Théorie de l’action organisée
La construction et la mise en place de projets de transport au sein de l’entreprise, prennent place dans le cadre plus général du fonctionnement interne des organisations. Il est important de prendre conscience que la gestion du transport du personnel ne constitue pas le cœur de métier des différentes entreprises étudiées. La mise en place d’un dispositif dédié à cette finalité s’inscrit donc immanquablement dans un contexte pré-existant ayant ses logiques et son histoire, et avec lequel il faudra composer. Nous nous appuierons sur l’approche organisationnelle présentée dans l’ouvrage d’Erhard Friedberg pour approcher et comprendre le terrain d’enquête et les jeux d’acteurs entre les différentes parties prenantes (Friedberg, 1993). Le but de cette approche est de permettre et de faciliter le changement, via la production d’une connaissance fine du contexte du terrain étudié.
Cette connaissance doit être partagée pour être efficace, cela est cohérent avec l’esprit de cette étude sur le covoiturage en entreprise. En effet, son élément déclencheur a été l’intérêt des commanditaires à co-construire un dispositif avec les différents acteurs concernés.
Les logiques à l’œuvre lors de la création d’un dispositif
Pour qu’un dispositif soit efficace, il faut qu’il soit adapté aux attentes et aux dispositions des utilisateurs, mais il faut également que ce dispositif puisse être créé et conçu de façon satisfaisante.
L’apport de Friedberg nous sera utile dans toute cette partie en amont de la conception, pour bien appréhender les logiques à l’œuvre dans le milieu où doit être créé le dispositif. Divers phénomènes peuvent avoir une influence sur l’action des personnes : par exemple, les facteurs affectifs et psychologiques influent sur les comportements, tout comme le hasard, la norme, la tradition, l’intuition, l’échange, la poursuite de stratégies, mais également l’action gratuite. Chaque facteur apportant sa propre rationalité à l’action des individus, comprendre le sens de ces comportements est donc complexe et incertain. Ces rationalités spécifiques peuvent parasiter l’objectif initialement suivi si elle ne sont pas prises en compte et anticipées. La nécessité de coopération entre diverses parties met également en avant la question de l’accès à l’information, qui est généralement inégalement répartie. Cela amène au phénomène de la rationalité limitée de Michel Crozier (Crozier cité par Friedberg, 1993, p. 47) , qui peut expliquer des comportements et des décisions apparaissant à fortiori comme inadaptés. Friedberg pointe donc l’importance de la diffusion de l’information dévoilée par le sociologue à l’ensemble des acteurs associés au projet. Il est également important de réussir à partager l’intérêt de l’objectif suivi. Si certains acteurs estiment que leurs intérêts sont menacés par cet objectif ils s’opposeront, alors qu’au contraire il est possible qu’ils l’appuient s’ils estiment que cela leur sera profitable.
Co-construire et adapter la solution à la réalité locale
La co-construction est cruciale pour éviter un phénomène fréquent dans les organisations, « la tentation du discours » (Crozier cité par Friedberg, 1993, p. 283). Cet échec au changement est issu d’une double dynamique : en premier lieu le fait d’affirmer des principes fondateurs et des valeurs essentielles ne provoque pas automatiquement une modification des comportements. En second lieu, le discours venant de la hiérarchie peut également provoquer le rejet, en étant perçu comme une tentative d’endoctrinement, même s’il y a consensus sur le fond. Au niveau de la définition des problèmes, les organisations étant des univers complexes et politiques, il est primordial d’adopter une approche globale. Il est également important de ne pas segmenter « à priori » les problèmes, ni de chercher à apporter des réponses uniquement techniques dans le cadre restreint ainsi prédéfini. Il s’agit pourtant d’une pratique assez courante, qui empêche de comprendre le fond du problème en ne s’intéressant qu’à ses conséquences visibles. Par extension, les « solution miracles » livrables « clé en main » et transposables d’une structure à une autre sont également à éviter. Chaque problème étant spécifique et issu d’un contexte particulier, il doit recevoir une réponse adaptée à cette réalité locale.
