Développement de la socialisation chez le jeune enfant

Développement de la socialisation chez le jeune enfant

Les activités du carré

Dans le cadre des approches didactiques de l’enseignement musical au premier cycle du PER, Joliat (2016) déclare que le carré est composé de plusieurs activités musicales à visée intégrative, c’est-à-dire qui font évoluer l’enfant dans ses apprentissages de la musique tout en respectant son intégrité, son niveau de développement et ses intérêts. Il est régulé par une communication sensorielle basée sur un climat d’empathie. À travers les activités du carré, l’enfant va petit à petit se construire un sens de soi grâce aux rituels, un monde autour de soi à travers l’imitation (mimesis), puis un soi dans ce monde en agissant dans cet environnement avec son corps et sa voix (performativité). Le carré peut se pratiquer assis sur une chaise, mais l’élève doit pouvoir toucher le sol avec ses pieds, assis sur le sol, debout, ou alors couché.
Il est basé sur trois types d’activités différentes : les activités de proprioception, de praxie, puis d’accordage. Les activités de proprioception permettent de construire son schéma corporel et l’image de son corps. Elles comprennent des exercices de posture, travaillent avec la prise d’information tactile et kinesthésique et utilisent le contact visuel. Les activités de praxie travaillent les capacités psychomotrices, vocomotrices et gestuelles. Les activités d’accordage se divisent en trois niveaux : la synchronisation, la syntonisation, puis l’empathie. La synchronisation est un processus qui se fait automatiquement et qui pousse l’individu à se mouvoir lorsqu’il entend une musique. Il est appelé « à bas niveau », car il ne nécessite pas un gros investissement d’énergie psychique. La syntonisation, au contraire de la synchronisation, engage une activité cognitive « de haut niveau », car il s’agit de ressentir la musique, ce qui permet de créer une correspondance et une forme de communication avec la musique et avec autrui en créant un format commun. Finalement, l’empathie est la capacité à ressentir les émotions de l’autre par le biais de phénomènes d’identification, de compréhension et de mise en situation personnelle de ses états d’expériences.
Les activités du carré consistent à développer l’appareil moteur et vocal de l’élève selon trois formes de mouvements : les engagements, les dissociations, les pendules/rotations. Les engagements incitent le corps et la voix de manière globale. Par exemple, frapper sur le sol avec la plante des deux pieds en même temps. Les dissociations séparent la gauche et la droite du corps par des mouvements alternatifs. Par exemple, lorsque le bras gauches’élève, le bras droit s’abaisse. Pour terminer, les pendules/rotations sont des mouvements de balancement soit de droite à gauche, par exemple balancer la tête de gauche à droite, soit de mouvement de rotation d’articulations, par exemple pivoter les jambes. Les enfants apprennent premièrement les engagements, ensuite les dissociations, puis finalement les Comptines à gestes pendules/rotations. Les trois mouvements sont d’abord abordés séparément. Par la suite, ils peuvent être associés.
Lors des activités du carré, l’enseignant se base sur deux principes importants : le principe de correspondance, qui signifie qu’il exerce des actions et des expressions motrices gestuelles et vocales qui sont au niveau de ce que l’élève est capable de produire, puis le principe de complémentarité, qui signifie que l’enseignant prend en compte les variations que l’élève lui propose afin que les activités restent attractives. L’enseignant exerce le principe de correspondance et de complémentarité selon quatre notions : la simplification (réduire un exercice à son expression la plus simple), la formalisation (créer une forme d’exercice facilement identifiable), la répétition (répéter cet exercice jusqu’à ce qu’il n’ait plus d’intérêt pour l’élève), puis finalement l’exagération (modeler l’exercice de manière empathique afin de garder l’attention de l’élève). Lors des activités du carré, il est possible que l’élève prenne la place de l’enseignant à travers des activités de miroir par exemple.
L’enseignant met en place certains facilitateurs avec les élèves tels qu’une communication sensorielle, des interactions visuelles et un regard périphérique, des codes musicaux communs : fixer les départs et les arrêts, créer des effets de surprise, travailler en miroir, l’enfant prend la place de l’enseignant, répéter jusqu’à la diminution de l’intérêt.

