Système de surveillance
Les données de surveillance de la bronchiolite chez les enfants de moins de deux ans sont fournies par un réseau de médecine ambulatoire (SOS Médecins), les structures d’urgence du réseau OSCOUR®, ainsi que par les analyses virologiques hospitalières (RENAL) et ambulatoires (Réseau Sentinelles). En 2018-2019, 618 services de structures d’urgence et 62 associations SOS Médecins ont participé au dispositif de surveillance, représentant 93% des passages aux urgences et 95% des actes médicaux réalisés par les associations SOS Médecins en France métropolitaine, respectivement.
Dans la surveillance de la bronchiolite, il existe également des réseaux locaux : par exemple le réseau bronchiolite en Normandie ou en Ile-de-France.
Leurs missions sont d’améliorer la prise en charge des bronchiolites en coordonnant les professionnels de santé lors des périodes épidémiques (exemple : les kinésithérapeutes de ville), en dehors d’une simple surveillance épidémiologique.
Virologie
Le virus respiratoire syncytial humain (VRS) est le principal virus à l’origine des bronchiolites pendant la période automno-hivernale (60 à 90% des bronchiolites, selon les ressources). A l’âge de deux ans, environ 90% des enfants ont été infectés par le VRS.
Le VRS est un virus de la famille des paramyxovirus, du genre pneumovirus. Il existe deux sous type A et B, et peuvent être retrouvés au cours d’une même épidémie.Le sous type A est souvent associé aux bronchiolites sévères.
Il s’agit d’un virus pléiomorphe, c’est-à dire qu’il a la capacité de changer de formes sous certaines influences.
L’ARNviral code pour 11 glycoprotéines protéines, dont 8 qui ont un rôle bien établi : trois protéines sont présentes dans la nucléocapside (impliquées dans la réplication virale), trois protéines sont associées à la matrice (M1 qui assure la libération des virions, M2 qui assure le maintien entra la nucléocapside et l’enveloppe et protéine SH) et deux glycoprotéines externes (Glycoprotéine G qui lie le virus à l’épithélium respiratoire et Glycoprotéine F qui infecte les cellules respiratoires).
Critères de gravité et critères de vulnérabilité
De nombreux scores ont été proposés dans la littérature pour évaluer la gravité des épisodes de bronchiolites aiguës. Cependant il existe une grande hétérogénéité des populations de nourrissons étudiées et des différents critères qui composent ces scores.
Les recommandations américaines ont été actualisées récemment mais peuvent rester contradictoires sur certaines recommandations.
Parallèlement à l’augmentation du nombre de bronchiolit es recensées, on observe principalement une augmentation des formes sévères, d’autant plus graves qu’elles surviennent chez le nourrisson de moins de 6 mois.
La décision d’hospitaliser devrait reposer sur le jugement clinique et tenir compte de l’état respiratoire du nourrisson, de sa capacité de demeurer bien hydraté, du risque d’évolution vers une maladie grave et de la capacité qu’a la famille d’affronter la situation. Au moment de prendre la décision d’hospitaliser, les médecins devraient se rappeler que la maladie a tendance à s’aggraver pendant les 72 premières heures . On ne peut pas prédire l’évolution seulement à partir des scores cliniques et des observations individuelles lors de l’examen physique. Il existe des scores de gravité, mais aucun n’est utilisé de manière généralisée, et rares sont ceux qui ont démontré une validité prédictive.
Il existe ainsi de nombreux scores dans la littérature pour évaluer la gravité des détresses respiratoires au cours des épisodes de bronchiolites aiguës,mais ne sont que peu utiles dans la prise en charge des bronchiolites aiguës.
La grande majorité des scores évaluant la gravité recueillent :
· La Fréquence respiratoire
· Les signes de détresse respiratoire : Balance thoraco-abdominale, Battement des ailes du nez, Tirage intercostal et susternal, Entonnoir xiphoïdien et Geignement expiratoire.
· L’hypoxémie mesurée par la SpO2(en %) et recours à l’oxygénothérapie
· Présence d’apnées
· La présence de difficultés alimentaires (inférieure à 50%des apports habituels sur 24 heures)
· L’altération de l’état général: aspect toxique, hypotonie
Les critères d’environnement et sociaux associés à la gravité:
· Le tabagisme passif
· Pour les prématurés de 32 – 35 SA : le tabagisme passif, le tabagisme pendant la grossesse, la crèche, la fratrie, la naissance autour de l’épidémie.
