DIGESTION CHEZ LES CARNIVORES
Digestion des lipides
Les triglycérides d’origine animale ou végétale sont la principale source de lipides de l’alimentation du chien. En effet, ils peuvent représenter jusqu’à 95% des lipides totaux ingérés (GODEAU, 1993). Les autres sources sont les phospholipides d’origine animale ou végétale ainsi que le cholestérol et ses esters uniquement d’origine animale. Les vitamines A, D, E, K sont absorbées comme des lipides polaires, même si les mécanismes ne sont pas totalement identifiés (SHIAU, 1987). L’assimilation des lipides nécessite 4 étapes : l’émulsification, l’hydrolyse, la formation de micelles et l’absorption. L’émulsification débute dans l’estomac dans lequel, les lipides sont portés à la température corporelle et sont soumis à un intense mélange.
En réduisant la taille des gouttelettes lipidiques, l’émulsification assure la formation d’une suspension stable dans l’eau ou les milieux aqueux. Dans l’intestin grêle, l’action détergente des acides biliaires et des phospholipides complète ce mécanisme et permet aux gouttelettes de devenir encore plus petites. L’hydrolyse des triglycérides nécessite la lipase pancréatique, un cofacteur de la lipase et des acides biliaires. La lipase clive les acides gras à chaque terminaison de la molécule mais elle n’attaque pas les acides gras centraux. L’hydrolyse d’un triglycéride conduit à la formation d’un monoglycéride et de deux acides gras après la rupture de deux ponts esters (fig. 1). Le pancréas sécrète aussi des phospholipases et une cholestérol-estérase.
La bordure en brosse contient des enzymes ayant une activité hydrolytique sur le cholestérol, les esters de la vitamine A, la sphingomyéline et les phospholipides mais leurs rôles sont encore mal définis. Les produits de l’hydrolyse des lipides se combinent avec les sels biliaires pour former des micelles qui sont des molécules amphiphiles de taille nettement inférieure à la taille des globules gras dont elles sont issues. La surface des micelles est constituée de molécules polaires, les lipides non polaires et les acides biliaires sont au centre de celles-ci. L’intérieur des micelles contient les vitamines liposolubles et les stéroïdes insolubles dans l’eau. L’absorption de la graisse alimentaire est schématisée ci-dessous (fig. 2). Les micelles pénètrent dans la bordure en brosse où elles sont séparées en leurs différents constituants. Les acides gras et les monoglycérides entrent dans les cellules, les acides biliaires retournent dans la lumière de l’intestin et sont réabsorbés au niveau de l’iléon.
présents dans ces deux molécules.
L’hydrolyse de l’amylose fournit du maltose et du maltotriose ; l’hydrolyse de l’amylopectine fournit du maltose, du maltotriose et des dextrines. L’hydrolyse terminale s’effectue grâce à des enzymes de la bordure en brosse : maltase, saccharase, isomaltase (= dextrinase), lactase. La teneur du repas en glucides détermine la sécrétion de l’amylase et des autres enzymes ; cela nécessite un temps d’adaptation de quelques jours lors de changements alimentaires. Les glucides non digérés dans l’intestin grêle sont attaqués dans le gros intestin par des bactéries Gram + (Clostridium spp) qui produisent des acides gras volatils (acide acétique, acide butyrique), et des aldéhydes qui peuvent produire une inflammation de la paroi digestive (WOLTER, 1988 (b)).
Digestion des protéines
Le tableau général de la digestion des protéines animales ou végétales est simple même s’il fait intervenir un nombre relativement élevé d’enzymes (tabl. 1). La digestion de molécules de fort poids moléculaire commence dans l’estomac grâce à l’action de la pepsine et continue dans l’intestin grêle grâce à différentes protéases d’origine pancréatique : la trypsine, la chymotrypsine, l’élastase et les carboxypeptidases. Ces enzymes jouent un rôle important ; cependant si elles sont absentes 50 à 75% des protéines alimentaires sont tout de même absorbées (STROMBECK, 1996). Les produits de la digestion sont majoritairement de petits peptides (2 à 6 acides aminés) et quelques acides aminés. L’hydrolyse est complétée au niveau de la bordure en brosse ou dans les cellules épithéliales où se produit simultanément l’absorption.
