Depuis les années 1970, l’environnement économique des entreprises se transforme rapidement. Les entreprises doivent évoluer pour s’adapter à un contexte toujours changeant, développer des produits plus rapidement, prendre en compte les nouvelles technologies et souvent avoir une production plus diversifiée. Pour gérer tous ces changements, les entreprises sont amenées à réaliser de plus en plus de projets et des projets de plus en plus variés. Dans un environnement concurrentiel, la réussite de ses projets est directement liée à la performance de l’entreprise. Aussi, les entreprises ont recherché à mieux gérer les interactions entre les projets : sélection d’un projet plutôt qu’un autre, répartition des ressources entre les projets, réutilisation des connaissances acquises sur un projet dans un autre. Par ailleurs, le champ d’application des méthodes de management de projet s’est élargi. Dans les années 1950, les méthodes de management de projet étaient centrées sur la maîtrise des coûts et des délais des projets de grande envergure et se basant sur un cahier des charges du produit attendu précis (Morris, 1994). Aujourd’hui, les entreprises gèrent en projet des activités plus variées parfois ne concernant que quelques personnes. Les changements de structure organisationnelle des entreprises incluant une évolution des pratiques des individus sont maintenant gérés en projets.
Etat de l’art des approches pour la performance des projets d’une organisation
La finalité de cette partie est d’établir l’intérêt de la recherche et de formuler précisément les problématiques de la thèse. Il s’agit :
❖ De confirmer l’intérêt d’une nouvelle méthode destinée aux organisations et ayant pour but de garantir dans la durée un niveau de performance des projets cohérent avec leurs enjeux pour l’organisation,
❖ De tirer les enseignements pouvant servir de point d’entrée de la recherche entreprise dans cette thèse,
❖ De formuler les problématiques de la recherche.
Cette partie commence par une présentation du contexte de l’état de l’art. Une épistémologie succincte des fondamentaux pour la réalisation des projets est présentée, le besoin d’une meilleure maîtrise de la performance des projets justifié, le périmètre de l’état de l’art précisé. Ensuite, cinq approches pouvant être utilisées par une organisation pour améliorer la performance de ses projets feront l’objet d’un chapitre. Nous analyserons plus particulièrement les études empiriques significatives : études par questionnaires portant sur un nombre significatif d’organisations et les études de cas basées sur un recueil d’avis de professionnels impliqués dans la gouvernance des projets.
❖ La performance des projets par la formation aux méthodes de management de projet Un des premiers leviers de performance est de former le personnel des projets à l’utilisation de méthodes de management de projet appropriées pour les projets de l’organisation. Dans ce chapitre les principaux référentiels sont présentés.
❖ La performance des projets par la maîtrise des processus Une autre manière d’aborder la performance consiste à porter son attention les processus et la structure organisationnelle, dans l’esprit des normes de la famille ISO 9000. Le modèle de maturité CMMI® (Capabity Maturity Model Integration) du SEI (Software Engineering Institute) est l’outil le plus connu de cette approche.
❖ La performance des projets par les bureaux des projets ou PMOs Le bureau des projets aussi appelé PMO, pour Project Management Office, est un regroupement dans une entité de plusieurs fonctions concernant les projets. Des recherches récentes permettent de mieux connaître ces entités.
❖ La performance des projets pour des types particuliers d’organisations Pour certaines organisations, caractérisées par le type de projets ou le contexte de ceux-ci, des enseignements ont été établis. Trois types d’organisations font l’objet d’un état de l’art dans ce chapitre.
❖ La performance des projets par l’alignement stratégique L’influence de l’application de ce concept issu de la recherche opérationnelle a fait l’objet de plusieurs publications récentes.