· Pour les grands prématurés : la fratrie, la sortie de néonatalogie en période épidémique
· La mère jeune ou avec un faible niveau socio-économique
Les autres critères associés à l’hospitalisation:
· Le sexe masculin
· Le petit poids (facteur de confusion avec le terme dans desétudes américaines)
· La prématurité dont l’âge gestationnel varie selon les études
· La naissance par césarienne
· Pour les prématurés ; un allaitement < 4 mois, une ventilation néonatale, un petit poids ou une croissance pondérale rapide.
Prise en charge thérapeutique
La bronchiolite est une maladie spontanément résolutive. La plupart des enfants ont une maladie légère qui peut être traitée par des soins de soutien à domicile.
Selon les principales recommandations, la prise en charge de la bronchiolite aiguë est donc symptomatique. Elles conseillent principalement des mesures générales telles que : désobstruction rhino-pharyngée, le maintien d’une hydratation satisfaisante, le fractionnement de l’alimentation…
Interprétation
Les formes légères sont définies par la présence de tous les critères
Les formes modérées sont définies par la présence d’au moins un des critères (non retrouvées dans les formes graves).
Les formes graves sont définies par la présence d’au moins un des critères graves
Prise en charge initiale.
Retour à domicile avec conseils de surveillance
Hospitalisation si :
¸ SpO2 <92%
¸ Support nutrionnel
¸ Age < 2 mois
Hospitalisation à discuter si critères de vulnérabilité ou d’environnement
Hospitalisation systématique
Hospitalisation USI/Réanimation
si:
¸ Apnées
¸ Epuisement respiratoire
¸ Augmentation rapide des besoins en oxygène
Pour ceux qui doivent être hospitalisés, des soins de soutien incluant une alimentation assistée, une manipulation minimale, l’aspiration nasale, l’oxygénothérapie et plus récemment LHD et CPAP demeurent les piliers du traitement.
La revue de littérature de Sinha rappelle que les nourrissons sont particulièrement sensibles à l’insuffisance respiratoire en raison de certains facteurs développementaux et anatomiques, notamment la respiration nasale prédominante chez le nourrisson de moins d’un an. Une obstruction nasale du nourrisson peut majorer l’inconfort respiratoire. La fré quence de la rhinite dans la bronchiolite et ces conséquences sur la spO2 suggèrentla nécessité de libérer les voies aériennes avant d’évaluer le statut respiratoire de l’enfant puisque la désobstruction rhinopharyngée ou l’aspiration peut améliorer celle-ci..
Paraclinique
Les recommandations ne préconisent aucun examen complémentaire puisque le diagnostic est clinique.
Toutefois, dans les formes sévères, certains examens peuvent être réalisés pour évaluer le retentissement clinique : la radiographie pulmonaire et les gaz du sang.
Hypothèses
La bronchiolite est donc un problème de santé publique majeur par sa prise en charge aiguë, mais également du fait des séquelles à long terme qu’elle peut provoquer, comme des BPCO précoces. Les recommandations internationales et la littérature ont bien codifié la prise en charge du premier épisode de bronchiolite ou des nourrissons présentant un asthme du nourrisson. De nouvelles recommandations françaises sur laprise en charge du premier épisode chez le nourrisson de moins de 12 mois vont être prochainement publiées.
Une précédente étude réalisée sur le recueil de ce travail nous avait permis d’évaluer la fréquence des patients avec une hypoxémie inférieure ou égal e à 90 % et de déterminer si ce seuil était corrélé avec la gravité clinique (définie par un score Silverman ≥3, une FR ≥60/min, une difficulté d’alimentation ou un recours ultérieur à un support ventilatoire LHD ou CPAP).
Cette hypoxémie initiale augmente de façon significative le risque d’avoir un recours à un support ventilatoire (OR = 1,89), essentiellement une CPAP (OR = 2,47), mais paradoxalement n’a pas d’incidence sur l’utilisation de l’oxygénothérapie. La conclusion montrait qu’il était difficile de retenir la SpO2% comme un facteur unique décisionnel, mais l’hypoxémie initiale parmi ces enfants hospitalisés augmente le risque d’avoir un recours à un support ventilatoire.
Cette étude a également pu montrer que le recours à un support ventilatoire était associé de manière significative à l’intensité de la détresse respiratoire, aux difficultés alimentaires et à l’âge du nourrisson (inférieure à 6 semaines ou inférieure à 3 mois). Par ailleurs, l’âge inférieur à 6 semaines, qui est le principal critère de vulnérabilité retrouvé, était associé à un risque plus important d’avoir une détresse respiratoire sévère et d’avoir un recours aux supports ventilatoires.
