Diagnostic des masses mammaires solides

Les masses mammaires palpables chez la femme jeune sont fréquentes et souvent de nature bénigne. Cependant la prévalence des cancers chez les patientes présentant une masse palpable est nettement supérieure à celle des patientes asymptomatiques, elle augmente avec l’âge. Le cancer du sein représente le cancer le plus fréquent de la femme dans le monde. Il est au premier rang des cancers de la femme en Afrique subsaharienne et constitue donc un véritable enjeu de santé publique. Le taux de cancer du sein chez la femme de moins de 35 ans varie entre 7,5 et 14%. Le diagnostic est souvent tardif par méconnaissance des patientes, ajouté à l’inexistence d’un système de dépistage organisé. La sénologie est devenue une activité majeure en radiologie ; le radiologue est indispensable à toutes les étapes de la prise en charge d’une patiente porteuse d’une pathologie mammaire. La radiosénologie offre un rôle de premier plan dans l’établissement du diagnostic mais aussi impacte directement sur les taux de guérison et de survie grâce à des techniques d’imagerie sans cesse améliorées autorisant des dépistages de plus en plus précoces. L’échographie mammaire est l’examen de première intention pour caractériser les masses mammaires chez la femme jeune du fait de l’importance de la densité mammaire chez ces patientes. La lecture des masses mammaires détectées en imagerie mode B repose principalement sur des critères morphologiques. Afin d’améliorer la spécificité de l’échographie en mode B, l’élastographie a émergé comme une technique complémentaire basée sur l’analyse des déformations lésionnelles sous une contrainte externe (compression) ou générée par une onde ultrasonore de cisaillement (ShearWave Imaging). Grâce à la sénologie interventionnelle, la chirurgie d’exérèse à visée diagnostique a disparu ; le diagnostic des lésions bénignes repose entièrement sur la radiologie et l’histologie. Les biopsies percutanées ont gagné en popularité pour l’évaluation des masses mammaires car elles permettent un diagnostic histologique fiable évitant des chirurgies inutiles pour des lésions bénignes et de distinguer des lésions proliférantes avec ou sans atypie, un cancer in situ versus invasif. C’est dans cette optique que nous avons réalisé ce travail, afin de déterminer la sensibilité de l’échographie mode B couplée à l’élastographie dans le diagnostic des lésions mammaires solides chez la femme de 35 ans et moins en faisant une corrélation avec les résultats de l’histologie.

DISCUSSION

Le couple écho-élastographie nous a permis d’avoir une orientation diagnostique de toutes les lésions observées au cours de cette étude. La biopsie a permis de poser un diagnostic de certitude chez toutes les patientes. Les résultats de l’échographie ont été concordant et confirmé par l’histologie dans 100 des cas pour les masses BIRADS 3 et 5. Concernant les lésions douteuses BIRADS 4A l’élastographie n’apportait aucune utilité.

L’âge 

Les masses mammaires chez le sujet jeune sont généralement de nature bénigne. C’est pourquoi le médecin peut d’emblée être rassurant dans presque tous les cas ce qui est d’autant plus important que l’intolérance psychologique de l’adolescente vis à vis d’anomalie corporelle est toujours source d’anxiété. La charge affective et sensorielle de cet organe en devenir qu’est le sein ne doit pas être occulté. Dans notre série 29 patientes étaient âgées entre 15 et 25 ans. Trente et quatre patientes soit 80,9% présentaient des lésions bénignes. La fréquence des masses bénignes qui sont souvent d’origine lobulaire peut être liée au fait qu’à cet âge, la croissance lobulaire est maximale. Il existe cependant des cancers du sein survenant à un âge jeune. Huit patientes soit 19,04 % dans notre série présentaient un cancer du sein. L’âge de survenue du cancer était en moyenne de 32,12ans avec des extrêmes allant de 25 à 35 ans, ce qui concorde avec la littérature ou cette moyenne varie entre 31 et 32 ans. On note également une progression considérable de l’incidence avec une augmentation de 25% des cas dans cette tranche d’âge.

Ces résultats concordent avec la littérature ou environ 15 à 20% des cancers du sein sont decouverts avant 50 ans, c’est parmi ces cancers que la fréquence d’une mutation génétique de type BRCA1 ou BRCA2 est la plus fréquente [10]. M Mbengue a également trouvé des cas de tumeurs malignes chez 11 patientes âgées de moins de 40ans soit 19,29 de sa série. Cette précocité de survenue du cancer dans nos régions pourrait s’expliquer par les nombreux facteurs de risque au cancer (nutritionnel, environnemental…) liés aux pays pauvres de manière général d’une part ; et aux mutations génétiques notamment le gène BRCA qui n’est pas évalué dans nos pays d’autre part. Les facteurs génésiques associés à une exposition prolongée à des œstrogènes endogènes, telle qu’une puberté précoce, une ménopause tardive ou une première grossesse tardive, figurent parmi les facteurs de risques les plus importants du cancer du sein. A cela s’ajoutent les dépistages mal organisés et le manque d’infrastructure pouvant faire face à la demande prévisible diagnostique et thérapeutique.