Contraintes et leviers pour la diffusion du covoiturage
L’innovation sociale
La définition de l’innovation peut porter à débat. Norbert Alter la définit ainsi : « L’innovation représente l’ensemble du processus social et économique amenant l’invention (un objet ou une pratique nouvelle) à être finalement utilisée ou pas » (Alter, 2002, p. 16). De ce point de vue, un objet ou un dispositif ne sont pas en eux-même des innovations, l’innovation se situant au niveau de leur processus d’intégration dans la société. Dans le cas du covoiturage, l’innovation consiste donc à remettre à l’honneur un mode de déplacement ancien mais qui a été délaissé. Ceci afin d’apporter une amélioration à la situation actuelle où l’autosolisme massif crée de nombreuses nuisances. Le parallèle peut être fait ici avec le retour du tramway dans différentes villes qui est souvent présenté comme une preuve de modernité.
La volonté de mettre en place de nouvelles logiques de déplacement pour le personnel représente une innovation puisqu’il faut réussir à diffuser au sein de la société de nouvelles pratiques de déplacement au quotidien. Cette nouveauté relève autant de la gestion des contraintes que de la motivation à changer. Ce changement suppose un environnement favorable, mais il doit également être pertinent et savoir saisir les opportunités le facilitant. Toutes les personnes concernées doivent être informées sur les objectifs et les modalités pratiques pour pouvoir participer efficacement, et il faut faire des personnes favorables des alliés. L’innovation est en effet un rapport de force où se rencontrent des acteurs aux intérêts divergents. Innover comporte des risques pour chacun d’entre eux, avec la possibilité de gagner ou de perdre quelque chose lors de cette évolution.
La réception de l’innovation par les acteurs concernés est donc essentielle. Associer les parties prenantes leur permet également d’éviter les mauvaises surprises, comme par exemple obtenir par un autre canal une information qui les concerne directement. Par ailleurs, cela permet d’éviter les fausses rumeurs ou une information incomplète ou déformée. Comme nous l’avons vu précédemment, la mise en place d’un nouveau système nécessite un jeu de traductions. La présence d’un certain nombre d’intermédiaire engendre des perceptions différentes au sein des divers groupes en présence. Ceci provoque une déformation des messages, notamment ceux qui expliquent la nature, l’objectif et les modalités de mise en œuvre de l’innovation. Ceci crée une difficulté à trouver un référentiel commun permettant une cohésion de toutes les parties prenantes. (Zelem, 2010)
Habitudes et changement de cadre
La force des habitudes
Albert Einstein disait qu’il était plus facile de briser un atome qu’un préjugé. Il aurait pu ajouter pour généraliser « ou qu’une habitude », puisqu’un préjugé est une habitude mentale sur un sujet. Une habitude est un phénomène très puissant, dans un contexte fixe. Elle est particulièrement utile aux individus puisqu’elle leur permet de vivre dans un monde stable. Une habitude est un phénomène arrêté, non remis en question et reproduit à l’identique. La stabilité des habitudes est donc un ancrage pour les personnes, au sein d’un monde incertain en éternelle évolution. Elle permet de réaliser une économie cognitive, un confort, en n’ayant pas à constamment devoir élaborer de nouvelles réflexions (Zelem, 2008). Tenter de modifier des habitudes ne signifie donc pas uniquement modifier une certaine pratique, mais également ouvrir une sphère d’incertitude sur un sujet jusque-là clos et inséré dans un ensemble ayant sa cohérence propre, ce qui crée une inertie gênant le changement. Les habitudes et les routines ne sont pas uniquement d’origine individuelle, il peut y avoir également un effet de groupe. Elles se développent par exemple au sein du groupe de travail, constituent une « mémoire organisationnelle », prescrivant de façon plus ou moins inconscientes, des choix, gestes et attitudes adaptés au contexte (Reynaud, 1998). Il y a dans cette situation un double blocage, la stabilité et l’économie cognitive, ainsi que le risque d’opposition au groupe. Le temps renforce les habitudes, qui s’enracinent et deviennent routines, à partir des expériences passées et des contextes vécus.
