Développement d’une approche holistique d’évaluation des projets de rénovation durable

Le développement durable est une priorité pour l’avenir des sociétés. Il est défini comme « un développement qui répond aux besoins du présent, sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». Son mode d’organisation est fondé sur trois piliers, la qualité environnementale, l’équité sociale et l’efficacité économique. Dans le contexte actuel, le parc immobilier consomme 40% de l’énergie. Il est aussi responsable du dérèglement climatique. Le développement durable a donc une importance particulière pour l’industrie de la construction tant pour les bâtiments neufs que pour la rénovation des bâtiments existants. L’efficacité énergétique des bâtiments peut stimuler la croissance socio-économique et promouvoir le développement durable. En effet, les bâtiments économes en énergie peuvent apporter une contribution significative à la réalisation des objectifs de durabilité, qui sont liés à la lutte contre le changement climatique est ses impacts. Ils visent aussi à rendre les villes et les établissements humains sûrs, inclusifs, résilients et durables. Le grand potentiel du développement durable réside dans la rénovation des bâtiments existants dû au faible taux de renouvellement du stock de bâtiments. La rénovation assure la préservation des ressources naturelles en limitant la consommation d’énergie. Elle améliore les conditions de vie des occupants en assurant des logements sains et durables. Elle contribue au développement économique en développant le marché des énergies renouvelables et en faisant émerger de nouvelles professions. Elle est donc au centre du développement durable.

Contexte énergétique du bâtiment

L’industrie, le transport, le résidentiel et le tertiaire sont les principaux secteurs économiques à la base de la consommation finale en énergie en France (Figure 1.1). Le champ résidentiel-tertiaire est le secteur le plus énergivore avec près de 44% de la consommation finale du pays et 20% des émissions des gaz à effet de serre GES (Figure 1.2). Bien que la part du secteur tertiaire dans les émissions françaises de CO2 est de 7.4% et sa part dans le bilan énergétique est modeste avec près de 15% de consommation finale, cependant il est au sein des politiques de maîtrise de l’énergie. La plus grande proportion de consommation énergétique dans ces secteurs est dédiée aux besoins et au confort des occupants liés au chauffage et à la production de l’eau chaude sanitaire (Figure 1.3). La France à travers ses engagements internationaux et européens en matière de lutte contre le changement climatique, œuvre pour réduire ses émissions des gaz à effet de serre et à améliorer l’efficacité énergétique des différents secteurs. Dans ce cadre, le bâtiment représente un secteur clé dans lequel il est possible de progresser rapidement sur le plan de l’achèvement des objectifs définis.

Son engagement s’est traduit à l’échelle nationale par des mesures concrètes illustrées par la mise en œuvre des Plans Climat (2004,2010,2017) décrivant les actions nationales de prévention du changement climatique dans tous les secteurs d’économie à l’horizon de 2012, 2020 et 2022 respectivement [7]. Outre, la France a adopté des lois relatives à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV 2015) et à l’Énergie et au Climat (2019) qui ont ancré les objectifs assignés au secteur du bâtiment. La loi LTECV repose sur les économies d’énergie comme un pilier principal. Elle a défini des objectifs de réduction des émissions des gaz à effet de serre de 40% et de réduction de la consommation d’énergie de 20% à l’horizon 2030 par rapport à celles en 1990. La loi relative à l’Énergie et au Climat a introduit des modifications sur les visées nationales fixées par la LTECV, notamment en ajoutant un nouvel objectif de neutralité carbone d’ici 2050.Ces lois ont défini aussi des outils de pilotage de la politique énergétique dont les plus émergents sont la Stratégie Nationale Bas-Carbone SNBC et le Programme Pluriannuel de l’Énergie PPE. Des textes cadrant les bâtiments neufs et la rénovation des bâtiments existants ont été développés aussi dans des réglementations thermiques, dont la plus récente est la RT-2020 qui a introduit le principe des bâtiments à énergie positive BEPOS produisant davantage d’énergie qu’ils n’en consomment. Les mesures mises en place ont compris aussi la transposition de directives européennes telles que la directive sur les performances énergétiques des bâtiments, avec l’obligation de la réalisation d’un diagnostic de performance énergétique pour tout logement nouvellement construit [9].

