DÉVELOPPEMENT DE L’ADOLESCENT·E
EDUCATION AUPRÈS DES JEUNES
Selon Michel Bozon (2010), l’éducation en santé sexuelle a été, jusqu’à récemment, un moyen de contrôler la sexualité des jeunes, plutôt que de les protéger. La sexualité des jeunes a été longtemps perçue négativement, potentiellement dangereuse, et les politiques se sont occupé.e.s de la gérer au même titre que la consommation d’alcool ou de tabac. Cela crée un paradoxe qui est
visible notamment dans le fait que si la société dit vouloir aider les jeunes à orienter leurs pratiques sexuelles, l’éducation tente parfois de retarder l’entrée des jeunes dans la vie sexuelle.
Les programmes éducatifs, en mettant en exergue des dangers, des maladies, des grossesses non désirées, des troubles de la sexualité etc., ont alors tendance à être dissuasifs. A la fin du XXème siècle, la prévention a mis l’accent sur la préservation de la santé, notamment suite à l’apparition du VIH. À ce moment-là, les jeunes ont été visé.e.s par les campagnes de prévention, alors que ce n’était pas la population la plus concernée. Cependant, cela permettait de ne pas renforcer un stigmate déjà existant sur un autre groupe social : les hommes homosexuels.
PROFESSIONNEL.LE.S DE L’ÉDUCATION SEXUELLE
La Fédération valaisanne des centres SIPE se tient aux valeurs énoncées par l’IPPF et est membre de SANTE-SEXUELLE Suisse, ainsi que de Couple+, fédération romande et tessinoise, encadrant les différents services de consultation conjugale. C’est à elle que reviennent les mandats dans les domaines de la santé sexuelle pour le canton du Valais. Elle poursuit plusieurs buts : la promotion de la santé sexuelle et reproductive, ainsi que la défense des droits en cette matière. La défense du respect en ce qui concerne la santé sexuelle ou l’intimité, ainsi que le respect des règlements légaux. Le libre accès à une information et du soutien de façon neutre pour tout.e individu.e dans les domaines suivants : santé sexuelle, éducation à la santé sexuelle, périnatalité et couple.
Il existe quatre centres dans le Bas-Valais et deux dans le Haut-Valais, permettant d’offrir aux personnes qui le souhaitent un accompagnement donné par des conseillers et conseillères en santé sexuelle. Depuis 2006, l’ensemble des élèves des degrés 6H à 8H et 10CO bénéficient d’un programme cantonal d’éducation en santé sexuelle. Un programme spécialisé est également proposé pour les élèves en situation de handicap. Selon le rapport d’activités 2016, ce sont plus de 16’000 élèves, de la 2H au niveau tertiaire qui ont bénéficié de l’intervention des éducateurs et éducatrices en santé sexuelle cette année-là. (SIPE, 2017)
ENCADREMENT DE LA SEXUALITÉ
Afin d’éviter les risques liés à la sexualité au sein des institutions sociales et médicales, les professionnel.le.s tentent de respecter la « bonne distance professionnelle », de façon à séparer strictement la vie professionnelle de la vie privée. Cependant, cette distance à tenir n’est pas un concept si clair que cela, inscrit dans un règlement avec une description, voire une définition de ce qui est une bonne ou une mauvaise distance. De ce fait, les professionnel.le.s doivent souvent se fier à leur bon sens ou leurs expériences et agir selon leur propre ressenti. De plus, ils et elles se forcent à tenir un discours « hygiéniste », promouvant une sexualité responsable, protégée et contrôlée (Moulin, 2007, p.82). Ce discours s’accompagne de militance auprès des jeunes, contre l’image véhiculée par la pornographie : relations sexuelles bestiales et sauvages, dissociées de relations amoureuses. Au contraire, les professionnel.le.s insistent sur le consentement, capital entre les personnes.
Notamment au sein des institutions de soins, mais également dans les foyers où travaillent des ES, les professionnel.le.s sont attentifs et attentives à contrôler les réactions possibles des bénéficiaires ou des jeunes, en évitant par exemple d’alimenter des relations dans lesquelles s’instaure une dynamique de séduction. Cette envie de se distancer des personnes accompagnées se heurte à l’envie de promulguer une aide adéquate et satisfaisante. C’est en naviguant entre ces deux pôles que les professionnel.le.s tentent de trouver la fameuse « bonne distance ».