Certains dispositifs ont toutefois pour objectif d’apporter un bénéfice à l’individu en agissant au niveau du phénomène de l’habitude, notamment en réduisant le coût de la recherche de solution (Cochoy, 2004, p.23). Cette piste peut être intéressante à suivre, puisque dans cette logique d’économie cognitive, il faudrait alors proposer une solution « clé en main », standardisée, qui deviendrait une nouvelle habitude remplaçant la précédante. De plus, il est important de prendre conscience que le système visé par le changement possède sa propre logique, et une certaine inertie provoquant de la résistance au changement, comme nous venons de le voir. Un système entretient donc un certain fonctionnement via les interactions et les comportements de ses membr es, qui ont leur propre logique au sein de la structure. En ce sens,la résistance au changement n’est pas moins rationnelle que la volonté de changement. (Friedberg, 1993, p. 321)
Changer de cadre pour modifier les habitudes
L’habitude n’est toutefois pas éternelle, elle est sensible au changement de cadre. Une évolution du contexte provoque immanquablement une adaptation et donc un changement des habitudes. Ceci peut s’illustrer par l’étude sur les altermobilités de Stéphanie Vincent, où un certain nombre de cas de changements d’habitudes modales s’insèrent dans des périodes de transition biographique, ou des contextes de remise en cause personnelle (Vincent, 2008, p. 225). Au delà de situations exceptionnelles aux conséquences imprévisibles, des changements courants comme un déménagement ou la diminution des contraintes familiales lorsque les enfants grandissent, modifient le système de contrainte lié au choix du mode de déplacement lors d’une période de transition. Ce contexte est effectivement une source d’instabilité qui peut avoir des conséquences imprévisibles (Grossetti, 2006), et pouvant éventuellement modifier le mode de déplacement. Le hasard joue donc un rôle dans le changement, mais pour être intégrable dans une stratégie, il doit pouvoir être prévu et anticipé. Des événements exceptionnels prévisibles existent, comme par exemple, l’immobilisation temporaire d’un parking, des travaux sur les grands axes, des grèves, une immobilisation de la voiture. Chacun de ces évènements peut être utilisé pour favoriser le covoiturage, si une alternative valable est proposée lorsque cette situation survient brusquement.
Encadrer le changement de cadre pour réduire l’incertitude
L’instabilité du contexte peut donc éventuellement favoriser le changement. Néanmoins l’incertitude peut représenter aussi un frein puissant. Chaque doute relatif au trajet, comme par exemple le manque d’expérience dans la pratique, le fait que le trajet ne soit pas défini (et donc la crainte de se voir imposer un détour), la non connaissance du covoitureur, créent autant de craintes de désagréments et donc de barrières mentales à la pratique. Les promoteurs du covoiturage doivent donc avoir comme objectif de proposer une alternative rassurante, et de fournir un maximum d’informations aux éventuels usagers. Ceci afin de faire disparaître le plus possible de zones d’ombres, qui peuvent apparaître comme autant de sources potentielles d’expériences négatives.
