Physique du spin
Les particules fondamentales telles que les protons (ou noyaux d’hydrogène 1H) possèdent une propriété physique intrinsèque appelée « spin », une forme quantifiée de moment angulaire. Comme une particule chargée en électrodynamique classique, les particules ayant un spin se comportent comme des dipôles magnétiques. L’IRM est basée sur l’interaction d’un spin nucléaire avec un champ magnétique externe, B0. Le noyau dominant de l’IRM est le protondans l’hydrogène et son interaction avec le champ externe entraîne la précession du spin du proton dans la direction du champ. On peut comprendre le mouvement de base de la rotation du proton en l’imaginant comme une rotation gyroscope chargé électriquement. Il possède donc une boucle efficace de courant électrique autour du même axe autour duquel il tourne. Cette boucle de courant efficace est capable d’interagir avec les champs magnétiques externes ainsi que de produire son propre champ magnétique. La force avec laquelle la boucle interagit avec un champ externe, ainsi que la force avec laquelle la boucle produit son propre champ, peut se décrire par un vecteur. La direction de ce vecteur n’est autre que l’axe du spin luimême et, comme l’aiguille d’une boussole, le vecteur de moment magnétique aura tendance à s’aligner le long de tout champ magnétique statique externe, B0. Cependant, cela est compliqué par le spin qui au lieu de « tomber » le long de la direction du champ, le vecteur de moment magnétique, comme le gyroscope en rotation, va se contraindre autour de la direction du champ. La fréquence angulaire de précession du proton (et pour l’axe de rotation également) est donnée par l’équation de Larmor ? = ?. ?0, où ? est une constante appelée le rapport gyromagnétique. Les groupes de particules avec spin ont tendance à s’aligner dans un champ magnétique statique (B0). Lorsque de l’énergie est ajoutée au système par une impulsion de radiofréquence (RF) externe avec une composante magnétique perpendiculaire au champ magnétique statique, le moment magnétique agrégé s’éloigne de l’état d’équilibre. L’IRM tire son signal de la relaxation des spins pour les ramener à leur état d’équilibre, pendant lequel ils restituent l’énergie absorbée, ce qui peut être détecté à l’aide d’un récepteur RF. Lorsqu’une image est reconstruite, l’intensité de l’image à chaque voxel est donc proportionnelle au nombre de spins dans le voxel et le rapport entre les spins et l’unité de volume est appelé « densité de rotation ». L’eau est omniprésente dans les tissus physiologiques et les molécules d’eau contiennent deux noyaux d’hydrogène avec un spin magnétique, ainsi le noyau d’hydrogène est le noyau le plus souvent imagé en IRM clinique. Dans ce type d’imagerie, la densité de spin est équivalente à la « densité de protons (DP) » puisque le noyau d’hydrogène est un proton unique. Comme la densité de l’eau est assez constante dans les structures du cerveau, la DP fournit un faible niveau de contraste dans les images du cerveau. Cependant, en manipulant le comportement de relaxation des spins en utilisant une séquence d’impulsions RF et en exploitant les différences temporelles du processus de la relaxation des spins, des contrastes additionnels peuvent être générés (Figure 1.1).
