Diffraction électromagnétique par la surface océanique

Notre étude s’insère dans le cadre des problèmes de diffraction électromagnétique par la surface océanique qui est un problème particulier des surfaces rugueuses aléatoires. Elle s’appuie sur les connaissances acquises depuis les anciennes théories classiques (Rayleigh, Kirchhoff) développées pour des problèmes d’acoustique. La théorie de Rayleigh [1896] rebaptisée méthode des petites perturbations ou théorie de Bragg dans la communauté des océnographes ainsi que l’approximation dite du Plan Tangent ou approximation de Kirchhoff (Beckmann and Spizzichino [1963]) sont les méthodes les plus anciennes et probablement les plus utilisées. Ayant des domaines de validité différents elles permettent d’interpréter la plupart des résultats de diffraction par des surfaces rugueuses. Pour traiter le cas particulier de la mer qui présente de nombreuses échelles spatiales, des approximations hautes fréquences (Valenzuela [1978]) ou des méthodes dites à deux échelles (Wright [1968]) ont été développées plus tard. Ces méthodes sont encore utilisées aujourd’hui par toute la communauté des océanographes pour l’interprétation de données radar. De nombreux progrès ont été faits depuis sur les méthodes approchées pour modéliser le phénomène de diffusion électromagnétique sur des surfaces rugueuses. La prise en compte de phénomènes complexes comme la diffusion multiple et la courbure locale de la surface sont à la base des principales améliorations de ces méthodes. Le besoin d’une description plus complexe de l’interaction onde-surface et de la surface elle même s’est rapidement fait ressentir. Les principales améliorations ont été faites en prenant graduellement en compte la dépendance fréquentielle, la polarité de l’onde, la permittivité locale, les angles d’incidence et bien sûr des propriétés géométriques de la surface (élévations, pentes, courbures, …).

Les récents développements de l’observation satellitaire de la surface terrestre dans des buts environnementaux ou militaires ont vu croître leurs besoins d’une meilleure description du phénomène de diffusion afin de pouvoir interpréter les mesures de manière plus juste. L’observation de la surface marine à grande échelle est devenue un des points clé dans l’estimation des paramètres géophysiques tels que l’intensité et la direction du vent ou encore la température et la salinité de l’eau. Mieux prévoir la diffusion électromagnétique due à la surface marine est aussi devenu un maillon nécessaire dans la détection de cibles en mer. Dans toutes ces applications, l’étude de l’influence de tous les phénomènes hydrodynamiques et électromagnétiques prenant part aux problèmes de diffraction est devenue une priorité. Dans l’estimation de la température de brillance et dans la détection de cibles en mer, l’influence de l’écume, principalement par grands vents, prend une part importante dans l’estimation des données.

L’océan est un milieu complexe. Il est inhomogène, évolue dans le temps et sa surface multi-échelles est le lieu d’interactions nonlinéaires entre les vagues. Ces interactions résonnantes participent à la création des plus grandes vagues et à l’évolution de la surface. Le profil des élévations de surface qui en résulte présente un caractère non Gaussien qui n’est généralement pas pris en compte dans la plupart des modèles. En effet, l’approximation de la Gaussianité est bonne en première approche, principalement par vents modérés. Lorsque le vent devient assez fort, les vagues se cambrent et déferlent provoquant alors l’apparition d’écume. Les nonlinéarités deviennent aussi très importantes car de grandes vagues modulent la forme des petites se déplaçant sur leur surface. Tous ces phénomènes (vagues cambrées, écume) contribuent à l’echo radar de la mer et principalement aux angles rasants Avant même d’étudier l’influence de l’écume, il nous a donc semblé nécessaire d’étudier l’aspect non-linéaire de la surface. Comme nous le verrons dans la suite du manuscrit, les interactions non-linéaires vague-vague apparaissent même par vent faible et influencent de manière significative la forme du diagramme de diffusion, entrainant une erreur importante sur l’estimation des paramètres recherchés. Le problème du déferlement reste ouvert et compliqué et nous ne proposons ici qu’un approche très partielle.

Equations du mouvement

Approche Eulérienne

Afin d’introduire les principales notations se rapportant au système étudié, je rappelle ici les équations hydrodynamiques qui seront utiles dans toute la suite. En diffusion, nous travaillerons dans le domaine des micro-ondes où les longueurs d’onde sont supérieures au centimètre et notre étude sera donc restreinte aux seules ondes de gravité. Les forces de capillarité seront négligées car elles agissent à des échelles inférieures. Je note R la position dans l’espace, r = (x, y) sa projection horizontale sur la base cartésienne et z est sa composante verticale. Je note aussi v le vecteur vitesse, u = (u, v) sa projection sur l’horizontale et w sa composante verticale.