Confiance et sécurité
Un frein potentiel au covoiturage peut être la crainte du risque encouru à se déplacer avec des inconnus. Ce risque éventuel est de diverse nature : conduite dangereuse, manque de fiabilité de l’autre personne, individu désagréable ou dont le caractère nous déplait, éventuellement agression, enlèvement ou événement violent. Le fait d’avoir une appréhension à se retrouver dans un es pace clos et petit avec des inconnus n’est pas un phénomène récent, comme tend à le montrer l’étude réalisée en 1983 auprès du public en vue de proposer un nouveau mode de transport lors du projet ARAMIS. (Latour, 1992, p. 65)
L’importance de la confiance catégorielle
Johann Chaulet commence sa thèse sur les relations de confiance sur internet en définissant la confiance comme étant « un état d’attentes favorables par rapport aux actions et intentions d’autres personnes » (Chaulet, 2007, p. 17). Cette définition peut être mise en relief par celle de la confiance catégorielle de Louis Queré : « confiance sur la base de l’appartenance à un groupe, un collectif, une catégorie, étant entendu que la fiabilité et la loyauté figurent dans les propriétés attribuées à ce groupe » (Queré, 2001, p.134). Ce frein du risque pourrait donc être retourné en valeur positive grâce à la confiance catégorielle et à l’éventuelle identification des salariés vis-à-vis de leur entreprise, leur secteur d’activité, leur zone géographique d’habitation ayant une certaine identité, ou au moins leur groupe socioprofessionnel. La difficulté est de saisir les différents groupes et tribus qui existent, ou d’en créer des nouveaux, suffisamment larges pour qu’un maximum d’individus puissent s’y reconnaître.
Prévenir la mauvaise publicité
Mais la confiance accordée peut vite s’estomper en cas de mauvaise expérience, elle peut donc être variable dans le temps. La qualité du dispositif proposé est donc essentielle pour gagner et conserver la confiance des utilisateurs. Albert Hirschman (Hirschman, 2011) met en garde contre la possibilité des individus de « sortir », de faire défection lorsqu’on se trouve dans un marché ouvert.
Le covoiturage étant en concurrence avec d’autres modes de déplacement, il s’agit bien ici d’un marché ouvert. À tout moment, un individu peut également donner de la voix, protester contre une qualité insuffisante, à la présence d’un éventuelrisque, d’autant plus s’il est attaché au covoiturage et qu’il souhaite rester dans cette dynamique de transport. Cette mauvaise publicité, qui peut être relatée et relayée dans l’entourage professionnel, a la faculté de provoquer une limitation de la participation. Les mauvaises expériences peuvent ainsi avoir une audience large. Il est donc important de tenter au maximum d’en prévenir l’occurrence en s’équipant de « garde-fous », dispositifs de prévention et d’amélioration en douceur au sein du dispositif général.
Méthodologie
Dimensions d’analyse
À partir de l’analyse de la genèse et de la constitution des dispositifs de covoiturage domicile-travail au sein des différentes structures constituant le terrain d’enquête, nous avons exploré les dynamiques à l’œuvre au sein du système-réseau du covoiturage entre salariés. Nous chercherons à identifier les freins et les leviers relatifs aux différents dispositifs existants au sein des structures ciblées.
Différentes dimensions d’analyse existent pour aborder cette étude :
• Les usages et les pratiques en matière de déplacement. L’évolution personnelle au sein des structures et des dispositifs existants, les habitudes et les routines, construisent la socialisation modale de l’individu qui a un pouvoir structurant.
• Une approche s’intéressant à la situation du salarié. La composition du ménage et les systèmes d’activité précédant et suivant le travail (dépose d’enfants, courses, sport, loisirs, etc) peuvent avoir une influence importante sur les déplacements en contraignant les choix.
• La prise en compte de la relation employeur-salariés afin de questionner la légitimité de l’entreprise à organiser le covoiturage. La caractéristique « organisé par l’entreprise » pour un covoiturage particulier est ici centrale. La perception d’un pouvoir de contrôle peut effrayer des utilisateurs potentiels. Au contraire, des attentes du personnel vis-à-vis de l’employeur, découlent ce rôle central joué par l’entreprise.
• La question de l’autonomie des salariés, qui en covoiturant perdraient de leur liberté de déplacement. Ils pourraient alors subir des cadres contraignants qui les pénaliseraient et les stresseraient, en les obligeant à s’organiser et à s’adapter aux autres. Notamment en leur faisant perdre du temps à attendre, ou en faisant baisser leur productivité en leur faisant quitter le travail de façon contrainte. Cela peut produire une tension entre d’un côté la volonté de liberté et d’autonomie dans ses déplacements, liée à celle de confort, et de l’autre côté l’objectif de limiter ses dépenses de transport.
