Dictée à l’adulte

Permettre à l’enfant de construire ses savoirs par l’action, et à son rythme fut une préoccupation majeure de nombreux pédagogues tels que C.Freinet ou encore M.Montessori. Pour ces différents pédagogues, l’enfant doit être au centre des apprentissages. Le professeur des écoles doit donc remettre en question sa pratique et mettre l’élève au cœur des apprentissages afin que ce dernier puisse progresser.

A travers nos différentes expériences, nous avons pu constater que de nombreux professeurs donnaient ou projetaient les traces écrites d’une leçon sans que les élèves n’interviennent. Il nous a donc semblé important de remettre les élèves au centre des apprentissages en co-construisant la trace écrite afin d’améliorer leur mémorisation à long terme. La dictée à l’adulte est une activité qui permet de faire produire l’enfant un texte quand il ne peut pas encore encoder seul . Elle permet donc aux élèves de cycle 1 d’entrer dans l’écrit et la lecture. Cependant, elle est très peu présente dans les cycles suivants, or elle présente l’avantage de rendre l’élève acteur de son apprentissage. En effet, la pratique de la dictée à l’adulte peut être utilisé au cycle 3 (et même cycle 2) afin de rendre les élèves acteurs notamment en construisant leur propre trace écrite ou bilan de leçons, autrement appelées procédures d’institutionnalisation. Il est intéressant de regarder les effets de cette pratique sur les apprentissages et plus particulièrement la mémorisation.

Dictée à l’adulte 

Définitions et place dans les programmes 

Selon Hindrickx, Lenoir et Nyssen (2006) la production d’écrit demande à l’enfant non seulement de rédiger mais aussi et avant tout de composer, de rechercher des mots qu’il souhaite écrire puis de les retranscrire. L’élève doit donc comprendre ce qu’il est en train d’écrire. Cette production passe par l’apprentissage du geste d’écriture qui se développe tout au long du cycle 1, avec notamment, vers 4-5 ans, l’acquisition de l’écriture des premières lettres ainsi que l’écriture de son prénom. Puis, vers 5-6 ans, la reproduction correcte de toutes les lettres apparaît mais également la manifestation de difficultés dans la trajectoire ainsi que dans le respect du sens de l’écriture. C’est seulement vers 6 ans que l’on observe le respect du sens de parcours, c’est-à-dire l’écriture de gauche à droite, ainsi que de la trajectoire correcte du tracé des lettres (Hindrickx, Lenoir et Nyssen, 2006). Afin de produire un écrit, il est donc nécessaire d’acquérir le geste d’écriture. Seulement, au cycle 1, cet apprentissage est complexe. Par conséquent, certaines activités d’écriture sont mises en place afin de se diriger vers la production d’écrits, tout en allégeant cette difficulté du geste d’écriture. La dictée à l’adulte en est un excellent exemple. En effet l’un des intérêts de cette activité est que l’enfant sera capable de produire un écrit, sans pour autant supporter le coût du geste d’écriture puisque c’est l’enseignant qui écrit à sa place, d’autant plus qu’au cycle 1, les élèves ne savent pas encore écrire des phrases. Le geste graphique que demande l’écriture a un coût cognitif trop important pour un jeune enfant ce qui l’empêche de se concentrer sur ce qu’il écrit en tant que tel. C’est une des raisons pour laquelle on utilise dans un premier temps la dictée à  .

La dictée à l’adulte désigne le plus souvent un dispositif d’enseignement/apprentissage destiné à des élèves qui entrent dans l’écrit. Selon le site de l’académie de Dijon, « c’est le moyen de faire produire à l’enfant un texte quand il ne peut pas encore graphier seul. L’enfant confie ce texte à l’adulte, qui sait lire et écrire. Dégagé des problèmes matériels du graphisme, il peut découvrir les contraintes propres de l’écrit et leurs différences avec celles de l’oral. ».  Selon Lentin (2009, p.68), « la dictée à l’adulte n’est pas un simple remaniement, une simple reformulation par l’adulte d’un texte dicté préalablement par les élèves. Il faut qu’au moyen d’une interaction verbale dirigée par le formateur, l’apprenti parviennent à dicter lui même des énonciations écrivables c’est-à-dire formulées dans un français canonique acceptable à l’écrit ».

