Développements théoriques de nouveaux dispositifs de détection de gaz

Les forces d’interactions

     Dans le contexte de cette thèse, les forces d’interaction jouent un rôle important sur les processus d’adsorption des molécules à la surface des nanomatériaux ainsi que sur la captation des molécules de gaz. Les propriétés d’interface sont le résultat d’une contribution complexe de liaisons covalentes, d’interactions non covalentes et de transfert de charge, etc…, ce qui conduit à des applications prometteuses. En effet, ces systèmes finaux présentent des propriétés électroniques différentes des composants isolés. Par conséquent, contrôler et manipuler les fonctionnalités de l’interaction moléculaire à l’interface des matériaux représente un défi à la fois théorique et expérimental. Dans le cadre de cette thèse, il a été choisi de fonctionnaliser les nanomatériaux via des interactions non covalentes. Ces interactions se retrouvent dans tous les types de matériaux qui subissent des forces attractives et/ou répulsives entre eux . Ces interactions sont présentes dans de nombreux systèmes naturels et synthétiques de reconnaissance ou de détection. Les interactions non covalentes impliquant des cycles aromatiques jouent un rôle déterminant en chimie et en biologie 87, en particulier dans les modifications de la surface de matériaux. Il a été démontré précédemment que divers types d’interactions non covalentes entrent en jeux lors de la fonctionnalisation des nanotubes de carbone et du graphène. Il s’agit en particulier des interactions d’empilement ?, des liaisons hydrogène (liaisons H), des interactions électrostatiques 90, des interactions faibles de van der Waals . Ces interactions seront brièvement décrites dans cette partie ainsi que les fonctionnelles (DFT-D3) incluses dans nos calculs.

Le graphène

     Le graphène est considéré comme l’une des réalisations les plus remarquables dans le domaine de la science et de la technologie 127. L’étude de ce matériau a été rendue abordable depuis la première réalisation expérimentale proposée en 2004 par Andre Geim du département de physique de l’université de Manchester 128. Cette découverte a suscité une grande variété de recherches, matérialisées par un nombre croissant de publications sur ce matériau, en raison de ses propriétés optiques 128, chimiques et électroniques exceptionnelles 25. Il est important de mentionner que l’histoire du graphène remonte au XIXe siècle. En 1859, le chimiste britannique B. Brodie a décrit la structure hautement lamellaire de l’oxyde de graphite 129. L’étude théorique du graphène a été considérée pour la première fois en 1947 par P.R. Wallace qui a calculé sa structure de bande, en utilisant la méthode des liaisons fortes, pour servir de point de départ pour comprendre les propriétés électroniques du graphite 130. En 1956, J.W. McClure a fourni une description détaillée des propriétés électroniques de ce matériau, en suggérant un modèle théorique pour la fonction d’onde des électrons 131, 132. G.W. Semenoff a ensuite comparé ce modèle à l’équation de Dirac en 1984. Avec l’avancement des calculs théoriques, les chercheurs ont fait de grands progrès quant à l’identification du graphène .

Fonctionnalisation du graphène

    Plusieurs travaux ont été effectués en vue de modifier le graphène afin d’augmenter sa densité de porteurs de charges et d’ajuster sa fonction de travail 162, 163. Des efforts considérables ont été déployés pour déposer des molécules organiques ou inorganiques sur la surface du graphène, dans le but de fabriquer des matériaux nano-hybrides à base de graphène pour des applications nanoélectroniques et de détection. Ces efforts sont motivés par le fait que ces matériaux hybrides combinent les propriétés électriques, optiques et chimiques de chaque composé. Récemment, le greffage non covalent est apparu comme un moyen particulièrement prometteur, car il permet de préserver les propriétés électroniques et structurelles du graphène. De nombreux travaux ont été consacrés à la fonctionnalisation non covalente du graphène avec les métalloporphyrine MPo, car leur structure aromatique favorise la liaison non covalente avec le plan du graphène 164. Cette fonctionnalisation MPo a été vérifiée via des transferts de charge. Cette approche a été étudiée pour améliorer les performances de dispositifs électroniques à base de graphène. En utilisant une analyse statistique de mesures de spectroscopie à effet tunnel, il a été montré précédemment que l’interaction non covalente des porphyrines métalliques avec le graphène pourrait provoquer une ouverture de bande interdite selon l’atome de métal central de la porphyrine 165. Gajarushi et al. 166 ont étudié les propriétés électroniques du graphène fonctionnalisé de manière non covalente avec des porphyrines contenant du zinc. Cette fonctionnalisation provoque un décalage du point de Dirac, un courant de trou amélioré et un courant d’électrons réduit. Lorsqu’ils sont mis en œuvre dans un capteur chimirésistif, de nombreux MPo présentent des dipôles forts une fois liés à un analyte et des dipôles relativement faibles dans leurs états non liés. Ces fortes interactions dipolaires modifient la concentration des porteurs de charge dans le graphène et modulent la conductivité du capteur en fonction de la concentration en analyte 167. Le graphène-CVD fonctionnalisé par une porphyrine de Co a montré une résistance chimique à l’ammoniac hautement sensible par rapport au graphène non fonctionnalisé. Ce dispositif à gaz a été fabriqué en mettant des gouttes d’une solution de porphyrine sur un réseau de capteurs graphène-CVD .