DÉVELOPPEMENT DE L’ADOLESCENT·E
DÉVELOPPEMENT SOCIAL:
Le développement psychologique et physique de l’adolescent.e a été abondamment décrit par un grand nombre d’auteur.e.s. Cependant, nous allons mettre l’accent dans ce travail, sur le développement social, puisque vivant en institutions, les relations qu’entretiennent les jeunes avec leurs groupes de pair.e.s sont d’autant plus importantes, car ce sont des relations de cohabitation. De plus, d’autres relations façonnent le quotidien des jeunes : celles avec leurs parents, dont ils et elles sont séparé.e.s lors des séjours en foyer, ainsi que celles entretenues avec les TS. Nous trouvons qu’il est intéressant de garder à l’esprit l’ensemble de ces relations, notamment lors de l’analyse des entretiens, dans la deuxième partie de ce travail.
Selon Berthe Reymond-Rivier (1977), il est reconnu que l’adolescent.e pourra acquérir de l’autonomie et de l’indépendance ainsi que le sens de la solidarité, de la justice et toutes les qualités indispensables à la vie en groupe, en se confrontant bénéfiquement à un groupe de pair.e.s. L’adolescence est une période de découvertes et d’expérimentations pour les adolescent.e.s, qui vivent généralement à ce moment-là leurs premiers flirts ainsi que leurs premiers baisers, leurs premières amours.
GROUPES SOCIAUX SIGNIFICATIFS:
Lorsque nous parlons de l’ancrage sociologique, nous pensons qu’il convient de parler du groupe. En effet, ce dernier a une grande influence sur l’adolescent.e et sur la construction de son identité. Tout d’abord, définissons ce qu’est un groupe. Selon Anzieu et Martin (2007) le groupe est un ensemble d’individu.e.s ayant des croyances, des goûts, des intérêts et des buts communs, mais qui ont également des liens et qui s’influencent mutuellement. Le groupe va devenir un support d’identité puisqu’il représente lui-même une forte identité. Les personnes se mettent en groupe parce qu’elles ont les mêmes besoins, les mêmes valeurs, le même langage, les mêmes pensées, etc. Nous allons ici présenter trois groupes sociaux déterminants, qui influencent les adolescent.e.s: les pair.e.s, la famille et l’école.
RITES DE PASSAGE
Les rites de passages étaient autrefois considérés comme des coutumes permettant le changement de statut social ou sexuel d’un.e individu.e. Encore aujourd’hui vécus dans certaines cultures de façon très démonstrative, ils sont un peu moins visibles dans notre société occidentale actuelle, bien que les cérémonies religieuses marquent par exemple toujours certaines étapes : baptême, mariage, mort, etc. Par ailleurs, nous avons pensé qu’il serait intéressant d’évoquer ici que l’adolescent.e, afin de construire son identité, passe sûrement par des étapes, des comportements, que nous pouvons associer à des rites de passages, puisqu’ils permettent aux jeunes de passer du statut d’adolescent.e à celui d’adulte.
En dehors des étapes physiques et biologiques, les jeunes ont parfois besoin de tester les limites du cadre donné par leurs parents, par l’école ou la société. Lorsque les adultes leur imposent un cadre, cela leur inculque des valeurs et permet aux jeunes d’intérioriser des règles. A contrario, si aucune personne ne pose de limites claires, les jeunes encourent des risques, en ayant recours à des comportements toujours plus dangereux ou illégaux, puisqu’ils ou elles n’ont pas les repères de stabilité nécessaires à leur bon développement. Ils et elles peuvent vouloir aller toujours plus loin, afin de tester leurs propres limites, jusqu’à les dépasser et subir des dommages psychologiques ou corporels.
IMAGE DE SOI
Les changements corporels vécus durant la puberté rendent les jeunes sensibles à leur image et à ce que les autres peuvent en penser. Comme l’image corporelle joue un rôle important dans l’acceptation et la valorisation sociales, elle devient un gage très important de l’estime de soi pour les adolescent.e.s. En effet, le corps est aujourd’hui, en occident, sujet à une multitude de règles et
de codes, véhiculés en majeure partie par les médias. De plus, avec l’essor des réseaux sociaux, les jeunes sont confronté.e.s à des images de corps considérés comme parfaits, vers lesquels ils et
elles cherchent à tendre, avec peu ou prou d’assiduité. Cet idéal représenté dans les magazines, sur les plateaux télés, sur internet etc. propose –impose– des modèles de beauté restreints, qui affectent tout particulièrement les jeunes, alors qu’ils et elles sont justement en train de s’accommoder de leur corps qui se transforme. La pression qui découle de ces standards imposés ne vient pas sans une multitude de conseils à suivre pour atteindre cet idéal. Ces marches à suivre remplissent les magazines et représentent aujourd’hui un grand nombre de vidéos sur Youtube.