D’après WOLTER (1988 (a)), les protéines non encore absorbées sont soumises au niveau du gros intestin à l’action de bactéries Gram – , qui vont produire des substances irritantes (NH3, H2S, phénol, indol) pour le tube digestif et des amines toxiques (cadavérine, histamine …) responsable au niveau cutané de l’apparition d’un poil terne, sec et de couleur ocre (WOLTER, 1988 (b)).
vitamine E
La vitamine E (tocophérol) intervient de façons multiples. Elle participe au maintien de l’intégrité des membranes cellulaires. En effet, elle empêche la peroxydation des acides gras polyinsaturés, de la méthionine, de la vitamine A. De plus, sa structure indépendamment de son rôle antioxydant, possède une action stabilisatrice sur les bicouches lipidiques. Elle intervient également de façon plus générale au niveau des réactions immunitaires et des réactions inflammatoires dans l’organisme. L’apport chez le chien à l’entretien en vitamine E est de 24,7mg/kg de matière sèche (MS) pour le National Research Council en 1985 (NRC 1985) avec un rapport vitA/vitE=1000/10. Le déficit naturel en vitamine E n’a pas été décrit chez le chien. Expérimentalement, il se traduit d’abord par une séborrhée sèche, puis, un érythème et une séborrhée grasse, se compliquant secondairement d’une pyodermite bactérienne (GABEN, 1992). L’utilisation de la vitamine E est indiquée dans le traitement de différentes dermatoses.
Des essais ont été réalisés, par exemple, sur des démodécies généralisées (SCOTT et al, 1995), sur des lupus (lupus érythémateux discoïde, lupus érythémateux systémique) à des doses de 400 à 800 UI/12 heures, sous forme d’acétate d’- tocophérol (MILLER, 1989). Les indications et les posologies utiles sont regroupées dans le tableau suivant (tabl. 3).
Zinc Il intervient dans le métabolisme des prostaglandines.
Il participe également à la synthèse des protéines. Le déficit en zinc a été bien documenté chez les Bulls Terriers présentant une acrodermatite. Deux autres syndromes dermatologiques sont également décrits. Le premier syndrome existe chez le Sibérian Husky et l’Alaskan Malamut mais les Bulls Terriers peuvent aussi être atteints. Les lésions cutanées se développent malgré des repas bien équilibrés. Elles apparaissent chez le jeune adulte (1 à 3 ans) et progressent de façon variable. D’abord, il y a une phase érythémateuse puis apparaît une alopécie avec des squames, des croûtes au niveau de la face (bouche, menton, yeux, oreille) et de la région génitale (scrotum, vulve, prépuce). Des infections secondaires (bactériennes ou fongiques) sont fréquentes et les coussinets deviennent rapidement hyperkératosiques. Chez les Malamuts, il existe un défaut génétique dans l’absorption du zinc. Le second syndrome apparaît chez des chiots à croissance rapide nourris avec des repas déficients en zinc ou mal équilibrés (trop riches en phytates ou calcium).
Beaucoup de 24 grandes races peuvent être atteintes : Dogue Allemand, Berger Allemand, Labrador Retriever, Rhodésian Ridgeback mais également Beagle et Dobermann Pinsher. Les lésions cutanées sont des plaques hyperkératosiques sur des régions de points d’appui, sur les coussinets et la truffe. Le diagnostic se fait grâce aux commémoratifs, à l’examen clinique et à l’examen histologique d’un fragment de peau. Il faut noter que le dosage du zinc est une manipulation difficile, soumise à de nombreuses variations physiologiques. De plus, dans ces deux syndromes, la quantité de zinc présente dans le sérum ou dans les poils peut être considérée comme normale. Le traitement consiste en une administration de zinc : pour le premier syndrome, la supplémentation se fait pendant toute la vie de l’animal ; pour le second, quelques semaines suffisent. La supplémentation orale avec du sulfate de zinc (10 mg/kg/j) ou du zincméthionine (1,7 mg/kg/j) est la plupart du temps suffisante (SCOTT et al, 1995). Quelques chiens, surtout les Huskies, ne répondent pas à cette administration ; il faut donc utiliser le sulfate de zinc (10-15 mg/kg) par voie intraveineuse pendant quelques semaines.
