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Les diffรฉrents types dโimagerie molรฉculaire
Comme prรฉsentรฉ dans le paragraphe prรฉcรฉdent, lโimagerie molรฉculaire constitue un vรฉritable outil dans le domaine clinique. Ainsi, suivant la cible ร visualiser, les rรฉsolutions spatiale et temporelle nรฉcessaires et le type dโinformations requises, les chercheurs comme les mรฉdecins ont le choix parmi cinq modalitรฉs dโimagerie4 : la tomodensitomรฉtrie ou lโimagerie par rayon X (CT pour Computerized Tomography en Anglais), lโImagerie par Rรฉsonnance Magnรฉtique (IRM), lโimagerie nuclรฉaire qui comprend la Tomographie par Emission Mono-Photonique (TEMP) et la Tomographie par Emission de Positons (TEP), lโรฉchographie et lโimagerie optique qui regroupe la fluorescence, la bioluminescence et la chimiluminescence. Ces modalitรฉs sont souvent distinguรฉes suivant deux catรฉgories. La premiรจre regroupant la tomodensitomรฉtrie, lโIRM et lโรฉchographie, donne des informations de type anatomique/structurale, et est largement utilisรฉe dans les domaines clinique et prรฉclinique. La deuxiรจme catรฉgorie, bien plus utilisรฉe en recherches clinique et fondamentale, renseigne sur un aspect microscopique et permet ainsi dโobserver des phรฉnomรจnes ร lโรฉchelle cellulaire voire molรฉculaire. Elle rรฉunit la TEP, la TEMP et lโimagerie optique. Comme chacune de ces modalitรฉs a ses avantages et ses limitations (Figure I.3), dโautres techniques les couplant les unes aux autres, appelรฉes multimodales, telles que le PET-CT, le PET-MRI ont vu le jour. En effet, en complรฉtant les faiblesses des unes par les bรฉnรฉfices des autres, il a รฉtรฉ possible dโamรฉliorer sensiblement les donnรฉes de reconstruction et de visualisation.
Les techniques de type macroscopique
La tomodensitomรฉtrie
La tomodensitomรฉtrie (CT pour Computational Tomography) repose sur la capacitรฉ des tissus ร absorber des rayons X lorsque quโils passent ร travers le corps. Elle constitue ainsi un outil morphologique extrรชmement utile. Elle a notamment permis dโidentifier certaines pathologies telles que lโembolie pulmonaire6 et lโischรฉmie.7 Malgrรฉ des bonnes rรฉsolution et sensibilitรฉ, un temps dโacquisition rapide et une facilitรฉ dโutilisation, cette technique est limitรฉe par une forte exposition aux irradiations et une faible qualitรฉ de contraste des tissus mous, ce qui nรฉcessite lโadministration dโune dose importante dโagents de contraste. Ces derniers, principalement ร base dโiode, sont malheureusement non-spรฉcifiques et par consรฉquent causent des problรจmes de toxicitรฉ. En effet, pour dรฉlimiter de maniรจre efficace les organes ou les tumeurs, la dose ร injecter est de lโordre du millimolaire, soit un million de fois plus quโune dose dโagents chimiques injectรฉe pour les analyses de type TEP et TEMP (cf partie 2.2.1). Nรฉanmoins, cette technique est utilisรฉe de maniรจre usuelle en recherche clinique et est dโautant plus apprรฉciรฉe lorsquโelle est couplรฉe ร une autre technique dโimagerie pour rรฉaliser de la multimodalitรฉ.
