Nature des polluants dans la mer
Le milieu marin est soumis à un stress dû aux rejets d’éléments toxiques et à l’enrichissement du milieu par les nutriments et par la matière organique. D’après Jebali (2002), il existe trois catégories de polluants : biologiques, physiques et chimiques.
1. Polluants biologiques : Ils proviennent essentiellement des effluents urbains ou industriels comprenant des détritus ménagers, des matières fécales, des lessives, des papeteries hautement fermentescibles. Ces rejets sont à l’origine d’une pollution microbienne.
2. Polluants physiques : La pollution physique du milieu marin peut être due au rejet de chaleur, ou encore par les rejets radioactifs provoquant la formation de radicaux peroxydes hautement réactifs qui peuvent avoir des effets génotoxiques (une radio-contamination) (Jebali, 2002).
3. Polluants chimiques : Il existe deux types de polluants chimiques: Les polluants organiques : ce sont les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et toutes les substances organiques de synthèse. Ils sont utilisés comme carburants et lubrifiants. La pollution marine par les hydrocarbures peut être due à l’extraction du pétrole et à son transport maritime. L’utilisation des substances organiques de synthèse à des fins domestiques (détergents), agricoles (organochlorés) ou industriels peut être aussi une cause supplémentaire de la pollution marine. Les plus utilisés en tant que pesticides sont les carbamates et les organophosphorés. En dépit de leur dégradation relativement rapide, la plupart de ces pesticides ont remplacé les organochlorés dont l’utilisation est désormais interdite à cause de leur forte toxicité et de leur bioaccumulation dans l’environnement ; Les polluants Inorganiques : les sels nutritifs (nitrates, phosphates, etc…) utilisés en agriculture Ainsi que divers résidus métalliques rejetés par les industries métallurgiques, les métaux peuvent être rejetés à l’état de trace dans les déchets de certaines industries chimiques. A la différence des polluants organiques, les métaux traces ne font pas l’objet de dégradation biochimique (Fang et Hong, 1999 ; Klavins et al., 2000; Tam et Wong 2000; Yuan et al., 2004)et peuvent s’accumuler dans la chaîne alimentaire (Roméo et Amiard, 1992). Ils sont déversés dans le milieu marin directement ou indirectement (par l’intermédiaire des cours d’eau).
Rappels généraux sur les métaux lourds
A la différence de la plupart des contaminants organiques, les métaux lourds sont des constituants naturels dans les roches et dans les gisements minéraux. Ainsi, normalement ces éléments sont présents à de faibles teneurs (à l’état de traces, moins de 0.1%) dans les sols, les sédiments, les eaux de surface et les organismes vivants (Alloway et Ayres, 1997 ; Callender, 2003). Ces faibles concentrations en métaux lourds constituent le fond géochimique d’un certain environnement. Pour évaluer l’impact d’un métal lourd dans l’environnement, la seule présence n’est pas suffisante. Cet impact est potentiel si le métal donné se trouve à des niveaux des concentrations anormalement élevées par rapport au fond géochimique (Alloway et Ayres, 1997). Une fois que les métaux lourds ont été libérés dans le milieu, soit par des processus naturels ou anthropiques depuis leur source, ils peuvent être transportés par voie éolienne via des aérosols ou par voie aqueuse via l’eau, les matières en suspension ou les sédiments de fond des cours d’eau ; leurs concentrations est un paramètre important pour caractériser l’impact, toutefois il est très important de connaître la disponibilité de leur concentrations dans le milieu vis-à-vis des organismes terrestres et aquatiques (Alloway et Ayres, 1997). Cette « disponibilité » d’un élément vis- à-vis des organismes (appelée parfois abusivement « biodisponibilité ») est très contrôlée par la dissolution et la mise en solution à partir des minéraux porteurs, et par la suite par l’adsorption et la précipitation de cet élément par des réactions géochimiques ayant lieu dans les eaux, les sédiments ou les aérosols. Le degré dans lequel un métal est absorbé ou précipité dépend notamment de ses propriétés intrinsèques (état(s) d’oxydation, rayon atomique, etc.), des paramètres physico-chimiques de l’environnement (pH et potentiel d’oxydoréduction), de la nature de l’absorbant (charge dépendant du pH, type de complexes ligands, surface spécifique), des autres métaux (ou d’autres cations majeurs) présents et de leurs concentrations (Alloway et Ayres, 1997 ; Sigg et al., 2000). En raison de leurs différentes caractéristiques spécifiques, les métaux lourds ont été largement utilisés dans les nouvelles technologies (métallurgiques et électroniques). En conséquence, leurs sources anthropiques sont vastes et leur introduction est plutôt récente dans l’environnement (Callender, 2003). Parmi les sources anthropiques de métaux lourds, nous pouvons signaler : l’activité minière, l’industrie métallurgique et sidérurgique, les engrais et pesticides appliqués dans la culture des sols, les incinérateurs et cendres d’incinération des déchets, les déchets médicaux, les déchetteries de villes, les émissions des usines et moteur à explosion, les effluents des égouts et boues d’épuration (Alloway et Ayres, 1997 ; Plumlee et Ziegler, 2003). Toutefois, il semble que la source anthropique principale de métaux lourds pour l’environnement est celle produite par l’activité industrielle et doméstique (Nriagu, 1996 ; Leblanc et al., 2000).