L’échographie 

Critères sémiologiques 

Les images doivent être décrites selon les termes du lexique BIRADS en appliquant le vocabulaire descriptif du BIRADS de l’ACR 2013 [1]. Ainsi pour la détection des masses bénignes, l’échographie se base sur des signes morphologiques qui sont prédictifs de bénignité tels que la forme ovale, les contours circonscrits, l’hypoéchogénicité et le grand axe parallèle. Les lésions bénignes sont secondaires à une prolifération à la fois épithéliale et conjonctive le plus souvent d’origine lobulaire expliquant le grand axe parallèle à la peau en échographie (orientation anatomique naturelle des lobules). Dans notre étude, le grand axe parallèle était trouvé dans 78,57% des cas.

La direction de l’axe principal de la tumeur est un signe primordial pour déterminer la forme et juger de la nature de la lésion. Les lésions bénignes se développent dans un axe antéropostérieur ; cependant elles sont plus larges que hautes. Par contre les lésions malignes ont un développement transversal, elles sont plus hautes que larges. Ce signe est suspect lorsqu’il suggère un développement perpendiculaire aux plans des tissus, à l’inverse des lésions bénignes qui ont un développement parallèle [13]. Dans notre étude les masses avaient des contours circonscrits dans 52,38% des cas. En effet les contours nets sont expliqués par la disposition périphérique du tissu conjonctif qui étant sous tension va former une lame fibreuse ou pseudocapsule[12]. En outre les contours d’une masse sont une caractéristique essentielle pour différencier une lésion bénigne d’une lésion maligne, allant d’une marge bien définie (une caractéristique bénigne) aux marges micro lobulées ou angulaires (caractéristiques malignes) [14]. Toutes les lésions malignes de notre série présentaient des contours flous ou spiculés dans 14,28 et 7,14%. Les lésions bénignes étant sensibles à l’impression hormonale, leur aspect radiologique varie au cours du temps, chez la femme jeune (fibroadénome cellulaire) : nodule hypoéchogène [12]. Ainsi dans notre étude où l’âge maximal des patientes est de 35ans, 95,24% des masses étaient hypoéchogènes parmi elles, les 8 lésions étaient malignes. Il faut noter que l’échostructure nettement hypo échogène à une grande valeur prédictive de malignité, dans l’étude de Stavros la VPP était de 92%[14, 15]. C’est un signe apprécié par rapport à l’échostructure de la graisse et non celle du tissu fibreux plus échogène [16]. Dans notre étude 16,67% des masses avaient une atténuation postérieure des échos, elles correspondaient toutes à des lésions malignes. Il été noté que l’atténuation du faisceau postérieur varie selon le stroma réactionnel du cancer. Dans l’étude de Stavros et al, ce caractère était présent dans 76% des cas, essentiellement dans les cancers tubuleux, avec une sensibilité à 76% et une VPP et une spécificité égale à 96%. Par contre les cancers médullaires, les formes hémorragiques ou nécrotiques ont plus souvent un faisceau ultrasonore normal ou rehaussé [16, 17]. Bien qu’exceptionnelle, l’hypothèse d’une étiologie maligne rare chez la femme jeune ne peut être complètement exclue, et on se souviendra que les cancers agressifs (grade III, triple négatif) sont responsables d’un aspect pseudo-bénin a l’échographie et ne doivent pas être confondus avec un banal adénofibrome.

Confrontation écho-histologique 

Les résultats du tableau XXIII montrent une sensibilité de l’échographie de 100% dans le diagnostic des lésions mammaires bénignes et des lésions malignes. La VPP dépend étroitement de la prévalence de la maladie, ici le cancer rarissime avant 25 ans, la VPP de malignité ne peut être un paramètre valable. L’échographie est un examen clé en pathologie mammaire, considérée comme de réalisation facile dans la communauté radiologique. Cependant pour en tirer le meilleur parti elle nécessite une parfaite connaissance des réglages de base pour une qualité d’image optimale ainsi que des différents modes qu’elle propose afin d’optimiser la détection et la caractérisation lésionnelle. L’opérateur dépendance est une limite classique de l’échographie mammaire difficile à quantifier. Les voies d’amélioration incluent une technique d’examen standardisée. L’échographie permet de détecter de nombreux cancers infracentimétriques, infiltrant, occultés à la clinique et à la mammographie. La capacité de l’échographie à diagnostiquer des lésions malignes et principalement les cancers infracliniques dépend de plusieurs facteurs, essentiellement :

– La taille des lésions : c’est un élément déterminant dans la détection des petites masses solides, le seuil de détection pour ces derniers est supérieur par rapport au kyste.
– Le type de sein : le taux des faux négatifs à l’échographie est plus important dans les seins graisseux que dans les seins denses malgré l’amélioration du contraste par les sondes de haute fréquence.
– Le type de lésions détectées à l’échographie : (les microcalcifications isolées exclues) la capacité de l’échographie est assez satisfaisante dans la détection des cancers qui se traduisent par des opacités nodulaires et spiculées ou des distorsions architecturales alors que dans les asymétries de densité, l’échographie reste limitée.