LโImagerie par Rรฉsonance Magnรฉtique (IRM)
LโImagerie par Rรฉsonance Magnรฉtique est une technique basรฉe sur le phรฉnomรจne de relaxation magnรฉtique des protons contenus dans les biomolรฉcules telles que lโeau, les lipides ou les protรฉines, prรฉsentes ร diffรฉrentes concentrations dans les organes. En outre, il sโagit dโune technique similaire au principe thรฉorique de la Rรฉsonnance Magnรฉtique Nuclรฉaire (RMN) frรฉquemment utilisรฉe en chimie. Le corps รฉtudiรฉ, alors placรฉ dans un aimant, est exposรฉ ร un champ magnรฉtique qui induit un alignement des spins nuclรฉaires dโatomes contenus dans lโorganisme. Des variations dโintensitรฉ du champ magnรฉtique sont produites par impulsions รฉlectriques (ou radiofrรฉquences) et conduisent au retour ร lโรฉquilibre de ces spins, รฉtat รฉgalement appelรฉ relaxation. Ce phรฉnomรจne est alors mathรฉmatiquement et informatiquement traduit en une image haute rรฉsolution ร trois dimensions et la diffรฉrence de contraste obtenue est dรฉpendante du temps de relaxation magnรฉtique des tissus pris individuellement (temps de relaxations longitudinal (T1) et transversal (T2)).8 Les donnรฉes transcrites donnent ainsi des informations aussi bien dโordre structural, ร travers lโobservation des tissus-mous, que molรฉculaire, notamment grรขce ร lโavรจnement de nouveaux agents de contraste spรฉcifiques, tels que le gadolinium sous forme chรฉlatรฉโ les ions gadolinium libres รฉtant cytotoxiques โ et dโautres nanoparticules paramagnรฉtiques ร mรฉtaux de transition (Mn2+ par exemple) ou encore, plus rรฉcemment, les nanoparticules dโoxydes ferreux.9 Ces agents de contraste, qui influencent le temps de relaxation des molรฉcules dโeau qui leur sont associรฉes, et donc permettent de cibler des รฉvรฉnements plus spรฉcifiquement, permettent dโoptimiser la sensibilitรฉ, bien quโร ce jour trop faible (de lโordre du millimolaire), et la diffรฉrentiation des organes. Toutefois, la sensibilitรฉ semble รชtre une problรฉmatique majeure pour la technique dโIRM car les agents employรฉs sont responsables dโallergies (voire de chocs anaphylactiques) et sont la cause de pathologies telles que la fibrose nรฉphrogรฉnique systรฉmique notamment chez les patients ayant une fonction rรฉnale diminuรฉe. LโIRM est de ce fait proscrite aux femmes enceintes.7
Notons que les agents de contraste pour lโIRM peuvent aussi bien agir en tant quโagents multifonctionnels, ร la suite de couplages ร des fluorophores organiques ou ร des complexes mรฉtalliques ร ligands luminescents par exemple. Par consรฉquent, deux voire plusieurs propriรฉtรฉs peuvent รชtre exploitรฉes de faรงon simultanรฉe par des techniques de multimodalitรฉ. Ce procรฉdรฉ semble รชtre le cลur de nouvelles recherches pour pallier le manque de sensibilitรฉ de lโIRM et permettrait ainsi de travailler ร des concentrations en agents plus faibles.10
Une variante de lโIRM, la Rรฉsonance Magnรฉtique Spectroscopique (RMS ou MRS pour Magnetic Resonance Spectroscopy) est รฉtudiรฉe depuis une dizaine dโannรฉe et permet lโobservation du mรฉtabolisme cรฉrรฉbral en temps rรฉel.11 Celle-ci repose รฉgalement sur la relaxation des protons mais est plus efficace sur celle du 13C, la faible abondance naturelle de cet isotope รฉtant justement exploitรฉe. Cette technique est en pleine รฉvolution et jouera trรจs certainement un rรดle important dans lโavenir de lโimagerie molรฉculaire.
Lโimagerie par ultrasons
Lโimagerie mรฉdicale par ultrasons ou รฉchographie est une technique qui exploite les propriรฉtรฉs et le comportement des ondes sonores ร haute frรฉquence (de lโordre du MHz) lorsquโelles passent ร travers un tissu biologique. Lors de lโanalyse dโun sujet, des signaux รฉlectriques sont convertis, par le biais dโune sonde ou transducteur, en ultrasons qui traversent le corps. Certaines de ces ondes sont par la suite rรฉflรฉchies et renvoyรฉes vers le transducteur pour รชtre dรฉtectรฉes et converties en retour en signaux รฉlectriques. Ces derniers sont alors traitรฉs informatiquement pour donner une image contrastรฉe.4 Afin dโamรฉliorer le rapport signal sur bruit, il est coutume dโemployer, comme pour les techniques dโIRM et de tomodensitomรฉtrie, des agents de contraste qui sont administrรฉs par voie intraveineuse. Bien quโil en existe plusieurs types,12 ceux entrant dans la catรฉgorie de microbulles sont majoritairement utilisรฉs. Ils sont constituรฉs dโune capsule phospholipidique ou bio-polymรฉrique remplie de gaz (air ou autres gaz ร haut poids molรฉculaire comme les perfluorocarbures) et ont gรฉnรฉralement un diamรจtre de lโordre du micromรจtre (Figure I.4). La cape lipidique ou polymรฉrique a pour rรดle dโรฉviter toute fuite ou agrรฉgation des microbulles dans lโorganisme, et le cลur gazeux est littรฉralement responsable de lโaugmentation du pouvoir รฉchogรฉnique de la substance injectรฉe. Grรขce ร ce type dโagents de contraste, il a รฉtรฉ possible de cibler spรฉcifiquement des bio-molรฉcules (rรฉcepteurs protรฉiniques responsables de diverses pathologies) par greffage en surface dโanticorps ou de peptides ciblants spรฉcifiques.13 Ainsi, lโimagerie par ultrasons est une modalitรฉ unique puisquโelle peut รชtre employรฉe aussi bien en imagerie diagnostique quโen tant quโoutil thรฉrapeutique. De plus, son faible coรปt, sa portabilitรฉ, sa facilitรฉ dโutilisation, lโabsence dโirradiations ionisantes, ainsi que ses hautes rรฉsolutions temporelle et spatiale font de cette modalitรฉ une technique parfois prรฉfรฉrรฉe aux techniques classiques de lโimagerie molรฉculaire.