Un bilan de conservation de la masse permet d’écrire l’équation de continuité du système pour un fluide supposé incompressible : ∇ · v = 0. (1.1.2)

En supposant le mouvement irrotationel, hypothèse vérifiée pour les vagues naturelles sauf au moment du déferlement (compression locale de l’eau), il est possible d’écrire la vitesse comme dérivant d’un potentiel : v = ∇Φ, (1.1.3)

Approche Lagrangienne

Afin de déterminer un profil de surface de mer il peut être plus intéressant de suivre le mouvement des particules plutôt que les variations des grandeurs en un point donné. Le mouvement d’une particule de surface est un peu comme celui d’une bouée sur la surface marine libre de se déplacer selon les trois directions de l’espace. Je note R0 = (x0, y0, z0) les coordonnées initiales d’une particule de fluide et R = (x, y, z) sa position au cours du temps t. Les coordonnées (x, y, z) seront donc des fonctions des variables indépendantes x0, y0, z0 et t qui représentent l’évolution de la particule au cours du temps.

Modèle linéaire et “Choppy Wave Model”

Description linéaire

Afin de simplifier les calculs analytiques dépendant des statistiques de la surface de la mer, celle-ci a longtemps été décrite par une superposition d’un grand nombre de vagues indépendantes et donc comme un processus Gaussien. Sous cette hypothèse, les distributions des hauteurs ainsi que des pentes et des courbures suivent des lois Gaussiennes, très proches des distributions observées. Le spectre du processus ou la fonction de corrélation suffisent alors à décrire complètement la surface. Cette description simplifiée permet d’écrire le processus des élévations comme la représentation spectrale d’un processus Gaussien.

Le spectre de la mer 

Comme mentionné précédemment, les solutions des équations linéaires de mouvement possèdent une infinité de degrés liberté puisque les amplitudes de chaque onde peuvent être choisies arbitrairement et indépendamment les unes des autres. Dans le modèle linéaire, il n’y a pas d’interactions entre les vagues. Toutefois les équations ne sont pas linéaires, Phillips [1960a, 1961a]; Longuet-Higgins [1962a] ont montré que les ondes interagissent, créant ainsi de nouvelles vagues de fréquences spatiales différentes et ne se déplaçant pas forcément librement. Autrement dit les vagues liées ne respectent plus la relation de dispersion linéaire. Avec le temps, le spectre de la mer se peuple de nouvelles fréquences jusqu’à l’obtention d’un régime d’équilibre. L’énergie fournie par le vent est alors dissipée par déferlement, soit directement à la surface de la mer, soit sur la côte. Lorsque le vent a soufflé régulièrement depuis longtemps et que le régime d’équilibre est atteint (on parle de “fetch” infini), le spectre de la mer devient stable. Cox and Munk [1954], Jähne and Riemer [1990] et Hara et al. [1994] ont réalisé nombre de mesures dans le domaine des vagues de gravité-capillarité et le projet JONSWAP (Joint North Sea Wave Project) a largement servi a déterminer la forme du spectre pour les basses fréquence. Utilisant, entre autres, les travaux de Phillips [1985], Kitaigorodskii [1983] et ceux cités précédemment, Elfouhaily et al. [1997] ont proposé une forme unifiée du spectre directionnel des vagues de vent paramétrée par la force du vent à 10 mètres au dessus de la surface de mer ainsi qu’un paramètre appelé “âge des vagues” relatif au temps depuis lequel le vent souffle et donc à la vitesse de phase de la vague dominante. Dans la suite du mémoire j’utiliserai le spectre de mer directionnel d’Elfouhaily pleinement développé qui est aujourd’hui couramment utilisé dans la communauté des océanographes. Dans cette partie je présenterai rapidement les principales caractéristiques qui le définisse. Les résultats établis sont tous généralisables à des spectres de mer différents.

Le “Choppy Wave Model”

Dans ce manuscrit le modèle de surfaces nonlinéaires que nous avons adopté est nommé “Choppy Wave Model”. Cette terminilogie a été introduite par la communauté des graphistes sur ordinateur par Fournier and Reeves [1986] puis reprise plus tard par Tessendorf [2004]. Ils utilisent ce modèle pour rendre les surfaces de mer plus réalistes en augmentant de manière artificielle l’effet nonlinéaire. En effet comme nous le verrons dans le chapitre 5 les surfaces générées par ce modèle ont un aspect visuel bien plus réaliste que les surfaces Gaussiennes. Elles paraissent plus houleuses et présentent un aspect plus rugueux de part la présence de crêtes de vagues plus affutées. Le terme “Choppy” est utilisé pour traduire cet aspect tempétueux de la surface.