• Une analyse des différents systèmes de contraintes existants, comme par exemple le problème des assurances, des covoitureurs qui conduisent mal, de la sécurité, de la nonvolonté de créer des relations avec des collègues de travail et de devoir les fréquenter en espace clos matin et soir, le malaise pouvant se créer de covoiturer avec un responsable ou un subordonné, de baisser en gamme de véhicule en devant voyager dans des voitures anciennes ou mal entretenues, la crainte inverse de subir des critiques relatives à sa propre voiture.
Terrain d’enquête
Analyse de la genèse et de la construction des projets de covoiturage et de mobilité alternative
Dans un premier temps, nous avons réalisé une évaluation à dire d’expert en interrogeant les responsables des PDE des entreprises participant à l’étude. L’objectif a été de collecter leurs explications, leurs propositions, leurs expériences, relatives au covoiturage domicile-travail et aux autres mobilités alternatives dans leurs organisations. Le covoiturage provoque généralement l’incompréhension au sein des structures, à cause de la faible participation des salariés et de la difficulté du suivi de cette pratique, les dispositifs dédiées sont donc parfois absents ou inutilisés. Il était donc nécessaire d’envisager le phénomène de façon plus globale au sein de la dynamique des mobilités alternatives dans laquelle s’inscrit le covoiturage. Ensuite, nous avons étendu cette approche aux acteurs ayant pu jouer un rôle dans la constitution de ces projets de déplacement, en particulier au niveau de la concertation et des négociations éventuelles avec divers partenaires.
L’objectif de cette première étape qui a constitué la première phase d’entretiens, a été de comprendre ce qui se joue derrière la mise en place des PDE, comme les relations entre acteurs, les tensions, les négociations, les éventuelles luttes de territoires. Les projets de transport peuvent en effet être pénalisés par les dynamiques de fonctionnement pré-existantes au sein des organisations mais qui peuvent n’avoir aucun lien avec le thématique du transport, c’est le cas notamment des luttes de territoire.
Création d’un tableau de bord
Ce tableau récapitule les dispositifs existants sur les différents sites, et leurs conditions de mise en place. Il a été réalisé grâce aux entretiens de la première phase centrés sur les dispositifs et leur histoire. Une analyse documentaire était prévue, mais ce type de document s’est révélé extrêmement rare. La quasi totalité du savoir relatif aux différents dispositifs existants et ayant existé n’est disponible que sous forme orale. Des personnes ressources ont donc été particulièrement précieuses pour collecter ces informations. Leur participation à l’étude leur a permis de bénéficier en retour du tableau récapitulatif que nous avons compilé et qui est présent en annexe IX.
Enquête auprès des salariés
Les conditions de l’enquête nous ont amené à concentrer les entretiens usagers sur l’entreprise Thales du fait des bonnes conditions d’accès à une population salariée diverse. L’accès aux salariés n’a pas été possible ailleurs, à l’exception de la Carsat. Les nombreuses initiatives existant sur le site de Thales nous ont permis de tester diverses possibilités et expériences de mobilité chez les salariés, mais également d’enrichir le propos des autosolistes en faisant apparaître les limites des différents dispositifs présents. Des salariés de la Carsat ont été interrogés en complément pour accroître encore davantage la diversité de l’échantillon interrogé et pour confronter les situations entre deux entreprises éloignées sur la question des mobilités alternatives, la Carsat n’étant qu’au début du processus. Les salariés interrogés ont été choisis selon différents critères et en suivant un guide d’entretien, dont les caractéristiques sont détaillées plus bas. Nous avons interrogé le rapport au covoiturage domicile-travail des différents profils de salariés.