Accumulation des métaux selon les organes : Organotropisme
L’organotropisme est défini comme étant l’accumulation préférentielle d’un métal dans un organe donné. L’étude de la répartition des éléments traces métalliques dans les organes des poissons présente un double intérêt puisqu’elle renseigne d’une part, sur leur métabolisme en montrant les organes de stockage et d’autre part, elle fournit des données sur une éventuelle contamination des organes comestibles, le muscle en particulier. Le muscle est le principal vecteur de substances potentiellement toxiques pour le consommateur. Les concentrations dans ce tissu, reflètent l’absorption d’un élément durant de longue période, (Kojadinovic et al., 2007). Toutefois, il est très important d’étudier la teneur des métaux dans ce tissu afin d’estimer leur quantité pouvant parvenir à l’homme à travers la consommation du poisson (Phillips, 1995). Le foie qui est considéré comme organe accumulateur et le siège de métabolisme de certains éléments, est un bon indicateur de l’exposition chronique des métaux et joue un rôle important pour leur stockage et leur inactivation (Miller et al., 1992). En effet, le foie est utilisé pour déterminer une accumulation récente de certains éléments d’un écosystème déterminé. Les branchies constituent un organe en contact direct avec le milieu extérieur. Toutefois, les teneurs métalliques peuvent être représentatives du degré de contamination du milieu environnant. Les gonades qui sont comestibles, pourraient présenter des risques de contamination sur le développement des embryons. L’analyse des gonades est réalisée pour évaluer le transfert possible et/ou l’influence des métaux dans le processus de reproduction et en plus pour déterminer les quantités des éléments toxiques pouvant affecter l’homme à travers leur consommation. Le stockage sélectif dans certains organes dépend de trois critères essentiels : l’espèce, la nature du métal (persistant ou non) et la concentration des métaux. Il apparaît qu’avant d’être empoisonnés par les métaux dispersés dans le milieu, les poissons tout comme les organismes aquatiques, les emmagasinent dans des organes de stockage. La biofixation, malgré une certaine variabilité spécifique s’opère en général dans le rein et le tube digestif en cas de contamination passagère sans aucune gravité. Par contre, en cas de contamination plus sévère¸ la plupart des métaux s’accumulent sélectivement au niveau du foie. Les travaux d’Eilser (1981) ont montré que le Zinc, le Cuivre, le Cadmium et le Fer sont accumulés dans les tissus lisses tels que le foie, les reins, le cœur, la rate et les gonades. Cependant le Plomb, le Manganèse sont concentrés dans les organes osseux et cartilagineux tels que les branchies et les squelettes. D’aprés Hamza-Chaffai (1993), les poissons Téléostéens ont le même modèle d’accumulation métallique selon les organes. Ainsi le foie est un site préférentiel de stockage de plusieurs métaux tels que le Cadmium, le Cuivre et le Zinc. Les muscles des espèces présentent toujours les plus faibles teneurs en Cd, Cu et Zn. Les gonades présentent la particularité d’accumuler le Zinc en quantité importante par rapport aux autres organes en raison du rôle de cet élément essentiel dans la fertilisation et le développement embryonnaire.