Lโimagerie optique
Pendant de nombreuses annรฉes, la biologie utilisait la microscopie optique comme outil fondamental pour lโobservation des tissus ร lโรฉchelle du micromรจtre. Cependant, le phรฉnomรจne de dispersion de la lumiรจre empรชchait de recueillir des informations sur les รฉvรจnements cellulaires et rรฉduisait donc fortement lโimagerie biologique ร une observation en surface. La crรฉation et le dรฉveloppement de nouvelles technologies optiques et รฉlectroniques ainsi que lโavรจnement et la synthรจse de molรฉcules fluorescentes ont permis dโouvrir les possibilitรฉs dโimagerie en profondeur. Aujourdโhui, lโimagerie optique exploite les diffรฉrentes propriรฉtรฉs de la lumiรจre telles que lโabsorption, lโรฉmission, la rรฉflexion, la diffraction ou encore la fluorescence comme source de contraste. Elle compte trois techniques : la fluorescence, la bioluminescence et la chimiluminescence qui se diffรฉrencient par la source excitatrice utilisรฉe. Cette modalitรฉ a connu de grandes avancรฉes avec principalement la fluorescence, technique la plus utilisรฉe actuellement qui a รฉtรฉ mise en avant via la dรฉcouverte de la protรฉine fluorescente dโAequoria Victoria (Green Fluorescent Protein โ GFP).22 La bioluminescence est elle aussi en plein essor depuis la dรฉcouverte des couples lucifรฉrine/lucifรฉrase, couples substrat/enzyme responsables de la luminescence des lucioles ou encore de certaines espรจces marines. Elle est ร lโorigine de nombreuses recherches dans le domaine du gรฉnie gรฉnรฉtique pour le suivi et la comprรฉhension des interactions protรฉine-protรฉine en temps rรฉel par exemple.23 Cependant, ce type de manipulation nโest pour le moment pas transposable du petit animal ร lโHomme, puisque nรฉcessitant une ingรฉnierie gรฉnรฉtique de lโorganisme ร observer, la technique ne peut donc รชtre exploitรฉe quโau stade prรฉclinique. Tout dโabord destinรฉe ร la recherche fondamentale, la chimiluminescence est aujourdโhui au cลur de nombreux exemples in vitro et in vivo aussi bien par lโutilisation de molรฉcules inorganiques quโorganiques que nous prรฉsenterons dans ce chapitre. Lโintรฉrรชt de ces trois techniques rรฉside dans leur propriรฉtรฉ non invasive ainsi que dans lโemploi de composรฉs plus stables pouvant donner facilement des informations ร lโรฉchelle cellulaire en contraste avec les techniques รฉnumรฉrรฉes prรฉcรฉdemment. De plus, lโinstrumentation est peu encombrante et ร moindre coรปt, ce qui constitue un atout supplรฉmentaire. Lโimagerie optique est de ce fait une alternative plus attractive que les techniques classiques de lโimagerie molรฉculaire.
