Différents types de chiralité

L’étude des interactions faibles dans les systèmes biologiques permet de mieux comprendre le fonctionnement du vivant. La chimie supramoléculaire se consacre depuis plusieurs décennies à l’étude des interactions non-covalentes et s’inspire du vivant dans le but de créer de nouveaux systèmes supramoléculaires appelées « mimes d’enzymes », c’est à dire des structures biomimétiques, dont la structure est similaire au site actif d’une enzyme. Ces dernières peuvent alors mimer la capacité d’une protéine à reconnaître un substrat et surtout mimer l’action catalytique de l’enzyme. La structure de ces récepteurs supramoléculaires peut alors comporter différentes fonctions chimiques contenues dans le site actif d’une enzyme, des métaux… et vont pouvoir catalyser une réaction chimique donnée (oxydations, estérifications…).

En souhaitant développer des systèmes analogues au sites actifs des enzymes, la recherche dans le domaine de la chimie supramoléculaire s’est intéressée de près à l’étude de plusieurs aspects structuraux et notamment à la chiralité de ces structures. La chiralité est un des points centraux de ce domaine puisque les enzymes, sont composées d’acides aminés chiraux, qui leur confère une structure unique, et sont faites pour reconnaître spécifiquement une molécule.

La synthèse de récepteurs supramoléculaires dans le but de reconnaître spécifiquement de petites molécules organiques et inorganiques, de catalyser des réactions, à l’instar des systèmes biologiques, a largement été développée au cours de ces dernières années. Parmi les récepteurs les plus répandus, nous nous intéresserons aux macrocycles formés de n monomères identiques (calix[n]arènes, curcurbiturils, pillar[n]arènes), aux cavitands (cryptophanes, hémicryptophanes) et aux cyclodextrines. Ces molécules possèdent toutes une cavité permettant d’inclure une molécule invitée. Dans leur forme native, leur haut degré de symétrie (Cn) est généralement un frein à une reconnaissance spécifique.

LA CHIRALITE

Un des aspects principaux de la reconnaissance moléculaire concerne la chiralité. Dans cette partie, différents aspects vont être présentés.

Découverte

La chiralité, dont le terme tient son origine du grec keir (main), est une notion fondamentale dans le monde d’aujourd’hui. Elle est définie comme deux objets étant image l’un de l’autre dans un miroir et qui sont non superposables, à l’image de nos mains. Au début du XIXème siècle, on doit à Fresnel et à Biot les travaux sur la lumière polarisée et le pouvoir rotatoire. Dès les années 1840, Pasteur s’intéresse aux produits de la fermentation du vin, et plus particulièrement à l’acide tartrique et aux sels de tartrate. Pasteur a pu séparer à la main des cristaux de formes différentes de l’acide tartrique et, s’appuyant sur les travaux de Fresnel et Biot il fut en mesure d’établir que les cristaux déviaient la lumière polarisée dans le sens opposé. « Le paratatrate de soude et d’ammoniaque dévie le plan de polarisation : seulement, parmi les cristaux provenant d’un même échantillon, il en est qui dévient le plan de polarisation à gauche, d’autres à droite ; et quand il y a autant d’une espèce que de l’autre, la solution est inactive, les deux déviations contraires se compensent. » .

Il émit donc l’hypothèse que l’arrangement des atomes dans l’espace était différent. Faute de moyens techniques pour appuyer ses dires, il faudra attendre 1874 pour entendre Le Bel et Van’t Hoff énoncer de manière indépendante que les liaisons du carbone sont dirigées selon celles d’un tetraèdre régulier. Par leur seule découverte, Pasteur, Van’t Hoff, Le Bel et bien d’autres ont posé les bases de la chimie et de la biochimie modernes. La chiralité est aujourd’hui au centre des préoccupations des scientifiques qui cherchent à reproduire et à comprendre le fonctionnement des systèmes biologiques. De nombreux développements ont eu lieu dans la synthèse totale de molécules bioactives, que ce soit dans le but d’obtenir des molécules chirales de manière très sélective grâce à des catalyseurs chiraux ou bien dans le but d’étudier les mécanismes de reconnaissance de ces dernières avec le vivant.

Différents types de chiralité

La chiralité centrale

Deux objets sont chiraux s’ils sont non superposables et images l’un de l’autre dans un miroir. Deux molécules sont énantiomères si elles répondent à cette règle. La chiralité centrale se réfère à des molécules qui possèdent un centre stéréogène (où les quatre atomes liés au carbone sont différents) (Figure 2). Deux énantiomères d’une molécule possèdent des propriétés optiques différentes. Elles ont notamment la capacité de dévier la lumière polarisée dans le sens opposé. Une molécule déviant la lumière polarisée vers la droite sera dite dextrogyre (+) alors que celle déviant la lumière polarisée vers la gauche est lévogyre (notée (-)).