Influence de la saison
Plusieurs hypothèses peuvent être proposées pour expliquer le phénomène de variations saisonnière sur les niveaux d’éléments métalliques accumulés dans les tissus de Posidonia oceanica: l’existence de facteurs métaboliques, l’effet de l’âge des tissus, la dilution biologique et / ou des mécanismes de détoxication (Pergent- Martini & Pergent, 2000 ; Stauber et Florence., 1987). En outre, un certain nombre d’auteurs semble attribuer les faibles niveaux enregistrés au printemps et en été, le cas de notre étude, à l’augmentation de la biomasse et au phénomène de dilution biologique. Plusieurs auteurs ont souligné l’importance de ce phénomène dans les herbiers marins (Capiomont et al., 2000). Selon Gobert. (2002), Si la croissance est toute l’année, elle est plus importante au printemps. Pour expliquer les fortes teneurs automnales en oligo-éléments, certaines théories sont avancées, par exemple, l’augmentation de la concentration de Cu et du zinc dans les feuilles vertes des échantillons de l’automne, souligne la nécessité physiologique et biochimique de ces éléments durant cette période de l’année (Zwart, 2005) et que le Cuivre et le zinc étant des métaux indispensables à l’organisme (floraison), ils sont donc naturellement présents dans les organismes vivants. De la même manière, Ledent et al. (1993) rapportent que la saison d’échantillonnage est influencée de manière significative par les concentrations de métaux notées (Cd, Cr, Fe, Pb, Ti et Zn) dans les feuilles photosynthétiquement. Les différences enregistrées par certains auteurs (Tabl. 22) semblent être dues à des facteurs physico-chimiques et / ou paramètres biologiques susceptibles de modifier la disponibilité des éléments métalliques. Nos résultats de l’analyse en composante principale (ACP) montrent nettement l’effet de la température et de la salinité sur la bioaccumulation des micropolluants et suggérerait l’influence de ces facteurs environnementaux sur l’absorption et l’assimilation des ETM par les tissus de cette phanérogame marine. Wahbeh (1984) a montré que, dans certaines phanérogames, l’intensité lumineuse et la température augmentent considérablement la fixation. Brinkhuis et al. (1980) et Malea et Haritonidis (1995) ont souligné l’impact de la salinité sur l’accumulation de certains métaux (cadmium, sodium, par exemple) et Malea et al. (1994) ont souligné l’importance de la biomasse des épiphytes, très variable d’une saison à l’autre, qui peut avoir un effet sur les niveaux d’accumulation observés chez certains éléments (par exemple, le calcium).
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Table des matières
Introduction
Chapitre I : Synthèses bibliographiques
2.1. GÉNÉRALITÉS SUR LA POLLUTION PAR LES MÉTAUX TRACES DANS LE MILIEU MARIN
2.1.1. La pollution marine
2.1.1.1. Définition
2.1.1. 2. Sources de pollution
2.1.1. 3. Nature des polluants dans la mer
2.1.2. Les polluants métalliques
2.1.2.1. Rappels généraux sur les métaux lourds
2.1.2.2. Les sources de pollution métallique
2.1.3. Les caractéristiques des métaux lourds
2.1.3.1. Les métaux essentiels
2.1.3.2. Les métaux non essentiels
2.1.3.3. Argumentaire sur les métaux lourds pris en compte
2.1.4. L’utilisation des métaux lourds
2.1.5. Mécanismes de fixation des métaux
a) L’assimilation
b) La bioconcentration
c) La bioamplification
2.1.6. Mobilité et biodisponibilité des contaminants dans un sédiment
2.2. EFFETS DES METAUX VIS-A-VIS DES ORGANISMES MARINS ET DE L’HOMME
1. Toxicité et impact
1.1. Accumulation des métaux par les organismes marins
1.2. Accumulation des métaux selon les organes : Organotropisme