Le fer dans le cerveau
Avant de quantifier le fer par IRM, il est important de s’entendre sur une définition de ce que l’on entend par « fer ». En effet, le fer peut être trouvé sous deux formes principales: (1) fer héminique, comme dans l’hémoglobine, ou (2) le fer non-héminique (Schenck, 2003). Le fer non-héminique est stocké sous différentes formes protéiques dans le cerveau, appelées la ferritine ou hémosidérine. La majorité du fer non-héminique intracérébrale est présent sous forme de ferritine. Le corps humain adulte normal contient 3 à 5 g de fer, dont environ les deux tiers sont présents sous forme d’hémoglobine dans le sang. Le cerveau normal contient environ 60 mg de fer non-héminique. Des études (Bizzi et al., 1990; Morris et al., 1992) démontrent que jusqu’à 90% du fer présent dans le cerveau se trouverait sous forme de ferritine. Les ions paramagnétiques exercent un effet sur le contraste de l’IRM par l’intermédiaire de deux mécanismes possibles : le mécanisme de la sphère extérieure et le mécanisme de la sphère interne (Schenck and Zimmerman, 2004). L’effet de la ferritine sur le contraste IRM se produit par l’extérieur et apparaît sous forme d’hypo intensité sur des images pondérées T2/T2* avec un minimum ou pas effet sur le temps de relaxation T1. Il n’est pas clair : dans quelle mesure les dépôts de fer contribuent-ils à la physiopathologie des dysfonctionnements neurologiques liés à l’âge et les lésions tissulaires observées dans divers états pathologiques ou si le fer représente purement un épiphénomène (Zecca et al., 2004). Des niveaux élevés de fer sont potentiellement neurotoxiques par leur capacité à induire des réactions oxydatives. Les liens entre le métabolisme du fer, d’oxygène et la peroxydation des graisses polyinsaturées des acides dans le cerveau pouvant conduire à la mort cellulaire peuvent être la meilleure façon de le comprendre et d’examiner quelques éléments biochimiques clés in vivo. Le fer est une source bien connue d’oxydation des radicaux libres, car il a la capacité redox de donner ou de prendre des électrons, altérant ainsi son état d’oxydation. L’oxygène est utilisé par les cellules du cerveau pour cataboliser en énergie les molécules riches en carbone et en hydrogène. Au cours de ce processus, l’oxygène est réduit en eau et donne naissance à des radicaux libres anioniques superoxydes et à du peroxyde d’hydrogène (H2O2). Le peroxyde d’hydrogène est capable de traverser les membranes cellulaires. Lorsque le peroxyde d’hydrogène réagit avec le fer ferreux (Fe2+), des radicaux hydroxyles réactifs se forment et le fer ferreux devient ferrique (Fe3+) (Schenck and Zimmerman, 2004). La réaction du fer ferreux (Fe2+) avec le peroxyde d’hydrogène qui forme des radicaux libres (OH) qui sont des radicaux hydroxyles hautement réactifs et toxiques pour l’organisme et cause des dommages cellulaires.
L’atrophie multi-systématisée
L’atrophie multi-systématisée (AMS) est une forme atypique de parkinsonisme dégénératif. L’AMS est associée à une diminution du volume cellulaire (atrophie des cellules) de certains noyaux gris centraux, tronc cérébral et du cervelet, alors que ceux-ci sont conservés dans la MP, de sorte qu’une majorité des cas d’AMS peuvent être distingués de la MP (Spetsieris et al., 2009). Cependant, le diagnostic in vivo est souvent difficile, surtout dans les premiers stades de la maladie, et la différenciation en particulier avec la maladie de Parkinson comporte un taux élevé de diagnostics erronés (Litvan et al., 1997). Il est important de noter que ces troubles ont des pronostics très différents sur le plan du handicap, de réponse thérapeutique et de survie. La morbidité et la mortalité sont plus élevées chez les patients atteints d’AMS, qui répondent souvent mal aux traitements et dont l’incapacité motrice progresse plus rapidement que chez les patients atteints de MP. Chez les patients atteints d’AMS, les signes caractéristiques de RM comprennent la dégénérescence neuronale dans la substance noire pars compacta comme les patients MP, mais aussi une atrophie du putamen et une hypo-intensité T2*, une atrophie des pédoncules cérébelleux moyens, du pons et du cervelet. Ces marqueurs ont une spécificité relativement bonne, mais une faible sensibilité seulement (Meijer et al., 2012). Pour résumer, les niveaux de fer sont élevés dans les zones des ganglions de la base, ce qui indique un changement pathologique dans ces troubles. En particulier, la teneur en fer total augmente dans la substantia nigra dans les cas de PD et MSA. Les niveaux de fer dans le putamen augmentent dans les MSA par rapport au PD. Les niveaux de fer augmentent dans le globus pallidus dans les MSA (Dexter et al., 1992).