La chiralité planaire

La chiralité planaire est une forme de chiralité où il n’y pas de centre stéréogène. Elle concerne des molécules où une partie des atomes est dans un plan et l’autre en dehors de ce plan. L’exemple du E-cyclooctène est le plus simple. Les atomes numérotés 2 et 3 (Figure 3 gauche) font partie du plan (double liaison) ensuite les règles CIP s’appliquent. Ici il y a deux carbones de même priorité. Que l’un ou l’autre soit choisi, les trois atomes tournent dans le sens antihoraire soit S. On la note pS (p pour planaire). Il en est de même pour le (pR)-E-cyclooctène mais dont les trois atomes tournent dans le sens horaire.

La chiralité axiale

La chiralité axiale fait également partie des formes de chiralité dans lesquelles il n’y a pas de centre stéréogène impliqué. Ici, différents substituants se situent autour d’un axe fixe, comme dans le cas des atropoisomères avec des molécules comme le BINAP par exemple (Figure 4).

La chiralité inhérente

Le terme « chiralité inhérente » a été introduit pour la première fois par Böhmer en 1994 pour décrire des calix[4]arènes dont le motif de substitution est XXYZ ou WXYZ (Figure 6). Leur structure globale est chirale, même s’ils ne possèdent pas de centres stéréogènes car ils sont dépourvus de plans de symétrie (symétrie C1) de par leur motif de substitution. Une définition plus générale a été proposée par le groupe de Schiaffino : « la chiralité inhérente résulte de l’introduction d’une courbure dans une structure plane idéale qui est dépourvue d ‘axes de symétrie dans sa représentation bidimensionnelle ». Ainsi, en trois dimensions, ce type de structure existe sous deux énantiomères car la chiralité provenant de la courbure peut être inversée.

LES MACROMOLECULES COMME PLATEFORMES CHIRALES POUR LA RECONNAISSANCE MOLECULAIRE ET LES REACTIONS ENANTIOSELECTIVES 

Il existe de nombreux exemples de reconnaissance de molécules achirales par des macrocycles de symétrie Cn. Cette reconnaissance peut être sélective et la formation de complexes d’inclusion peut être effectuée par différents moyens : stabilisation par charge, par différents types d’interactions… La reconnaissance de molécules chirales avec des macrocycles, qui vise en particulier à sélectionner un des deux énantiomères, a été moins développée, du fait de sa complexité. Les structures hôtes doivent être elles-mêmes spécifiques à un type de molécule correspondant au modèle clé-serrure. Ainsi, on peut associer à un macrocycle possédant une cavité d’autres interactions spécifiques (liaisons H, interactions faibles, coordination…) avec des fonctions chargées ou non, qui pourront intervenir dans le processus de reconnaissance. Parmi ces macromolécules on va trouver les rotaxanes, les porphyrines mais aussi les cavitands, comme les calix[n]arènes, les resorci[n]arènes ou encore les hémicryptophanes et les cryptophanes. Ces molécules possèdent une cavité plus ou moins grande qui peut potentiellement être déformée et une chiralité intrinsèque qui fait que deux énantiomères ou diastéréoisomères peuvent être générés. Les cyclodextrines quant à elles, font partie d’une classe à part puisqu’une unique structure existe à l’état naturel : elles sont composées de D-glucose et de ce fait sont déjà chirales. Cette partie va aborder les développements qui ont été réalisés dans la reconnaissance chirale par des macrocycles.

Les complexes hôte-invité

La chimie hôte-invité repose sur de grands concepts. Fischer énonce en 1894 que les processus de reconnaissance doivent être sélectifs, et qu’une relation de complémentarité existe entre une enzyme et un substrat. Ce modèle clé-serrure pose les bases de la reconnaissance moléculaire. Ce concept a évolué au fil du temps avec une théorie plus représentative de la réalité, celle du modèle de l’ajustement induit énoncée par Koshland. Ce modèle prend en compte l’aspect dynamique des molécules et donc qu’un récepteur peut être capable de modifier sa forme pour former un complexe avec un substrat donné (Figure 7).

Dans le cas particulier des macrocycles, leur point commun est de pouvoir former des complexes hôte-invité via différentes interactions spécifiques à chaque macrocycle. La stabilité thermodynamique d’un complexe hôte-invité, dans un solvant et température donnés est caractérisée par la constante d’association appelée K. Elle le plus souvent notée Ka (constante d’association), Ks (constante de stabilité) ou encore Kd (constante de dissociation, utilisée pour caractériser des systèmes biologiques).