L’analyse des périodes de construction confirme que la France pâtit d’un parc important de logements anciens datant d’avant 1974 [10]. Par conséquent, près de 51% du parc national de bâtiments (Figure 1.4), ne sont pas en conformité avec les normes définies dans les réglementations thermiques étant donné que la première réglementation a vu le jour en 1974. Ces habitations sont identifiées comme étant les plus énergivores, vue que leur consommation énergétique dépasse largement celle des habitations récentes [11]. Les ministères de la transition écologique et solidaire et de la cohésion des territoires ont rapporté que 7 millions de logements français sont mal isolés, 3.8 millions de ménages sont en situation de précarité énergétique et 1 million de ménages ont froid dans leur logement en hiver.

Approche globale de la rénovation des bâtiments

La rénovation des bâtiments est motivée par des besoins qui vont au-delà de la volonté de réduire la consommation énergétique des bâtiments et les émissions des gaz à effet de serre, comme dans le cas de travaux de rénovation qui coïncident avec des réparations structurelles [20]. Des travaux de rénovations sont effectués dans le but de réparer les dommages et de moderniser les systèmes de service du bâtiment en fin de vie. La nécessité de s’adapter aux normes et demandes des locataires est aussi un des motifs de rénovation [21,22]. Les efforts de modernisation visent à améliorer le confort intérieur en adoptant des mesures pour améliorer la qualité de l’environnement intérieur [23-25]. La rénovation offre des opportunités d’amélioration de l’état général du bâtiment, notamment son exploitation en assurant des conditions saines de vie et de travail, la prolongation de son cycle de vie et la réduction des coûts de maintenance. Elle peut contribuer à réduire l’exposition à la volatilité des prix de l’énergie, à augmenter la valeur du bâtiment et à créer des emplois [26,27].

L’optimisation de la rénovation des bâtiments affecte la possibilité d’atteindre simultanément les profits cités. En effet, la mise en œuvre des mesures de modernisation les plus rentables permettant d’assurer des performances énergétiques tout en maintenant un niveau de service satisfaisant et un confort intérieur acceptable est un problème majeur dans la rénovation énergétique des bâtiments. De ce fait, les phases du programme de rénovation et les éléments qui affectent la modernisation doivent être examinés afin de parvenir à traiter ce problème [28]. Le processus de rénovation d’un bâtiment comporte cinq phases (Figure 1.13). La première phase consiste à comprendre les problèmes opérationnels existants et les préoccupations des usagers, à fixer les objectifs du projet et à déterminer les ressources disponibles pour encadrer le budget et le programme de travail. La deuxième phase comporte une analyse des données énergétiques des bâtiments pour comprendre la consommation en énergie et proposer des mesures d’économie d’énergie. Des diagnostics peuvent être réalisés afin d’identifier les équipements inefficaces et tout autre dysfonctionnement. La troisième phase concerne l’identification des options de modernisation. En utilisant des modèles énergétiques appropriés, des outils d’analyse économique et des méthodes d’évaluation des risques, la performance d’une gamme d’alternatives de rénovation peut être évaluée quantitativement. Ces alternatives peuvent ensuite être hiérarchisées en fonction des facteurs pertinents liés et/ou non liés à l’énergie. Dans la quatrième phase, les mesures de rénovation sélectionnées sont mises en œuvre. Le test et la mise en service seront utilisés pour ajuster les mesures de rénovation afin de garantir que le bâtiment et ses systèmes de services fonctionnent d’une manière optimale. Une fois les mesures de modernisation sont mises en œuvre et bien réglées, il s’agit de vérifier les économies d’énergie. Une enquête post occupation est nécessaire pour vérifier si les occupants et les propriétaires des bâtiments sont satisfaits de l’opération de rénovation.