L’imitation

Dès sa naissance, le nourrisson possède des compétences d’imitation en reproduisant les mimiques faciales de l’adulte. Il est donc capable d’observer une action, de l’enregistrer, puis de la répéter. À six semaines, il est capable d’imiter une action qu’il a enregistrée 24 heures avant (Dayan & Rochette-Guglielmi, 2012).
Le Run (2014) affirme que les activités d’imitation jouent un rôle très important dans le développement social de l’enfant. Nadel (2011, citée par Le Run, 2014) déclare : «L’imitation est l’une des plus puissantes capacités humaines. Elle est l’assise de deux fonctions adaptatives de base : l’apprentissage et la communication » (p. 19). Ce que l’enfant voit lors de l’imitation induit une résonance de sa propre motricité dans le rapport à son camarade, car en même temps qu’il fait, il voit l’autre reproduire, donc il se rend compte que ce qu’il fait existe. L’imitation permet d’engager une communication, elle offre des moments de rire, de jubilation, de plaisir et d’apprentissage.
L’imitation, par exemple le jeu de miroir, est une façon d’enseigner la musique à l’élève. Elle était très utilisée aux XVIIe et XVIIIe siècles. Imiter ne signifie pas reproduire un résultat identique à celui du professeur, mais être capable de se mettre à sa place. L’enseignant ne donne pas à l’élève les ressources pour reproduire la tâche. L’élève doit donc puiser dans ses propres ressources afin de pouvoir imiter l’enseignant (Le Run, 2014).

La communication sensorielle ou protoconversation

Nous savons que le nourrisson est sollicité par les sons et les mouvements avant même de l’être par les formes et les couleurs. Il connaît également dès sa naissance ses premiers rapports sociaux qui sont suscités par l’adulte, et le plus souvent par la mère. Dans ces échanges, la mère utilise des processus de répétition basés sur les vocalisations, les stimulations tactiles et les mouvements, principalement pour entrer en contact. C’est ce que l’on appelle la communication sensorielle, ou la protoconversation. Les activités protomusicales regroupent les six qualités spécifiques du son, c’est-à-dire la hauteur, la mélodie, le rythme, la durée, l’intensité, le timbre. Elles privilégient les activités musicales basées sur plusieurs modes : la posture, l’attitude, les mouvements, la gestuelle, le regard, les mimiques, le langage, la voix.
Selon Trevarthen et Aitken (2001, cités par Gratier, 2007), il s’agit d’une « coopération expressive et psychique entre l’adulte et le bébé que l’on peut observer dans leurs interactions spontanées dès la naissance » (p. 50). ratier (2001) parle de la communication sensorielle ainsi : « L’échange entre une mère et son bébé se situe entre expression et psychisme comme une sorte de narration sans mots, mais narration tout de même, car il y a un but » (p. 12).
La communication sensorielle contient les mêmes éléments clés qu’un processus narratif, à l’exception qu’elle n’emploie pas de vocabulaire. C’est un groupe de vocalisations composé d’un début, d’un développement, durant lequel l’excitation est souvent au plus haut, puis d’une conclusion. La conclusion consiste souvent à une chute d’intensité, ou alors à un prolongement des sons, comme on le fait également dans le langage parlé et qui marque la fin d’une phrase (Gratier, 2007).