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Table des matières
TABLE DES ILLUSTRATIONS
INTRODUCTION
1 ° PARTIE : DONNEES BIBLIOGRAPHIQUES
1 DIGESTION CHEZ LES CARNIVORES
1.1 Digestion des lipides
1.2 Digestion des glucides
1.3 Digestion des protéines
1.4 Digestion des fibres alimentaires
2 ALIMENTATION ET DERMATOSES
2 .1 I ntolérances alimentaires
2.1.1 Place de l’allergie alimentaire
2.1.2 Définition
2.1.3 Etiologie
2.1.4 Pathogénie
2.1.5 Diagnostic
2.1.6 Traitement
2.2 Dermatoses carentielles
2.2.1 Carences en vitamines liposolubles
2.2.1.1 vitamine E
2.2.1.2 vitamine A
2.2.2 Carences en vitamines hydrosolubles
2.2.2.1 vitamine B6
2.2.2.2 vitamine H
2.2.3 Carences en oligo-éléments
2.2.3.1 cuivre
2.2.3.2 zinc
2.2.4 Carences en acides gras
3 SYNDROME DE MALASSIMILATION
3 .1 Phénomènes de malabsorption
3.1.1 Entérite lymphoplasmocytaire
3.1.1.1 symptômes
3.1.1.2 diagnostic
3.1.1.3 traitement
3.1.1.4 pronostic
3.1.2 Colite lymphoplasmocytaire
3.1.2.1 symptômes
3.1.2.2 diagnostic
3.1.2.3 traitement
3.1.3 Gastro-entérocolite éosinophilique
3.1.3.1 étiologie
3.1.3.2 signes cliniques
3.1.3.3 diagnostic
3.1.3.4 traitement
3.1.3.5 pronostic
3.1.4 Entérite granulomateuse
3.1.5 Entérite immunoproliférative des Basenjis
3.1.5.1 étiologie
3.1.5.2 symptômes
3.1.5.3 diagnostic
3.1.5.4 traitement
3.1.5.5 pronostic
3.1.6 Colite histiocytaire
3.1.6.1 signes cliniques
3.1.6.2 diagnostic
3.1.6.3 traitement
3.1.7 Pullulation bactérienne de l’intestin grêle
3.1.7.1 étiologie
3.1.7.2 signes cliniques
3.1.7.3 diagnostic
3.1.7.4 traitement
3.1.7.5 pronostic
3.2 Phénomènes de maldigestion
3.2.1 Etiologie
3.2.2 Signes cliniques
3.2.3 Diagnostic
3.2.4 Traitement
2 ° PARTIE : MATERIEL ET METHODES
1 ANIMAUX
2 COPROSCOPIE FONCTIONNELLE
2.1 Principe
2.2 Colorants utilisés
2.3 Réalisation des échantillons
2.4 Eléments détectables
2.4.1 Fibres musculaires
2.4.2 Grains d’amidon
2.4.3 Lipides
3 PLAN DE L’ANALYSE
3 ° PARTIE : RESULTATS ET DISCUSSION
1 ETUDE DESCRIPTIVE DES DIFFERENTS PARAMETRES
1.1 Amidon
1.2 Fibres musculaires
1.3 Graisses
2 RELATION ENTRE LE PRURIT ET LES PARAMETRES PRIS DE FAÇON ISOLEE
2.1 Prurit et lipides
2.2 Prurit et amidon
2.3 Prurit et fibres musculaires
3 RELATION ENTRE LE PRURIT ET LES DIFFERENTS PARAMETRES
3.1 Prurit et digestion
3.2 Atopie et digestion
4 DISCUSSION
4 .1 Animaux
4.2 Méthode
CONCLUSION
BIBILOGRAPHIE
ANNEXES
ANNEXE 1 : PRESENTATION DES 68 CHIENS DE L’ETUDE
ANNEXE 2 : CRITERES DE L’ATOPIE
ANNEXE 3 : EXEMPLE DE FICHE DE RESULTAT
ANNEXE 4 : DONNEES CHIFFREES DE L’ETUDE
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