La performance des projets pour une organisation
La recherche de performance des projets avant le management de projet
La pratique du projet est très ancienne. Depuis les premières grandes civilisations, l’homme a entrepris des réalisations d’ampleur qu’il était impossible de mener à leur terme sans une organisation structurée. Ce sont par exemple, les pyramides de l’Égypte antique, les temples grecs, les aqueducs romains, les cathédrales du moyen-âge, les expéditions maritimes de la renaissance, les navires de guerre de l’époque de Louis XIV. Pour toutes ces réalisations, des pratiques se sont établies sur plusieurs générations avec pour finalité sous-jacente de répondre aux attentes des commanditaires du « projet ». Pourtant, il n’est pas possible de parler de « management de projet » pour ces réalisations. En effet, la recherche de règles communes à toutes les opérations, l’inventaire des méthodes possibles et leur intérêt relatif, la volonté d’établir un vocabulaire commun indépendamment de l’objet du projet n’ont pas été à l’ordre du jour avant les années 1960 avec la création des associations pour praticiens du management de projet. Comme le fait remarquer Gilles Garel (Garel 2003, page 28): « Pendant longtemps, les projets se pratiquent, mais le management de projet s’ignore en tant que modèle de gestion spécifique. La rationalisation des « pratiques projets » est progressive, au travers de la structuration d’outils et de professions. ».
Le management de projet à l’origine
D’après Morris, le management de projet a évolué en trois périodes. La première période concerne le développement des techniques et concepts centraux, plus particulièrement dans le domaine de la défense et de l’aérospatial (1955- 1970). La seconde période consiste en une longue diffusion dans autres secteurs de l’industrie (1970-1985). La dernière période à partir de 1985, est marquée par la diffusion et l’amélioration principalement impulsés par les idées et concepts de Qualité Totale et par les associations professionnels de management de projet (Morris, 1994, Preface). Les logiciels de management de projet disponibles sur les ordinateurs personnels à partir de la fin des années 80 ont facilité leur diffusion. (Morris, 1994, page 189). Il existe des concepts de base du management de projet qui ont été utilisés, depuis les origines, dans les projets d’envergure. Ces concepts sont rappelés dans le paragraphe 2. Ces concepts ont évolué à partir de la fin des années 1950 pour prendre en compte les possibilités des outils informatiques. De manière concomitante, à cette époque, l’armée américaine a mis au point la méthode PERT, l’entreprise Du Pont de Nemours la méthode CPM (Morris, 1994). La méthode des potentiels a été conçue pour la construction du paquebot France à la même époque (Garel, 2003, page 82). Toutes ces méthodes ont les mêmes fondements théoriques. Ces fondements sont toujours à la base des logiciels de planification de projets.
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Table des matières
Introduction générale
0.1 Contexte et problématique
0.2 La problématique industrielle
0.3 La démarche de recherche
0.3.1 Etape 1 : Construction de la méthode et approfondissement des aspects académiques liés
0.3.2 Etape 2 : Diffusion de la méthode et recherche d’avis sur celles-ci
0.3.3 Etape 3 : Rédaction de la thèse
0.4 Méthodologie pour le choix des définitions et termes
0.5 Guide de lecture
0.5.1 Avertissement au lecteur
0.5.2 Plan de la thèse
Chapitre 1 La performance des projets pour une organisation
1.1 La recherche de performance des projets avant le management de projet
1.1.1 Le management de projet à l’origine
1.1.2 La gouvernance des organisations basées sur les projets dans l’histoire
1.2 Les concepts de base pour la maîtrise des projets
1.3 Emergence d’un besoin d’une meilleure maîtrise de la performance des projets