L’objectif était de connaître leurs attentes et leurs conditions d’engagement ou de non-engagement au sein des dispositifs existants, les éventuels freins et leviers à la participation à ces différents dispositifs, ainsi que de tester des propositions. Ceci a également permis de recenser leurs propositions et leurs analyses qui pourraient potentiellement favoriser la diffusion du covoiturage domicile-travail. Tout ceci permettant d’appréhender des possibilités d’extension des initiatives existantes dans d’autres entreprises.
Collecte des données
La constitution d’un dispositif de covoiturage suit une double dynamique
L’objectif initial de cette étude était de se concentrer sur les usagers, dans une logique de coélaboration d’un dispositif qui serait alors théoriquement plus adapté à leurs attentes et à leurs dispositions, pour être plus efficace et plus utilisé. Mais en approfondissant le sujet, il est apparu que foncer sur les usagers aurait été de la précipitation. Un dispositif s’inscrit dans un contexte, qui est dans le cas présent le cadre d’une organisation. Les usages et les perceptions des individus en découlent, en étant toujours relatifs à ces dispositifs. Il est donc nécessaire de comprendre les dispositif pour pouvoir comprendre les usages. Une double dynamique est donc à l’œuvre, et nous tenterons de mieux la comprendre grâce à une démarche qualitative.
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Table des matières
Première partie : méthodologie et cadre théorique
1 Contexte de l’étude
1.1 Commande de l’association Toulouse Ouest Partenaires
1.2 Présentation des entreprises visitées : personnel, PDE et covoiturage
1.2.1 Thales Alenia Space
1.2.2 ERDF Midi-Pyrénées Sud
1.2.3 Carsat Midi-Pyrénées
1.3 Un environnement particulier : histoire des transports à Toulouse et dépendance au sentier
1.3.1 Des transports en commun privés au règne de l’automobile
1.3.2 Un service de transports publics éternellement en retard
1.3.3 Un réseau hyper-centré et des projets mono-modaux
2 Objet de l’étude : le covoiturage en entreprise
2.1 Définition et histoire du covoiturage
2.1.1 Une diversité de dispositifs liée à une diversité de pratiques
2.1.2 Histoire et développement du covoiturage
2.1.3 Hégémonie du covoiturage ponctuel et effet d’occultation
2.2 Le covoiturage en entreprise
2.3 Les Plans de Déplacement Entreprise (PDE)
2.3.1 L’évolution des PDE, de l’engagement des salariés à l’amélioration des infrastructures
2.3.2 La prise de décision dans l’entreprise
2.4 Le poids des individus pilotes dans la mise en place des PDE
2.5 Quelle place pour l’employeur dans le covoiturage du personnel ?
2.5.1 L’éventuelle crainte d’un contrôle de la part de l’entrperise
2.5.2 Responsabilité Sociale des Entreprises
2.5.3 Retour du paternalisme industriel
2.6 Politique de déplacement : une multitude d’acteurs imbriqués
2.6.1 Les individus
2.6.2 Les entreprises
2.6.3 Les collectivités locales
2.6.4 L’État
2.6.5 Le contexte global
2.7 La voiture, espace personnel mobile conçu pour voyager à plusieurs
2.7.1 Un espace de liberté, qu’il peut être difficile de partager
2.7.2 Le véhicule renvoie une certaine image de son propriétaire
2.7.3 La voiture, conçue pour déplacer le foyer
3 Problématique et cadre théorique
3.1 Reformulation de la demande
3.2 Modèles théoriques pour comprendre et analyser le covoiturage géré par l’entreprise
3.2.1 Théorie de l’acteur réseau
3.2.1.1La traduction
3.2.1.2La captation des publics
3.2.1.3Le cas ARAMIS : exemple des contraintes pesant sur la construction d’un projet de transport
3.2.1.3.1 Les contraintes nombreuses de l’innovation
3.2.1.3.2 La difficulté de tout devoir inventer
3.2.2 Les néo-tribus de salariés
3.2.2.1Le rôle de la face publique au sein de l’entreprise
3.2.2.2Des groupes de salariés avec une socialisation pouvant être forte
3.2.2.3Des potentiels freins communautaires
3.2.2.4Quelle profondeur pour la relation liant les salariés ?