De ce constat, pour approfondir les données de la littérature concernant la prise en charge des bronchiolites aiguës, nous proposons de compléter la précédente étude en analysant la population des nourrissons hospitalisés pour un second épisode de bronchiolite de la même période épidémique (de Novembre 2018 à Mars 2019) et comparer si leurs caractéristiques cliniques étaient semblables à celles des nourrissons hospitalisés pour un premier épisode de bronchiolite.
Nos principales hypothèses sont que les nourrissons hospitalisés pour un second épisode de bronchiolite aiguë sont a priori plus âgés et devraient avoir un recours plus court en supplémentation d’oxygène.
MATERIEL ET METHODE
Population
Il s’agit d’une étude observationnelle, rétrospective, monocentrique, descriptive au CHU de ROUEN.
Les critères d’inclusion ont été: les nourrissons âgés de moins de 2 ans, hospitalisés en pédiatrie générale, néonatalogie et réanimation pédiatrique pour un premier ou second épisode de bronchiolite aiguë entre Novembre 2018 et Mars 2019. Les dossiers doivent comporter la SpO2% à l’entrée, le score de Silverman, la fréquence respiratoire, la durée d’hospitalisation, et la durée de ventilation quand applicable.
Afin de réaliser un recrutement exhaustif, les patientsont été sélectionnés via le codage du PMSI (Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information). Tousles dossiers médicaux des patients codés par les codes pouvant inclure des diagnostics de bronchiolite, à savoir : J21.0/J21.1/J21.8/J21.9/J96, en tant que diagnostics principaux ou secondai res. La signification de ces codes est indiquée dans l’Annexe3.
Les critères de non-inclusion : les nourrissons avec plusieurs épisodes de bronchiolites (définition d’une exacerbation respiratoire dans un contexte d’asthme du nourrisson), les enfants âgés de plus de 24 mois et les dossiers avec donnéesmanquantes.
Recueil de données
Les comptes-rendus d’hospitalisation, les dossiers médicaux et paramédicaux ont été analysés afin de recueillir les données cliniques et biologiques, via les données informatisées par le biais de différents logiciels utilisés au CHU de ROUEN (Urqual, Maincare, ICCA ped).
Les informations recueillies comprenaient des données démographiques (sexe, âge au moment de l’hospitalisation), les antécédents néonataux (termede naissance, poids de naissance), les antécédents médicaux personnels, la présence d’un terrain atopique familialau premier degré (à savoir la présence d’une rhinite allergique et/ou d’un eczéma et/ou d’un asthme et/ou d’une allergie alimentaire chez les parents ou les frères et sœurs), l’environnement (tabagisme passif, mode de garde et animaux, état du logement), des données cliniques (altération de l’état général, difficultés alimentaires, fièvre (température supérieure à 38.5°C), fréquence respiratoire, score de Silverman, SpO2% à l’entrée, SpO2% à l’arrêt du support ventilatoire et le score de Silverman à la sortie), le résultat de la virologie nasale, le traitement avec un support ventilatoire (O2, lunettes haut débit (LHD), ventilation non invasive (CPAP) ; la durée et type de ventilation), le délai entre les premiers symptômes et l’hospitalisation; la durée d’hospitalisation.
Les données ont été recueillies par un seul et même enquêteur.
Dans notre étude, afin d’évaluer ladétresse respiratoire, les éléments du score de Silverman ont été individualisés : battement des ailes du nez, balance thoraco-abdominale, tirage (sus claviculaire, intercostal), entonnoir xiphoïdien, geignement expiratoire. Chaque élément est coté de 0 à 2 permettant un score final de 0 à 10.
Objectifs de l’étude
L’objectif principal de cette étude est de comparer la population hospitalisée pour une première bronchiolite aiguë et celle hospitalisée pour uneseconde bronchiolite aiguë. Le critère de jugement principal est la durée (en jours) de l’oxygénothérapie.
Les objectifs secondaires sont :
· Un recours aux supports ventilatoires : LHD ou CPAP
· La durée de l’hospitalisation (en jours)
· L’utilisation de broncho-dilatateurs (SALBUTAMOL) et de corticoïdes systémiques
Analyse statistique
Les variables quantitatives sont présentées sous forme de médianes, 25-75ème interquartiles. Les variables qualitatives sont présentées en nombre de cas et en pourcentages. Les variables qualitatives ont été analysées par un test du X², un test de Fischer ou un test de Student quand cela était applicable. Les tests statistiques significatifs pour un p < 0.05.