Nรฉanmoins, bien que le problรจme de la dispersion ait pu รชtre attรฉnuรฉ par les avancรฉes technologiques il nโen demeure pas moins prรฉsent. En effet dโun tissu ร un autre, les indices de rรฉfraction diffรจrent et les photons servant de source excitatrice ainsi que ceux รฉmis (i.e. par les sondes luminescentes) sont fortement perturbรฉs par le milieu. A cela sont ajoutรฉes la forte absorption et la diffusion de la lumiรจre par les tissus (Figure I.6), rendant difficile lโanalyse au-delร de 0.5 cm de profondeur dans le domaine du visible (i.e. 450 – 600 nm). Il est donc important de travailler dans un domaine spectral supรฉrieur dans lequel lโabsorption par les tissus, notamment lโhรฉmoglobine, est rรฉduite. Cependant, au-delร de 900 nm, les molรฉcules dโeau absorbent fortement, une gamme spectrale est donc dรฉfinie. Cette gamme est dite ยซ fenรชtre dโimagerie ยป in vivo et est comprise entre 650 et 900 nm.
Une autre limitation majeure est lโauto-fluorescence des tissus en grande partie due ร lโhรฉmoglobine mais aussi ร dโautres bio-analytes tels que les coenzymes (e.g. les flavines), les acides aminรฉs (e.g. le tryptophane), ou encore les bases de lโADN. Comme le dรฉmontre la Figure I.7, les organes de lโorganisme dโรฉtude (i.e. une souris ici) deviennent quasiment indiscernables ร la lumiรจre dans le proche IR. Le signal sur bruit en alors augmentรฉ et la sensibilitรฉ amรฉliorรฉe. Lโutilisation de molรฉcules absorbant et รฉmettant dans le proche infra-rouge (IR) semble donc รชtre la solution ร lโensemble de ces problรฉmatiques.
Les modulations de la fluorescence
La fluorescence peut รชtre modulรฉe suivant diffรฉrents mรฉcanismes. Nous pouvons distinguer les phรฉnomรจnes permettant dโinduire une extinction de fluorescence (e.g. le PeT) de ceux conduisant ร un dรฉplacement des longueurs dโonde dโรฉmission (e.g. lโESIPT). Nous allons donc prรฉsenter briรจvement chacune des possibles modulations.
Le transfert dโรฉlectron photoinduit (ou PeT pour Photo-induced electron Transfer)
Le PeT est sans aucun doute le phรฉnomรจne le plus mis en ลuvre dans la conception de sondes fluorogรฉniques. Il se traduit par une inhibition de la fluorescence par un motif ยซ quencheur ยป (i.e. accepteur dโรฉnergie), suivant un mรฉcanisme oxydatif ou rรฉducteur. La prรฉsence dโun groupement รฉlectro-attracteur (e.g. un groupement nitro) ou dโun groupement donneur (e.g. un groupement amino) sur la ยซ quencheur ยป de la sonde permet ร ce mรฉcanisme dโopรฉrer. Comme reprรฉsentรฉ sur la Figure I.14, il qui peut รชtre expliquรฉ via la thรฉorie des orbitales frontiรจres. Dans le cas dโun PeT oxydatif, lโรฉlectron excitรฉ (i.e. ร la suite dโune excitation photonique) est transfรฉrรฉ de lโorbitale LUMO du fluorophore (i.e. notรฉ D) vers lโorbitale LUMO du ยซ quencheur ยป (i.e. notรฉ A) avant de revenir ร lโรฉtat fondamental via un mรฉcanisme non radiatif. Dans le cas dโun PeT rรฉducteur, un รฉlectron de lโorbitale HOMO du quencheur (i.e. notรฉ D cette fois) vient occuper lโorbitale HOMO du fluorophore (i.e. notรฉ A) et empรชche lโรฉlectron excitรฉ qui occupe lโorbitale LUMO du fluorophore de revenir ร lโรฉtat fondamental.
Le transfert de charge photoinduit (ou ICT pour Intramolecular Charge Transfer)
Les fluorophores possรจdent des moments dipolaires diffรฉrents ร lโรฉtat excitรฉ et ร lโรฉtat fondamental : le moment dipolaire est gรฉnรฉralement plus important ร lโรฉtat excitรฉ. La prรฉsence dโun groupement รฉlectro-attracteur (e.g. de types carbonyl ou nitrile) et dโun groupement รฉlectro-donneur (e.g. amine) sur le fluorophore constitue un systรจme dit ยซ push-pull ยป qui exalte dโautant plus le moment dipolaire de lโespรจce fluorescente. Le transfert de charge correspond alors ร lโรฉquilibre atteint lorsque les molรฉcules dโun solvant polaire environnant stabilisent lโรฉtat excitรฉ du fluorophore polarisรฉ. Cet รฉquilibre induit un dรฉplacement des longueurs dโonde dโรฉmission vers les valeurs les plus รฉlevรฉes, qui va de pair avec la polaritรฉ du solvant : plus le solvant est polaire plus lโeffet bathochrome augmente.