Comparaison du “Choppy Wave Model” avec les modèles existants 

Les modèles prenant en compte la nonlinéarité des vagues de gravité sont généralement basés sur le calcul du potentiel des vitesses sous l’hypothèse d’un fluide idéal. Lorsque les pentes des vagues restent faibles, les équations nonlinéaires peuvent être résolues au moyen d’un développement perturbatif (Tick [1959]). Cette approche consiste à résoudre de manière itérative les équations du mouvement de l’élévation et du potentiel des vitesses (Hasselmann [1962]; Longuet-Higgins [1963]; Weber and Barrick [1977]). Par une autre méthode Zakharov [1968] a montré que l’élévation et le potentiel des vitesses évalués à la surface sont des variables canoniques conjuguées et qu’il devient alors possible de réécrire les équations comme un système Hamiltonien. Cette méthode est basée sur la technique du développement d’opérateurs et utilise la troncature d’Hamiltonien (Zakharov [1968]; Creamer et al. [1989]; Watson and West [1975]; West and al. [1987]; Fructus et al. [2005]). Nous pouvons nous référer à l’article d’Elfouhaily et al. [2000] pour une comparaison des deux approches. Récemment, plusieurs modèles déterministes (Dias [2006]) prenant en compte de manière exacte les nonlinéarités de la surface ont été développés (Ruban [2005]; Zakharov et al. [2002]; Chalikov and Sheinin [2005]; Fructus et al. [2005]) et les récentes améliorations numériques devraient nous permettre de les comparer au CWM grâce aux simulations de Monte Carlo (Chalikov [2005]; Toffoli et al. [2008]). Cependant, ces méthodes numériques ne permettent pas de maîtriser le spectre de la surface qui évolue et les comparaisons statistiques ne sont donc pas évidentes. Nous allons donc nous limiter à la comparaison aux développements perturbatifs cités précédemment.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
1 Description hydrodynamique
1.1 Equations du mouvement
1.1.1 Approche Eulérienne
1.1.2 Approche Lagrangienne
1.2 Modèle linéaire et “Choppy Wave Model”
1.2.1 Description linéaire
1.2.1.1 Statistique de premier ordre
1.2.1.2 Le spectre de la mer
1.2.2 Le “Choppy Wave Model”
1.3 Comparaison du “Choppy Wave Model” avec les modèles existants
1.3.1 Développement de Stokes
1.3.2 Théorie de Longuet-Higgins
2 Etude statistique des processus nonlinéaires
2.1 Description statistique des surfaces nonlinéaires 2D
2.1.1 Hauteurs
2.1.2 Pentes
2.2 Description statistique des surfaces nonlinéaires 3D
2.2.1 Hauteurs
2.2.2 Pentes
3 Spectres
3.1 Calcul du spectre habillé
3.2 Déshabillage de spectre
4 Processus temporel
4.1 Statistique de premier ordre
4.2 Spectre temporel
5 Génération de surfaces aléatoires
5.1 Surfaces figées
5.2 Evolution temporelle
6 Diffraction par des surfaces rugueuses
6.1 Modélisation et définitions
6.2 Diffraction dans l’approximation de Kirchhoff
6.2.1 Cas d’une surface Gaussienne
6.2.2 Cas d’une surface non – Gaussienne
6.3 Implémentation numérique et résultats
6.3.1 Calcul de la fonction de corrélation et de ses dérivées
6.3.1.1 Fonction de corrélation des hauteurs
6.3.1.2 Dérivées de la fonction de corrélation
6.3.2 Calcul de l’intégrale de Kirchhoff
6.3.2.1 Cas Gaussien
6.3.2.2 Cas non-Gaussien
6.3.2.3 Résultats et interprétations
6.4 Optique Physique et Optique Géométrique
6.4.1 Approximation haute fréquence d’Optique Physique
6.4.2 Influence des nonlinéarités sur les diagrammes de diffusion
6.5 Calcul de l’émissivité
6.5.1 Emissivité et difficultés
6.5.2 Approximation de Kirchhoff et méthode des petites perturbations
6.5.2.1 Formule des convolutions radiales
6.5.2.2 Application au calcul de l’émissivité
6.5.3 Résultats numériques
Conclusion

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *