EPIDEMIOLOGIE DES DIARRHEES A ROTAVIRUS DANS LES PAYS INDUSTRIALISES
Prévalence Chez les enfants Européens de 0 à 5 ans la prévalence des diarrhées à rotavirus est de 10 à 35% [17,29]. En Europe, les infections à rotavirus sont beaucoup plus fréquentes que les infections dues aux autres entéropathogénes [17,19]. Les diarrhées à rotavirus sont responsables de 3 millions de cas aux Etats Unis chaque année [40]. En France près de 300000 épisodes annuels de diarrhées à rotavirus seraient décomptés chez les enfants de moins de cinq ans [36]. Bien que ces infections soient parfois sévères, la mortalité associée à celle-ci reste faible. Selon une estimation du CDC sur les décès par diarrhée et les décès par rotavius chez les enfants [44], les données suivantes sont rapportées : en Australie sur 10 décès par diarrhée, 3 décès sont dus à la diarrhée à rotavirus ; au Canada le nombre de décès par diarrhée est de 20 enfants et 7 sont dus au rotavirus ; en France sur les 40 enfants qui décèdent de diarrhée, 14 décès sont attribuables au rotavirus ; en Italie le nombre de décès par diarrhée est de 30 enfants et le 1/3 est attribuable au rotavirus ; au Japon 50 enfants décèdent de diarrhée et 17 enfants de diarrhée à rotavirus ; aux Etats Unis 300 enfants décèdent de diarrhée et 102 enfants par rotavius. L’analyse de ces résultats montre qu’environ un tiers des décès par diarrhée chez l’enfant sont attribuables au rotavirus.
Age Les enfants de moins de 24 mois sont les plus touchés par la diarrhée à rotavirus dans les pays développés [45,40]. Aux Etats Unis plus de 100.000 enfants sont hospitalisés annuellement pour diarrhée à rotavirus [45], et on estime qu’elle touche 80% des enfants de moins d’un an. En Europe, le rotavirus atteint surtout les enfants de moins d’un an, ensuite la tranche d’âge de 1 à 4 ans [17,29].
Saison Chaque année, l’épidémie de gastroentérite à rotavirus coïncide souvent avec les épidémies de bronchiolite et de grippe, pouvant mettre en difficulté les systèmes de soins pédiatriques dans les pays tempérés [21]. Dans ces pays développés, on rencontre les gastroentérites à rotavirus lors d’épidémie hivernale (pic en décembre et janvier), mais il existe des cas sporadiques tout au long de l’année.
Sérotypes Une estimation récente montre que les sérotypes G1, G3, G4 et G9 sont retrouvés dans près de 90% des infections à rotavirus en Amérique du Nord et en Europe [48]. P [4] et P [8] représentent 90% des sérotypes P circulant à travers le monde [48]. En Europe, en Amérique du Nord et en Australie, les combinaisons les plus fréquentes sont : G1P [8], G3P [8], G4P [8] et G2P [4]. [51] Ces souches sont ubiquitaires : G1P [8] étant la plus isolée lors d’épidémies. Leur fréquence et leur prédominance varient selon l’année et selon la zone géographique [51].
MECANISME DES DIARRHEES A ROTAVIRUS
Le tropisme tissulaire des rotavirus se limite à l’épithélium des villosités intestinales. Le rotavirus pénètre dans l’organisme de l’hôte par voie orale pour infecter les entérocytes matures de l’intestin grêle, du duodénum à l’iléon terminal. Depuis peu, l’antigène du rotavirus ( la protéine VP6) ou son ARN ont été mis en évidence également dans le sang ou le LCR de patients prélevés pendant la phase aigüe de l’infection, cependant, le rôle de la dissémination extra intestinale du rotavirus dans la survenue des formes sévères reste à préciser. La réplication du virus dans les entérocytes entraîne plusieurs phénomènes physiopathologiques responsables de la diarrhée. L’infection des entérocytes matures entraînent les anomalies structurales et fonctionnelles complexes de l’épithélium à l’origine de la diarrhée. L’infection diminue les fonctions de digestion (diminution de l’activité des disaccharidases) et l’absorption des nutriments (diminution de l’absorption du glucose via SGLT1 et l’absorption de la leucine) à l’origine de la diarrhée osmotique. L’augmentation de la sécrétion d’eau et d’électrolytes dans la lumière intestinale est le principal mécanisme de cette diarrhée, mais la malabsorption due à l’atrophie villositaire et à l’accélération du transit participe aussi à l’aggravation de la diarrhée. La diarrhée à rotavirus comporte également une hypersécrétion modérée de chlore dans la lumière intestinale. La protéine non structurale NSP4 se comporte comme une entérotoxine capable de déclencher par elle-même la diarrhée. Le système nerveux entérique (SNE) semble également jouer un rôle important dans les mécanismes de cette diarrhée sécrétoire (figure4). Ces résultats obtenus chez l’animal suggèrent les mécanismes qui pourraient expliquer comment le rotavirus peut être responsable chez l’homme d’une diarrhée si intense qu’elle peut conduire à la déshydratation aigüe sévère voire létale, comme avec le vibrio cholerae. Certains facteurs de virulence propres au virus ont été proposés chez l’animal, tels que la protéine NSP4 ou la protéine VP4, la protéine d’attachement du virus à la cellule. Les rotavirus animaux sont peu ou pas pathogènes pour l’homme ; ce qui est à la base de leur utilisation comme virus vaccinaux. Mais ces virus animaux semblent pouvoir acquérir une pathogènicité par réassortiment génétique avec des virus humains. L’expression du pouvoir pathogène du virus chez l’homme est variable et conduit à des expressions cliniques différentes : de la forme asymptomatique à la déshydratation sévère voire au décès du patient. L’infection est plus sévère chez l’enfant de 3 mois à 2 ans que chez le jeune nourrisson, chez l’enfant plus âgé ou chez l’adulte. Plusieurs facteurs pourraient rendre compte de cette différence de susceptibilité vis-à-vis de l’infection liée à l’âge. Avant tout, les réinfections naturelles entraînent des réponses immunitaires spécifiques qui protègent progressivement les jeunes patients contre les formes les plus sévères. La présence d’anticorps circulants spécifiques d’origine maternelle et transmis par voie transplacentaire participe probablement à la protection du nourrisson jusqu’à l’âge de 3 mois. L’entrée du virus dans la cellule intestinale est sous la dépendance du clivage protéasique du VP4. Or chez le nouveau né, les quantités de trypsine, d’élastase ou de pancréatine dans les sécrétions intestinales sont moindres que chez le nourrisson ou le jeune enfant [23].
Signes de la déshydratation
Le diagnostic de déshydratation repose sur l’association de plusieurs signes cliniques, la sensibilité et la spécificité de chacun étant médiocres. Le nombre de signes présents augmente avec l’importance de la déshydratation : Perte de poids ; soif intense ou pleurs incessants chez le jeune nourrisson ; sécheresse de la muqueuse jugale ; pli cutané persistant (à rechercher au niveau du cou ou sous la clavicule) ; cernes, hypotonie des globes oculaires ; absence de larmes lors des pleurs ; fontanelle antérieure creuse.
Les probiotiques
En ce qui concernent les probiotiques, plusieurs méta-analyses confirment qu’un traitement par Lactobacillus (toutes espèces et souches confondues) est efficace en termes de réduction de durée de la diarrhée [56, 57], d’environ une journée en cas d’infection à rotavirus [55]. Aucune étude ne montre que les probiotiques réduisent le volume des selles. Leur mécanisme d’action dans les gastroentérites est probablement une stimulation de la réponse immunitaire. En France, Saccharomyces boulardii (Ultra-levure®) est un probiotique tandis que Lactéol fort® (Lactobacillus acidophilus), d’action similaire, ne rentre pas exactement dans la catégorie des probiotiques car il a été inactivé par la chaleur.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LITTERATURE
I- DEFINITION
II- EPIDEMIOLOGIE
1- EPIDEMIOLOGIE DE LA DIARRHEE
2- EPIDEMIOLOGIE GENERALE DES DIARRHEES A ROTAVIRUS
3- EPIDEMIOLOGIE DES DIARRHEES A ROTAVIRUS DANS LES PAYS INDUSTRIALISES
3.1. Prévalence
3.2. Age
3.3. Saison
3.4. Sérotypes
4- EPIDEMIOLOGIE DES DIARRHEES A ROTAVIRUS EN AFRIQUE EN DEHORS DU SENEGAL