Stern (1987, cité par Miroudot, 2000) cite en parlant de la communication mère-nourrisson: « Ce qui sans doute importe moins, c’est ce que la mère dit réellement. L’important, c’est la musicalité des sons qu’elle produit. De ce point de vue, l’action répétitive acquiert son importance en tant qu’unité structurelle et fonctionnelle dans l’interaction » (p. 23). En effet, les parents parlent à leurs bébés alors qu’ils ne comprennent pas ce qu’ils disent. Mais, alors qu’ils produisent des vocalises plus mélodieuses, avec des hauteurs plus élevées qu’en temps normal, des répétitions et des grands contrastes de hauteurs, ils engagent leur nouveau-né dans une communication non verbale (Imberty & Gratier, 2007).
La mère va donc employer une voix plus aiguë lorsqu’elle communique avec son bébé, elle va faire plus de variations entre le grave et l’aigu que lorsqu’elle parle à un adulte, elle va accentuer certains mots et en répéter d’autres de nombreuses fois. Cette répétition joue un rôle essentiel dans le développement social et cognitif de l’enfant, car elle lui permet de s’adapter à un nombre toujours plus grand de variations, et d’anticiper ce qui va se passer de par sa régularité (Stern, 1987, cité par Miroudot, 2000).
Comme le fait remarquer Robin (1986, cité par Baudier & Céleste, 2002), le langage de la mère adressé à son bébé contient un vocabulaire très réduit, composé de quelques mots simples, répétés plusieurs fois consécutivement. La mère emploie plusieurs onomatopées, et les phrases interrogatives sont également très nombreuses.
Selon Gratier (2001) : « Le rythme du dialogue entre mère et bébé est un rythme qui n’est ni tout à fait aléatoire, ni tout à fait prévisible, et qui offre au bébé un éventail de possibilités expressives » (p. 11). L’auteur souligne également que ces interactions vocales sont indissociables des gestes, de la posture, et des interactions visuelles. Il a été démontré que la qualité et l’efficacité de la communication chez le nouveau-né avec son entourage dépendent de la musicalité des interactions. Autrement dit, plus les interactions contiennent de gestes, de mouvements, plus elles seront efficaces auprès du jeune enfant.
La communication sensorielle ou protoconversation permet de maintenir l’attention du bébé et de gérer l’excitation. Elle provoque une émotion, car elle donne envie de connaître l’autre et de partager. Elle rend l’interlocuteur curieux de la rencontre et de la séparation, puis elle donne également le goût de l’anticipation (Gratier, 2007). Selon Joliat (2016), la communication sensorielle favorise l’établissement d’un accordage affectif qui favorise l’attachement et garantit la survie du nouveau-né. De plus, elle apaise et permet la construction d’un sens de soi.
Selon Nocker-Ribeaupierre (2002, cité par Prat, 2013) : « Les sentiments de la mère sont transmis à son bébé par les paramètres musicaux de sa voix » (p. 31).