Propriétés électriques, thermiques et mécaniques des SWNTs

     Les nanotubes de carbone de type « armchair » ont des propriétés électroniques comparables à celles des conducteurs métalliques, tandis que les nanotubes de type « zigzag » ou « chiral » (avec ? − ? ≠ 3? ) ont à un comportement semi-conducteur. Selon les règles de construction et en tenant compte de toute chiralité possible, il a été démontré que sur un échantillon synthétisé expérimentalement, 1/3 des nanotubes de carbone auront un comportement métallique, et 2/3 auront un comportement semi-conducteur 172. De plus, dans la structure des bandes des SWNTs, plus le diamètre du SWNT est grand, plus le gap est petit et se rapproche du gap nul du graphène. Les propriétés électroniques des nanotubes sont très sensibles aux défauts (trous, pentagones, dopants 173). La conductivité électrique est mesurée généralement en utilisant le microscope à force atomique. Il a été observé que les nanotubes métalliques ont un régime de conduction électrique balistique, tandis que les semi-conducteurs ont un régime diffusif4 174. Les nanotubes ont plusieurs caractéristiques similaires à celles du graphène. Ils ont une mobilité de porteurs de charges très remarquable ≈ 104cm2.V-1.s-1 , car ils peuvent véhiculer une densité de courant de l’ordre de 109 A/cm2 175. La jonction de ces nanomatériaux peut former des dispositifs de type transistors. Ils peuvent acheminer des signaux électriques à des vitesses élevées lorsqu’ils sont utilisés comme interconnexions sur des dispositifs semi-conducteurs. Les nanotubes de carbone présentent également des propriétés optiques en raison de leurs structures électroniques qui dépendent des indices de Hamada. En conséquence, chaque type de SWNT a des propriétés d’absorption et d’émission différentes. Les énergies de transition sont différentes pour les SWNTs de diamètre différents, elles sont classées en fonction des diamètres des nanotubes dans le diagramme de Kataura (voir la figure 1.8.b). Seuls les nanotubes semi-conducteurs fluorescent du fait de la présence du gap. Il a été prédit théoriquement que ce type de nanotubes présente un indice de réfraction extrêmement faible 176. Il a ensuite été montré qu’un réseau de nanotubes serait le matériau le plus sombre possible avec une réflectance totale intégrée correspondante de 0.045% 177. Les nanotubes de carbone sont capables d’absorber 99.9% de la lumière. Les nanotubes de carbone possèdent des conductivités thermiques élevées à température ambiante. Ces structures carbonées rigides forment des liaisons covalentes de types sp2 et sp3 entre les atomes de carbones, qui favorise une transmission de la chaleur par vibration des réseaux (phonons) 178, ce qui explique cette conductivité. Le diamant et le graphite ont des conductivités thermiques valant 400 et 2200 W.m-1.K-1. Quant aux nanotubes de carbone, des études théoriques effectuées par dynamique moléculaire ont révélé des conductivités thermiques qui atteignent ≈ 6600 W.m-1.K-1 pour les SWNT (10,10) à température ambiante. Pour les nanotubes qui ne présentent pas de défauts structurels, la conductivité peut dépasser celle du diamant 178. D’après une autre étude sur le SWNT(10,10) avec la prise en compte des défauts, une conductivité thermique ≈ 2980 W.m-1 .K-1 a été trouvée à température ambiante 179. En général, les nanotubes de carbone peuvent enregistrer des valeurs de conductivité thermique différentes en fonction de leurs structures, ces valeurs peuvent aller de 0,1 W.m-1. K-1 à des valeurs très élevées comme 6600 W.m-1.K-1 180.