4.1. Prévalence
4.2. Age
4.3. Saison
4.4. Sérotypes
5- EPIDEMIOLOGIE DES DIARRHEES A ROTAVIRUS AU SENEGAL
5.1. Prévalence
5.2. Age
5.3. Saison
5.4. Sérotypes
III- RAPPEL VIROLOGIQUE SUR LES ROTAVIRUS
1- CARACTERES DU VIRUS
1.1. Classification
1.1.1- Famille
1.1.2. Genres
1.1.3. Groupes : A à G
1.1.4. Sous-groupes
1.1.5. Sérotypes et génotypes du groupe A
2- STRUCTURE MOLECULAIRE
2.1. Forme
2.2. Structure
2.3. Propriétés antigéniques
2.4. Propriétés physico-chimiques
3- MULTIPLICATION DES VIRUS
3.1. Support de la culture
3.2. Cycle de la multiplication
4- HOTE – HABITAT
5- TRANSMISSION
IV- MECANISME PHYSIOPATHOLOGIQUE DES DIARRHEES A ROTAVIRUS
1- MECANISME DES DIARRHEES A ROTAVIRUS
2- IMMUNITE ANTI-ROTAVIRUS
V- SIGNES
1- TYPE DE DESCRIPTION : LA FORME HABITUELLE
1.1- Signes cliniques
1.2- Signes paracliniques
1.2.1. Test Elisa
1.2.2. Les tests immuno-enzymatiques unitaires sur membrane
1.2.3. Les tests d’agglutination
1.2.4. Biologie moléculaire
2- FORMES CLINIQUES
VI- DIAGNOSTIC
1- DIAGNOSTIC POSITIF
2- DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
3- DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
4- DIAGNOSTIC DE RETENTISSEMENT
4.1- Déshydratation
4.1.1- Signes de la déshydratation
4.1.2- Facteurs de risques de déshydratation
4.1.3- Classification de la déshydratation
4.2- Choc hypovolémique
4.3- Invagination intestinale aigue
VII- TRAITEMENT
1- CURATIF
1.1- Buts
1.2- Moyens
1.2.1. Réhydratation par voie orale
1.2.2. La réhydratation intraveineuse
1.2.3. La réalimentation de la diarrhée aigüe
1.2.4. Traitement médicamenteux
1.2.4.1. Médicaments anti diarrhéiques
1.2.4.2. Thérapie de supplémentation en zinc
1.3- Indications
1.3.1. Traitement pour les enfants selon le degré de déshydratation
1.3.1.1. Déshydratation légère (diarrhées sans signes de déshydratation)
1.3.1.2. Déshydratation bénigne à modérée
1.3.1.3. Déshydratation sévère
2- PREVENTIF
2.1- Règles d’hygiène
2.2- Vaccins contre le rotavirus
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
I. CADRE D’ETUDE ET METHODOLOGIE
1- CADRE D’ETUDE
1.1. Hôpital de recrutement des malades
1.2. Laboratoires de l’étude
1.2.1- Laboratoire de Bactériologie du CHNEAR de Dakar
1.2.2- Laboratoire de l’Institut Pasteur de Dakar
2- METHODOLOGIE
2.1. Type d’étude
2.2. Critères d’inclusion
2.3. Critères d’exclusion
2.4. Paramètres étudiés
2.5. Stratégie de collecte des données
2.6. Examens bactériologiques et virologiques
2.6.1. Examen bactériologique
2.6.2. Recherche de rotavirus
2.6.3. Sérotypage
3- ANALYSE DES DONNEES
II. RESULTATS
1- CARACTERISTIQUES GENERALES DES ENFANTS RECUS POUR UNE DIARRHEE
1.1. Fréquence
1.2. Age des patients
2- PROFIL EPIDEMIOLOGIQUE, CLINIQUE ET EVOLUTIF DES GASTROENTERITES A ROTAVIRUS
2.1. Epidémiologie
2.1.1. Prévalence des rotavirus
2.1.2 Distribution des diarrhées à rotavirus selon l’âge et le sexe
2.1.2.1. Selon l’âge
2.1.2.2. Selon le sexe
2.1.3. Distribution saisonnière des rotavirus
2.1.4. District de résidence des malades
2.2. Clinique
2.2.1. Délai de consultation de la diarrhée aigüe à rotavirus
2.2.2. Caractéristiques des selles de la diarrhée à rotavirus
2.2.3. Signes cliniques
2.2.4. Les complications
2.2.5. Les affections associées à la diarrhée à Rotavirus
2.2.6. Létalité
III. DISCUSSION
1- DIFFICULTES DE L’ETUDE
2- CARACTERISTIQUES GENERALES DES ENFANTS RECUS POUR UNE DIARRHEE
3. PROFIL EPIDEMIOLOGIQUE, CLINIQUE ET EVOLUTIF DES GASTRO-ENTERITES A ROTAVIRUS
3.1. Epidémiologie
3.1.1. Prévalence des rotavirus
3.1.2. Age et sexe
3.1.3. Distribution saisonnière
3.1.4. District de résidence des malades
3.2. Clinique
3.2.1. Délai de consultation de la diarrhée à rotavirus
3.2.2. Caractéristiques des selles de la diarrhée à rotavirus
3.2.3. Les signes cliniques
3.2.4. Complications
3.2.5. Les affections associées à la diarrhée à rotavirus
3.2.6. Létalité
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES
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