|
Table des matières
1 INTRODUCTION
1.1 MOTIVATIONS DE NOÉMIE
1.2 MOTIVATIONS DE SANDRINE
1.3 CHOIX DU THÈME
1.4 PROBLÉMATIQUE
2 SANTÉ SEXUELLE
2.1 HISTORIQUE
2.1.1 CONCEPT CULTUREL, POLITIQUE ET COMMUNAUTAIRE
2.1.2 DÉCLARATIONS DES DROITS SEXUELS
2.2 DÉFINITION DIFFICILE À ÉLABORER
2.3 EDUCATION AUPRÈS DES JEUNES
2.4 PROFESSIONNEL.LE.S DE L’ÉDUCATION SEXUELLE
3 REPRÉSENTATION DE LA SEXUALITÉ CHEZ LES PROFESSIONNEL.LE.S DE LA SANTÉ ET DU TRAVAIL SOCIAL
3.1 CONDUITES SEXUELLES PROBLÉMATIQUES
3.2 ENCADREMENT DE LA SEXUALITÉ
4 DÉVELOPPEMENT DE L’ADOLESCENT·E
4.1 DÉVELOPPEMENT SOCIAL
4.2 GROUPES SOCIAUX SIGNIFICATIFS
4.3 RITES DE PASSAGE
5 SEXUALITÉ DES JEUNES
5.1 SEXE BIOLOGIQUE
5.2 IMAGE DE SOI
5.3 ENTRÉE DANS LA VIE SEXUELLE
5.4 PERCEPTION DE LA SEXUALITE DES JEUNES
5.5 COMPORTEMENTS SEXUELS
5.6 MASTURBATION
5.7 PORNOGRAPHIE
5.8 SOCIALISATION SEXUELLE
6 GENRE ET SEXUALITÉ CHEZ LES JEUNES
7 PRÉSENTATION DES MÉTIERS CONCERNÉS ET TERRAIN DE RECHERCHE
7.1 ES VERSUS ASC
7.1.1 ANIMATION SOCIOCULTURELLE
7.1.2 EDUCATION SOCIALE
7.2 ANALYSE DES ENTRETIENS
8 PROFESSIONNALITÉ VERSUS VALEURS PERSONNELLES
8.1 DÉCALAGE ENTRE TS ET JEUNES : EFFETS DE L’INSTITUTION
8.2 VALEURS ET EXPÉRIENCES MISES EN PERSPECTIVE
8.3 PORNOGRAPHIE : UN SUJET CONFRONTANT
8.4 L’AMOUR COMME RÉFÉRENCE
8.5 RESPONSABILITÉS PARTAGÉES ENTRE ASC, ES ET FAMILLES
8.5.1 TROUVER COMMENT EN PARLER EN FONCTION DE SON EXPÉRIENCE
9 CONSTRUCTION GENRÉE DE LA RÉALITÉ
9.1 NON-MIXITÉ : GARANTIE DE CHASTETÉ ?
9.2 MIXITÉ : PAS DE SOUCI DE SEXUALITÉ ?
9.3 RELATIONS INTIMES FILLES-GARÇONS MARQUÉES AU SCEAU DU GENRE
9.3.1 FOYER
9.3.2 CENTRE DE LOISIR
9.3.3 APPARTENANCE AU GROUPE
9.4 FILLES, GARÇONS : DEUX POIDS, DEUX MESURES
9.4.1 APPARENCE, SÉDUCTION, BEAUTÉ : DEUX DISCOURS
9.4.2 PROVOCATION : UNE HISTOIRE DE FILLES
9.5 COMPORTEMENTS SEXUELS PERÇUS PAR LES PROFESSIONNEL.LE.S
9.6 PRISE DE CONSCIENCE ET HÉTÉRONORMATIVITÉ OMNIPRÉSENTE
9.7 HOMOSEXUALITÉ : CRAINTE ET RÉALITÉ
9.8 SYNTHÈSE DE L’ANALYSE
10 PARTIE CONCLUSIVE
10.1 EVALUATION DES OBJECTIFS ET BILAN MÉTHODOLOGIQUE
10.2 PISTES D’ACTIONS CONCRÈTES
10.3 BILAN PERSONNEL ET PROFESSIONNEL
10.3.1 NOÉMIE
10.3.2 SANDRINE
11 RÉFÉRENCES
12 ANNEXES
A) ARTICLE 8 DE LA DÉCLARATION DES DROITS SEXUELS DE L’IPPF : LE DROIT À L’ÉDUCATION ET À L’INFORMATION
B) SCÉNARIOS POUR LES ENTRETIENS AVEC JEUNES ET TS
C) GRILLE D’ENTRETIEN AVEC LES JEUNES
E) GRILLE D’ENTRETIEN AVEC LES TS
Télécharger le rapport complet