« Le monde n’appartient pas à l’homme ; l’homme appartient au monde… toutes les choses sont reliées. L’homme ne tisse pas le tissu de la vie ; il est simplement un rivage dedans. Quoi qu’il fasse au tissu, il le fait à lui-même ». Seattle principal, 1854,
Tout est lié, les Lois, les Sciences, l’Economie et l’Environnement, mais cette connexion est quelquefois éludée par le développement rapide, la croissance démographique et la pression croissante sur les ressources qui créent de nombreux conflits d’usage. Comment devrait être utilisée la Terre ? Quel usage a une plus grande valeur économique ? Pouvons-nous faire de la science sans faire attention au profit ? Devrions-nous encourager le développement sans faire attention à la l’environnement ? Comment pouvons-nous trouver l’équilibre écologique et financier pour rendre effectifs nos choix d’utilisation de la terre ? Telles sont les questions problématiques actuelles qui se posent à nous et aux générations futures. Comme le stipule le principe de Seattle, « Tout est relié…, science, politique, éthique, et science économique». Nous pensons qu’il est primordial de lier transversalement toutes ces disciplines afin d’optimiser les ressources environnementales dans le monde.
Au cours des dernières décennies la société a pris conscience des nouveaux enjeux environnementaux dus à l’activité humaine. Les sommets de la terre Stockholm 1972, Nairobi 1982, Rio de Janeiro 1992 et Johannesburg 2002 témoignent de l’importance du mouvement mondial pour la protection de l’environnement. Ce mouvement se traduit par une forte mobilisation sociale et gouvernementale, particulièrement au niveau des pays industriels développés. L’équilibre entre le développement économique et la protection environnementale n’est plus assuré. L’homme produit plus que ce dont il a besoin et surtout plus que ce qu’il consomme réellement. Un équilibre est à trouver sur le long terme d’où l’apparition d’un nouveau modèle de consommation et de production durable qui permet de préserver l’homme et son environnement actuel et futur. Il est évident que la consommation massive des produits industriels cause divers impacts sur l’environnement comme la dégradation de la couche d’ozone, le réchauffement de la planète, la pollution de l’eau et de l’air. Ces impacts interviennent tout au long du cycle de vie du produit de la fabrication à la fin de vie. Il est de la responsabilité des entreprises de ne plus créer un produit sans considérer son impact sur l’environnement. Pour ce faire, les entreprises travaillent sur différents paramètres tels que le type de matière, le mode de fabrication du produit, la gestion en fin de vie qui permettent de réduire l’impact de leurs produits sur l’environnement. Nous constatons une meilleure prise de responsabilité des producteurs vis-à-vis de leurs actions, leurs produits et leurs processus. Les entreprises tentent d’intégrer une démarche de développement durable qui leur permettrait de garantir un développement économique sans dégrader l’environnement social et naturel. Elles mettent en place des actions d’amélioration continue du produit et de la chaine d’approvisionnement (supply chain). Par ailleurs, elles doivent faire face à toutes les pressions sociétales et aux exigences réglementaires de plus en plus contraignantes.
L’industrie électrique et l’éco-conception
L’industrie électrique et électronique est pionnière dans l’application de l’écoconception. En effet, les appareillages électriques ont vu des améliorations environnementales majeures en termes de réduction de consommation d’énergie, d’eau et de poids et d’augmentation de taux de recyclabilité. De plus, depuis peu, la réglementation vient appuyer cette démarche de par l’obligation de déclaration des substances chimiques [REACH], l’interdiction de certaines substances dangereuses [RoHS] et l’obligation de recyclage en fin de vie [DEEE]. Cette démarche a permis de faire évoluer rapidement la qualité environnementale des produits électriques et de créer une synergie autour de la gestion de la fin de vie de ces équipements. Toutefois, cela se restreint aux produits de grande consommation de type électroménager, machines de basse tension, équipements informatiques, etc. Les produits électrotechniques qui sont à cheval entre l’industrie électrique et l’industrie mécanique sont exclus de ces obligations. Ils présentent des caractéristiques particulières en termes de conception, de conditions d’utilisation, de dispersion géographique et surtout d’utilisateurs. Ce sont des appareils vendus majoritairement à des professionnels pour un usage industriel. Une des difficultés de la conception de ces produits est de prédire les changements technologiques qui peuvent se révéler après le lancement du produit étant donné sa longue durée de vie. Par exemple, il est difficile de prévoir l’évolution de certains procédés de fabrication ou des filières de valorisation des matériaux en fin de vie. Cela est lié à l’évolution des connaissances scientifiques et technologiques et aux conditions économiques et industrielles.