3.2.2.5Le poids des leaders au sein des tribus
3.2.3 Théorie de l’action organisée
3.2.3.1Les logiques à l’œuvre lors de la création d’un dispositif
3.2.3.2Co-construire et adapter la solution à la réalité locale
3.3 Contraintes et leviers pour la diffusion du covoiturage
3.3.1 L’innovation sociale
3.3.2 Habitudes et changement de cadre
3.3.2.1la force des habitudes
3.3.2.2Changer de cadre pour modifier les habitudes
3.3.2.3Encadrer le changement de cadre pour réduire l’incertitude
3.3.3 Confiance et sécurité
3.3.3.1L’importance de la confiance catégorielle
3.3.3.2Prévenir la mauvaise publicité
3.3.3.3Sécuriser le trajet
3.3.4 Les économies d’énergie, d’argent, et le confort
3.3.4.1L’essence ne coûte-t-elle pas assez cher ?
3.3.4.2La double limite de l’incitation au covoiturage par les économies d’argent
3.3.4.3Économies d’argent et écologie, deux arguments fréquents à l’impact faible
3.3.4.4Le poids de la recherche de confort
3.3.5 La gestion du temps, fatigue, stress, horaires et temporalités
3.3.5.1Valoriser le temps perdu
3.3.5.2Diminution du stress et de la fatigue
3.3.5.3La nécessité d’accorder constamment les plannings
3.3.5.4Avoir un enfant à charge rend très compliqué la pratique du covoiturage
3.3.6 La socialisation modale
3.3.6.1Des rites de passage vers l’autonomie de déplacement
3.3.6.2Maximiser le bagage d’expériences pour se passer de la voiture
3.3.7 Le système choix du mode de transport
4.Méthodologie
4.1 Dimensions d’analyse
4.2 Terrain d’enquête
4.2.1 Analyse de la genèse et de la construction des projets de covoiturage et de mobilité alternative
4.2.2 Création d’un tableau de bord
4.2.3 Enquête auprès des salariés
4.3 Collecte des données
4.3.1 La constitution d’un dispositif de covoiturage suit une double dynamique
4.3.1.1Préserver le covoiturage des jeux d’acteurs et de l’arène
4.3.1.2Associer l’usager potentiel
4.3.2 Présence sur le terrain
4.3.3 Sélection des salariés interrogés
4.3.4 Présentation des guides d’entretiens
Deuxième partie : des dispositifs à l’épreuve de la réalité
5 Présentation des dispositifs de covoiturage existants dans les entreprises visitées
5.1 Tableau de bord récapitulatif des dispositifs des différentes entreprises
5.2 Thales Alenia Space
5.3 ERDF
5.4 Carsat
5.5 Tisséo
6 Genèse et construction des dispositifs
6.1 Le dispositif de covoiturage de Tisséo
6.1.1 Histoire du dispositif
6.1.2 Un dispositif pénalisé par un manque de coopération institutionnelle
6.1.3 Un dispositif contraignant
6.1.4 Un dispositif orienté vers une certaine forme de covoiturage
6.1.5 Profil des utilisateurs
6.2 La commission transport de Thales, d’un mouvement social contre un péage autoroutier à la promotion des mobilités alternatives