1.4 Périmètre de l’état de l’art de la partie 1
1.4.1 Organisation
1.4.2 Projet
1.4.3 Les activités de gouvernance orientée projets de l’organisation
1.4.4 Performance
1.4.5 Approches pour la performance des projets d’une organisation
1.4.6 Les critères de sélection des approches étudiées
1.4.7 Les éléments recherchés dans l’état de l’art
1.5 Synthèse du chapitre
Chapitre 2 La performance des projets par la formation aux méthodes de management de projet
2.1 Les référentiels utilisés pour la certification de personnes
2.1.1 Le corpus de connaissance PMBOK du PMI
2.1.2 La méthode PRINCE 2 de l’OCG
2.1.3 Le modèle ICB du IPMA
2.1.4 Domaine d’application des référentiels
2.2 Les retours d’expérience concernant l’utilisation des méthodes traditionnelles
2.2.1 Un manque de preuves de la corrélation entre les méthodes traditionnelles et la performance
2.2.2 Les limites du domaine d’application des méthodes traditionnelles de management de projet
2.2.3 La nécessité d’adapter les outils et pratiques au contexte des projets
2.2.4 Les systèmes d’information pour le management de projet
2.2.5 Enseignement sur les retours d’expériences des méthodes traditionnelles
2.3 L’incomplétude des référentiels de connaissances
2.4 Les autres méthodes pour le management de projet
2.4.1 Les guides pour l’auto-formation des chefs de projet de projets internes de moyenne importance
2.4.2 Les méthodes dites agiles
2.4.3 Le management de programme
2.5 Conclusion du chapitre
2.5.1 Synthèse des résultats issus de l’état de l’art
2.5.2 Propositions utiles à un « organisateur »
2.5.3 Facteurs de succès à mettre en œuvre par « l’organisateur »
2.5.4 Résumé de la conclusion
Chapitre 3 La performance des projets par la maîtrise des processus
3.1 Les principes de l’approche processus et son application pour les projets
3.2 La performance par la maîtrise du « plan du projet »
3.2.1 Principe de mise en œuvre
3.2.2 Retours d’expérience sur la maîtrise du « plan de projet »
3.2.3 Conclusion sur la maîtrise du plan du projet
3.3 Les constatations sur le niveau d’implantation des processus de management de projet
3.3.1 Les modèles de maturité basés sur le PMBOK®
3.3.2 Les états des lieux sur la diffusion des processus de management de projet
3.3.3 La maîtrise des processus de management de projet dans la durée
3.3.4 Conclusion pour l’implantation de la maîtrise de processus de management de projet
3.4 Le modèle CMMI® du SEI (Software Engineering Institute)
3.4.1 Le positionnement du modèle
3.4.2 Principe du modèle
3.4.3 Retours d’expérience concernant le CMMI®
3.4.4 Conclusion pour l’utilisation du CMMI
3.5 La formalisation des processus d’une organisation
3.5.1 L’évaluation d’un système de maîtrise des processus
3.5.2 L’existence de procédures formelles
3.5.3 Conclusion sur la formalisation des processus d’une organisation
3.6 Conclusion du chapitre
3.6.1 Synthèse des résultats issus de l’état de l’art
3.6.2 Propositions utiles à un « organisateur »
3.6.3 Facteurs de succès à mettre en œuvre par l’organisateur
3.6.4 Résumé de la conclusion
Chapitre 4 La performance des projets par les bureaux de management de projet ou PMOs
4.1 Les Bureaux de management de projets ou PMOs
4.1.1 Des entités de formes multiples
4.1.2 Les études réalisées sur les PMOs
4.2 Les motivations pour mettre en place un PMO
4.2.1 Les éléments de l’état de l’art
4.2.2 La synthèse
4.3 Le contenu du PMO
4.3.1 Existence d’un ordre de mission
4.3.2 Fonctions du PMO
4.3.3 Synthèse
4.4 La mesure de la performance des PMOs
4.4.1 Les éléments de l’état de l’art
4.4.2 Synthèse
4.5 Les difficultés perçues dans le fonctionnement des PMOs
4.5.1 Les difficultés perçues
4.5.2 Le glissement vers une bureaucratie
4.5.3 Les évolutions d’autorité
4.5.4 Synthèse
4.6 L’évolution des PMOs
4.6.1 La temporalité des PMOs
4.6.2 Les deux hypothèses d’évolution concernant les PMOs
4.6.3 La théorie de la co-évolution (Aubry & al, 2008)