Cette modulation est ร la base des sondes ratiomรฉtriques notamment pour la dรฉtection de cations mรฉtalliques.35
Le transfert de proton photoinduit
En milieux aqueux, la densitรฉ รฉlectronique dโun fluorophore comportant des fonctions acides et/ou basiques se voit modifiรฉe lors de son excitation. Dans certains cas, le caractรจre acide du donneur de proton (i.e. un groupement hydroxyle par exemple) ou le caractรจre basique de lโaccepteur de proton (i.e. un atome dโazote hรฉtรฉrocyclique par exemple) peut รชtre exaltรฉ ร lโรฉtat excitรฉ par rapport ร lโรฉtat fondamental. Ce transfert peut รชtre inter ou intra molรฉculaire (on parle alors dโESIPT, pour Excited-State Intramolecular Proton-Transfer). La Figure I.15 illustre un exemple de sonde fondรฉe sur lโESIPT proposรฉe par lโรฉquipe du Prof. J. Zhao.36
Le cas particulier dโinteraction intermolรฉculaire avec les molรฉcules dโeau est causรฉ par le phรฉnomรจne de transfert de proton photoinduit et est ร lโorigine dโune modification des spectres dโabsorption est dโรฉmission de certains fluorophores. Les sondes ร pH, par exemple, sont en gรฉnรฉral fondรฉes sur ce principe de fluorescence. Elles permettent de cartographier la dynamique du pH intracellulaire afin de mieux comprendre le fonctionnement de lโorganisme ou de dรฉtecter ses dysfonctionnements, tels que la production anormale dโespรจces acides responsable de nombreuses maladies. Nous pouvons citer quelques exemples utilisant les coumarines37 ou les rhodamines.38
Le transfert dโรฉnergie de type Fluorescence Resonance Energy Transfer (FRET)
A lโopposรฉ des sondes pro-fluorescentes, celles fondรฉes sur un transfert de type FRET sont constituรฉes de deux chromophores : un donneur dโรฉnergie et un accepteur. Le donneur est excitรฉ et transfert son รฉnergie de faรงon non radiative vers lโรฉtat excitรฉ du chromophore accepteur. Pour que le mรฉcanisme opรจre efficacement, les deux chromophores doivent รชtre suffisamment proches spatialement (i.e. dโune distance infรฉrieure ou รฉgale ร 10 nm) et un bon recouvrement des spectres dโรฉmission et dโabsorption des donneur et accepteur, respectivement, est nรฉcessaire (Figure I.16). Par interaction ou reconnaissance avec lโanalyte cible, les deux partenaires sโรฉloignent (i.e. par rupture dโune liaison covalente) ce qui a pour consรฉquence dโannuler le transfert de type FRET. Dans le cas oรน lโaccepteur induit une extinction de fluorescence du donneur (lโaccepteur est alors appelรฉ quencheur, lโรฉnergie quโil rรฉcupรจre est libรฉrรฉe de faรงon non radiative), celle-ci est retrouvรฉe aprรจs rรฉaction avec lโanalyte. Un autre cas est possible : lโaccepteur peut transformer lโรฉnergie qui lui est transmise en une รฉnergie lumineuse lui รฉtant propre, et seule la dรฉtection de lโanalyte permet de retrouver la luminescence du donneur. 39
Nous verrons plus tard que le transfert dโรฉnergie entre un donneur et accepteur peut suivre dโautres mรฉcanismes (e.g. le transfert ร travers les liaisons).