Myéline
La myéline est essentielle au bon fonctionnement du cerveau. Elle joue un rôle fondamental dans la détermination des potentiels de vitesse d’action ; lorsque l’intégrité de la myéline est compromise, les fonctions cérébrales sont affectées. Par ailleurs, lorsque de nouvelles fonctions cérébrales sont apprises ou que des voies de compensation se forment à la suite d’une lésion neuronale, on s’attend à voir une myélinisation accrue dans les voies nerveuses concernées. Par conséquent, une mesure in vivo précise du contenu de la myéline a des implications importantes pour la compréhension de la plasticité du cerveau et des maladies neurodégénératives. Les faisceaux d’axones myélinisés présentent une microstructure très ordonnée, qui est la principale source de contraste entre substance grise et substance blanche (Figure 1.8). La gaine de myéline est constituée de multiples des membranes avec des protéines incorporées. L’échange entre les membranes multiples réduit efficacement la perméabilité, « l’eau de myéline » est emprisonnée dans la gaine et forme un compartiment (Whittall et al., 1997). L’eau intra- et extra-axonale ne peut pas ne pas être discernée par un simple T2 ou T2*. Il n’est pas possible de séparer les différences présentes dans l’eau d’un voxel en fonction des temps de relaxation des protons de l’eau dans différents environnements microscopiques (compartiments). Dans la substance blanche humaine normale, la composante T2 la plus courte (environ 10-50 ms à 1,5 T) est attribuée à l’eau piégée entre les bicouches de myéline et une composante T2 intermédiaire (environ 80-100 ms) provenant de l’eau intra/extracellulaire (Figure 1.8).
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Table des matières
Introduction du manuscrit
Chapitre 1 Contexte clinique et scientifique
1.1. Introduction à l’IRM
1.1.1. Physique du spin
1.1.2. Phénomènes de relaxation
1.1.3. Séquences IRM
1.1.4. Récupération du signal IRM
1.2. Intérêt de la mesure du fer in vivo par IRM
1.2.1. Le fer dans le cerveau
1.2.2. Hétérogénéités dans le champ magnétique local et variation du signal T2*
1.2.3. Dépôt de fer et vieillissement normal
1.2.4. Dépôt de fer et pathologies du cerveau
1.3. Les méthodes de détection de fer in vivo
1.3.2. La relaxométrie R2*
1.3.3. Quantitative Susceptibility Mapping (QSM)
1.4. Relaxométrie à plusieurs composantes
1.4.1. Limites de la relaxométrie à une composante
1.4.2. Intérêts de la relaxométrie à plusieurs composantes
1.5. Problématique générale
Chapitre 2 Développement d’une approche afin d’analyser la relaxométrie T2* de manière bi-exponentielle
2.1. Introduction au chapitre 2
2.2. Prétraitement de l’image
2.2.1. Généralités
2.2.2. Théorie des filtres de bruit
2.2.3. Évaluation des filtres pour la relaxométrie T2*
2.3. Simulations numériques du signal bi-exponentiel
2.3.1. Création de simulation du signal bi-exponentielle
2.3.2. Paramètres de l’algorithme Levenberg-Marquardt
2.3.3. Évaluation de la précision des résultats
2.3.4. Mise en place d’un critère pour la détermination des niveaux sous-voxels
2.4. Simulations numériques IRM
2.4.1. Calcul du SNR
2.4.2. Création de simulations IRM
2.5. Proposition d’une approche Bi-R2*
2.6. Précision R2* sur un sujet sain
2.7. Conclusion chapitre 2
Chapitre 3 Interprétation et validation de la méthode Bi-R2* sur fantôme et sur sujets sains
3.1. Introduction au chapitre 3
3.2. Étude 1 : In vitro
3.2.1. Cartographie R1
3.2.2. Fantôme v1
3.2.3. Fantôme v2
3.2.4. Résultats
3.2.5. Conclusion Étude 1
3.3. Étude 2 : Étude de la méthode Bi-R2* in vivo sur une population de sujets sains
3.3.1. Contexte
3.3.2. Matériels et méthodes
3.3.3. Résultats
3.3.4. Conclusion Étude 2
Chapitre 4 Validation de l’approche Bi-R2* dans le vieillissement normal et dans les pathologies neurodégénératives
4.1. Introduction au chapitre 4
4.2. Étude 3 : Relaxométrie T2* et vieillissement normal
4.2.1. Introduction
4.2.2. Matériels et méthodes
4.2.3. Analyses des images
4.2.4. Analyses statistiques
4.2.5. Résultats
4.2.6. Conclusion Étude 3
4.3. Étude 4 : Relaxométrie T2* et maladie neurodégénérative
4.3.1. Introduction
4.3.2. Matériels et méthodes
4.3.3. Analyses des images
4.3.4. Analyses statistiques
4.3.5. Résultats
4.3.6. Conclusion Étude 4
Conclusion générale et perspectives
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