Au regard du Bulletin Officiel , celle-ci semble être appropriée pour développer un certain nombre d’attendus. Lorsque l’on analyse le BO concernant le cycle 1, nous pouvons mettre en évidence plusieurs points en lien avec la dictée à l’adulte :
• « L’enseignant, attentif, accompagne chaque enfant dans ses premiers essais, se montre désireux de mieux le comprendre en posant des questions ouvertes, en demandant des précisions et en l’invitant à reformuler son propos. Il reprend ses productions orales pour lui apporter des mots ou des structures de phrase plus adaptés qui l’aident à progresser »,
• « Il appartient à l’école maternelle de donner à tous une culture commune de l’écrit. Les enfants y sont amenés à comprendre de mieux en mieux des écrits à leur portée, à découvrir la nature et la fonction langagière de ces tracés réalisés par quelqu’un pour quelqu’un, à commencer à participer à la production de textes écrits dont ils explorent les particularités. En fin de cycle 1, les enfants peuvent montrer tous ces acquis dans leurs premières écritures autonomes. Ce seront des tracés tâtonnants sur lesquels s’appuieront les enseignants de cycle 2. »,
• « Commencer à produire des écrits et en découvrir le fonctionnement »,
• « Toute production d’écrits nécessite différentes étapes et donc de la durée avant d’aboutir »,
• Les premières productions d’écrits autonomes : « Les premiers essais d’écriture spontanés et autonomes des enfants marquent une étape importante dans l’appropriation de l’écrit par les élèves et sont accueillis positivement par l’enseignant. Ils lui permettent de voir que les enfants commencent à comprendre la fonction et le fonctionnement de l’écriture, même si ce n’est que petit à petit qu’ils en apprendront les règles. ». « Un recueil individuel de ces premières écritures peut devenir un dossier de référence pour chaque élève, à apporter pour leur rentrée au CP. ».

L’un des attendus de fin d’école maternelle est le suivant : « Participer verbalement à la production d’un écrit. Savoir qu’on n’écrit pas comme on parle. » La dictée à l’adulte est donc bien une activité qui permet d’acquérir cet attendu important de fin de cycle 1.

Selon les ressources maternelles du site Eduscol , la dictée à l’adulte vise plusieurs compétences pour les élèves comme élaborer une histoire à l’oral ainsi qu’énoncer un oral écrivable. Il s’agit également de savoir découper une phrase en unités lexicales, segmenter une phrase en mot. Les compétences visées par la dictée à l’adulte sont également de savoir dicter en respectant le rythme d’écriture du scripteur, répéter en écrivant chaque mot dicté, relire pour vérifier sa production écrite ou pour la poursuivre. Il y a également celles pour comprendre les fonctions de lecture et de l’écriture, reconnaître des mots de manière visuelle ainsi que reconnaître des éléments du code alphabétique.

Les étapes et conditions de mise en œuvre

La dictée à l’adulte doit être travaillée dans le cadre d’une séquence didactique (Thévenaz-Christen, 2012). Cette activité nécessite plusieurs séances afin d’atteindre la tâche finale. Les premières séances peuvent s’effectuer de manière collective, en groupe classe, avant de passer à une dictée à l’adulte en petits groupes voire en individuel (Lentin, 2009). Nous allons analyser les étapes de la dictée à l’adulte selon Hindryckx, Lenoir et Nyssen (2006). La première étape de l’élaboration est la construction du canevas, c’est-à-dire le choix du destinataire de l’écrit, du sujet et de l’organisation. L’enseignant demande également aux élèves ce qu’ils souhaitent écrire. A travers cette étape, les élèves prennent progressivement conscience de l’importance de la planification de l’écrit ainsi que le rôle d’un brouillon avant la production d’un texte. Il existe différentes manières de procéder : l’enseignant peut utiliser des images/photographies porteuses de sens pour les élèves, afin qu’ils se souviennent des différentes étapes, par exemple de la réalisation d’une recette ou bien d’une expérience. Il peut également écrire certains mots-clés sur le tableau afin que les élèves puissent s’y référer au moment de la rédaction. Ces mots et images permettent aux élèves de structurer plus facilement leurs idées et de ne pas omettre d’informations importantes.