Dโautres mรฉcanismes, tels que la formation dโexciplexes, sont responsables du quenching de fluorescence.40
Le motif 1,2-dioxรฉtane
Synthรจse du motif 1,2-dioxรฉtane
Le motif 1,2-dioxรฉtane est gรฉnรฉrรฉ ร partir de lโoxygรจne ร lโรฉtat singulet in situ par cycloaddition [2+2] sur une olรฉfine riche en รฉlectron. Celui-ci peut รชtre prรฉparรฉ selon diffรฉrentes mรฉthodes. Nous avons vu, dans le cas du luminol, par exemple, une mรฉthode purement chimique qui met en jeu une oxydation par le peroxyde dโhydrogรจne en prรฉsence de soude et dโun catalyseur qui conduit, dans ce cas ร une cycloaddition [4+2]. Cependant, ces conditions sont bien trop drastiques pour des applications in vivo. La mรฉthode la plus connue repose sur lโutilisation dโun photosensibilisateur (e.g. le bleu de mรฉthylรจne, le rose bengal, la tรฉtraphรฉnylporphyrine) qui par irradiation gรฉnรจre lโoxygรจne singulet. Diffรฉrents photosensibilisateur peuvent รชtre utilisรฉs, chacun ayant des caractรจres photophysiques diffรฉrents (Figure I.25). A lโopposรฉ des fluorophores, les photosensibilisateurs doivent favoriser au maximum le transfert dโรฉnergie non radiatif pour rรฉaliser le passage de lโoxygรจne dโun รฉtat triplet vers un รฉtat singulet. Ceci explique la structure particuliรจre du Rose bengal : les atomes de chlore et dโiode favorisent les transferts dโรฉnergie non radiatifs. Il est important de noter que la nature du solvant a รฉgalement son importance dans la rรฉaction de formation du motif 1,2-dioxรฉtane. En effet, dโun solvant ร un autre, le temps de demi de lโoxygรจne singulet diffรจre. En milieu aqueux, par exemple, lโoxygรจne singulet se dรฉsexcite rapidement en interagissant avec les liaisons oxygรจne-hydrogรจne. Il est รฉgalement trรจs sensible vis-ร -vis des liaisons carbone-hydrogรจne, son temps de demi-vie est donc plus important dans un solvant ne comportant pas dโatome dโhydrogรจne (e.g. 7 000 ยตs dans le CDCl3 contre 3.1 ยตs dans lโeau).57 Une autre mรฉthode plus rarement utilisรฉe, fait appel ร la formation dโun trioxaphosphรฉtane ร partir dโun phosphite et de lโozone.58 Lโoxaphosphรฉnate peut se dรฉcomposer en donnant le phosphate et lโoxygรจne singulet. Nous verrons que cette alternative peut sโavรฉrer trรจs utile notamment lorsque les prรฉcurseurs utilisรฉs pour la formation du motif 1,2-dioxรฉtane sont photosensibles.
Les mรฉcanismes de dรฉclenchement de chimiluminescence
La dรฉcomposition thermique ou chimique du motif 1,2-dioxรฉtane conduisant ร lโรฉmission lumineuse est majoritairement dรฉcrite selon un mรฉcanisme de type CIEEL pour Chemically Initiated Electron Exchange Luminescence. Cependant, un second mรฉcanisme dit CTID pour Charge Transfer Induced Decomposition, a rรฉcemment รฉtรฉ introduit dans la littรฉrature et pourrait remettre en question le mรฉcanisme prรฉcรฉdent. Nous allons donc dรฉtailler, ci-aprรจs, chacun des mรฉcanismes de dรฉclenchement.
Le mรฉcanisme CIEEL
Ce mรฉcanisme a รฉtรฉ pour la premiรจre fois dรฉcrit en 1979 par le Prof. Schuster.59 Il procรจde comme suit : une reconnaissance enzymatique ou chimique ou encore une instabilitรฉ thermique, induit la formation dโun donneur dโรฉlectron (i.e. gรฉnรฉralement un phรฉnolate) qui transfert un รฉlectron vers le motif 1,2-dioxรฉtane (i.e. la source dโรฉnergie) (Figure I.26). La dรฉstabilisation de ce dernier conduit ร une rupture homolytique de la liaison oxygรจne-oxygรจne puis de la liaison carbone-carbone. Un transfert dโรฉlectron en retour (i.e. BET pour Back Electron Transfer) sโeffectue ensuite vers le phรฉnol qui le conduit dans un รฉtat excitรฉ. Son retour ร lโรฉtat fondamental sโaccompagne dโune รฉmission lumineuse.
Le mรฉcanisme CTID
Ce mรฉcanisme a รฉtรฉ ร maintes reprises revendiquรฉ par le groupe du Prof. M. Matsumoto.60 Il est plus simple que le mรฉcanisme prรฉcรฉdent et ne fait pas intervenir un transfert dโรฉlectron en retour. Lโabsence de preuve expรฉrimentale de lโexistence de cette รฉtape est justement ร lโorigine des polรฉmiques quant au manque de justification du mรฉcanisme. Il commence avec la formation dโun phรฉnolate dont la charge est transfรฉrรฉe vers le motif 1,2-dioxรฉtane (Figure I.27). Ce dernier se fragmente en un motif sur lequel un des atomes dโoxygรจne porte la charge transfรฉrรฉe, lโautre atome portant lโรฉlectron surnumรฉraire. La rupture homolytique de la liaison carbone-carbone conduit ร la formation dโune cรฉtone et du phรฉnol qui rรฉcupรจre un รฉlectron et donc sa charge complรจte. Sous cette forme, le phรฉnolate est dans un รฉtat singulet excitรฉ et par retour ร lโรฉtat fondamental, il libรจre une รฉmission lumineuse.