Les comparaisons quantitatives ont été analysées par des tests non paramétriques de Man et Whitney, et Kruskal-wallis, et corrélation de Spearman.
Les facteurs indépendants ont été déterminés par régression multiple, en intégrant les valeurs dont la significativité p < 0,15. Deux modèles ont été étudiés,un regroupant les critères de gravité uniquement, et un second regroupant toutes les critères répondant au seuil de significativité. Les tests statistiques significatifs pour un p < 0.05. L’ensemble des tests statistiques ont été réalisés à l’aide du programme STATISTICA (StatSoft, Inc).
En analyse bivariée, pour comparer les deux groupes, nous avons utilisé une correction de multiplicité de tests. Le petit p est un petit pcorrigé dans les tableaux des résultats (sauf pour le critère de jugement principal).
La correction utilisée pour cette étude est la correctionde Hochberg. Il s’agit d’une correction adaptée pour l’évaluation de multiples critères de jugement s’appliquant à la même exposition ou à la même intervention. Les valeurs du petit pà prendre en compte dans notre étude sontcelles corrigées pour la multiplicité de tests avec la méthode de Hochberg.
RESULTATS
Population
Du 01 Novembre 2018 au 31 Mars 2019 : 376 patients répondaient aux critères de codage par le PMSI. Après analyse des dossiers médicaux,parmi ces 376 patients, 295 (soit 78,4%) ont été inclus dans le groupe « 1 ère bronchiolite » et 58 patients (soit 15,4%) ont été inclus dans le groupe « 2 nd bronchiolite ». Les patients exclus étaient 23 nourrissons présentant unasthme du nourrisson (plus de trois épisodes de bronchiolite aiguë).
Description de la population
Nous nous sommes interrogés sur l’existence dans cette base de données des mêmes patients qui ont été hospitalisés pour un premier et ensuite pour un second épisode de bronchiolite lors de la période de recueil de données (novembre 2018 à mars 2019). Nous avons retrouvé 12 paires des patients qui étaient hospitalisés pour un premier épisode de bronchiolite et pour un 2 nd pendant la période de recueil des données. Mais du fait du faible nombre des paires, nous sommes dans l’impossibilité de réaliser une analyse de données en fonction des paires, donc nous allons analyser les patients comment s’ils étaient des observations indépendantes.
Les caractéristiques principales de la population sont rapportées dans le tableau 2. Dans les deux groupes le sexe ratio est en faveur des garçons, avecun sexe ratio (H/F) à 1,4.
La majorité des nourrissons est née à terme, la très grande majorité avait moins d’un an.
Concernant les antécédents personnels, la majorité des nourrissons n’ a pas d’antécédent particulier (81,6%). Les principaux antécédents retrouvés sont la prématurité (12,5%), l’existence d’une cardiopathie congénitale (4,2%), la dermatite atopique (2,5%) ou APLV (1,7%). Le délai déclaratif entre l’apparition des symptômes etla consultation aux urgences pédiatriques est de 3[2-4] jours.
On a tout d’abord recherché la présence de corrélations entre les différents critères sur l’ensemble des 2 populations réunies (N = 353 patients) ; en analyse bivariée, on a retrouvé principalement l’âge (p< 0,001). Plus ils sont âgés, plus le risque de refaire unsecond épisode de bronchiolite aiguë est important.
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Table des matières
Sommaire des figures
Sommaire des tableaux
Abréviations
Introduction
1-Clinique
2- Epidémiologie
3- Système de surveillance
4- Virologie
5- Critères de gravité et critères de vulnérabilité
6- Prise en charge thérapeutique
7- Paraclinique
8- Hypothèses
MATERIEL et Méthode
1-Population
2-Recueil de données
3-Objectifs de l’étude
4-Analyse statistique
Résultats
1-Population
2-Description de la population
3-Symptomatologie des patients
4-Recours à l’oxygénothérapie et des autres supports ventilatoires
Oxygénothérapie
LHD et CPAP
5-Durée d’hospitalisation
6-Différences entre les nourrissons hospitalisés pour une première bronchiolite et une deuxième bronchiolite
7-Prise en charge pharmacologique
Discussion
1-Principaux résultats
2-Supports ventilatoires
3- Caractéristiques de la population
4- Signes cliniques
5- Durée d’hospitalisation
6- Examens complémentaires
7- Prise en charge pharmacologique
8- Forces et limites de l’étude
Conclusion
Bibliographie
Annexes
RESUME