Ensuite, vient le temps de la mise en mot et de l’écriture du texte dicté par les élèves. C’est à ce moment que l’enseignant reformule les propos des élèves. Il induit des modifications en interrogeant les élèves sur des formulations dictées, sans en changer le sens. Progressivement, l’enseignant dicte à haute voix ce qu’il écrit, en demandant aux élèves de répéter ce qu’il doit écrire afin de faire comprendre progressivement aux élèves de cycle 1 que l’écrit peut être parlé mais également qu’on ne peut pas écrire comme on parle (ministère de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports, 2021, Bulletin Officiel n°25 du 24-6-2021). Les élèves doivent donc ralentir leur débit de parole afin de suivre le rythme de l’écrit de l’enseignant.

Pour finir, la dernière étape est la relecture du texte. Cette étape est primordiale. Selon Thévenaz-Christen (2012), la relecture de quelques morceaux de phrases au cours de l’élaboration permet de faire apparaître les incohérences de l’écrit. La première relecture complète permet de vérifier si le contenu est en accord avec ce que veulent écrire les élèves. La seconde, quant à elle, vérifie la cohérence du texte. C’est également le moment pendant lequel l’enseignant modifie et corrige l’écrit, avec l’accord de l’élève, pour que le texte ait du sens. Pour que la dictée à l’adulte puisse avoir un intérêt et que celle-ci fonctionne, certaines conditions sont nécessaires. Tout d’abord, la situation choisie doit avoir du sens pour les élèves, notamment à travers le choix du destinataire et la forme du texte. Par exemple, cela peut prendre la forme d’une lettre adressée aux parents ou encore une recette de cuisine à ramener chez eux pour pouvoir la confectionner en famille par la suite. Cela peut également être une affiche sur une expérience réalisée afin que les autres élèves de l’école puissent en prendre connaissance. De plus, la dictée à l’adulte doit être pratiquée régulièrement pour que les élèves puissent s’approprier progressivement les codes de l’écriture. Il faut également que les élèves puissent suivre ce que l’enseignant écrit au fur et à mesure de leur dictée. Il est donc préférable d’écrire sur un support vertical et de grand format (Ressources Maternelle – Eduscol ).

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Table des matières

INTRODUCTION
Introduction (Coralie)
Introduction (Laurie)
1. Cadre théorique
1.1. Dictée à l’adulte
1.1.1. Définitions et place dans les programmes
1.1.2. Les étapes et conditions de mise en œuvre
1.1.3. Les intérêts sur les apprentissages
1.2. La fonction de l’institutionnalisation de la trace écrite
1.2.1. Définitions de ces deux concepts : institutionnalisation et trace écrite
1.2.2. Les étapes de construction d’une trace écrite
1.2.3. Les intérêts de la trace écrite sur les apprentissages
1.3. La mémoire/apprentissage
1.3.1. Les grands types de mémoire
1.3.2. Fonctionnement de la mémoire
1.3.3. Facteurs qui améliorent la mémoire
1.4. La problématique
2. La méthodologie
2.1. Démarche générale
2.2. Participants
2.3. L’organisation des séances
2.4. Les évaluations
2.5. Collecte de données
3. Résultats
3.1. Analyse des résultats selon les groupes
3.1.1. Comparaison des groupes H exp et H contr aux évaluations
3.1.2. Comparaison des groupes S exp et S contr aux évaluations
3.2. Analyse des résultats selon les profils d’élèves
3.2.1. Analyse des résultats des groupes H exp et H contr
3.2.2. Analyse des résultats des groupes S exp et S contr
4. Discussion
CONCLUSION
Bibliographie
Annexes
Annexe 1 : Fiches de préparation des leçons d’histoire et de sciences
Annexe 2 : La construction des traces écrites dans les groupes H exp et S exp
Annexe 3 : Les traces écrites des groupes H exp et S exp
Annexe 4 : Les traces écrites du groupe H contr et S contr
Annexe 5 : Transcriptions des échanges lors des leçons
Annexe 5.1 : Transcriptions des échanges lors de la construction de la trace écrite en dictée à l’adulte avec le groupe H exp
Annexe 5.2 : Transcriptions des échanges lors de la leçon avec le groupe S contr
Annexe 5.3 : Transcriptions des échanges lors de la leçon avec le groupe S exp
Annexe 6 : Évaluations d’histoire et de sciences
Annexe 7 : Tableau des données bruts

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