Deux patientes de notre série présentaient des masses mammaires volumineuses avec une évolution rapide (moins de 1mois). A l’histologie elles sont revenues en faveur de fibroadénome. IL a été décrit l’adénofibrome juvénile chez l’adolescente qui se caractérise par une croissance très rapide (fibroadénome géant). Il se manifeste par une cellularité accrue de la composante mésenchymateuse, un développement péricaniculaire et une hyperplasie canalaire simple. Son principal diagnostic différentiel est la tumeur phyllode. C’est la tumeur la plus rare de toutes les tumeurs fibroépitheliales dont la principale caractéristique est celle d’une composante conjonctive hyper cellulaire prépondérante. Elle s’observe à un âge plus tardif que le fibroadénome(40-50ans) mais il existe un pic de fréquence à l’adolescence. En macroscopie aucun élément ne la caractérise par rapport au fibroadénome. En imagerie également il n’existe aucun signe radiologique permettant de différencier une tumeur phyllode bénigne d’un fibroadénome. [18] C’est sur son potentiel évolutif rapide que le diagnostic va être suspecté. Elle nécessite une exérèse plus large que le fibroadénome (tendance à récidiver et à se dédifférencier en sarcome).

ACR

La classification BIRADS DE l’ACR selon la version 2013 stipule que :
– La catégorie ACR3 signifie toujours une anomalie probablement bénigne nécessitant une surveillance rapprochée (contrôle à 4mois,12mois et 24mois puis reclasser BIRADS2 si stable), la probabilité de malignité étant comprise entre 0 et 2 %. Dans notre série toutes les lésions BIRADS3 ont été confirmées bénignes soit une sensibilité de 100%. Nous préconisons donc tel que le recommande l’ACR un contrôle échographique de ces lésions.
– Le classement ACR4 signifie toujours une anomalie douteuse nécessitant une biopsie. La VPP de l’ACR4 étant large (2-95% de cancer), il est recommandé d’utiliser la sous-division en ACR4A, ACR4B et ACR4C. Cette sous-division de l’ACR4 est optionnelle, mais peut aider d’une part à évaluer sa pratique et d’autre part à mieux corréler les résultats radiohistologiques. Dans notre série 18 lésions douteuses ont été classées BIRADS 4A ; Elles ont toutes été confirmées bénignes par l’histologie avec une sensibilité de 100%.
– Une lésion ACR5 est évocatrice de cancer (VPP > 95 %) ; et doit être biopsiée pour obtenir un diagnostic. Toutes les lésions BIRADS 5 de notre série ont été confirmées malignes par l’histologie soit une sensibilité de 100%.

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Table des matières

INTRODUCTION
NOTRE ETUDE
1. MATERIEL ET METHODE
1.1. Type d’étude
1.2. Période d’étude
1.3. Cadre d’étude
1.4. Patients
1.4.1. Critères d’inclusion
1.4.2. Critères de non-inclusion
1.4.3. Caractéristiques de la population d’étude
1.5. Matériel
1.6. Méthodologie
1.6.1. Procédure
1.6.2. Analyse descriptive
1.6.2.1. Etude sémiologique
1.6.2.2. Classification BIRADS de l’ACR échographique
1.6.2.3. Etude comparative et corrélation
1.6.3. Analyse statistique
2. RESULTATS
2.1. Résultats échographiques
2.1.1. Topographie des lésions
2.1.2. Caractéristiques échographiques des lésions
2.1.2.1. Autres anomalies échographiques
2.1.2.2. Anomalies ganglionnaires : Classification de Mainiero
2.1.3. Orientation diagnostique des lésions observées à l’échographie
2.2. Résultats de l’élastographie
2.2.1. Quantification de la dureté des lésions en KPa
2.2.2. Diagnostic de présomption
2.3. Résultats anatomopathologiques
2.4. Confrontation des données de l’imagerie aux résultats anatomopathologiques
2.4.1. Anomalies rencontrées en fonction de l’âge
2.4.2. Confrontation des données échographiques à l’anatomopathologie
2.4.3. Confrontation des données échographiques par rapport à l’élasticité des lésions
2.4.4. Confrontation des données élastographiques par rapport à l’anatomopathologie
3. DISCUSSION
3.1. L’âge
3.2. L’échographie
3.2.1. Critères sémiologiques
3.2.2. Confrontation écho-histologique
3.3. ACR
3.4. Elastographie
3.4.1. Elasticité des lésions
3.4.2. Confrontation élasto-histologique
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXE

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