L’asthme est une affection chronique multifactorielle impliquant des facteurs génétiques et environnementaux. Sa pathogénie s’articule autour de l’inflammation bronchique, l’hyperréactivité bronchique et l’obstruction bronchique [1]. L’OMS estimait à environ 300 millions le nombre d’asthmatiques dans le monde en 2016, bien que ces chiffres communiqués soient considérés sous-estimés. C’est un problème sanitaire mondial majeur, qui concerne toutes les classes d’âge, avec une prévalence croissante dans de nombreux pays en voie de développement, des coûts de traitement en augmentation et qui constitue une charge de plus en plus importante pour les patients et la société. [2].
D’après les dernières estimations publiées en décembre 2016, il y a eu 383 000 décès dus à l’asthme en 2015 dans le monde. Bien que plus de 80% des décès sont enregistrés dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, l’asthme ne sévit pas moins dans les pays plus développés. [3]. Cela dénote tout simplement une plus grande difficulté de prise en charge dans les pays en voie de développement, en raison du contexte socioéconomique, de faits inhérents aux patients et ceux se rapportant aux personnels soignants [1, 2]. Face à l’émergence des maladies chroniques dans le monde, face à leur fort poids sur les ressources humaines (mortalité) et sur l’économie, face au constat que les innovations biomédicales depuis les années 70 ne suffisait pas pour une prise en charge optimale par l’évaluation de concepts nouveaux (années 90) dont la qualité de vie [4, 5], est née une réelle prise de conscience de la collectivité médicale et une volonté politique à l’échelle mondiale de faire de l’éducation thérapeutique l’une des priorités en matière de santé publique, marquée par une succession de textes officiels [6]. L’éducation thérapeutique du patient (ETP) s’est alors dessiné dans le temps comme étant le meilleur élément de réponse et surtout le plus viable. C’est ainsi qu’ont été pensés les lieux où l’ETP pourrait être dispensée et que les écoles de l’asthme vont naître un peu partout dans le monde [4, 5, 6].
Épidémiologie de l’asthme
Épidémiologie descriptive
Prévalence
L’OMS estimait à environ 300 millions le nombre d’asthmatiques dans le monde en 2016. La maladie touche aussi bien tous les âges que toutes les classes sociales de patients. Ce chiffre est en constante évolution dans tous les pays surtout les pays industrialisés [2]. En France, l’asthme touchait en 2006, environ 6,25 millions d’individus soit 6,7% de la population générale [8]. Aux Etats Unis, la prévalence est en constante augmentation depuis 1960, d’environ 50% tous les 10 ans. En Afrique la prévalence globale différait selon le pays et variait entre 3,9 et 8,1% en 1998 [9]. Les enquêtes épidémiologiques dans 10 pays, rapportées par Chaulet portant en majorité sur des sujets âgés de 6 à 20 ans ont montré une prévalence variant entre 2 et 10 % [10]. Au Sénégal, on ne dispose pas des chiffres sur la prévalence globale. Une étude menée en 1998 dans le Service de Pneumologie du CHNUF trouvait 8,2% d’asthmatiques parmi tous les malades consultant durant la même période et en 2013 de 9,2% [11, 12]. Le taux de prévalence de l’asthme s’élève parallèlement à l’occidentalisation des modes de vie et à l’urbanisation. Certaines projections évaluent la croissance de la proportion de la population urbaine de 45 % à 59 % en 2025. Une croissance importante du nombre d’asthmatiques est donc à craindre au cours des deux prochaines décennies. On estime ainsi qu’il pourrait y avoir 100 millions de patients asthmatiques supplémentaires en 2025 [13].
Mortalité
D’après les dernières estimations de l’OMS, publiées en décembre 2016, il y a eu 383 000 décès dus à l’asthme en 2015 dans le monde. La majorité de ces décès était enregistrée dans des pays à revenus faible et intermédiaire. Cette mortalité était en augmentation principalement chez les sujets de plus de 65 ans [2, 3]. En France, elle était globalement stable depuis 1990 et on chiffrait 909 décès en 2008 [14]. En Afrique, nous ne disposons pas de chiffres globaux et de très peu de collectes de données. Masoli et al. [13] dans son rapport de 2004 au comité exécutif du GINA ne mentionnaient que la Mauritanie comme pays africain sur la carte représentative de la mortalité chez les sujets de 3 à 34 ans. Le taux de mortalité s’y élevait à 1,5 décès pour 100.000 habitants quand il était de 0,5 en France. Au Sénégal, il n’existe pas de données concernant la population générale. Une étude menée à l’Hôpital Principal de Dakar (HPD) montrait, en 2002, une mortalité de 6% parmi 30 cas d’AAG [15].