Par ailleurs, nous avons constaté que les démarches actuelles d’éco-conception appliquées aux appareillages électriques de basse tension ne s’appliquent pas automatiquement sur les équipements de réseaux électriques. Nous avons alors travaillé sur l’élaboration d’une méthodologie d’éco-conception simplifiée, adaptée au secteur de la distribution de l’électricité et consolidée au niveau environnemental. Notre démarche est générale mais son application est spécifique aux équipements électriques de moyenne tension de la société AREVA T&D/DRC. AREVA T&D/DRC est un centre de recherche et développement relatif aux appareillages de distribution électrique de AREVA T&D. Il comporte à la fois un bureau d’études, une équipe d’éco-conception, un service achat et qualité, un service marketing et des laboratoires d’essai. Ce centre nous a servis d’unité pilote pour l’élaboration et le test de notre démarche.
CONTEXTE GENERAL
AREVA T&D/DRC souhaite mettre en place une démarche d’éco-conception pour ses appareillages de moyenne tension. Cette démarche, totalement volontaire, est motivée par le respect de l’environnement, l’amélioration de l’image de marque et l’anticipation de futures évolutions réglementaires. AREVA T&D/DRC , Distribution Research Centre : centre spécialisé dans le développement des appareillages de moyenne tension de AREVA T&D est situé à Montpellier. DRC compte un bureau d’études, un service achat et qualité, un service spécialisé dans les matériaux et éco-conception, un service marketing et des laboratoires d’essai.
L’objectif de ce travail étant d’apporter une assistance à l’équipe de conception pour lui permettre d’intégrer l’éco-conception lors du développement des nouveaux produits. Ceci s’inscrit dans le cadre d’une politique plus générale de développement durable. Plus globalement, notre travail de recherche s’inscrit dans un contexte industriel en évolution : un marché de l’électricité en pleine croissance, soumis à de fortes pressions sociétales, réglementaires et économiques. En effet, l’accès à l’énergie est devenu une priorité internationale au même titre que l’accès à la nourriture ou à l’eau. L’électricité considérée autrefois comme un élément de confort est aujourd’hui une nécessité absolue. La croissance moyenne de la demande mondiale d’électricité est à l’heure actuelle de 3% par an. Il existe cependant, au niveau de la consommation mondiale d’énergie électrique de très fortes disparités, bien supérieures aux écarts enregistrés dans la répartition de la consommation d’énergie : les pays en développement représentent seulement un quart de la consommation mondiale d’électricité, alors qu’ils constituent 80% de la population mondiale. A titre d’exemple, les consommations s’élèvent à :
• 1 000 kWh/an/habitant pour la Chine
• 7 500 kWh/an/habitant pour le Japon
• 15 000 kWh/an/habitant pour le Suède .
Les enjeux économiques
La protection de l’environnement est devenue une priorité stratégique de l’entreprise. Elle est régie, d’une part, par la prise de conscience écologique accompagnée d’exigences réglementaires de plus en plus strictes et d’autre part, par l’intérêt économique que peuvent présenter les produits verts. Il existe donc des surcoûts environnementaux liés aux moyens humains et financiers mis en place dans l’entreprise pour réduire la pollution due à la production et pour la gestion de ses produits en fin de vie.
A titre d’exemple, une étude de Novethic révèle que le réchauffement climatique pourrait coûter à l’économie mondiale jusqu’à 7 trillions de dollars en l’absence de mesures concrètes d’ici 10 ans. Dans un contexte plus français, une étude de Agenda212, affirme que le coût moyen du traitement des déchets est de 50,50 € /an par habitant pour l’enlèvement et le traitement des déchets ménagers. En fonction du traitement appliqué le coût à la tonne fluctue de 88 € (incinération directe) à 240 € (refus de compostage). Le coût moyen à la tonne se situe à 126,20 €. Le tri de la poubelle présente un coût moyen de 178 €/tonne tandis que les matériaux recyclés ont un coût de 90 €/tonne. Il est donc aisé de conclure qu’une meilleure conception et une sélection des matériaux à la source ne peuvent que diminuer le coût du traitement global des déchets en limitant le nombre d’étapes nécessaires. Ces investissements s’avèrent indispensables dans un marché de plus en plus sensible à la protection de l’environnement. Les produits « écologiques » peuvent, ainsi, présenter un nouvel argument de vente et un moyen de différenciation par rapport à la concurrence. Tel est le cas des équipements électroménagers qui affichent entre autres les consommations d’eau et d’électricité et les niveaux de bruit et de vibration. Le retour sur investissement n’est pas toujours quantifiable, toutefois, le résultat peut être mesuré par un indicateur de satisfaction des clients [VIGNERON et PATINGRE 2001 et LEPOCHAT 2005]. Très généralement, l’éco-conception s’accompagne d’une réduction de coût liée à la diminution de l’utilisation des ressources matières, de la facture énergétique et de la quantité de déchets. Par exemple, l’intégration des coûts de gestion des produits en fin de vie dans le coût initial a amené les industriels à revoir leur approche de conception afin de prendre en considération cette phase du cycle de vie. Par ailleurs, les entreprises bénéficient de différentes aides financières pour mener des actions de réduction de pollution et de mise en conformité et plus récemment pour élaborer des projets d’éco-conception.
