienfaits et des qualités nutritionnelles de son huile. En effet, la graine de chanvre possède une forte teneur en protéines (environ 30% de protéines) et une concentration en acides gras essentiels importante qui font d’elle un produit nutritif avec des effets bénéfiques sur la santé. Son ratio en oméga-3 et oméga-6 est parfaitement équilibré pour les besoins nutritionnels de l’être humain. De plus, elle est très riche en vitamines et en minéraux. Pour la consommation humaine, l’akène est décortiqué. Dans le commerce, elles sont mises en conserve ou sous vide. L’huile de chanvre est incorporée dans de nombreuses préparations alimentaires comme des barres nutritionnelles, des boissons, etc. Les sous-produits obtenus suite à l’extraction de l’huile entrent dans la fabrication de farines, de pâtes alimentaires, etc.46
Depuis les années 1990, l’huile de chanvre suscite un grand intérêt dans le domaine cosmétique, de par ses propriétés émollientes. Différents produits sont commercialisés tels que des savons, des shampoings, des lotions, ou des soins pour le corps. L’investissement dans une gamme de produits à base de chanvre par les fondateurs de The Body Shop, une célèbre chaîne internationale, a donné à l’industrie émergente du chanvre une crédibilité considérable47.
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Table des matières
Remerciements
Table des matières
Table des tableaux
Table des figures
Liste des annexes
Liste des abréviations
Glossaire
Introduction
PARTIE 1 : Le chanvre Cannabis sativa L.
1. Étude botanique
1.1. Place dans la systématique végétale
1.2. Caractéristiques botaniques
1.2.1. Appareil végétatif
1.2.1.1. Habitus
1.2.1.2. Tige
1.2.1.3. Racines
1.2.1.4. Feuilles
1.2.1.5. Trichomes
1.2.2. Appareil reproducteur
1.2.2.1. Fleurs mâles
1.2.2.2. Fleurs femelles
1.2.2.3. Fruit
1.2.3. Variétés
1.3. Habitat et culture
1.3.1. Milieux et variations
1.3.2. Culture du chanvre industriel et réglementation
1.3.2.1. Réglementation autour de la culture du chanvre
1.3.2.2. Conditions de culture
1.3.3. Culture du chanvre à drogue
1.3.3.1. Croisements
1.3.3.2. Technique « sinsemilla »
1.3.3.3. Clonage
1.3.3.4. Hermaphrodites produits artificiellement
2. Histoire et utilisations
2.1. Utilisation de la fibre
2.1.1. Industrie textile
2.1.2. Marine
2.1.3. Papeterie
2.1.4. Nouvelles applications
2.2. Utilisation des graines
2.3. Usage récréatif
2.3.1. Histoire du cannabis en tant que drogue
2.3.2. Différentes formes et modes d’utilisation du cannabis
2.3.3. Effets du cannabis sur l’Homme
2.3.3.1. Effets à court terme
2.3.3.2. Effets à long terme
2.4. Usage thérapeutique
3. Composition chimique
3.1. Cannabinoïdes
3.1.1. Principaux phytocannabinoïdes
3.1.2. Δ9-tétrahydrocannabinol (THC)
3.1.3. Récepteurs aux cannabinoïdes
3.1.3.1. Récepteur CB1
3.1.3.2. Récepteur CB2
3.1.4. Endocannabinoïdes
3.2. Autres composants
PARTIE 2 :Dispositif législatif applicable au cannabis thérapeutique en France et aux États-Unis
1. Législation française concernant le cannabis
1.1. Historique de la réglementation : un régime d’interdiction
1.1.1. Historique de la réglementation française
1.1.2. État de la législation française
1.1.2.1. Usage du cannabis
1.1.2.2. Détention du cannabis
1.1.2.3. Culture du cannabis
1.1.2.4. Trafic du cannabis
1.1.2.5. Provocation à l’usage ou au trafic
1.1.3. Différents statuts juridiques du cannabis
1.1.3.1. Prohibition
1.1.3.2. Légalisation
1.1.3.3. Libéralisation
1.1.3.4. Dépénalisation
1.1.3.5. Contraventionnalisation et décriminalisation
1.1.4. Cas du cannabis à usage thérapeutique
1.1.5. Le cannabis au cœur de nombreux débats
1.1.5.1. Arguments contre la légalisation du cannabis
1.1.5.2. Arguments en faveur de la légalisation du cannabis
1.1.5.3. Cas du cannabis à usage médical
1.2. Autorisation de l’usage thérapeutique : l’expérimentation du cannabis médical
1.2.1. Mise en œuvre de l’expérimentation
1.2.2. Cadre de l’expérimentation
1.2.2.1. Inclusion des patients
1.2.2.2. Médicaments mis à disposition
1.2.2.3. Conditions de prescription et de délivrance
1.2.2.4. Fournisseurs en charge de la fabrication et de la distribution des médicaments
1.2.3. Conditions de sécurisation
1.2.3.1. Qualité et sécurité des produits
1.2.3.2. Sécurisation du circuit de la mise à disposition des médicaments
1.2.3.3. Formation des professionnels de santé
1.2.3.4. Suivi des patients
1.2.4. Avenir du cannabis médical
2. Cadre législatif du cannabis aux États-Unis
2.1. De la diabolisation à la légalisation
2.1.1. Prohibition américaine
2.1.2. Vers une légalisation progressive du cannabis
2.2. Des statuts juridiques du cannabis différents selon les États
2.2.1. Une législation à deux niveaux
2.2.1.1. Système législatif américain
2.2.1.2. Loi fédérale américaine en matière de cannabis
2.2.1.3. Lois étatiques concernant le cannabis
2.2.2. Régulation de l’accès au cannabis
2.2.2.1. Contexte de la mise en place d’une régulation
2.2.2.2. Des modèles de régulation à la fois convergents et divergents.
2.2.2.3. Des règles d’accès au produit strictes
2.2.2.4. Des conditions de production et de distribution disparates
2.2.2.5. Taxation et utilisation des recettes engendrées
2.3. La place du cannabis à usage thérapeutique aux États-Unis
2.3.1. Conditions d’accès au cannabis médical
2.3.1.1. Accès réglementé
2.3.1.2. Voies d’approvisionnement du cannabis à usage médical
2.3.1.3. Autres réglementations autour du cannabis médical
2.3.1.4. L’exemple californien
2.3.2. Spécialités médicamenteuses disponibles
2.3.3. Recherches scientifiques liées au cannabis
2.4. Bilan des conséquences de la légalisation du cannabis
Conclusion
Bibliographie et sitographie
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