Impact socio-économique
Les conséquences économiques de l’asthme sont importantes et peuvent constituer un lourd fardeau pour les personnes atteintes, leurs familles et la société en général. Elle est l’une des maladies les plus coûteuses. Les coûts s’y rapportant peuvent être distingués en couts directs (consultations médicales, hospitalisations, traitement en salle d’urgences, frais de laboratoires, de médicaments et autres thérapeutiques) estimés à 35 à 60% des dépenses, et indirects qui résultent des pertes financières non médicales dues à la maladie : absentéisme scolaire et professionnel, invalidité et décès soit 40 à 65% des dépenses [16]. Le nombre de journées perdues (DALYs : disability-adjusted life years ou somme des années de vie perdues par mortalité précoce et des années vécues avec un handicap important) liées à l’asthme, a été estimé à environ quinze millions par an. L’asthme représente environ 1 % de l’ensemble des DALYs, ce qui montre la prévalence importante et la sévérité de l’asthme. On retrouve les mêmes chiffres pour le diabète, la cirrhose du foie, ou la schizophrénie [13]. Les exacerbations sont responsables de 50 à 70% du coût de la prise en charge. Plus l’asthme est sévère et mal contrôlé, plus il engendre des dépenses. Le coût lié à l’asthme sévère représente 80% des dépenses de santé liées à l’asthme [2, 13]. En France les coûts liés à l’asthme sont estimés à 1,36 milliards de dollars.
Au Sénégal le coût moyen des examens complémentaires est estimé de 41 704 francs/mois (environ 64 euros) et celui de la prise en charge thérapeutique de 25 216 francs/mois (environ 39 euros).
Épidémiologie analytique
Répartition selon le sexe
Le sexe ratio garçon/fille varie de 1,5 à 3,3 avant la puberté. Il est inférieur à 1 à l’âge adulte.
Répartition selon l’âge
L’asthme touche tous les âges mais surtout les sujets jeunes. Trois quarts des asthmatiques ont leur première crise d’asthme avant l’âge de 20 ans. Un second pic d’apparition se situe aux environs de la cinquantaine : ce sont les asthmes dits tardifs, en général non allergiques [1].
Physiopathologie
La physiopathologie est complexe et s’articule autour de trois phénomènes intriqués que sont :
1. L’inflammation bronchique
2. L’hyperréactivité bronchique
3. L’obstruction bronchique
L’inflammation bronchique est constante même dans les formes légères et récentes. L’agresseur lors de son passage dans les voies aériennes (allergènes, micro-organismes, toxiques, irritants) va être confronté aux cellules résidentes normales de l’appareil respiratoire (c. épithéliales, macrophages, mastocytes) et les cellules recrutées par la circulation (polynucléaires neutrophiles, polynucléaires éosinophiles, lymphocytes, plaquettes). Les polynucléaires éosinophiles représentent la clef de l’inflammation ; leur présence dans les voies aériennes est corrélée à la sévérité de l’asthme. L’inflammation est caractérisée par :
– Des infiltrats cellulaires liés à la desquamation des cellules épithéliales qui favorisent l’accès de l’agresseur à la sous-muqueuse
– Un œdème de la muqueuse.
En entraînant un épaississement de la muqueuse elle va conduire à un remodelage bronchique qui associe un épaississement de la membrane basale et une hypertrophie des glandes à mucus aboutissant à une hypersécrétion de mucus. Avec la participation d’un spasme du muscle lisse bronchique sous le contrôle du système nerveux autonome, l’hypersécrétion de mucus responsable de la formation de bouchons muqueux va conduire à l’obstruction bronchique.