1.3. Évaluation de la contamination métallique dans le milieu marin
1.3.1. Définition du terme « indicateur biologique » ou « bioindicateur »
1.3.2. Les bio-indicateurs en milieu marin
1.4. LES MAGNOLYOPHYTES DE MÉDITERRANÉE
1.4.1. La mer Méditerranée
1.4.2. Les magnoliophytes
1.4.3. Taxonomie et répartition de Posidonia oceanica
1.4.4. Caractéristiques biologiques
1.4.5. Ecologie
1.4.6. Repartions géographique
1.4.7. Rôles écologiques
1.4.8. Menaces
2. 3. La SAUPE Sarpa salpa (Linnaeus, 1758)
2.3.1. Présentation de la famille des Sparidés
2.3.2. Position systématique de la Saupe
2.3.2.1. Caractères distinctifs
2.3.2.2. Répartition géographique de la saupe
2.3.2.3. Régime alimentaire
2.3.2.4. Reproduction
Chapitre II: Matériels & Méthodes
1. Aperçu général sur le littoral Algérien
1.1. Caractéristiques générales du littoral algérien
1.1.2. Le littoral de Skikda
1.1.2.1. Analyse climatique
1.1. 2.2.. Diagramme de Gaussen
1.1.2.3. La température
1.1.2.4. Le régime pluviométrique
1.1.2.5. L’humidité relative
1.1.2.6. La vitesse du vent
1.2. Les facteurs anthropiques
1.2.1. La population
1.2.2. Les industries
1.2.3. Les activités portuaires
1.1.3. Le golfe de Skikda
1.1.3.1. Apports d’eaux douces
1.1.3.2. La sédimentologie
1.1.3.3.Les courants
1.1.3.4.Sources de pollution
1.2. Stratégie d’échantillonnages
1.2.1.Techniques de prélèvements.
1.2.1.1. Mesure des paramètres physico-chimiques
1.2.1.2.. Récolte et traitement des échantillons
1.2.2. Phase analytique
a). Analyse chimique des sédiments
b). Analyse chimique des poissons
c). Traitement et analyse chimique de P. oceanica
1.2.3.. Valeurs guides requises pour déterminer les niveaux de contamination
1.2.4. Evaluation des niveaux de contamination métallique
1.2.4.1. Calcule de l’Indice de Contamination (IC)
1.2.4.2. Calcule de l’Indice de Pollution métallique (PLI)
1.2.4.3. Calcul du facteur de bioconcentration (BCF)
1.3. Analyse statistique des données
A). Comparaison de moyennes : ANOVA et test de Student
B). Analyse en Composantes Principales (A.C.P.)
Chapitre III: Résultats
3. Résultats
3.1. Paramètres physicochimiques de l’eau de mer
3. 1.1. Température de l’eau (°C)
3.1.2. Salinité de l’eau (‰)
3.1.3. Potentiel hydrogène (pH)
3.1.4. Oxygène dissous (%)
3.2.Distribution des métaux lourds dans le sédiment superficiel du golfe de Skikda
3.2.1.Cadmium
3.2.2.Plomb
3.2.3.Chrome
3.2.4.Zinc
3.2.5.Cuivre
3.3. Evaluation de degré de pollution des sédiments des différentes stations étudiées dans le golfe de Skikda
3.3.1. Normes et classes de pollution par le calcul de l’indice de contamination (IC)
3.3.2. Normes et classes de pollution par le calcul de PLI (Pollution Load Index, Indice de Charge de Pollution)
3.2.3. Analyse en composantes principales ACP pour le sédiment
3.3.1.Variations spatio temporelles des ETM rencontrés chez P. oceanica du Golfe de Skikda
3.3.1.1.Cadmium
3.3.1.2. Plomb
3.3.1.3.Chrome
3.3.1.4.Cuivre
3.3.1.5. Zinc
3.3.1. Variations spatio temporelles des ETM rencontrés chez P. oceanica du Golfe de Skikda
3.3.2. Résultats de l’analyse statistique des données sur la posidonie
3.3.2.1.Analyse en composantes principales (ACP)
3.3.2.2. Corrélation de Pearson (bivariée) entre le sédiment et la posidonie
3.4. Teneurs en éléments traces métallique dans le Muscle de Sarpa salpa
3.4.1.Cadmium
3.4.2.Plomb
3.4.3.Chrome
3.4.4.Cuivre
3.4.5.Zinc
3.5. Analyses en composantes principales
3.4.2. Corrélations de Pearson
3.4.3. Evaluation de la concentration des ETM par le calcul du facteur de bioconcentration (BCF) chez la posidonie et chez la saupe
Discussion
Conclusion & perspectives
Références bibliographiques
Résumés
Annexes
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