6.2.1 La mobilisation contre le péage, genèse de la dynamique
6.2.2 Réorientation vers les mobilités alternatives et structuration
6.2.3 Jeux d’influence
6.3 La navette Portet-Thales-Basso Cambo : le sujet de clivage interne
6.4 Rapport des salariés aux dispositifs et limites de ceux-ci
6.4.1 Problèmes de communication
6.4.2 Difficultés de coopération
6.5 La construction difficile des dispositifs de transports
6.5.1 Des interactions peu constructives et peu satisfaisantes
6.5.2 La contrainte de l’obligation de perfection immédiate
Troisième partie : pistes pour développer le covoiturage
7 Diminuer les incertitudes, pour développer la pratique du covoiturage domicile-travail
7.1 Anticiper les événements contraignants, pour proposer un repli modal satisfaisant sur le covoiturage
7.2 Le covoiturage de dépannage, porte d’entrée dans la pratique et possibilité d’amplification de la dynamique
7.2.1 Une porte d’entrée dans la pratique qui concerne un public large
7.2.2 Des salariés temporaires pouvant être demandeurs
7.2.3 Le covoiturage, solution de repli des altermobiles
7.3 Entrer dans la pratique par des trajets clairs et sans ambiguïté
7.3.1 Segmenter les trajets pour réduire l’impact du chaînage d’activités
7.3.2 Taille des bases de données et préférence de l’origine des covoitureurs
7.3.3 Baliser des trajets sur le modèle des lignes de bus
7.4 Le lien social comme élément central du développement de la pratique
7.4.1 Créer des groupes de voisins pour encourager le lien social
7.4.2 Rencontrer ses collègues voisins peut favoriser le covoiturage
7.4.3 L’hospitalité contractuelle en modèle pour la constitution d’équipages ?
7.4.3.1 Faire dormir chez soi en confiance des inconnus sélectionnés
7.4.3.2 Accorder autant d’importance à la personnalité du covoitureur qu’au trajet lors de la mise en relation
7.5 L’organisation interne des entreprises est plus ou moins favorable aux mobilités alternatives
et à la diminution des déplacements
7.5.1 Cadrer les horaires variables et les réunions de fin de journée
7.5.2 Moins de présence sur le site signifie moins de déplacements
7.5.3 Automatiser l’identification des salariés potentiellement intéressés par le covoiturage domicile-travail
7.5.4 Prévoir, pour envisager la politique de transport de façon globale
7.5.5 Le levier des déplacements internes
7.6 Définir les populations ciblées
7.6.1 Les salariés actifs
7.6.1.1Les covoitureurs
7.6.1.2Les altermobiles
7.6.2 Les salariés fortement intéressés par le covoiturage
7.6.3 Les salariés intéressés par le covoiturage mais faisant face à de fortes incertitudes
7.6.3.1Les salariés craintifs
7.6.3.2Les salariés sensibles au problème des horaires variables
7.6.3.3Les salariés ayant des activités sur le trajet, et ceux craignant de devoir faire un détour
7.6.3.4Les habitants des zones isolées
7.6.3.5Les salariés craignant la rigidité d’un covoiturage quotidien
7.6.4 Salariés aux incertitudes difficilement surmontables
7.6.4.1Les parents avec enfant à charge
7.6.4.2Les salariés avec de fortes contraintes horaires
7.6.5 Les salariés n’étant pas intéressés par le covoiturage
Bibliographie
Annexes
I.Répartition géographique des institutions membres de TOP
II.Carte des services de covoiturage en France en 2007, CERTU
III.Cadre juridique du covoiturage (CERTU 2006)
IV.Affiches américaines de propagande incitant au covoiturage pendant la Seconde Guerre Mondiale
V.Grilles d’entretien
I.Grille d’entretien avec les personnes actives au niveau de la mise en place des dispositifs de transport alternatif dans les entreprises
II.Grille d’entretien avec les salariés
III.Grille d’entretien avec les salariés travaillant pour le dispositif de covoiturage de Tisséo
VI.Critères de sélection des différents profils de salariés recherchés
VII.Personnes interrogées
7.6.1 Liste des personnes interrogées actives au niveau de la mise en oeuvre des dispositifs de transport alternatif
I.Liste des personnes interrogées parmi les salariés
VIII.Caractéristiques socio-démographiques des populations travaillant dans les entreprises visitées
IX.Tableau de bord des dispositifs
I.Thales Alenia Space
II.TOP
III.ERDF
IV.Carsat
V.Dispositif de covoiturage de Tisséo
X.Différents types de publics pour un dispositif de covoiturage
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