L’importance de ces phénomènes physiopathologiques de base évolue dans le temps et on peut en effet distinguer chronologiquement trois étapes :
● Une réaction initiale, qui survient immédiatement après l’inhalation de l’antigène, caractérisée surtout par une bronchoconstriction,
● Une phase dite tardive qui survient 6 à 12 heures après la réaction initiale et où la réaction cellulaire et inflammatoire est importante ;
● Un passage à la chronicité lorsque les crises se succèdent : l’inflammation s’installe et on assiste à la mise en place d’une hyperréactivité bronchique, caractéristique de la maladie asthmatique. Cette phase est marquée par la détérioration des fonctions respiratoires en dehors des épisodes critiques ; elle est dominée par l’inflammation chronique et l’installation d’un processus de fibrose bronchique.
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE
L’ASTHME
I. Définitions
II. Épidémiologie de l’asthme
II.1. Épidémiologie descriptive
II.1.1. Prévalence
II.1.2. Mortalité
II.1.3. Impact socio-économique
II.2. Épidémiologie analytique
II.2.1. Répartition selon le sexe
II.2.2. Répartition selon l’âge
III. Physiopathologie
IV. Diagnostic de l’asthme
IV.1. Diagnostic positif
IV.2. Diagnostic différentiel
IV.3. Diagnostic étiologique
IV.4. Formes cliniques
IV.4.1. Formes symptomatiques
IV.4.2. Autres formes
V. Evaluation dans un premier temps de l’asthme : Sa sévérité
VI. Prise en charge de l’asthme
VI.1. Principes généraux
VI.2. Moyens
VI.2.1. Le traitement pharmacologique
VI.2.2. La prise en charge des facteurs favorisants et des comorbidités
VI.2.3. L’éducation thérapeutique
VII. Indications – Surveillance – Résultats – Evolution – Pronostic
VII.1. Traitement des crises
VII.1.1. Traitement des exacerbations en soins primaires ou aigus
VII.1.2. Évaluation de la réponse au traitement
VII.1.3. Le plan d’action écrit
VII.2. Traitement de fond
VIII. Evaluation dans un second temps : Le niveau de contrôle
IX. Stratégie thérapeutique dans l’asthme
L’ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE DU PATIENT (ETP)
I. Définition
II. Historique
III. Intérêts de l’ETP
IV. Les acteurs concernés par l’éducation thérapeutique
IV.1. Les patients : importance de l’approche cognitivo-comportementale
IV.1.1. Croyances, représentations et vécu de la maladie asthmatique
IV.1.2. Asthme et anxiété
IV.1.3. Processus d’acceptation de la maladie
IV.1.4. « Lieu de maîtrise de sa santé » (health locus of control)
IV.1.5. Capacité à faire face à la situation (coping)
IV.1.6. Facteurs culturels
IV.1.7. Facteurs socio-économiques
IV.2. La famille et les proches
IV.3. Les professionnels de santé
V. Les étapes de la démarche éducative
V.1. Première étape : le diagnostic éducatif
V.2. Deuxième étape : Le contrat d’éducation et les techniques éducatives
V.3. Troisième étape : mise en œuvre du programme éducatif
V.3.1. Les principes d’apprentissage
V.3.2. Les lieux de mise en œuvre de l’éducation thérapeutique
V.3.2. L’organisation du programme éducatif
V.3.3. La mise en œuvre de l’éducation thérapeutique
V.4. Quatrième étape : L’évaluation des compétences du patient
V.4.1. Types d’évaluation
V.4.2. Instruments d’évaluation
VI. Évaluations de la qualité et de l’efficacité du programme éducatif
VII. Les programmes d’éducation « simplifiés » et « structurés »
VIII. La place du plan d’action écrit
L’ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE À L’ÉCOLE DE L’ASTHME DU SERVICE DE PNEUMOLOGIE DU CHNUF
I. Historique
II. Organisation et activités
DEUXIÈME PARTIE
I. Matériel et Méthodes
I.1. Type et période d’étude
I.2. Cadre d’étude
I.3. Population d’étude
I.4. Critères d’inclusion
I.5. Critères de non inclusion
I.6. Recueil des données
I.7. Traitement et analyse des données (Plan d’analyse et Outils statistiques et informatiques employés)
I.8. Système de référence
I.9. Difficultés rencontrées dans l’étude
I.10. Aspects éthiques
II. Résultats
II.1. Partie descriptive
II.1.1. Données épidémiologiques
II.1.2. Antécédents
II.1.3. Score de qualité de vie
II.2. Partie comparative
II.2.1. Comportement suivant chaque item
II.2.2. Comportement suivant chaque dimension
II.2.3. Score total
DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAHIQUES
ANNEXE