« Restructurer l’économie à l’aune des éco-technologies, c’est aussi promouvoir un autre modèle de développement, plus réaliste car basé sur des données concrètes, globales et systématiques. Actuellement, les marchés ne prennent pas en compte les véritables coûts des biens et services des écosystèmes terrestres qui sont indispensables à la santé de l’économie. A terme, l’économie ne survit pas dans un environnement dégradé, quel qu’il soit » [BREZET ET VAN HEMEL 1997].
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Table des matières
INTRODUCTION
1. CHAPITRE 1 : CONTEXTE DE LA RECHERCHE
1.1. CONTEXTE GENERAL
1.2. CONTEXTE DE RECHERCHE
1.3. CONTEXTE INDUSTRIEL
1.4. LES APPAREILLAGES ELECTRIQUES DE MOYENNE TENSION
1.5. OBJET DE LA THESE
1.6. HYPOTHESES
1.7. PHASES D’ELABORATION DU PROJET DE RECHERCHE
1.8. LIMITATIONS ET DOMAINES D’APPLICATION DE LA RECHERCHE
1.9. CONCLUSION
2. CHAPITRE 2 : DEMARCHE D’ELABORATION D’UNE METHODOLOGIE D’ECOCONCEPTION ADAPTEE AUX APPAREILLAGES DE MOYENNE TENSION DE AREVA T&D
2.1. INTRODUCTION A L’ECO-CONCEPTION
2.2. L’INDUSTRIE FACE A LA CONTRAINTE : POURQUOI L’INDUSTRIE A-T-ELLE BESOIN DE L’ECO-CONCEPTION ?
2.3. QUELLE DEMARCHE D’ECO-CONCEPTION POUR L’INDUSTRIE ?
2.4. ELABORATION D’UNE METHODOLOGIE D’ECO-CONCEPTION ADAPTEE AUX APPAREILLAGES DE MOYENNE TENSION DE AREVA T&D
2.5. CONCLUSION
3. CHAPITRE 3 : INTEGRATION DE L’ECO-CONCEPTION DANS LE PROCESSUS DE CONCEPTION DES APPAREILLAGES DE MOYENNE TENSION
3.1. INTRODUCTION
3.2. LA CONCEPTION : GENERALITES
3.3. L’INTEGRATION DE L’ENVIRONNEMENT DANS LE PROCESSUS DE CONCEPTION : ETAT DE L’ART
3.4. L’INTEGRATION DE L’ENVIRONNEMENT DANS LE PROCESSUS DE CONCEPTION : CAS DE AREVA T&D/DRC
3.5. CONCLUSION
4. CHAPITRE 4 : DEVELOPPEMENT DE L’OUTIL D’ECO-CONCEPTION
4.1. INTRODUCTION
4.2. CAHIER DES CHARGES DES OUTILS D’ECO-CONCEPTION
4.3. ETAT DE L’ART DES OUTILS D’ECO-CONCEPTION
4.4. LA SIMPLIFICATION DES OUTILS D’EVALUATION ENVIRONNEMENTALE
4.5. OUTIL SIMPLIFIE D’AIDE A L’ECO-CONCEPTION DES PRODUITS DE MOYENNE TENSION
4.6. CONCLUSION
5. CHAPITRE 5 : EXPERIMENTATION DE LA METHODE AU SEIN DU BUREAU D’ETUDE.
EXEMPLE DE LA BIELLE ISOLANTE
5.1. INTRODUCTION
5.2. ETUDE DE CAS : BIELLE ISOLANTE
5.3. CONCLUSIONS
6. CONCLUSION
6.1. BILAN DE NOTRE RECHERCHE
6.2. APPORT ET ORIGINALITE DE NOTRE TRAVAIL
6.3. LIMITES DE NOTRE TRAVAIL
6.4. PERSPECTIVES
7. BIBLIOGRAPHIE
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