Synthèse des nanomatériaux carbonés

    De manière générale, il existe plusieurs procédés pour la synthèse des nanomatériaux carbonés (voir chapitre 2) et qui peuvent êtes devisés en deux grandes familles : les méthodes de synthèse par voie chimique ou physique. Il est communément rapporté dans la littérature que la synthèse de nanomatériaux par voie chimique et particulièrement par dépôt chimique en phase vapeur (en anglais Chemical Vapor Deposition (CVD)) 256 est la méthode la plus appropriée pour la production de nanomatériaux carbonés de très bonne qualité cristalline. C’est une méthode catalytique qui repose sur la décomposition d’un gaz précurseur à la surface de particules de catalyseur dans un four porté à plus ou moins haute température (300-1200°C). Dans le cas des nanomatériaux carbonés, le précurseur est un gaz carboné et les particules sont le plus souvent de fines gouttelettes métalliques. Il existe plusieurs types de sources de carbone à savoir : acétylène, méthane, éthane, monoxyde de carbone. Leurs décompositions au contact de la particule métallique provoquent la libération d’atomes de carbone qui précipitent à sa surface. Cette condensation induit la croissance de nanomatériaux. La partie critique de cette méthode de synthèse réside dans la préparation et le contrôle de la taille des particules de catalyseur puisque la taille et la répartition de ces gouttelettes conditionnent la nature et la densité des structures carbonées produites. L’avantage majeur que présente cette méthode est que les nanomatériaux peuvent être utilisés directement après la synthèse sans passer par des méthodes de purification pour le développement des dispositifs électroniques. Dans ce travail, la synthèse de nanotubes de carbone et du graphène a été étudiée par CVD (étude réalisée par le Dr. Fatima Bouanis).

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 Méthodes théoriques
1. Equation de Schrödinger
2. Approximation de Born-Oppenheimer
3. La méthode Hartree Fock (HF)
4. Corrélation électronique
5. Théorie de la fonctionnelle de la densité (DFT)
5.1. Les théorèmes de Hohenberg et Kohn
5.2. Equations de Kohn-Sham
5.3. Approximation de la densité locale (LDA)
5.4. Approximation de gradient généralisé (GGA)
5.5. Fonctionnelles hybrides
6. Bases atomiques
7. Erreur de superposition des bases (BSSE)
8. Les forces d’interactions
8.1. Interaction électrostatique
8.2. Liaison Hydrogène
8.3. Interactions de van der Waals
8.4. Interaction d’empilement ?-?
8.5. Les fonctionnelles DFT-D3
9. Systèmes périodiques
9.1. Réseau direct et Réseau réciproque
9.2. Théorème de Bloch
9.3. Code Crystal
10. Propriétés électroniques
Chapitre 2 Introduction aux nanomatériaux à base de carbone : le graphène et les nanotubes
1. Le graphène
1.1. Structures cristallographique et électronique du graphène
1.2. Les propriétés du graphène
1.3. Applications
1.4. Obtention du graphène
1.5. Fonctionnalisation du graphène
2. Les nanotubes de carbone
2.1. Structure cristallographique et électronique des nanotubes de carbones
2.2. Propriétés électriques, thermiques et mécaniques des SWNTs
2.3. Applications des nanotubes de carbone
2.4. Synthèse des nanotubes de carbone
2.5. Fonctionnalisation des nanotubes de carbone
Chapitre 3 Fonctionnalisation des nanotubes de carbone et de graphène par l’imidazole pour la détection de CO2
1. Introduction
2. Détails de calculs
3. Résultats et discussions
3.1. Nanomatériaux carbonés (CRYSTAL)
3.2. Utilisation du code GAUSSIAN et de la méthode ONIOM
3.4. Les interactions du complexe CO2-imidazole avec les nanomatériaux de carbone (CRYSTAL)
4. Conclusion
Chapitre 4 Aspects expérimentaux
1. Introduction
2. Synthèse des nanomatériaux carbonés
2.1. Synthèse de nanotubes de carbone mono-parois (SWNTs)
2.2. Synthèse du graphène
3. Fonctionnalisation des nanomatériaux carbonés
3.1. Caractérisation structurale : Microscope à Force Atomique (AFM), Microscopie électronique à balayage (MEB), Microscopie électronique en transmission (TEM) et Microscopie électronique à transmission à balayage (STEM-EDS)
3.2. Spectroscopie Raman
3.3. Spectroscopie de photo-électrons induits par rayons X (XPS)
3.4. Mesures électriques
4. Conclusion
Chapitre 5 La fonctionnalisation des nanomatériaux carbonés (SWNT(8,0) et graphène) par une série de porphyrines/phtalocyanines pour la détection des gaz CO/NO
1. Introduction
2. Etudes des systèmes moléculaires
2.1. Molécules fonctionnalisantes
2.2. Interaction molécule-gaz
3. Fonctionnalisation non covalente de SWNT(8,0) par une série de porphyrines/phtalocyanines pour la détection des gaz CO/NO
3.1. Détails de calculs
3.2. Fonctionnalisation non covalente du SWNT(8,0)
3.3. Capture des gaz CO et NO sur le SWNT(8,0) fonctionnalisés
4. La fonctionnalisation de graphène par une série de porphyrines/phthalocyanines pour la détection des gaz CO/NO
4.1. Détails de calculs
4.2. Le processus théorique de la fonctionnalisation non covalente du graphène
4.1. Capture des gaz CO et NO sur le graphène fonctionnalisé
5. Conclusion
Conclusion générale et perspectives
A. Annexes
2.1 A.1. Annexe 1
2.2 A.2. Annexe 2
2.3 A.3. Annexe 3
2.4 A.4. Annexe 4
Bibliographie

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