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Table des matiรจres
CHAPITRE I. LUMIERE ET IMAGERIE MOLECULAIRE
I. LโIMAGERIE MOLECULAIRE
1. Introduction ร lโimagerie molรฉculaire
2. Les diffรฉrents types dโimagerie molรฉculaire
2.1 Les techniques de type macroscopique
2.1.1 La tomodensitomรฉtrie
2.1.2 LโImagerie par Rรฉsonance Magnรฉtique (IRM)
2.1.3 Lโimagerie par ultrasons
2.2 Les techniques de type microscopique et lโimagerie optique
2.2.1 Les techniques dโimagerie radio-isotopique
2.2.2 Lโimagerie optique
II. LUMIERE ET LUMINESCENCE
1. La lumiรจre
2. La luminescence
III. PRINCIPES GENERAUX DE FLUORESCENCE
1. Processus et gรฉnรฉralitรฉs
2. La pro-fluorescence
2.1 Principe gรฉnรฉral
2.2 Les modulations de la fluorescence
2.2.1 Le transfert dโรฉlectron photoinduit (ou PeT pour Photo-induced electron Transfer)
2.2.2 Le transfert de charge photoinduit (ou ICT pour Intramolecular Charge Transfer)
2.2.3 Le transfert de proton photoinduit
3. Le transfert dโรฉnergie de type Fluorescence Resonance Energy Transfer (FRET)
IV. BIOLUMINESCENCE ET CHIMILUMINESCENCE
1. Luminescence dans la nature : la bioluminescence
1.1 Histoire
1.2 Exemples dโapplications
2. Du processus biochimique au processus chimique : la chimiluminescence
3. Le motif 1,2-dioxรฉtane
3.1 Synthรจse du motif 1,2-dioxรฉtane
3.2 Les mรฉcanismes de dรฉclenchement de chimiluminescence
3.2.1 Le mรฉcanisme CIEEL
3.2.2 Le mรฉcanisme CTID
3.3 Relation structure-stabilitรฉ : influence des substituants sur la stabilisation thermique du motif 1,2-dioxรฉtane
3.3.1 Sรฉlection des groupements stabilisants
3.3.2 Sรฉlection du chromophore et du dรฉclencheur
4. Conjugaison aux fluorophores organiques
4.1 Transfert dโรฉnergie ร travers lโespace de type Chemiluminence Resonance Energy Transfer (CRET)
4.2 Transfert dโรฉnergie ร travers les liaisons de type Through Bond Energy Transfer (TBET)
V. INTRODUCTION AU PROJET DE THESE
CHAPITRE II. DEVELOPPEMENT DE SONDES CHIMILUMINESCENTES A PLATEFORME DE TYPE PHENOL POUR UNE DETECTION DANS LE PROCHE IR
I. ETAT DE LโART
1. Prรฉsentation des avancรฉes sur le motif 1,2-dioxรฉtane ร phรฉnol : de la dรฉtection UV au proche IR
1.1 Travaux du Prof. A.P. Schaap : commercialisation des premiรจres plateformes chimiluminescentes et amรฉlioration de leur efficacitรฉ
1.2 Travaux du Prof. M. Matsumoto : synthรจse et dรฉveloppement dโun nouveau motif dioxรฉtane
1.3 Travaux du Prof. D. Shabat : optimisation des dioxรฉtanes du Prof. Schaap et extension de la chimiluminescence vers le proche IR pour des applications in vivo
2. Utilisation des lanthanides pour la chimiluminescence
3. Les bras rรฉactifs auto-immolables
4. Prรฉsentation des travaux antรฉrieurs au laboratoire
4.1 Synthรจse et รฉvaluation dโune sonde chimiluminescente pour la dรฉtection de la Caspase-3
4.2 Synthรจse et รฉvaluation dโun hybride dioxรฉtane-coumarine
4.3 Extension de la chimiluminescence vers le proche-IR : formation dโune premiรจre cassette ยซ TBET ยป phรฉnolique
II. RESULTATS ET DISCUSSION
1. Prรฉsentation de la voie de synthรจse de nouvelles plateformes chimiluminescentes ร cลur phรฉnolique
1.1 Synthรจse de chimiluminophores : synthรจse modรจle dโune plateforme phรฉnolique .. 111
1.1.1 Premiรจre stratรฉgie : insertion dโun groupement fonctionnel via une rรฉaction dโortho-mรฉtallation
1.1.2 Deuxiรจme stratรฉgie : insertion dโun groupement fonctionnel via ortho-formylation
1.1.3 Troisiรจme stratรฉgie