Les politiques et réglementations fixent des exigences minimales d’efficacité énergétique pour la rénovation des bâtiments existants et définissent des lignes directrices nationales pour la mise en œuvre et l’encouragement des mesures de modernisation. Les gouvernements peuvent fournir des dispositifs incitatifs et des subventions pour soutenir les opérations de performance énergétique [29]. Les ressources et les attentes des clients affectent les objectifs du projet et les technologies à utiliser. Les solutions de rénovation doivent être déterminées en tenant compte des informations spécifiques au bâtiment telles que l’emplacement géographique, le type du bâtiment, son âge, son fonctionnement, ses sources d’énergie et ses systèmes de services. Les facteurs humains affectent le succès des rénovations des bâtiments. Ils peuvent inclure les exigences de confort, les régimes d’occupation, et l’activité des usagers. De nombreuses études ont montré que les changements du comportement des occupants, et de la plage de confort peuvent conduire à des économies d’énergie importantes [30,31]. Les technologies de rénovation sont des mesures d’économie d’énergie utilisées pour promouvoir l’efficacité énergétique et la durabilité des bâtiments. Ils vont de l’utilisation d’équipements éco énergétiques, des moyens de contrôle avancés et de sources d’énergie renouvelable aux changements des modèles de consommation d’énergie et à l’application des technologies avancées de chauffage et de refroidissement [28]. Ces mesures doivent être considérées en fonction de leur rentabilité économique, de leur complexité et de la facilité de leur mise en œuvre [32]. La rénovation des bâtiments est affectée par de nombreux facteurs tels que l’incertitude dans l’estimation des économies, les mesures de la consommation d’énergie, les prévisions météorologiques et les dégradations des performances du système. Une bonne estimation de ces facteurs est nécessaire pour déterminer les meilleures options de rénovation et pour réduire l’incertitude sur l’investissement dans la rénovation.

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Table des matières

Introduction Générale
Chapitre 1 : État de l’art
1.1 Introduction
1.2 Contexte énergétique du bâtiment
1.3 Approche Globale de la rénovation des bâtiments
1.4 Rénovation durable des bâtiments
1.4.1 Aspect environnemental
1.4.2 Aspect économique
1.4.3 Aspect social
1.5 Défis de la rénovation
1.6 Conclusion
Chapitre 2 : Méthodologie de recherche
2.1 Introduction
2.2 Méthodologie générale de la rénovation
2.3 Phase pré-rénovation
2.3.1 Planification
2.3.2 Indicateurs de performance
2.4 Phase post-rénovation
2.4.1 Évaluation de l’aspect technique
2.4.2 Évaluation de l’aspect social
2.4.3 Évaluation de l’aspect environnemental
2.4.4 Évaluation de l’aspect économique
2.5 Conclusion
Chapitre 3 : Analyse de la phase de planification du projet ESPRIT
3.1 Introduction
3.2 Éléments cadrant l’activité
3.2.1 Contexte
3.2.2 Objectif de l’opération
3.2.3 Contraintes financières
3.3 Diagnostic de l’état du bâtiment
3.3.1 Présentation du bâtiment existant
3.3.2 Diagnostic environnemental
3.4 Besoin des usagers
3.5 Besoins de la personne publique
3.6 Contexte réglementaire
3.7 Indicateurs de performance
3.8 Conclusion
Chapitre 4 : Analyse de confort et de consommations dans le bâtiment ESPRIT
4.1 Introduction
4.2 Analyse du confort dans le bâtiment ESPRIT
4.2.1 Présentation du Laboratoire LGCgE
4.2.2 Instrumentation
4.2.3 Analyse de la période chauffée
4.2.4 Analyse de la période non chauffée
4.3 Consommations du bâtiment ESPRIT
4.3.1 Consommation d’eau
4.3.2 Consommation d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre
4.3.3 Consommation d’énergie liée au chauffage
4.3.4 Consommation et production de l’électricité
4.3.5 Bilan énergétique global
4.4 Conclusion
Conclusion Générale

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