Ce mémoire a été réalisé en collaboration avec Charlotte Pigier, étudiante en Master 2 MEEF. Le 8 mars 2017 marquait les 40 ans de la journée internationale des droits des femmes (officialisée en 1977 par les Nations Unies) : l’occasion de faire un bilan sur leur situation. Les droits des femmes progressent, cependant les inégalités hommes-femmes sont encore très présentes dans notre société. En effet, même si ces inégalités se réduisent en matière d’éducation (les filles représentent 57% des étudiants à l’université) ou même dans la sphère politique, d’autres en revanche perdurent encore entre les deux sexes : inégalités de salaires, inégal partage du travail domestique, etc. Aujourd’hui encore, discriminations, différences entre hommes et femmes existent toujours.
Mixité
Histoire du terme
Le mot « mixité » est récent. Au XIXe siècle, nous faisons référence qu’à la coéducation, c’està-dire l’instruction et l’éducation en commun des garçons et des filles et qui définit donc une « cohabitation en commun ». Ce terme de coéducation, nous le retrouvons dans la seconde édition de 1911 du Dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire de Ferdinand de Buisson. D’autres termes sont aussi utilisés à cette même époque comme celui de gémination, c’est-à-dire « le regroupement par âge des garçons et des filles », par petits effectifs. En 1950 le terme mixité s’impose comme nom en référence à la mixité scolaire. Toutefois, les académiciens éprouvent une certaine dubitation quant à la perception de ce mot : « Mixité : n.f – Etat d’une école où les filles et les garçons sont admis. Certains éducateurs émettent des doutes sur l’efficacité de la mixité. » C’est à la fin du XIXe siècle que le terme « mixte » du latin miscere signifiant « mélanger », désigne la coexistence des deux sexes. C’est au cours des années 60 que ce terme est attribué à d’autres diversités que celle du sexe : « mixité sociale », « mixité religieuse », « mixité culturelle » … Ce terme « mixité » est l’objet d’un débat et d’un consensus sur le plan européen. En anglais, le substantif mixité est intraduisible, car il n’existe pas. En effet les anglo-saxons utilisent le terme de coéducation. Ce terme est perçu comme « un mélange de natures différentes » et donc un face à face entre « le même » et « l’autre ». Il est donc compliqué de le percevoir comme multiple et complémentaire.
Définitions actuelles
Dans le dictionnaire, la mixité est définie selon deux sens. Le premier sens renvoie au mélange des genres et des sexes et donc à la cohabitation entre les femmes et les hommes. D’après cette première définition, nous en concluons donc que le terme définit d’abord le regroupement des deux sexes lorsque que celui-ci n’est pas suivi d’indications plus spécifiques. Dans un deuxième temps, la mixité est définie comme un mélange de tout ce qui peut être différent, par extension et donc comme une cohabitation entre personnes de religions, de races, de pays, de catégories socio professionnelles différentes par exemple. Dans ce mémoire nous prenons essentiellement appui sur la première définition du mot « mixité » qui renvoie au mélange des genres et des sexes. En effet, dans ce mémoire de recherche, nous étudions l’adhésion aux stéréotypes après et avant une séquence en danse. L’adhésion aux stéréotypes est donc liée au genre et au sexe. La seconde définition du mot « mixité » qui englobe également « une cohabitation entre personnes de religions, de races, de pays et de catégories socio professionnelles différentes » est aussi intéressante et complémentaire pour cette recherche. La mise en place d’une expérimentation intègre un certain cadre à respecter. Ce cadre impose à la fois de constituer des groupes dits « équilibrés» selon deux paramètres : le genre mais aussi la catégorie socio professionnelle des parents des élèves. Afin de respecter une certaine mixité et un certain équilibre entre les groupes, il était essentiel de recenser l’ensemble des catégories socio professionnelles des parents.
La mixité à l’école
La séparation des sexes à l’école a été instaurée par l’Eglise Catholique (notamment avec ses réformes du XVIème et XVIIème siècles) pour des raisons de moralité. L’éducation était principalement réservée aux garçons, les femmes devant plutôt s’occuper de la vie domestique.
Cette séparation va être remise en cause pour un principe d’égalité entre tous les citoyens lors de la Révolution Française par Condorcet, Lakanl, l’abbé Seyes et d’autres. Le décret du 28 octobre 1793 décide que « les filles apprendront à lire, écrire, compter, les éléments de la morale républicaine, elles seront formées aux travaux manuels de différentes espèces utiles et communes » afin de « …préparer les filles aux vertus de la vie domestique ». Cette éducation devait donc être confiée à des femmes qui pouvaient maintenant exercer la fonction d’institutrice. Toutefois, les communes ne devaient plus financer une classe, mais deux. Cellesci refusent alors d’augmenter le budget de l’instruction, surtout pour les filles.