Relation entre communication sensorielle et musique

Comme le mentionne Gratier (2001) : « On a souvent comparé l’interaction mère-bébé à deux musiciens en train d’improviser » (p. 12). On retrouve dans la communication mèrebébé les trois éléments musicaux principaux : la mélodie, le rythme et la narrativité. Lorsqu’il parle au bébé, l’adulte a tendance à rendre plus mélodieuses ses vocalisations et à parler à un rythme plus régulier.
Gratier (2007) nous fait remarquer que cette forme de communication est plus proche de la musique que du langage, car, de la même manière que la musique, elle ne transmet pas de contenu spécifique, mais plutôt un ressenti.
Comme c’est le cas avec la musique, dans la communication sensorielle l’émotion se dégage lorsque l’attente rythmique, mélodique ou harmonique est résolue (Meyer, 1960, cité par Gratier, 2007).
Après ces recherches sur la socialisation, la musique et la relation qu’elles entretiennent, je vais passer à la partie méthodologique de mon travail afin de mettre toutes ces notions développées ci-dessus en pratique.

Question et objectifs de recherche

Identification de la question de recherche

Les recherches précédentes m’amènent à me poser la question de recherche suivante : « Est-ce que les activités du carré favorisent le leadership chez l’élève ? »
Durant ma recherche basée sur une approche expérimentale, j’ai enseigné plusieurs leçons de musique basées sur la communication sensorielle à une classe de cycle 1. Lors de mes interventions, j’ai enseigné les activités du carré aux élèves. Ainsi, j’ai pu les observer et découvrir s’il y avait une évolution dans leur socialisation, plus précisément, si les élèves osaient prendre place dans l’espace social. L’objectif de ma recherche est donc le suivant : « renforcer la place de l’élève dans l’espace social à travers les activités du « carré » ».
Afin d’analyser les leçons le plus précisément possible, j’ai choisi un unique critère d’observation ; j’ai observé si les élèves acceptaient de prendre place dans l’espace social en faisant un exemple devant leurs camarades. En d’autres termes, il s’agissait de voir si l’élève acceptait de prendre le rôle de leader en créant un exemple que ses camarades devaient reproduire. Levy-Leboyer (s. d., cité par Deswarte, 2016) définit le leadership comme tel :
Un processus d’Influence sociale par lequel un individu amène un groupe à atteindre des objectifs. Le leadership n’implique pas seulement le fait de faire faire quelque chose à d’autres individus, mais également (ce qui n’est pas le cas pour les relations d’autorité) la capacité à changer l’attitude des membres du groupe, à les mobiliser et à entraîner leur adhésion à des buts communs. De ce fait, le leader doit savoir susciter les motivations et entraîner ceux qui le suivent bien plus que les diriger de manière autoritaire. (p. 1)
L’élève a rencontré, ici, une double tâche : celle de concevoir un exemple, mais pas uniquement pour lui, et celle de prendre en compte le fait que ses camarades devaient être capables de reproduire son exemple. Il devait donc réussir à se mettre à la place de l’autre, afin de se rendre compte si son exemple était faisable pour quelqu’un d’autre ou pas.
J’ai filmé les leçons afin de pouvoir les visionner plusieurs fois, puis j’ai mis en place une observation systématique des comportements des élèves.

Méthodologie

Fondements méthodologiques

Type de recherche

Mon travail de bachelor s’inscrit dans une recherche mixte, c’est-à-dire qui est à la fois qualitative et quantitative. La recherche de type qualitatif est adaptée à l’étude de phénomènes sociaux, car elle explore l’existence et la signification de ces derniers. Elle étudie le comportement des sujets dans leur environnement, puis elle pose des hypothèses (Aubin-Auger, 2008). Ma recherche est qualitative, car elle cherche à comprendre certains comportements, à explorer les émotions et les sentiments de certains individus, puis leurs interactions avec les autres. Elle s’inscrit également dans une analyse quantitative, car j’ai transcrit mes données qualitatives observées à travers les différentes leçons en données quantitatives. Autrement dit, j’ai évalué (attribué des points) les exemples faits par les élèves lors des interventions afin de pouvoir remarquer une éventuelle évolution dans leur manière d’agir dans l’espace social.

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Table des matières

Chapitre 1. Problématique 
1.1 Définition et importance de l’objet de recherche
1.2 État de la question
1.2.1 La socialisation
1.2.1.1 La socialisation : définition
1.2.1.2. Développement de la socialisation chez le jeune enfant
1.2.1.3. La socialisation à l’école
1.2.2 La musique
1.2.2.1 Musique et socialisation
1.2.2.2 Didactique de la musique
1.2.2.3. La communication sensorielle ou protoconversation
1.3 Question et objectifs de recherche
1.3.1 Identification de la question de recherche
1.3.2 Objectifs de recherche
Chapitre 2. Méthodologie 
2.1 Fondements méthodologiques
2.1.1 Type de recherche
2.1.2 Type d’approche
2.1.3 Type de démarche
2.2 Nature du corpus
2.2.1 Récolte des données
2.2.2 Procédure et protocole de recherche
2.2.3 Échantillonnage
2.3 Méthodes et/ou techniques d’analyse des données
2.3.1 Transcription et traitement des données
2.3.2 Méthodes et analyse
Chapitre 3. Résultats 
3.1 Participation des élèves
3.2 Exemples fournis par les sept élèves
3.2.1 Analyse et interprétation des sept exemples séparés
3.1.2 Analyse et interprétation des résultats regroupés
3.1.3 Lien entre leadership et qualité de la performance
3.1.4 Limites de l’analyse
Conclusion
Bibliographie
Annexes
Annexe 1 : demande aux parents 
Annexe 2 : grilles d’analyses individuelles
Annexe 3 : grilles d’analyses individuelles condensées
Annexe 4 : grille d’analyse de toute la classe
Annexe 5 : graphique du leadership pendant la réalisation
Annexe 6 : graphique des vocalisations avec variations de hauteurs 
Annexe 7 : graphique du pattern différent

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