1.2 Choix et introduction dโun dรฉclencheur de chimiluminescence
1.2.1 Introduction de groupement phosphates pour une dรฉtection de la phosphatase alcaline
1.2.2 Introduction de dรฉrivรฉs silylรฉs pour une dรฉtection dโions fluorures
1.2.3 Introduction dโun groupement nitro via un bras auto-immolable pour une dรฉtection de la nitro-rรฉductase
1.3 Extension de la chimiluminescence vers le proche infra-rouge : utilisation du cลur phรฉnolique comme antenne par introduction dโun complexe de lanthanide
2. Conclusion et perspectives ร ces travaux
CHAPITRE III. DEVELOPPEMENT DE SONDES CHIMILUMINESCENTES A CลUR NAPHTOLIQUE : FORMATION DโUNE CASSETTE ยซ TBET ยป HYDROSOLUBLE
I. ETAT DE LโART
1. Prรฉsentation bibliographique
1.1 Exemples de fonctionnalisations des motifs 1,2-dioxรฉtanes pour une extension de chimiluminescence vers le proche IR
1.1.1 Les sondes chimiluminescentes ร cลur naphtolique
1.1.2 Autres modifications structurales
1.2 Exemples de cassettes de type TBET
1.3 Les benzo[a]phรฉnoxazines : mรฉthodes dโhydrosolubilisation
2. Prรฉsentation des travaux antรฉrieurs au laboratoire
2.1 Premiรจre stratรฉgie : Extension de lโรฉmission de chimiluminescence vers le proche IR via un transfert dโรฉnergie ร travers lโespace
2.2 Deuxiรจme stratรฉgie : extension de lโรฉmission de chimiluminescence vers le proche IR via un transfert dโรฉnergie ร travers les liaisons
2.2.1 Conception dโun chimiluminophore ร cลur naphtolique pour lโintroduction dโun motif fluorescent via un groupement de type triflate
2.2.2 Modification du groupement protecteur et introduction dโun motif fluorescent via un atome dโhalogรจne
2.2.2.1 Synthรจse
2.2.2.2 Dรฉclenchement de chimiluminescence par dรฉtection dโions fluorures : preuve de concept
II. RESULTATS ET DISCUSSION
1. Premiรจre stratรฉgie : modification du groupement protecteur par introduction dโun groupement de type mรฉthoxyรฉther (MOM)
2. Deuxiรจme stratรฉgie : introduction dโun groupement de type benzyle
2.1 Synthรจse du chimiluminophore
2.1 Choix et introduction dโun dรฉclencheur de chimiluminescence
2.1.1 Premiรจre stratรฉgie : introduction de lโacรฉtylรจne en amont du dรฉclencheur
2.1.2 Deuxiรจme stratรฉgie : introduction du dรฉclencheur en amont de lโacรฉtylรจne
3. Valorisation du chimiluminophore ร cลur naphtol
4. Extension de la chimiluminescence vers le proche IR : synthรจse et introduction de fluorophore de type benzo[a]phรฉnoxazine
4.1 Synthรจse de fluorophores
4.2 Synthรจse de la cassette chimiluminescente par introduction dโune version hydrosoluble du Nile red
4.3 Caractรฉristiques photophysiques : spectres dโabsorption et dโรฉmission
5. Conclusion et perspectives ร ces travaux
CHAPITRE IV. CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
I. CONCLUSION GENERALE
1. Sondes ร cลur phรฉnolique
2. Sondes ร cลur naphtolique
II. PERSPECTIVES
1. Fin du projet
2. Vers une stratรฉgie plus convergente
CHAPITRE V. EXPERIMENTAL SECTION
I. GENERAL PROCEDURES
1. Chemicals and reagent
2. Instrument
3. Methods
3.1 HPLC systems
II. UNPUBLISHED EXPERIMENTAL DATA
1. Synthesis of phenol chemiluminescent platform
2. Synthesis of naphtol chemiluminescent platform
2.1 Protection with methoxymethylether (MOM) group
2.2 Protection with benzyl (Bn) group
2.3 Synthesis of napthol platform from 1,2-dioxetane decomposition
3. Synthesis of water-soluble Nile red derivatives
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