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Table des matières

INTRODUCTION
I. La chiralité
1. Découverte
2. Différents types de chiralité
2.1 La chiralité centrale
2.2 La chiralité planaire
2.3 La chiralité axiale
2.4 La chiralité inhérente
II. Les macromolécules comme plateformes chirales pour la reconnaissance moléculaire et les réactions énantiosélectives
1. Les complexes hôte-invité
2. Reconnaissance chirale par des macrocycles chiraux
2.1 Les calix[n]arènes
2.2 Les cryptophanes et hémicryptophanes
2.3 Les cucurbiturils
2.4 Pillar[n]arènes
III. Utilisation de cyclodextrines
1. Cyclodextrines et reconnaissance moléculaire
2. Mimes d’enzymes
2.1 Sélectivité par la taille de la CD
2.2 Sélectivité fonction du motif de fonctionnalisation des CDs
3. Déformation de CDs : modifications structurales
3.1 Modification des unités glucose
3.2 Pontage
4. Utilisation de CDs modifiées comme plateforme chirale pour la catalyse
IV. Projet
CHAPITRE I Synthèse de cyclodextrines tripontées
I. Les cyclodextrines
1. Généralités
1.1 Présentation
1.2 Structure et réactivité
2. Fonctionnalisation et différenciation de la couronne primaire des cyclodextrines a et b
2.1 Définitions
2.2 Fonctionnalisation
3. Différenciation par pontage
3.1 Bidifférenciation : utilisation de réactifs pontants symétriques
3.2 Tridifférenciation par pontage : réactifs asymétriques, ouverture chimiosélective
4. Débenzylation régiosélective pour la différenciation de la couronne primaire
5. Tridifférenciation de la couronne primaire de l’a-CD par décompression stérique
5.1 Etude de l’orientation de la débenzylation
5.2 Troisième double débenzylation
5.3 Synthèse de régioisomères : obtention de nouveaux motifs
II. Synthèse et caractérisation d’a-cyclodextrines pontées
1. Synthèse des CDs tren ABE et ABD en série perbenzylée
1.1 Synthèse des triols ABE et ABD
2. Synthèse de cyclodextrines pontées
2.1 Pontage des CDs
2.2 Caractérisation par RMN
3. Synthèse des CD tren en série native et méthylée
3.1 En série native
3.2 En série méthylée
4. Synthèse du régioisomère symétrique CDtren-ACE
4.1 Trifonctionnalisation de la couronne primaire : introduction d’azotures
4.2 Polytritylation en série benzylée
4.3 Polytritylation en série native
III. Conclusion & perspectives
1. Conclusion
2. Synthèse de triols sur la b-CD
CHAPITRE II synthèse et caractérisation de complexes métalliques pour la reconnaissance moléculaire
1. Le cuivre
1.1 Le cuivre (II) en spectroscopie UV-vis
1.2 Le cuivre (II) en spectroscopie RPE
1.3 Le cuivre en voltamétrie cyclique
I. complexes tren-metal associés à une cavité
1. Complexes de cuivre et zinc sur les calix[6]arènes
1.1 Design
1.2 Calix[6]arènesN3Cu(II)
1.3 Calix[6]arènes-tren-Zn(II)
2. Complexes de cuivre et zinc encapsulés dans des hémicryptophanes
2.1 Complexes hémicryptophanes@Zn(II)
2.2 Complexes hémicryptophanes tren@Cu(II)
II. Synthèse et caractérisation de complexes métalliques CD-tren
1. Complexes CD-tren Zinc
1.1 Synthèse du complexe CD-tren-Zn ABD
1.2 Synthèse du complexe CD-tren-Zn-ABE
2. Complexes de CD-tren cuivre
2.1 Synthèse des complexes CDtren-Cu(II)
2.2 Caractérisation par spectroscopies UV
2.3 Caractérisation par spectroscopie RPE
3. Premiers essais de reconnaissance moléculaire
3.1 Etude de complexation de solvant par UV
III. Conclusion & perspectives
2. Perspectives
2.1 Pontage de l’alpha CD par un pont carboné aromatique
CHAPITRE III
I. Les superbases
1. Présentation
1.1 Amidines, guanidines et phosphazènes
1.2 Les éponges à protons
2. Les azaphosphatranes et proazaphosphatranes
2.1 Contexte : les atranes
2.2 Les azaphosphatranes et proazaphophatranes
3. Utilisations
3.1 Réactions nucléophiles
3.2 Déprotonations
3.3 Catalyse organométallique
4. Synthèse d’azaphosphatranes chiraux
II. Azaphosphatranes encapsulés dans des hémicryptophanes
1. Synthèse des azaphosphatranes et proazaphosphatranes encapsulés
2. Applications
2.1 Réaction de Diels-Alder basico-catalysée
2.2 Dédoublement
2.3 Utilisation d’azaphosphatranes dans la synthèse de carbonates cycliques
III. Synthèse d’azaphosphatranes encapsulés dans la CD
1. Synthèse des azaphosphatranes et proazaphosphatranes encapsulés
1.1 Synthèse de l’azaphosphatrane CD ABD
1.2 Synthèse de l’azaphosphatrane ABE
1.3 Synthèse et caractérisation du proazaphosphatrane ABD 202
2. Détermination du pKa du proazaphosphatrane 200
2.1 Tests préliminaires
IV. Conclusion & perspectives
CONCLUSION GENERALE

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