L’ordonnance de 1816 couramment représentée comme un texte fondateur de l’enseignement public, interdit de réunir les garçons et les filles pour l’instruction. En 1833 la loi Guizot organise l’école primaire, universelle. Les municipalités vont alors investir dans des écoles de garçons, mais on y admettait les filles pour remplir les classes uniques dans les petites communes par nécessité économique: on parle alors de classe unique. Cependant les filles et les garçons étaient séparés dans l’espace classe et ne partageaient pas la cour de récréation. Des écoles de filles existaient mais en nombre insuffisant. L’éducation des filles était destinée aux familles et l’Etat ne s’en préoccupait pas.
La situation évolue avec la loi Duruy du 10 avril 1867 sur l’enseignement primaire. Celle-ci prévoit la nomination, dans toutes les écoles mixtes, d’une femme capable d’enseigner les travaux d’aiguilles et promeut une meilleure rétribution pour les maîtresses. Elle incite à la gratuité de l’école publique. Elle souhaite également la laïcisation afin d’arracher l’éducation des filles à l’influence de l’église. Il faut attendre 1880 pour que l’enseignement secondaire des filles soit adopté. Les enseignements sont toutefois différents de ceux des garçons pour rester conforme à la distribution des rôles sociaux des deux sexes. L’éducation nouvelle du XXème siècle fait peu à peu évoluer les choses. Avec la Première Guerre Mondiale, les femmes prennent de plus en plus de place dans l’éducation puisqu’elles ont dû remplacer les hommes partis au front. En 1924 (décret Léon Bérard), elles obtiennent le droit d’étudier les mêmes programmes que ceux des garçons et de passer le baccalauréat.
Après la seconde Guerre Mondiale, peu à peu la mixité fait son chemin, lentement, dans les mouvements de jeunesse et dans l’éducation scolaire. En 1957, la mixité de l’enseignement primaire est légale. En 1959, le ministère décide de ne construire que des lycées mixtes dans le cadre de la réforme Berthoin. Avec la création des Collèges d’Enseignement Secondaire dans les années 1960, la mixité va se répandre progressivement. Il faut attendre 1975 (11 juillet) et la loi Haby pour que la mixité devienne obligatoire à l’école, de la maternelle au lycée (Décrets d’application en 1976). Celle-ci se répand ensuite dans les universités et les Grandes Ecoles.
La mixité en EPS
Principes
La mixité scolaire est donc un principe d’organisation (contenus, consignes, évaluations…) censé permettre une éducation donnée en commun aux filles et aux garçons, et qui tienne compte des différences entre le sexes (James Joseph 2015). La mixité scolaire est donc un choix pédagogique arrêté. La mixité en EPS (éducation physique et sportive) est devenue centrale au fil des années dans le milieu scolaire. En effet, la question du genre à l’école est devenue « un thème crucial » (Rapport Eurydice). En effet, les inégalités entre les filles et les garçons persistent. De ce fait, selon le programme EPS collège de 1997, nous citons : « La mixité doit être encouragée mais ne peut être conduite dans l’ignorance des différences. ». Le programme « EPS lycée professionnel » de 2002 prône l’importance de l’équité entre les filles et les garçons lors des évaluations afin de réduire en maximum tout écart de notation.
La mixité en EPS s’apparente donc à une volonté de l’institution qui repose sur une idéologie de l’égalité entre les filles et les garçons dans un processus de coéducation, c’est-à-dire une éducation donnée en commun aux filles et aux garçons. Une certaine incohérence persiste cependant entre les discours et les actes : les conclusions d’Artus (1998,1999) montrent néanmoins que les enseignant(e)s sont idéologiquement favorables à l’égard de la mixité, mais qu’ils/elles n’échappent pas au maintien des stéréotypes liés aux APSA et à leurs rôles sociaux.
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Table des matières
Introduction
Cadre théorique
1.1 Mixité
1.1.1 Histoire du terme
1.1.2 Définitions actuelles
1.1.3 La mixité à l’école
1.1.4 La mixité en EPS
1.2 L’apprentissage coopératif
1.2.1 L’apprentissage coopératif
1.2.2 Les effets de l’apprentissage coopératif
1.3 Stéréotypes
1.3.1 Définition
1.3.2 La construction des stéréotypes
1.3.3 Stéréotypes associés aux APSA et à la mixité
Objectif et hypothèses
La méthode d’expérimentation
2.1 Caractéristiques de la population choisie
2.2 Outils de mesure sélectionnés
2.2.1 Le questionnaire
2.2.2 Le visionnage vidéo
2.3 Le choix des indicateurs
2.4 Procédure
2.4.1 Elaboration de la séquence
2.4.2 Constitution des groupes
2.5 Conditions expérimentales
2.5.1 L’expérimentation
2.5.2 Fidélité des conditions expérimentales
Résultats
Discussion
Conclusion
Annexes
Bibliographie