4.6.4 Des transitions déclenchées par le contexte (Aubry & al, 2010)
4.6.5 Le rôle des « tensions » du PMO dans leurs évolutions (Hobbs & al, 2007)
4.6.6 Les évolutions des PMOs comme agents et sujets de changement (Pellegrinelli & Garagna, 2008)
4.6.7 La capacité de l’organisation en management de projet (Crawford, 2006)
4.6.8 Une évolution en deux étapes (Thiry, 2007b)
4.6.9 Le PMO virtuel (Santosus, 2003)
4.6.10 Le paradoxe principal des PMOs : « La rigueur sans la rigidité » (Duggal, 2009)
4.6.11 Synthèse concernant l’évolution des PMOs
4.7 Conclusion du chapitre
4.7.1 Synthèse des résultats issus de l’état de l’art
4.7.2 Propositions utiles à un « organisateur »
4.7.3 Facteurs de succès à mettre en œuvre par l’organisateur
4.7.4 Résumé de la conclusion
Chapitre 5 La performance des projets pour des types particuliers d’organisations
5.1 Les types d’organisations concernés
5.2 Les entités chargées du développement de nouveaux produits
5.2.1 Les caractéristiques constatées
5.2.2 Le management des nouveaux produits d’une entreprise
5.2.3 La nécessité de maîtriser les ressources disponibles
5.2.4 L’utilisation d’outils informatiques
5.2.5 La nécessité de vérifier l’intérêt de continuer le projet
5.2.6 Les points clés de ces organisations
5.2.7 Les éléments concernant la performance dans la durée
5.3 Les organisations spécialisées dans les projets pour un client externe
5.3.1 Les caractéristiques constatées
5.3.2 Les points-clés de ces organisations
5.3.3 Les éléments concernant la performance dans la durée
5.4 Les entreprises dont la pérennité dépend de la réussite des projets
5.4.1 Les caractéristiques de ces organisations
5.4.2 Les points clés de ces organisations
5.4.3 Les éléments concernant la performance dans la durée
5.5 Justification de la limitation du domaine d’étude de l’état de l’art des types d’organisations
5.5.1 Les autres organisations étudiées dans des publications
5.5.2 L’organisation orientée vers les projets de Gareis (1991)
5.5.3 L’organisation basée sur les projets de Turner & Keegan (1999, 2001, 2002)
5.5.4 Conclusion du paragraphe
5.6 Le domaine couvert par les types d’organisations de ce chapitre
5.6.1 Le bilan des types d’organisations développés dans les paragraphes précédents
5.6.2 La zone orpheline de la classification des « types d’organisations »
5.7 Conclusion du chapitre
5.7.1 Synthèse des résultats issus de l’état de l’art
5.7.2 Propositions utiles à un « organisateur »
5.7.3 Facteurs de succès à mettre en œuvre par « l’organisateur »
5.7.4 Résumé de la conclusion
Chapitre 6 La performance des projets par l’alignement stratégique
6.1 Les développements récents sur le lien entre l’alignement stratégique et la performance des projets
6.1.1 Les études confortant le lien entre alignement stratégique et performance des projets
6.1.2 Les autres contributions provenant de recherche sur des sujets connexes
6.1.3 Synthèse
6.2 Les contributions sur la manière d’appliquée cette stratégie
6.2.1 Stratégie délibérée et stratégie émergente
6.2.2 Alignement stratégique dans la durée
6.2.3 Synthèse
6.3 Les déclinaisons du concept d’alignement
6.3.1 La création de valeur
6.3.2 La construction de sens (ou sens making) pour la recherche de la valeur
6.3.3 La recherche de mesure de la valeur du management de projet
6.3.4 L’utilisation du modèle des valeurs en compétition (competing values model)
6.3.5 Entreprise concurrentielle ou secteur publique
6.3.6 Synthèse
6.4 Les solutions pour l’alignement stratégique
6.4.1 Le cadre décrivant l’influence de la stratégie de Srivannaboon & Milosevic (2006)
6.4.2 La recherche d’équilibre
6.4.3 Synthèse
6.5 Conclusion du chapitre
6.5.1 Synthèse des résultats issus de l’état de l’art
6.5.2 Propositions utiles à un « organisateur »
6.5.3 Facteurs de succès à mettre en œuvre par « l’organisateur »
6.5.4 Résumé de la conclusion
Chapitre 7 La formulation des problématiques de la recherche
Conclusion générale